L'île sur laquelle j'avais fait escale depuis déjà un petit moment était en réalité un immense volcan, d'une centaine de kilomètres de diamètre. Un volcan peut-être prêt à exploser du jour au lendemain, en vue de son activité particulièrement régulière. Je n'avais aucune idée de combien d'années datait cet amas de roches sombres, mais en tout cas, une chose était sûre, j'adorais le regarder. Lorsque je n'avais rien à faire spécialement, j'essayais toujours de me faufiler dans un des trous provenant des souterrains, afin de l'observer encore un peu plus longtemps. C'était presque devenu une fascination, même si en réalité, je n'étais pas venu sur cette île pour cela. Effectivement, au départ, j'avais l'intention d'étudier les nombreuses plantes se trouvant près du cratère du volcan, des plantes que l'on ne pouvait trouver nulle part ailleurs. Un ami m'en avait parlé, quelques mois auparavant. Il y avait fait escale une fois, et il avait été étonné de voir à quel point la flore était différente en ce lieu magique. J'avais donc "bâti" une sorte de petit laboratoire, à l'intérieur des souterrains, avec les quelques matériaux présents et en libre accès, ainsi que mes fournitures personnelles tels que des tubes à essais, des éprouvettes, et bien sûr des produits chimiques.

Alors que je m'attelais à la mise au point d'un tout nouveau sérum créé à partir de certaines de ces plantes toutes fraîches, j'entendis du bruit, beaucoup de bruit, qui semblait provenir de l'extérieur, mêlé à des cris. N'y faisant pas attention pendant quelques minutes, je compris qu'il s'agissait de quelque chose d'assez grave lorsque je pus sentir le sol trembler tout autour de moi, agitant ainsi de mauvais produits, et brisant quelques-unes de mes verreries. Voir tout ce travail finir quasiment en miettes me fit rapidement froncer les sourcils, me poussant dans mes retranchements. Malgré tout, j'essayais de rester calme, c'était la meilleure chose à faire, de toute évidence. Posant alors le tube que j'avais dans la main sur un support, je sortis de mon laboratoire en courant, attrapant au passage mes deux sabres. Courant vers une éventuelle issue de secours, je rangeai ces armes dans leur fourreau près de mes hanches, prêt à dégainer au cas où il y en aurait le besoin. Cependant, à ma plus grande surprise, je pus faire la rencontre d'une personne, un jeune garçon à la chevelure verte, ressemblant fortement à la mienne quelques années auparavant. Par réflexe, je ne pus m’empêcher de sourire en le voyant, bien que la situation ne s’y prêtait pas réellement. Regardant ensuite derrière moi, j’aperçus quelques morceaux de roche en train de s’écrouler sur le sol, la terre grondant comme si Dieu s’en mêlait. C’en était presque terrifiant.

Serrant l’un de mes sabres fermement entre ma main droite, j’adressai quelques mots à cet adolescent.

« Il faut partir maintenant, et vite ! On a plus le temps. J’ai pas vraiment envie d’être enterré vivant.. »

Venant tout juste de rencontrer le jeune homme à la chevelure verte, je me retrouvai en fin de compte à le suivre jusqu’à trouver une zone plus sécurisée. Si nous restions ici, il y avait malheureusement de grandes chances pour qu’une ou plusieurs roches nous dégringolent sur le coin du crâne. Apparemment, il souhaitait m’amener dans une zone se trouvant un peu plus en profondeur, là où les fondations seraient plus stables et nous permettraient donc de tenir aisément face à cette puissante éruption. Après tout, je ne connaissais pas vraiment les lieux, étant donné que les seules fois où je sortais de ma case, c’était pour aller récupérer des plantes à l’extérieur. De ce fait, j’avais décidé de le suivre sans rechigner, traversant quelques couloirs parfois horizontaux, parfois en pente douce. Très vite, nous atteignîmes un endroit qui me semblait déjà plus sûr que celui de départ. Ici, je sentais moins les tremblements du sol et les pierres restaient encastrées dans le plafond pour la plupart. C’était un bon signe. Du moins, c’était ce que je pensais…

« Nous ne sommes pas seuls. »

En effet, j’avais raison. Sur le chemin, j’avais pu sentir leur odeur, et seulement même leur présence, les bruits de pas, toutes ces petites choses qui vous font comprendre que vous n’êtes pas seuls. Tout à coup, un bruit sourd, un effondrement. Le plafond se mit à s’écrouler entre le jeune garçon et moi, créant une sorte de mur. Cela venait malheureusement de déstabiliser les fondations. Mordant légèrement mes lèvres en faisant face à l’une des deux présences, j’adressai finalement quelques mots à mon camarade du jour se trouvant de l’autre côté.

« On a été piégés. Tu vas devoir te débrouiller tout seul pour le moment. »


« Aaannnh ! Piégéééééééééééééééééééééééés ! »

L’homme à l’allure efféminée se mit à danser tout en souplesse, affichant des mouvements très dérangeants… Il me regarda ensuite avec une certaine envie, un plaisir qui se décelait sur son visage sans aucune imperfection. Soudain, sans même que je n’eus le temps de dire « ouf », son corps changea relativement d’apparence, devenant plutôt disgracieux. Sa peau devint plus rocailleuse, sa tête plus large, et des sortes de cornes lui poussèrent sur le crâne. Un Zoan ? Ça devait être ça, en effet. Mais le plus intriguant restait tout de même dans l’espèce que représentait ce fruit du démon. Aux premiers abords, je pus reconnaître l’un des célèbres mammifère de la savane, l’un des plus connus parmi tous. Un herbivore, souvent redouté par certains prédateurs pour ses cornes solides et dangereuses en cas de charge. Cette transformation terminée, suivie d’un ricanement, l’assaillant s’élança en ma direction, sabre en main et pointant ses cornes devant moi pour m’empaler le crâne. Mon premier réflexe fut bien évidemment de dégainer mes lames pour me protéger de son offensive, parant ainsi aisément chacune de ses cornes mais laissant toutefois mon abdomen à découvert, lui laissant donc la liberté de le cibler. Toutefois, les plaques se trouvant à ce niveau me permirent d’encaisser relativement bien le choc, sachant que cet homme n’avait pas eu l’air d’user de ses pleines capacités de coupe. Il me fallait donc désormais être prudent.


Redressant son haut de forme d'un geste simple, le jeune garçon à l’accoutrement laissant fortement à désirer s'avança vers son opposant. Sa spécialité à lui ? La fourberie. Etant un homme-chat, sa vitesse pouvait facilement rivaliser avec un faible Zoan, mais étant bien supérieure à celle d’un humain lambda. Attrapant les deux petites dagues se trouvant à sa ceinture, il se pencha légèrement en avant, sa queue se redressant et se balançant dans tous les sens. Il était prêt à foncer, à bondir telle une bestiole à qui on viendrait de voler le repas. Un large sourire taquin se dessina sur le bas de son visage, en guise de défi.

« C’est quoi ton p’tit nom ? » dit-il en montrant ses crocs.

« Kitchiro miaaaaaaaaw ? C’est mignoooon ! »

L’homme-chat se rendit rapidement compte des intentions du jeune garçon à la chevelure verte. Il ne cherchait pas à se battre, loin de là. Au contraire, il se précipita dans le couloir en courant pour tenter de s’échapper. Voyant cette situation plus qu’amusante, Félix ne put que sourire en lui laissant une petite longueur d’avance. Etait-il possible pour lui d’échapper à la folie de notre félin ? Peu de chances. Rapidement, il arriva près d’une porte menant à une salle inconnue. Le bandit se contenta de le regarder du coin de l’œil, et s’élança à vive allure juste avant que celui-ci ne tourne la poignée de la porte pour entrer. S’accrochant au plafond et aux parois à l’aide de ses griffes aiguisées, il se déplaça sans aucune difficulté avec finesse et agilité, atteignant bien rapidement la position du jeune homme. Ainsi, il put bloquer la porte à l’aide de sa dague, l’empêchant de se fermer comme sa cible voulait le faire initialement. Il reprit alors la parole, simplement pour répondre à la question de son interlocuteur.

« Félix. Moi c’est Félix, Miaaaaaaw ! »

Soudain, une dizaine de petits couteaux s’échappèrent de la veste de l’homme chat, fusant dans toute la pièce. Chacun d’eux vint se planter dans les murs, à différents endroits, sans jamais toucher la grenouille. Pourquoi ?


Pendant ce temps-là, le combat opposant les deux Zoan se prolongeait. A vrai dire, il venait tout juste de commencer, lui aussi, mais il s’annonçait bien plus terrible. Suite à mon contre, le bandit s’étant écarté d’un bond en arrière pour prendre ses distances, ayant bien compris que ce genre d’offensive ne serait pas si utile à l’avenir. Les plaques me protégeant étaient solides, et étaient en mesure d’encaisser bien plus que ce que l’on pouvait penser à première vue.

« T’es plutôt coriace on dirait.. Je trouve ça excit- Haaaaaaaaaaaaaaan… ! »

« Tu ne crois pas si bien dire. »

Soupirant légèrement, je fis mine de ranger mes lames dans leur fourreau respectif, tout en bondissant de façon impulsive, affichant une détermination sans borne. Le regard noir s’extirpant des trous se trouvant sur mon masque blanc vint se poser dans celui de l’efféminé qui bien entendu, se décida à faire la même chose. En quelques secondes seulement, on put entendre un son strident, celui du claquement produit par deux lames s’entrechoquant .Qu’était le résultat de cette double offensive à l’allure sauvage ? Je me tenais à une dizaine de mètres de mon adversaire, aussi immobile qu’une brindille en plein soleil, sans aucune brise. Ce n’était malheureusement pas le cas du second combattant qui, bien qu’encore en forme, maintenait son épaule gauche. Il avait été touché avant que je ne le sois. Du liquide carmin s’écoulait lentement le long de son bras, tâchant par la même occasion la manche de son haut. Serrant les dents, il continuait de maintenir son sabre entre ses doigts, déterminé.

Le sang du jeune homme à l'allure efféminée s'écoulait progressivement, sans jamais s’arrêter, étant donné que celui-ci ne daignait guère essayer de stopper l’hémorragie. Que cherchait-il à faire en agissant de la sorte ? L’homme masqué se le demandait. Ainsi, il ne faisait que le fixer, n’éprouvant aucun réel sentiment à son égard, pas même de la pitié. Tout ce dont il était certain et surtout ce qu’il souhaitait à l’heure actuelle, c’était mettre un terme à cet affrontement, créer une ouverture dans les décombres et venir en aide au garçon à la tête de grenouille – s’il n’en avait pas déjà terminé de son côté. Par ailleurs, Omega avait également d’autres choses à faire, plus importantes. Ainsi, alors que la vue de son adversaire semblait faire des siennes, il ne prit plus de temps avant de s’avancer face à lui, tenant sa lame gelée avec poigne, ne désirant qu’une seule chose : l’annihiler. Son regard était froid, peut-être plus que jamais, et ses pas se faisaient lents et lourds. De son côté, Rin semblait ne pas savoir de quelle façon réagir. Il était armé, ça il le savait, mais il était également conscient de son infériorité, et ce à tous les niveaux. Son opposant était bien trop rapide comparé à lui, et sa force plus importante encore. Après tout.. Il s’agissait d’un Zoan Antique, rien de bien étonnant face à sa nature.

« Excuse-moi, mais je suis attendu. »

« A-aah.. aaah… Je ne me fais pas de fausse idée, j’ai déjà accepté mon sort.. »

Rin se mit à sourire légèrement, montrant sa résolution. Il aurait très bien pu retirer sa propre vie d’un simple coup de sabre au niveau de la carotide, pour ne citer qu’un exemple de point vital, mais il souhaitait mourir en combattant fièrement, périr de la main d’un autre en somme. C’est alors sur ces mots que l’homme masqué s’avança jusqu’à atteindre son adversaire, gardant seulement quelques dizaines de centimètres d’écart, et tendant son bras droit avec délicatesse pour viser son foie de la pointe de sa lame. Un long soupir se fit entendre, s’échappant d’une grimace douloureuse, pendant que les jambes du bandit fléchissaient d’elles-mêmes, le mettant peu à peu à terre, ensanglanté, n’ayant plus qu’à attendre que la lumière ne daigne l’accueillir.


De l’autre côté du mur improvisé, créé par l’éboulement, l’homme-chat prenait un malin plaisir à jouer avec sa victime du jour, un certain Kitchiro. Celui-ci semblait si craintif, si inoffensif même.. C’en était presque amusant. Non, en fait, ça l’était réellement. Pour preuve, dès que Félix s’était infiltré dans la salle servant de planque provisoire à la grenouille, celui-ci s’était empressé de s’enfuir dans le fond de la pièce, essayant tant bien que mal de se munir d’objets diverses en guise de défense. Croyait-il réellement que des paires de ciseaux feraient l’affaire face à lui ? Quelles sottises ! Le bandit, sans vouloir trop perdre de temps non plus – étant donné que le Duo avait d’autres cibles en vue pour la suite des événements – Félix étira ses doigts d’une certaine façon, faisant rapidement glisser des couteaux, eux-mêmes attachés à ceux ayant été lancés précédemment, dans les airs. Du moins, c’était la première explication possible, en ne prenant que le sens primaire de la vue. En effet, la réalité était bien différente. Chaque couteau était parcouru par un fil, lui-même manipulé par l’homme chat. Seulement, pour un œil non entraîné, ces fils paraissaient invisibles.

« Adieuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuu ! » - s’écria le bandit en tirant la langue et montrant ses petits crocs

Soudain, un bruit sourd résonna dans tout le couloir, alors que la grenouille se trouvait visée par l’offensive du chat. Que venait-il de se passer à l’instant ? Un grognement du Friends ? Sans doute. Félix le pensait en tout cas. De ce fait, il n’y avait pas vraiment prêté attention, trop concentré sur sa petite souris. Mais… Les choses ne se passèrent malheureusement pas comme il l’avait prévu. Les couteaux s’arrêtèrent de coulisser, retombant vulgairement au sol et évitant ainsi une terrible expérience au révolutionnaire en herbe.

« QUOIIIII ?! »

Une silhouette se tenait désormais derrière lui. Une grande silhouette, à l'allure sombre et tenant deux lames entre ses mains. Il était arrivé.. Omega était là.

Félix, l’homme-chat, se retrouvait dès à présent dans une bien piètre situation. Il avait beau être supérieur au jeune garçon au chapeau de grenouille, face à un adversaire comme Omega, il ne pouvait absolument rien. Et malheureusement pour lui, ce qu’il redoutait le plus venait de se passer. Son compagnon n’avait pas résisté aux talents du Révolutionnaire qui n’avait pas eu besoin de beaucoup de temps pour s’en débarrasser. Il se retrouvait donc là, seul, face à deux adversaires. Quoi qu’il puisse décider de faire, il ne l’emporterait pas, dans tous les cas. Il lui fallait donc décider de l’issue de cet affrontement. Voulait-il mourir ou survivre ? L’homme masqué ne pensait pas utile de le lui demander, sachant pertinemment que lui-même en était conscient. Immobilisé par la crainte de ne pas s’en sortir, le bandit tremblait comme une feuille. Il se voyait incapable de faire quoi que ce soit, pour le plus grand plaisir du jeune garçon qui s’en donna à cœur joie pour se venger de sa précédente altercation. Celui-ci s’élança en sa direction pour lui asséner un uppercut suivi de quelques coups de pieds. Rien de bien méchant mais dans l’état actuel des choses, cela sonna quelque peu son adversaire qui commença à voir de petits éléphants roses virevolter devant ses yeux. Pendant ce temps, la grenouille adressa quelques mots à son « sauveur », le remerciant tout simplement de lui être venu en aide. Gardant un léger silence d’une poignée de secondes, Omega répondit tout de même, pour ne pas donner mauvaise impression.

« Tout cela n’était qu’une question de temps. Maintenant, c’est à lui de mourir. »

Poussant un long soupir en regardant le petit Révolutionnaire, l’homme masqué serra le manche de ses lames de ses doigts, avant d’exécuter de rapides mouvements. La cible visée était nette, mais qu’était-il réellement en train de lui faire ? Sans aucune pitié, ses lames tranchèrent plusieurs membres du bandit. Ses deux bras tombèrent sur le sol dans un fracas, le sang giclant avec violence au niveau des épaules. Relevant la tête pour admirer la réaction de son comparse, Omega gloussa derrière son masque, animé par cette animosité qui l’atteignait parfois. Leur adversaire s’écria de douleur, tombant à terre sur les genoux. Le grand Révolutionnaire, lui, se contenta de ranger ses lames - sans même prendre le temps de les essuyer – dans leur fourreau, se retournant pour sortir de la pièce. Seuls une phrase fut destinée au jeune garçon.

« Il est à toi. Achève-le. »

« N-non.. Nooon… S’il vous plait, ne me tuez pas.. ! Je vous serai fidèle, je vous servirai.. ! »

L’homme masqué n’avait que faire de ses derniers mots, de ses volontés. Pour lui, ce n’était que du vent. Des paroles de mort, sans aucune valeur. Il sortit donc entièrement de la pièce, faisant route vers la sortie des souterrains, laissant le gamin faire ce qu’il avait à faire. A partir de là, il n’y avait plus qu’une chose à savoir. Le suivrait-il pour devenir plus fort ? Ou resterait-il ici, face à son impuissance ? Tout était encore à prouver pour lui.