Tony était d’accord pour que la blessée passe quelques heures de tranquillité et de repos dans l’atelier ou on ne sait où mais l’important était que la verte pourrait reprendre la totalité de ses forces avant de reprendre la mer. Hors de question de paraître faible devant les petits trouffions de la marine qui étaient sous les ordres de la future gradée sur le bateau qui l’avait emmené ici, elle pourrait donc prendre le temps qu’il lui faudrait. Mais les choses n’étaient jamais aussi simples que ça dans la vie de la gouvernementale, et un petit vieux qu’elle avait déjà eu l’occasion de voir se trouvait au bout de la rue, il semblait énervé, impatient mais surtout énervé. Comme pour corroborer cette pensée de la jeune femme, le grand blond lâcha simplement un « oh oh » lourd de sens, apparemment le futur allait être mauvais pour le matricule du forgeron.
 

Tony ? C’est mauvais ça ?  

 
Clairement la réponse ne se fit pas attendre. On entendait seulement quelques paroles provenant du nain qui semblait relativement insultant envers son apprenti, puis une course effrénée du nabot qui sautait déjà sur le plus grand  de l’assemblée et probablement de l’île. Effectivement, c’était mauvais. Alors que la Toupex pensait que le petit n’avait pas la moindre chance contre ce titan, le résultat des courses était bien différent. En plus d’être rapide malgré son physique, le mentor était également incroyablement puissant, il avait retourné son disciple avec une vitesse ahurissante et l’avait explosé au sol dans le moindre effort.  Ce grand et puissant homme, ce maudit intouchable, cette force de la nature faisait alors pâle figure devant un nabot en surpoids et passablement âgé mais la spectatrice ne faisait absolument aucun commentaire : elle avait trop peur d’être la prochaine sur la liste. Le nain reprochait beaucoup de chose à Tony et l’intégralité des choses était à porter au discrédit de la jeune femme. Et alors que le blond ne se défendait pas, la lieutenante entreprit donc de la faire.
 

Excusez-moi maître forgeron mais tout cela est de ma faute. J’attendais en arrière-boutique pendant que votre apprenti forgeait ses lames, enfin reforgeait mes lames surtout et mon colis qui se trouve la-bas s’est réveillé, détaché et m’a attaqué en volant l’une de vos lames. Puis il s’est enfuit, alors j’ai moi-même emprunté cette épée pour le combattre. Tony a entendu le bruit et m’a rattrapé avec mes dagues mais j’étais déjà en forêt. Il m’a aidé à vaincre mes ennemis, des esclavagistes d’enfant. Il a donc sauvé de nombreuses vies et je ne peux que l’en remercier. C’est donc de ma faute s’il a laissé la boutique, s’il a emprunté ses armes et si je n’ai pas payé. Mais ne vous inquiétez pas, je vais payer pour le travail accomplit et pour l’emprunt de ces armes si vous le voulez bien. Si l’absence de Tony vous a causé un préjudice financier, je vous propose encore de me donner une facture que je ferai parvenir à ma hiérarchie qui prendra en charge le dit préjudice en tant que compensation pour l’aide apporté par votre apprenti. Mais s’il vous plait, ne le punissez pas, il n’y est pour rien la dedans, au contraire il m’a encore permit de reprendre mes forces cette nuit, il m’a sauvé alors que j’étais empoisonnée et il a vaincu de nombreux ennemis.     

 
Kanäe avait avancé tous les arguments nécessaires à la relax du vieux envers le blondinet mais maintenant elle se devait de clamer les nerfs de l’ancêtre, et pour cela quoi de mieux que titiller la fierté des nains.
 

D’ailleurs il ne fait aucun doute que s’il a réussi tous ces prodiges c’est grâce aux enseignements que vous lui dispensez depuis toutes ces années et je vous en remercie donc aussi Maître nain. Je suis votre obligée.  

 
La manipulatrice en herbe se pencha donc en avant vers son interlocuteur en signe de respect, avec de la chance, il allait se calmer et peut-être même offrir un petite ristourne à sa cliente.
 
 

 
Une rumeur persistante et assez ancienne évoquait l’idée selon laquelle le peuple nain n’aimait qu’une seule et unique chose. La famille n’était rien, l’amour, l’amitié ou encore la haine n’étaient rien, seulement quelque chose bien au-delà de tout : l’argent. Il fallait dire que la jeune femme née sur une île végétale n’avait jamais rencontré de Nain auparavant, sauf deux au QG de la marine et donc hors d’un cadre commercial. Elle n’avait donc jamais pu s’assurer de la véracité de cette rumeur sur l’esprit avare du nain commerçant et allait, pour la première fois de sa vie, en faire l’expérience. Il se foutait donc complétement que Tony ait aidé la belle dans son entreprise de récupération d’esclavagiste et ne se focalisait que sur une chose : le temps perdu par le forgeron apprenti. Le plaidoyer de la jeune femme dans le but de protéger l’artisan avait donc été totalement inutile et ce dernier se prit une dérouiller monstrueuse, son fruit du démon ne le protégeant absolument pas, il finit rapidement entre deux poubelles. Probablement que le maître nain maitrisait le haki de l’armement à un stade primaire et ne s’embêtait donc plus de considération relative au fruit du démon du Stronghold.  Quoiqu’il en soit, même non maudite, haki ou pas, la verte ne souhaitait pas faire face à la puissance du vieillard de petite taille qui semblait d’ailleurs content de la rouste qu’il avait collé à son subordonné.  Il entra alors en mode commerçant et la Toupex fut complétement larguée.
 
Ici on parlait de prorata, de défalquement négatif, d’usure, réduction, solde, location, facturation… Mais en fin de compte, seul le résultat importait, un nombre ou plutôt un couperet si l’on connaissait la situation de la jeune recrue de la marine, heureusement qu’elle était assurée par son mentor derrière. C’est donc ainsi que le fier artisan lui livra une facture d’un million de Berry, une somme tout à fait rondelette pour ne pas dire indécente. L’annonce entraina ainsi à l’écarquillement corrélatif des yeux de la cliente qui venait de comprendre qu’elle s’était mise dans une position assez délicate… un million de berry ? Son chef allait vraiment gueuler, mais bon elle était « sa petite fleur » après tout… Voilà que le nain tendait déjà la main attendant son paiement, il ne voulait pas de paiement différé mais bien immédiat, le problème étant encore que même si elle avait les moyens de payer par son mandataire, Kanäe n’avait pas cette somme sur elle ni dans le bateau qui l’avait emmené ici.  Tout d’abord souhaitant négocier le tarif, la mouette perçut le signe de tête de Tony lui signifiant qu’elle n’aurait pas le dernier mot en matière de liquidité.
 

Maître nain, je peux rassembler cette somme mais vous comprendrez aisément qu’en tant que recrue de la marine et chasse de proie, je n’ai pas une telle somme sur moi, elle ne figure pas non plus sur le bateau qui m’a emmené ici. Pour être honnête, vu l’état de l’embarcation, je ne suis même pas sûre qu’elle vaille encore un million. Quoiqu’il en soit,  je sais que tout travail mérite salaire et je ne vais pas discuter du prix avec vous. En tout état de cause, il me faut une facilité de paiement.

 
Un temps de réflexion vint alors se mettre dans la tête de la cliente qui faisait ses calculs et qui reprit la parole assez rapidement pour ne pas permettre au nain de répondre, celui-ci semblait presque offusqué.
 

Je vous propose donc deux choses : soit je vous fait envoyer le paiement d’un million lorsque j’arrive à Marijoa et je vous donne tout ce que j’ai sur cette île en plus, c’est-à-dire 200 000 Berrys. Soit je vous laisse ce monsieur saucissonné par terre là-bas à charge pour vous de l’emmener dans un QG de la marine, mais sa capture vous rapportera, en tant que civil, quatre millions. A vous de voir.   

 
L’offre était émise, à voir si l’interlocuteur allait enfin accorder la facilité de paiement, mais un autre sujet turlupinait la verte, elle reprit donc la parole mais à l’attention de Tony cette fois.
 

Devrais-je aussi payer ma chambre ce soir si je reste ?  

 
Elle préférais rester ici pour recouvrer ses forces, mais hors de question de dépenser encore des sommes folles pour loger, le cas échéant, elle se reposerait dans le bateau.
 
 

 
Apparemment, et malgré les préjugés, l’avarice et l’opiniâtreté des nains avaient des limites et d’autres choses comptaient plus pour eux que l’argent. Ainsi la tête de l’esclavagiste à quatre millions n’avait pas retenu l’attention du maître nain qui était trop attaché à son honneur pour accepter une telle différence de somme entre la facture qu’il adressait et l’offre qui lui était faite. L’offrant justement en appris alors un peu plus sur les nains et sur le caractère de son petit interlocuteur : beaucoup aurait pris l’argent mais lui n’était pas comme ça : les rumeurs étaient donc en grande partie vraies. Mais bref, elle se contenta de remercier son interlocuteur et lui promit donc de donner la somme convenue à son apprenti le lendemain lorsqu’elle retournerait sur son bateau, il ne semblait pas lui tenir rigueur de ce très léger décalage de paiement. Mais bien vite, il reprit la parole vers son apprenti en parlant de cette sous-location de chambre, et la verte attendait impatiemment de voir si elle devait partir immédiatement de l’île, ou si la nuitée lui était offerte. Le nain semblait négocier un léger dédommagement à son apprenti mais celui-ci prit une toute autre orientation.
 
Dans un premier temps, il essaya d’argumenter pour avoir le dessus, notifiant qu’il sous-louait à titre gratuit et qu’il dormirait sur le paillasson, même son invité ne le laisserai jamais faire. Puis, voyant que son mentor ne semblait que peu convaincu, il prit ses jambes à son cou et se dirigea en toute hâte vers une autre issue : il attrapa le prisonnier ainsi que la chasseuse et s’enfuit en laissant son maître seul. La course fut assez drôle pour la jeune femme ainsi transportée qui s’amusait de la situation. Elle trouvait ça étonnant qu’une telle montagne se fasse ainsi retourner et diriger par un si petit homme. Aux vues de la démonstration de force plus tôt dans la journée, elle comprenait néanmoins cette aversion du blond pour le combat ouvert contre le vieux forgeron. Mais bref, Tony courut sur une longue distance avant de reposer toutes ses charges et donna un glorieux conseil à son acolyte : éviter de parler argent au nain.
 

Oui, j’avais cru comprendre, mais dans le fond votre maître me semble très sympa.  

 
Après tout, elle n’avait pas été molestée par le vieil homme et il n’avait pas essayé de l’arnaquer donc tout allait pour le mieux entre la cliente et le propriétaire. Mais la journée avait été passablement longue pour le duo et notamment pour celle qui avait dû souffrir d’un empoisonnement. Elle se permit donc de faire avancer les choses assez rapidement.
 

Tony, auriez-vous un endroit où entreposer mon collègue pour la nuit ?

 
Il est vrai que cet esclavagiste restait un problème majeur ! Elle ne pouvait pas le laisser n’importe où pour ne pas risquer une nouvelle fuite et il devait donc être enfermé quelque part, une fois la question réglée, elle passa à son propre sort.
 

J’ai hâte de découvrir votre logement et de me coucher, je suis sûre que c’est très cosy. Par où nous dirigeons nous ?  

 
Kanäe forçait un peu le pas à son hôte mais l’heure était largement venue de se coucher pour la belle.
 
 

 
Le Stronghold était réellement un bon gars, il s’agissait d’une rencontre différente à celle que pouvait faire à titre habituelle la belle recrue de la marine. Non pas que les autres étaient de mauvaises personnes mais le forgeron avait un capital sympathie assez élevé et semblait bien faire les choses avec un total désintérêt. Il se souciait de bien-être des personnes avant du sien. De cette manière, il n’avait pas cherché bien loin et avait vite proposé de s’occuper de la détention du trafiquant de jeunes têtes blondes qui avait encore pu mériter le surnom de fugitif, au vue de sa prestation de l’après-midi. Il avait donc trouvé une solution pour la nuit et s’était également inquiété de l’empressement de la jeune femme à prendre ses quartiers pour la nuit. Il n’avait même pas tenté d négocier une petite discussion supplémentaire et l’avait mené jusqu’à sa petite masure sans en attendre davantage. Le duo arriva donc rapidement devant la belle petite habitation dont la porte s’ouvrit bien rapidement sous l’impulsion du grand blond. Le locataire était doué, très doué même, dans le cadre de son travail, mais concernant le rangement, il ne valait pas grand-chose. Sa vie était dévouée à son travail et l’état de son lieu de vie n’en était qu’une preuve supplémentaire : il y avait des instruments de forge dans tous les coins. La verte ne montrait rien, trop fatiguée et peut-être trop reconnaissante et polie pour faire une quelconque remarque mais une seule pensée trottait dans sa tête : Quel bordel !
 
Malgré tout le fatras, Tony était toujours au petit soin, il s’empressait de tout ranger pour que la verte ne se sente pas mal à l’aise et s’occupa du problème majeur de la journée dans un second temps, il s’occupa tellement bien de la prise en charge que Kanäe en était presque éblouit et se demandait même comment elle ferait pour le détacher le lendemain matin. En effet, la mouette comptait s’envoler assez tôt en laissant l’argent derrière elle, non pas qu’elle ne voulait pas dire au revoir au forgeron mais plutôt du fait qu’elle avait déjà pris assez de temps sur cette île. Le blondinet continuait ses explications après avoir laissé son lit à la jeune femme en disant qu’il allait dormir dehors, chose que la belle ne put accepter.
 

Non s’il vous plait, ne dormez pas dehors. Je me sens déjà honteuse de prendre votre lit alors dormez au moins à l’intérieur, ça ne me pose pas de problème.  

 
Elle lui faisait ainsi comprendre qu’elle dormirait seul dans le lit et donc qu’elle acceptait sa proposition mais il n’en restait pas moins qu’elle ne pouvait pas laisser son hôte dormir en extérieur. Après avoir régler la question du couchage, la Toupex s’occupa de la question du règlement du nain et répondit à l’artisan.
 

Je compte partir très tôt demain matin et je ferai donc attention de ne pas vous réveiller,  je vous ferai parvenir le paiement complet une fois de retour à Marijoa et je vous laisserai la somme due à titre de provision ici. En tout cas je me dois encore de vous remercier pour tout.

 
Kanäe s’inclina respectueusement face au grand blond en signe de remerciement et sans plus de cérémonie, elle se vautra sur le lit, tout habillée et sans entrer dans les draps. Elle ne voulait pas salir les nouveaux draps et surtout était beaucoup trop fatigué pour se mettre dans une tenue plus adéquate. Elle finit enfin par tomber bien rapidement dans les limbes du sommeil, laissant alors son partenaire seul avec ses pensées.
 
 
 
Le lendemain matin arriva bien vite pour la marine qui se leva aux aurores en faisant bien attention de ne pas réveiller celui qui devait encore probablement dormir. Elle se sentait beaucoup mieux, les poisons ne faisaient plus effets, elle venait d’injecter un puissant somnifère au prisonnier et se préparait à attaquer une nouvelle journée de voyage en mer. Elle passa près de cinq minutes à libérer son colis et termina par y parvenir avant de le jeter sur son épaule. Avant de pousser la porte, la chasseuse posa la somme convenue sur la table et sortit de la maison sans déranger son hôte. Dormait-il ou non, elle ne le savait pas mais elle avait apprécié cette rencontre, il était un homme différent.