La première interrogation lui venant à l’esprit était : « Où suis-je ? » Interrogation à laquelle la chose se faisait appeler « Tedi » avait répondu d’une manière assez rapide : le siège de Mars. La première interrogation étant passée, Klara jeta un coup d’œil autour d’elle, détaillant les lieux, écoutant d’une oreille toutefois attentive celui qui les avait accueillis ici. Car elle n’était pas seule, loin de là. A vu de nez, elle comptait une trentaine de personnes. Et encore, ce n’était qu’un minimum. Stoïque, elle écouta le reste du discours calmement, un vague sourire s’affichant sur son visage à l’écoute des lieux. La jolie blonde avait trouvé l’endroit par lequel elle voulait passer : le labyrinthe. Quoi de mieux que de passer par ce jardin, aller à la forge et récupérer les cadeaux dont il parlait ? C’était intéressant, et nettement plus engageant que la prison ou même le château. Et puis, ce n’était pas que de vulgaires murs végétaux qui allaient lui tenir tête. Néanmoins, elle fronça légèrement les sourcils. Ce « Kokuwa-sama » était quelqu’un de plutôt dérangé à les « inviter » comme ça. Une personne stupide et suicidaire. Enfin, selon elle. Klara avait écouté la fin du discours, son sourire s’élargissant quelque peu. S’amuser ? Certainement. Gagner ? Assurément. La demoiselle ne comptait pas mourir ici, d’une manière stupide. Alors elle se mit en marche vers le labyrinthe, une certaine excitation parcourant son corps. Ou tout du moins les mécanismes composant celui-ci.

Arrivée dans les dernières à l’intérieur du labyrinthe, elle regarda avec une certaine envie l’un des participants se propulser dans les airs, voulant sans doute sauter des étapes pour arriver le plus rapidement possible à la fin. Il faudrait qu’elle voie pour arriver à faire ça. Après tout, en y réfléchissant, cela pouvait être pratique. Même si sur ce coup-là, l’homme se retrouva à la case départ à cause d’une sorte de fermeture éclair dans le ciel. La blonde n’aimait pas vraiment ce pouvoir étrange. Après tout, avancer pour ensuite revenir en arrière à cause de cette chose, c’était assez frustrant. Mais bon, au moins pour voyager cela semblait assez pratique. Un bruit de feuilles attira son attention et elle aperçut l’ourson, sa patte fièrement levée, prendre à nouveau la parole pour mieux expliquer ce qu’on attendait d’eux. Voir le sang couler ? Cette phrase fit sourire Klara. Ils pourraient essayer, son sang ne risquait pas de couler. Peut-être qu’elle perdrait des composants –il y avait de grandes chances même- mais au moins, elle ne serait pas pénaliser sur ça. Dans tous les cas, voir le sang couler ne lui déplaisait pas. C’était un peu du chacun pour soi, même si elle doutait du fait de pouvoir s’en sortir seule. Peut-être faire une alliance ? C’était dangereux, surtout avec des gens qu’elle ne connaissait pas.

Les murs du labyrinthe se mirent alors à bouger, dans un bruit plus que désagréable. Le sol sembla trembler un peu, ou alors ce n’était qu’une simple impression, une hallucination de sa part. Klara ferma les yeux l’espace d’un instant, les rouvrant quand tout fut terminé. Les murs avaient bougé et maintenant ils n’étaient que cinq. Trois hommes, une autre fille et elle. Génial. Calmement, elle jeta un regard autour d’elle, notant qu’ils avaient deux choix : devant ou tout droit ? C’était un peu du pile ou face, sauf qu’elle n’avait pas spécialement l’envie de tomber sur un cul-de-sac et tout reprendre à zéro. La blonde pouvait être joueuse, mais il ne fallait pas pousser le bouchon trop loin. Elle allait faire un choix, sans prendre la peine d’adresser la parole aux autres membres de son groupe quand un nouveau bruit sourd se fit entendre derrière elle. Fronçant les sourcils, Klara se retourna, détaillant le nouveau venu de haut en bas, notant qu’il avait un goût vestimentaire quelque peu particulier. Et c’était quoi ce monocle du plus mauvais goût ? Elle n’était pas pointilleuse, se fichait même de son apparence en général, mais là, c’était le pompon.  La demoiselle le regarda s’approcher, notant, à nouveau, qu’il devait avoir un balai coincé dans les fesses pour avoir une démarche pareille. Un homme de la « haute » société ? Qu’est-ce qu’il fichait ici si c’était le cas ? Il n’avait pas le thé à prendre ou une autre connerie du genre ? Sa présentation fut affligeante, son nom, trop long, était impossible à retenir. La seule chose qu’elle avait comprise était « Victi » avant de décrocher complètement. Il n’y avait que des aristocrates pour affubler leur rejeton d’un tel nom.

Elle ne prêtait pas spécialement attention à lui, tiquant néanmoins sur son regard trop appuyé sur sa poitrine, murmurant un simple « Sale pervers » avant de serrer les poings lorsqu’il disparut. De quel droit il se permettait de la reluquer et de disparaitre avant qu’elle n’ait pu lui apprendre les bonnes manières ? Elle allait le tuer.

Poussant un léger soupir avant de se calmer, elle se tourna vers les autres, prêtant plus attention à eux qu’au départ. Un roux, un type avec les cheveux hirsutes, une fille assez banale et un type qui semblait plutôt tendu vu sa posture. D’ailleurs, ce dernier semblait connaitre la fille, au vu du regard qu’elle avait réussi à capter entre les deux. Un duo donc. L’idée de ce duo ne lui plaisait pas vraiment. Après tout, ils pouvaient prendre l’avantage en les affrontant chacun leur tour. Tuer l’un des deux mettrait tout le monde sur un même pied d’égalité. Son sourire, qui avait disparu avant, s’afficha à nouveau. Tuer serait intéressant, mais pas maintenant. Il fallait avancer avant. Alors elle prit la parole :

- Vu que ce sale pervers d’aristo nous fait le plaisir de pouvoir lui régler son compte, je propose néanmoins d’avancer, pour atteindre cette forge,  peut-être le trouver et ensuite régler son compte à notre hôte.

Elle n’avait pas parlé des cadeaux intentionnellement. Après tout, peut-être qu’elle était tombée sur des idiots qui avaient déjà oublié. Klara écarta les doigts, faisant coulisser son épée dans sa main et commença à avancer vers le chemin se situant en face d’elle.

- Mon nom est Klara et je suis membre de la Révolution. Ravie de vous rencontrer, en espérant que vous soyez utiles jusqu’au bout.

Après tout, s’ils pouvaient prendre un coup à sa place, elle ne dirait pas non. Mais ce n’était pas dit qu’elle ferait pareil pour eux.

Elle avait avancé de quelques pas, restant néanmoins proche des autres pour écouter les possibles paroles qu’ils pouvaient échanger. Dans une situation pareille, mieux valait rester avec son groupe et éviter de se faire éliminer de dos à cause d’un trop gros abus de confiance. Même s’ils auraient du mal à la tuer, mieux valait éviter de tenter le diable. Le rouquin sembla le premier à réagir à ses propos, s’approchant d’elle et se présentant à la suite. Bien, au moins la cyborg n’aurait pas à l’appeler « le rouquin » en cas de pépin. Et puis, il avait un nom facile à retenir : Mike. Rien que pour ça il était plus appréciable que ce type qui s’amusait à apparaître et disparaître à travers les murs du labyrinthe. Klara fronça les sourcils.

*S’il peut apparaître et disparaître comme ça, cela signifie qu’il a un lien avec ce labyrinthe. Un fruit du démon ? Oui, après tout il n’y a que les fruits du démon qui permettent de faire ça. Passer au travers du feuillage est impensable maintenant. Il va donc falloir le trouver avant. Génial.*

Elle en était là dans ses pensées, lorsque le type à la blouse blanche prit la parole. Et sur ce coup, elle aurait été parfaitement humaine, elle se serait sentie rougir. Certes, ses premiers mots étaient justes et elle ne pouvait que l’approuver, mais donner l’idée qu’une fille devait se dévêtir pour attirer l’aristo pervers, c’était tout aussi pervers que ce type. Surtout qu’elles n’étaient que deux filles. Donc c’était soit elle, soit la fille avec le type tendu, il n’y avait pas vraiment beaucoup de choix. Et Klara refusait catégoriquement de faire ça, tout du moins tant qu’ils n’auraient pas essayés toutes les possibilités. Elle avait sa fierté après tout. Mais au moins, cette proposition eut pour effet de réveiller l’autre habillé bizarrement, qui se proposa, en gros, qu’elle se dévêtît à la place de sa compagne. Klara lui jeta un regard mauvais. Ils étaient tous dans le même bateau et ce n’était pas parce que l’autre était sa petite copine qu’elle n’aurait rien à sacrifier. Et s’ils devaient décider, elle lui mettrait deux-trois bons coups de pieds au derrière pour faire comprendre qu’elle ne se déshabillera pas. La suite l’a fit tout de moins sourire. Ce type se proposait de se mettre nu pour tester la bisexualité de l’aristo ? Elle voulait bien voir ça. Après tout, ce forain devait être comme la plupart des hommes : que des paroles et peu d’actes.

La cyborg allait pour se moquer de lui lorsqu’un bruit sourd, accompagné d’un coup porté à son crâne lui coupa la parole. Son premier réflexe fut de s’éloigner des végétaux, portant dans un même temps la main sur son crâne pour toucher l’endroit visé. Un réflexe plutôt stupide, mais qui lui permit d’enlever quelques épines de ses cheveux. La jolie blonde avait à peine eu le temps de regarder cet aristo qu’il disparaissait à nouveau, sa voix se faisant néanmoins nettement entendre. Un sourire moqueur s’afficha alors sur son visage. Ce type faisait preuve de jalousie maintenant ? Il était si égocentrique qu’il n’appréciait pas que l’on parle d’autre chose que de lui ? Pauvre petit. Le fait qu’il parle de son monocle lui donna envie de rétorquer sèchement, de parler avant de réfléchir, avant qu’elle ne se retienne. Si son hypothèse était bonne et qu’il contrôlait ce labyrinthe, aller dans son sens permettrait de sortir rapidement. Au contraire, lui dire tout ce qu’elle pensait pouvait les conduire à se perdre dans ces lieux. Soupirant un bon coup, elle prit un air assuré avant de parler :

-Ce monocle ? Le plus laid du monde. Cet accessoire vous fait une tête ridicule, même si avec vos cheveux verts, vous êtes déjà ridicule.

Elle termina sur un grand sourire, tournant ensuite les talons pour se diriger vers la direction qu’elle avait empruntée au départ : le chemin qui était juste en face. Le forain et la blouse blanche avait bien dit vouloir aller par là non ? Au moins, ils étaient d’accord sur la marche à suivre. Au final, Klara ne l’avait pas flatté, préférant jouer sur la carte de la chance et de la possibilité de le tuer pour sortir d’ici. C’était un peu un pari risqué, surtout s’ils ne jouaient pas tous à ça. Mais au moins, elle pourrait voir qui partageait ses idées.

Ce labyrinthe était pénible, son groupe était pénible.  Pourquoi n’était-elle pas mieux tombée ? Maintenant, elle doutait de leur utilité. Déjà des doutes en si peu de temps. Klara soupira d’un air faussement fataliste, tiquant sur les paroles de la blouse blanche. S’éloigner des murs pour marcher au centre ? Cette idée pourrait permettre de coincer ce maudit pervers en costard bon marché. Finalement, ce type montait peu à peu dans son estime. S’ils faisaient fonctionner les idées de ce type plus ses provocations à elle, ils pouvaient peut-être réussir à le coincer. Oui, ce type était plus intéressant qu’il ne semblait l’être au premier regard. Mike prit la parole ensuite, amenant un vague sourire amusé sur les lèvres de la blonde. Passer à travers le feuillage ? Elle ne disait pas non, mais quelqu’un avait-il sur lui une débroussailleuse ou un quelconque lance-flamme ? Au vu du peu encombrement des autres, elle en doutait. L’idée était bonne dans le fond, mais irréalisable dans l’immédiat. Surtout qu’ils risquaient de revenir à la case départ à cause de la fermeture du début. Après, il fallait tenter le tout pour le tout, c’est sûr. Blouse blanche revint à la charge, disant tout haut ce qu’elle pensait tout bas. Bien, au moins ils étaient d’accord sur ça. Alors qu’elle allait tourner les talons, voulant mettre un terme à cette discussion qui ne rimait à rien, le forain prit la parole. Une prise de parole longue, assommante. Ce qu’elle retint fut la chose suivante : il parlait au nom de tous pour dire tout haut le plan mis en place tout bas. N’avait-il pas compris qu’il fallait se taire et berner l’ennemi ? Apparemment non. Fronçant les sourcils, Klara contint difficilement une envie de lui faire goûter la lame de son épée. Et l’autre godiche à côté qui ne pipait pas un mot, qui était totalement transparente que l’on pourrait presque l’oublier. Expirant un grand coup dans l’espoir de calmer ses nerfs, elle écouta le reste, se détournant purement et simplement quand il eut finit. Elle n’allait pas lui faire le plaisir d’acquiescer à sa proposition. Certes, il avait parlé d’un moyen qu’il avait pour battre le pervers, mais autant qu’il agisse, au lieu de parler dans le vent comme il le faisait. Décidemment, elle ne comprenait pas ces hommes qui parlaient pour ne rien dire. Voulait-il impressionner celle qui l’accompagnait ? Dans ce cas, il s’y prenait mal.

Klara commença à avancer, les laissant à leur présentation, notant dans un coin de son crâne quel nom correspondait à quelle voix. La fille, Summer. Le forain, Daniel. Et la blouse blanche, Zeke. Jetant un coup d’œil en arrière, la jeune fille remarqua qu’ils suivaient tous en file indienne. C’était ridicule, tout simplement ridicule. Agacée, elle faisait toucher la pointe de son épée le sol, laissant un sillon dans la terre. Un moyen de se repérer, si jamais les murs bougeaient. Si, évidemment, personne ne marchait dessus entre temps. Le silence dans le groupe était religieux, situation diamétralement opposée à celle du début. La concentration semblait de mise, même si elle n’était pas prête à y mettre sa main à couper. Une intersection se dessina alors. Droite ou gauche ? Gauche ou droite ? Klara allait se retourner pour donner la situation, lorsque des murs apparurent, bloquant son champ de vision. La zone où elle se trouvait été étroite. Un pas en avant, un pas en arrière, pas plus. Qu’est-ce qu’il comptait faire cet aristo encore ? Un rire se fit entendre. Il se croyait où avec son rire ? Dans une maison hantée. Klara resta néanmoins sur ses gardes, prête à parer à toutes les éventualités. Après tout, elle l’avait provoqué, il pouvait donc vouloir se venger. Pourtant, rien ne vient et sa voix se fit à nouveau entendre. Pervers ? Branche ? De quoi il parlait encore ? Il fallut attendre quelques secondes avant que les murs ne disparaissent, laissant le loisir de pouvoir admirer les dégâts. Mais rien, il n’y avait rien. Rien de bien visible en tout cas. Certes, un certain malaise s’était installé, mais rien de bien folichon à signaler. A croire que l’aristo allait et venait, sans jamais se décider à vraiment attaquer. En parlant d’aristo, il prit à nouveau la parole, parlant de choix à faire, et posant à nouveau une question, à laquelle Zeke et elle-même n’étaient pas autorisés à répondre. Elle, pas autorisée ? Elle allait se gêner tiens. Cependant, ce fut Daniel qui prit la parole en premier, soutenant que la personne la plus importante à ses yeux était Summer, la fille qui l’accompagnait. Etait-il réellement stupide ? A dire cela, il donnait une raison à l’aristo de s’en prendre à elle. Là, il venait de dévoiler sa faiblesse devant tout le monde. Et pourtant, un sourire prit place sur son visage. Ainsi, ils étaient réellement proches, et donc une potentielle menace. Il fallait donc éliminer l’un des deux. Et une mêlée pourrait permettre d’y arriver.

- Bien, vu qu’il a répondu, on va pouvoir avancer. Gauche ou droite, droite ou gauche. Par où passer ?

Elle s’adressait à tout le monde, mais surtout à elle-même. Après tout, elle était en tête de file, la plus susceptible de se faire attaquer. Il fallait faire un choix, et rapidement. Un léger sourire toujours sur le visage, elle reprit la parole.

- Ce sera donc la gauche.

Et elle recommença à marcher, ne faisant pas attention au fait que les autres décident de la suivre ou non.

Klara s’ennuyait. En arrivant ici, elle s’était attendue à des combats d’une réelle intensité, à des choix importants pour le reste de sa vie. Mais là non. Là, elle devait composer avec un aristo pervers incapable d’attaquer une personne correctement, avec quatre personnes plus différentes les unes des autres. Et au final, rien de bien folichon ne se passait. Klara voulait des combats, du sang, des supplices. Pas avoir l’impression d’être dans une colonie de vacances avec un animateur un peu trop farceur. Mike l’a sorti de ses pensées bougonnes, lui arrachant un sourire au passage. La blonde avait la confirmation, elle n’était pas la seule à s’ennuyer, même si elle, elle préférait le silence à une discussion n’ayant aucun sens. Enfin, elle préférait surtout l’action à une discussion futile, même si là, l’action se faisait désirer. Pourtant, elle prit la peine de lui répondre, d’une voix reflétant un peu de moqueries certes, mais au moins il avait une réponse.

- L’autre idiot n’est pas en droit de décider si l’on doit parler ou non, je te l’accorde, mais avoir une discussion futile entre nous ne pourrait que nous desservir.

Elle n’avait pas pris la peine de se retourner, se contentant de garder de vue le chemin qu’elle voulait suivre, surveillant qu’il n’y ait pas le moindre piège. Après tout, peut-être que l’aristo pervers pouvait avoir l’intelligence de poser des pièges ici et là, pour pimenter un peu la partie qui s’annonçait, pour l’instant, soporifique. La voix de Zeke, au fond de la file, parvint aux oreilles de la blonde, lui arrachant cette fois-ci une grimace crispée.  Rester plus près les uns des autres ? C’était une bonne idée certes, mais elle n’aimait pas devoir jouer avec la proximité des autres. Elle se sentait moins libre de ses mouvements, plus « responsable » en quelque sorte du sort de l’autre. Enfin, là elle avait surtout peur d’être gênée. Elle ne connaissait pas les capacités des autres, ne savaient pas s’ils seraient d’une quelconque utilité. Et au fond d’elle-même, Klara espérait ne pas être tombée sur une équipe de bras cassés. Là, ce serait le comble. Gardant la même allure, elle ne montrait aucun signe extérieur indiquant qu’elle était d’accord avec les paroles de Zeke, même si elle se doutait qu’il avait raison. Mais elle ne ferait en aucun cas le premier pas pour se « rapprocher » des autres, même pour une stratégie. Même si c’était totalement logique. Klara en était là dans ses pensées, quand une nouvelle intersection se dessina, la faisant soupirer. Encore le même dilemme : droite ou gauche, gauche ou droite ? Elle allait se décider, faisant à nouveau un choix seule, lorsqu’une voix désagréable se fit entendre : celle de l’aristo pervers. Malgré tout, ses premières paroles flattèrent quelque peu l’égo de la blonde : elle avait fait le bon choix, son instinct n’était donc pas si mauvais que ça. Le reste fut ennuyant à souhait, jusqu’à ce qu’un élément perturbateur apparaisse. Ou tout du moins, atterrisse dans ses cheveux. Fléchissant quelque peu les genoux à cause du poids inattendu atterrissant sur sa tête, Klara souleva la chose, la mettant devant ses yeux. Un rat. Cet aristo de malheur avait osé jeter un rat sur sa tête. La boule de poils, plus terrorisée qu’autre chose, couinait d’une manière pitoyable. Le remettant au sol calmement, pendant que l’autre abruti expliquait son geste par le simple fait qu’elle était une « vilaine fille », Klara se redressa, son regard jetant des éclairs aux murs du labyrinthe aux alentours. Elle allait le tuer, lui faire la peau, le torturer, le dépecer, s’assurer qu’il ne puisse pas avoir de descendance puis le brûler et ensuite le décapiter. Et là, seulement à cet instant, elle aurait l’impression de bien avoir accomplie son boulot. Il posa une autre question, à laquelle elle répondit froidement, sans toutefois que sa haine puisse se faire entendre.

- Certainement pas vous. Vous, la personne qui n’a même pas l’audace de venir nous affronter de manière frontale, vous qui prenez un malin plaisir à nous faire perdre notre temps, vous qui …

Elle allait continuer sur sa lancée, sortant toutes les choses qui la dégoûtaient chez ce type, quand un rire fou la coupa, lui faisant froncer les sourcils. Là, elle se tourna, son regard se dirigeant vers la provenance de ce rire : le forain, Daniel de son nom. Quelle mouche l’avait piqué ? Alors il s’écroula, offrant le piètre spectacle d’un homme fou se tortillant dans tous les sens sur le sol. Fronçant les sourcils, Klara s’approcha, la pointe de son épée dirigée vers le corps de cet homme, de ce fou. Il était malade, un danger potentiel pour eux, un boulet également. La seule solution lui venant à l’esprit était de le tuer, d’empêcher une quelconque menace de grandir, de frapper. Il fallait tuer pendant un état de faiblesse, pas lorsqu’il aurait retrouvé ses esprits, qu’il aurait décidé de les attaquer. Pourtant, Summer ne sembla pas de cet avis, s’interposant entre Klara et ce corps au sol, faisant comprendre qu’elle n’approuvait pas sa manière de faire, de voir les choses. Dans un soupire fataliste, la blonde recula et se détourna de ce corps au sol, reprenant la tête du cortège.

- Très bien, nous ne pouvons rien pour lui. Il nous faut avancer maintenant, que ceux souhaitant sortir d’ici me suivent.

L’impression de faire une erreur grandissait en elle. Le laisser en vie n’était pas bon. Dans un nouveau soupire, Klara prit le chemin de droite, la tête droite, le visage impassible. Elle avait laissé quelqu’un en arrière pour son propre bien. Et elle n’avait aucun remords à ce sujet.

La cyborg avançait, quelque peu perdue dans ses pensées. Elle avait pris le parti de partir, d’abandonner le forain à son sort, ainsi que Summer. Elle avait choisi d’avancer, sans se soucier des autres, de ce qu’ils pouvaient penser. Et là, la jolie blonde prenait le risque de se retrouver seule. Seule face à ce labyrinthe et à ses anciens « coéquipiers » s’ils lui tenaient rancune.  C’était comique sous un sens : elle essayait de prendre le rôle de leader pour au final prendre le risque de ne devenir qu’un nuisible aux yeux des autres. A croire qu’agir en solo était la seule bonne option pour elle. Pourtant, dans ce cas de figure, agir seule ne pourrait que lui être préjudiciable. Klara le savait. Toutes les personnes dans ce labyrinthe devaient s’en douter. Après tout, comment venir à bout d’un être ne prenant pas le combat au sérieux, s’amusant simplement à les faire tourner en bourrique. Mais à trop jouer avec le feu, il allait finir par s’en mordre les doigts. Et à ce moment-là, Klara serait prête à lui coller une balle entre les deux yeux.

Des bruits de pas précipités, suivit d’une prise de parole la firent sortir de ses pensées, sa tête se tournant légèrement vers le nouveau venu : Mike. Le rouquin avait décidé de la suivre, abandonnant lui aussi le malade mental à son sort. Il ne restait qu’à voir si celui qui avait de bonnes idées, ce Zeke, allait faire la même chose qu’eux. A trois, ils avaient plus de chance de s’en sortir rapidement. Passer plus de temps dans ces lieux ne lui donnait pas plus envie que ça. Attentive, elle écouta Mike, arquant un sourcil face à ses mains. Ce type avait des coussinets sur la paume de ses mains. Il avait des coussinets et il prétendait que c’était son arme. Bizarre, étrange, tous ces mots lui venaient en tête. Pourtant, un seul se démarqua : fruit du démon. Si ces choses étaient son arme, cela ne pouvait provenir que d’un fruit du démon. Encore l’une de ces choses, à croire que les possesseurs de ce pouvoir ne faisaient que voyager et se retrouver dans des situations pas possible. A croire qu’il n’y avait que ces personnes-là qui pouvaient gérer ces situations et se démarquer. Ou en tout, c’est ce qu’elle avait pensé après sa rencontre avec Kiru et William. Un golem et un dragon. Deux monstres d’une forme extraordinaire. Le rouquin était-il comme eux ? Que pouvait-il faire avec ses coussinets ? C’était curieux, mais intéressant.

Son regard se porta ensuite vers sa propre main, sa paume tourné du côté de son regard. Lui dire ou pas ? Il était un allié, lui cacher des choses ne pourrait que la desservir plus tard. Esquissant un vague sourire, elle prit la parole ensuite.

- Vu que tu m’as dit ton arme, je vais faire de même. Cette épée que tu vois est mon arme, mais pas seulement. Mon corps entier peut devenir une arme, ou tout du moins être dangereux pour un humain lambda. J’ai un pistolet également.

Son sourire s’accentua ensuite et elle tourna la tête vers Mike pour le regarder.

- Je ne compte pas m’éterniser dans ces lieux éternellement.

Son ton était rempli d’assurance. Klara se voyait déjà dehors, avec comme honneur le fait de battre Makui. Ce n’était pas son but premier, mais ce serait une sorte de petite fierté personnelle. Un projet bien utopique si l’on connaissait bien cet adversaire. De nouveau, elle allait parler, demandant s’il avait vu une chose permettant de dire si le mec à la blouse blanche allait les suivre. Mais elle fut coupée dans son élan, le sol sous ses pieds se dérobant lorsqu’elle s’appuya dessus. Quelle sensation étrange que celle de se sentir tomber, attiré par le sol en contre-bas. La chute fut assez rude, même le trou dans lequel elle se trouvait était peu profond. Son regard, d’abord dirigé vers le ciel, redescendit vers la terre, observant les alentours. Un trou large, comprenant facilement les deux-tiers du chemin. C’était impossible de l’éviter en marchant au milieu.

Après avoir observé ce trou, un détail lui sauta aux yeux. Un détail dont elle n’aurait pas dû pouvoir faire abstraction. Dans ce trou, il y avait des toiles. Pas des toiles de peinture, non. Ici, il y avait des toiles d’araignées, de très grosses toiles d’araignées. Et là, elle ressentit un sentiment qui lui semblait avoir oublié depuis longtemps : la peur. La peur face à des arachnides qu’elle n’avait pas encore vus. La peur de rester coincée ici. La peur de finir en pâté pour araignées. Son visage se crispa légèrement, quand la première araignée fut visible. Une grosse bestiole noire, poilue, pouvant donner des frissons. D’un geste vif, Klara rangea son épée, sortant son pistolet avant de tirer. Une balle dans la tête de l’arachnide, un premier cadavre. Une balle, un bruit attirant les autres, celles qui se terraient des trous dans les parois. Avec un certain effroi, elle vit d’autres araignées sortirent des trous, s’avancer vers elle. Alors elle tira, perdant son sang-froid. Jusqu’à ce que le nombre de ses balles lui revint en mémoire et qu’elle s’arrêta, sa tête se tournant vers le ciel, vers le lieu où devait se situer le rouquin.

- J’ai besoin d’aide !

Dire ça était un déchirement, une mise à mort de son honneur, de ce qu’elle voulait paraître aux yeux des autres. Mais tout ce que Klara souhaitait, c’était sortir de ce trou et quitter cette peur qui la rongeait.