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Jeu 9 Aoû - 23:45


Jus d'orange ou café ?


Je me tenais droite, les doigts crispés sur la rambarde du navire, défiant d’un regard l’île démoniaque qui me faisait face. Son secret la protégeait et se protégeait lui-même, mais j’en viendrais à bout. Je m’y étais rendue naïvement la première fois, et cette visite pionnière s’était conclue sur un mariage avec un simple corsaire, Massy Umbra. Mais à présent, j’y allais en connaissant les risques.

Attraction Town… tu ne m’auras pas. Pas cette fois.

***
Coeur goût café [PV Erwin Dog] Eustac10
Eliès Presso

Quelques jours plus tôt, j’avais rencontré un biologiste du nom d’Eliès Presso, spécialisé dans l’étude de l’évolution du comportement animalier selon les… bon, c’était un nom à rallonge pour faire joli, mais l’idée résidait dans la volonté de comprendre comment les êtres vivants s’adaptaient à leurs milieux. Nous avions pu parler lors d’un petit déjeuner sur une île voisine, durant lequel il but une demi-douzaine de cafés noirs, et moi autant de jus d’orange. Si notre discussion s’était d’abord tournée vers la comparaison de nos boissons, et que la question principale était de savoir laquelle des deux était la meilleure, nous divergeâmes assez rapidement vers notre intérêt commun : Attraction Town.

Eliès voulait comprendre comment un tel exploit était possible. Un charme ? Il n’y croyait pas. C’était un scientifique, convaincu que seules les explications rationnelles faisaient sens. De magie et de divinités il n’y avait pas. Si Attraction Town avait un tel effet sur la population, c’était qu’une molécule flottait dans les airs, et qu’aux abords de l’île, en la respirant, on oubliait sa raison pour se laisser porter par l’amour. Il ne voyait pas d’autre solution. Il aurait été simple de tester la chose, grâce à un masque à gaz d’assez bonne qualité. Mais n’appartenant à aucun groupe, et n’étant lui-même pas assez fortuné pour s’en procurer un – il dépensait énormément d’argent dans tous les types de cafés, il n’avait jamais pu essayer. Je comprenais plus ou moins le choix de ne pas s’allier à une équipe, de vouloir réussir par ses propres moyens. Après tout, j’étais un peu pareil, à l’époque. Sans Ogawa, j’avais essayé de tenir son commerce seule. Ce n’était pas tâche facile.

Surtout, il avait d’autres préoccupations. Il m’avoua à voix basse être sur le point de découvrir une drogue puissante, évidemment à base de caféine, utilisable aussi bien pour un usage ludique que pour des soins. Mais cette partie ne m’intéressa pas vraiment. Les drogues, j’en avais connu les effets sur mon père, et ne souhaitais en aucun cas avoir affaire à quelque cochonnerie de ce genre. C’est après ces confidences que nous parlâmes de l’île, et que nous choisîmes de nous y rendre ensemble.

***

Attraction… tu ne m’auras pas. Pas cette fois.


***

 
Eliès, mon amour, et si nous nous marions ?

Des cœurs dans les yeux, des papillons dans le ventre, des arcs-en-ciel dans la tête, j’étais victime de l’amour. Je voulais passer toute ma vie aux côtés de mon tendre Eliès, mon biologiste en herbe, mon petit hérisson vert, et répondre à tous ses désirs comme à ceux d’un prince. Et, je le savais, l’une des choses qu’il souhaitait le plus au monde était de créer cette drogue. Alors, depuis la semaine et demie que nous vivions ensemble, je m’étais efforcée d’améliorer au mieux la petite pastille cristallisée qu’il voulait tant mettre en œuvre. Je ne dormais plus beaucoup, mais ça ne me dérangeait pas le moins du monde. Si mon travail pouvait rendre mon scientifique chéri heureux, alors je n’avais pas besoin de me reposer.

C’est ainsi, après environ soixante heures sans dormir, que je m’étais retrouvée à errer au beau milieu des rues d'Attraction Town, à la recherche de quelques kilogrammes de café, et, pourquoi pas, d’un peu de jus d’orange.

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Lun 13 Aoû - 23:50
Cœur goût café [1]

Cette île, c'était le jeu du hasard. L'amour à première vue ? Non, Erwin avait erré avec ce sentiment d'appartenir à quelqu'un d'autre pendant quelques heures, et n'était pas tombé sur sa dulcinée. Il n'avait pas eu d'attirance pour le sexe opposé depuis des mois, et pourtant il savait qu'elle était là. Sa douce, sa belle, celle qui pourrait lui faire avaler des couleuvres sans qu'il ne dise mot. Alors, quand il arriva au niveau des boutiques de fleurs, il ne put s'empêcher de prendre un bouquet de roses blanche. Les plus belles qu'il trouva ! Et il les acheta, au prix faramineux qu'on lui demandait. Ici, tout avait le prix de l'amour, et l'amour ça coûtait cher. Il ne pensait pas à s'enfuir, il ne pensait pas à partir. À vrai dire, tant qu'il n'aurait pas rencontré l'amour de vie... Jamais il ne pourrait faire autrement que de chercher!

Alors il la... non, le vit ! Il était là, au milieu de ces commerces, en train de sourire bêtement devant un tee-shirt qu'il trouvait « trop mignon » mais qu'il n'osait pas acheté. Son sourire était ravageur, sa peau mat attirante, et il aurait aimé lui déchirer ses habits sur place. S'approchant, des cœurs dans les yeux, Erwin posa sa main sur l'épaule de ce jeune homme et lui dit sur un ton déterminé :

- Je... suis ton prince charmant !

Celui-ci se retourna, et rougit en grognant. Il avait aussi eu le coup de foudre, mais à quel prix l'avouerait-il ? En réalité, le rouquin ne comprenait pas ce qu'il lui arrivait. Jamais il n'avait ressenti une telle excitation. Il lui fallait la libérer, il lui fallait lui donner forme, alors il tendit les roses en mettant un genou à terre. Tout allait si vite, quand brusquement la voix de la personne en face de lui retentit.

- Homme de mes rêves, je préférerais des roses rouges... S'il-te-plaît.

Il acquiesça simplement avec vivacité et se retourna brusquement pour décamper, emmenant les roses blanches avec lui. Il s'approcha d'une quincaillerie qui vendait exactement ce qu'il cherchait : bientôt, il commença à peindre au milieu de la rue chaque pétale en symbole de son amour. Il les détachait soigneusement, avec un doigté qui leur permettait de survivre, puis les déposait sur le sol pour les laisser sécher. Quand il eut fini son opération, il les recolla au niveau de la tige. Il rirait alors de tout son saoul en observant ses chefs d’œuvres qui ne lui avaient pris la modique somme de cinq heures de sa vie. À vrai dire, il s'en fichait, et il tourna sa tête à nouveau dans tous les sens tout en reprenant sa course, passant à côté d'une demoiselle étrange qu'il ne capta d'abord pas.

Son bien-aimé avait disparu de là où il se trouvait, et fronçant les sourcils, le jeune homme aperçut une pétale rouge. On l'avait donc capturé... Un vilain dragon avait enlevé l'homme de sa vie... Non, c'était impossible, il fallait qu'il se ressaisisse. Brusquement, il fut bousculé par un homme en blanc qui se mit à courir en hurlant qu'il allait être en retard pour le « grand événement ». S'agissait-il de l'événement qui allait mettre son époux – oui, c'était allé très vite – à mort ? Non, bien sûr que non, car il serait là pour le sauver, au nom de leur grand amour !

S'élançant dans cette direction, il croiserait peut-être la même silhouette de jeune femme qu'il ne remarquerait toujours pas, pris dans sa quête héroïque qui promettait une fin tragique d'où il ressortirait, fidèle veuf larmoyant. Il en était certain à présent. Ce triste destin lui était réservé. Non, il ne pouvait pas... Il ferait tout pour l'éviter ! Son âme-sœur ! Ah, tristesse et précipice du désespoir...
Erwin
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Dim 24 Fév - 21:53


Plus on est de fous, plus on aime



 
Rooon… Rooon… Roohmpfl AH ! JE SUIS REVEILLEE ! Où est-ce que je suis ?!

A toute vitesse, mes yeux se déplacèrent autour de moi pour découvrir le monde dans lequel je venais d’évoluer. Ok, pas de panique. Je n’avais aucun souvenir des dernières secondes – minutes ? – et pas la moindre idée d’où je venais d’atterrir. Je tournai la tête à la recherche d’indices, ne manquant pas de frotter mes yeux gonflés par la fatigue, soulignés de cernes aussi bleues que la nuit dont je rêvais. Je bâillai ostensiblement, remarquant à quelques pas un fou amoureux coller des pétales de rose sur leur tige. Ca ne m’aidait pas vraiment à savoir où j’étais.

Putain, je fous quoi ici ?

Je claquai des doigts et frappai ma tête, me rappelant la mission qui m’avait été confiée : trouver du café pour mon tendre. Comment avais-je fait pour m’endormir alors que je m’affairais à lui rendre la vie plus belle ? C’était insensé ! C’était une insulte à l’amour que j’éprouvais pour lui. Je devais me racheter et faire au plus vite pour finir cette course qu’il m’avait commandée, et retourner auprès de lui. Il me manquait tant !

Mais avant toute chose, je devais me repérer. Mon sens de l’orientation laissait habituellement à désirer, alors après une micro-sieste qui avait suffi à me perdre, il ne m’aiderait en rien. Paradoxalement, je continuais à épier les moindres recoins de la rue, à la recherche d’un élément qui m’indiquerait où j’étais. Je n’avais qu’à demander mon chemin, en fait. Bonne idée. Alors que les gens saines semblaient grouiller dans la rue, mes jambes m’avaient dirigées naturellement vers le cinglé qui collait ses pétales sur sa rose. C’était étrange, cette sensation. Je me sentais… attirée par lui. Je remuai la tête pour faire fuir ces pensées perfides, fermant les yeux pour n’avoir à l’esprit que le doux visage de mon adoré. J’ouvris un œil, juste par curiosité, découvrant avec horreur que mes pieds, eux, ne se retenaient pas. Pourquoi, avec horreur ? Après tout, j’étais sur l’île de l’amour. Pourquoi l’amour que l’on porte devait-il rester unidirectionnel ? Pourquoi ne pouvait-il pas prendre plusieurs chemins ? Timidement, je me convainquais que mon cœur était assez large et ma tendresse assez profonde pour appartenir à deux êtres. J’aimais Eliès, et je voulais aimer cet inconnu.

Mais, alors que je m’approchais, à deux doigts de lui déclarer ma flamme, il se jeta sans raison dans une course folle. Sans savoir ce qui le prenait, je tendis une main vers lui qui l’effleura à peine, et l’observai s’éloigner. Je ne pus pousser qu’un gémissement déçu avant qu’il ne soit trop loin pour être rattrapé. Je grimaçai et pestai d’être trop fatiguée pour me montrer assez réactive. Si seulement j’avais dormi ces dernières nuits, j’aurais pu agripper son bras pour le retenir prêt de moi, j’aurais pu lui donner tout mon amour, comme je le faisais avec Eliès. Il était trop loin, mais je ne baissais pas les bras. J’avais maintenant deux choses à lui demander : mon chemin, et sa main. L’épuisement m’avait ralentie, mais la passion, elle, me donna les ailes pour poursuivre l’homme qui partagerait la moitié de ma vie.
 
Attends !

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6 mois pour répondre, on est pas mal
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Jeu 28 Fév - 14:07
Cœur goût café [2]

C’était une course-poursuite incertaine qui était menée par une polyamoureuse en plein émoi, vers un gringalet qui souhaitait retrouver son Roméo. Sa course effrénée le mènerait sûrement sur les pas de cet homme qu’il avait abordé, dans une danse forte en émotions. Il serait emporté vers l’endroit précis où il se trouvait, comme dans un film ! C’était ainsi que cela devait se passer, et ça ne se passerait pas autrement. Du moins le crut-il durant les deux minutes qui suivirent où son allure fut saccadée. Puis, comme coupé dans son élan, il entraperçut l’église, un lieu de sacre où des couples défilaient par dizaines. Il s’approcha de ce lieu, fronça les sourcils et entra sans demander son reste.

Quand il regarda ceux qui s’y trouvait, il ne vit que des couples qui lui jetaient leur bonheur à la figure. Un homme d’une cinquantaine d’année était en train d’officier devant un jeune couple fringuant. Il passait la plupart des formules de politesse, et à côté de lui, un certain nombre de couvre-chefs étaient posés comme autant de religions qu’il représentait. C’était un hérétique, un faux pour nombre de personnes qui auraient pu, sans l’influence de cette île, l’envoyer au bûcher. Malheureusement, les choses n’étaient jamais ce qu’elles paraissaient, et tandis qu’Erwin cherchait sa seconde moitié, il ne la trouva pas.

Abattu, il alla se poser près de l’autel où étaient mariés les visiteurs, et quand un couple eut fini d’être marié, par les liens sacrés d’un bout de papier et de la parole, le Dog saisit un acte de mariage et, de rage, le signa. Puis il se tourna vers le public qui se trouvait dans la pièce, choqué et à peu près aussi désintéressé de l’histoire qu’on pouvait l’être.

- Qui veut signer ce bout de papier et se marier avec moi, pauvre âme brisée ?

C’était encore plus mélodramatique que ce qu’il avait l’habitude de faire. Enfin, son ami l’avait quitté soudainement alors qu’il avait repeint ces si belles roses en rouges, il ne pouvait pas, non, décemment pas accepter cette situation. Il agissait sous le coup de la colère, mais et alors ? L’amour n’était pas forcément aveugle.

Plus loin sur l’île…

- T’es cuit, tu vas faire un bon gigolo…
- Et mes fleurs ? Mon amour m’a promis de revenir avec des fleurs !


Cela faisait dix minutes qu’il les baratinait avec ses « fleurs ». Qu’est-ce que cela voulait dire ? Il n’était qu’un prostitué de luxe à présent : joli minois, petit cul bien ferme, un sourire complet et des lèvres légèrement pulpeuses. Ce n’était qu’un homme parmi tant d’autres, et pourtant il serait parfait pour le rôle qu’on lui réservait.

Quel malheur avait-il eu, lui, simple civil, de venir en ces lieux de plaisir ! Il n’était pas au courant, ou alors il essayait simplement de l’ignorer, d’espérer que les choses seraient différentes et qu’il trouverait le seul, l’unique, le véritable amour. Son regard triste perça tandis qu’il regardait par les barreaux de sa fenêtre : « Un jour, mon prince viendra ! » commença-t-il à chanter.
Erwin
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Ven 19 Avr - 20:46


Une relation mouvementée



 
MOI !

La mine décomposée par la fatigue, les cheveux si explosés qu’on aurait pu me prendre pour une barbapapa, les jambes tremblantes après l’effort, j’avais ouvert la porte de la chapelle dans un grand fracas et ma voix avait déraillé puis résonné pour transpercer l’espace. Mettant en marche tout le peu de force qui me restait, je bringuebalais jusqu’à mon nouvel amant, futur mari, agrippant au passage le crayon qui lui avait servi à signer en premier. Avec délicatesse, s’il ne manifestait aucune résistance, je me saisissais de la feuille pour la parapher à mon tour.

Pour la vie, pour le meilleur et pour le pire.

Après tout, cette signature, je la méritais. Dès que je l’avais vu, je m’étais lancée à sa poursuite, malgré l’épuisement que m’imposait le travail harassant de mon premier mari. J’avais donné corps et âme pour ne pas le perdre de vue, j’avais bravé les dangers de la rue, alors même que mon champ de vision et mes réflexes étaient largement diminués, toujours pour les mêmes raisons. Mais j’avais fait face aux épreuves, face à l’adversité, face au désespoir de le perdre !

D’abord, j’avais senti l’écart se creuser entre lui et moi. Il fallait passer par là, dans une relation, mais ce fut une période difficile pour moi. Je le perdais, et je ne comprenais pas. Pourquoi n’arrivais-je pas à l’appeler, à le faire venir à moi, à lui déclarer mes sentiments les plus profonds ? Je ne me l’expliquais pas, mais surtout, je le voyais partir. Ce qui me faisait tenir, c’était de savoir que ça passerait, qu’il y aurait un après plus paisible dans lequel nous nous retrouverions. J’avais tout donné pour le suivre, mais la réalité m’avait vite rattrapée : soudain, ma vue s’était obstruée, ma tête s’était mise à tourner violemment, et mes jambes avaient manqué de me lâcher. A deux doigts du malaise, je me vis forcée de faire une pause, me retenant d’une chute en posant ma main contre un mur.

J’avais besoin de sucre. Je devais me recentrer sur moi-même, sur mes envies et mes besoins. Mes yeux se promenèrent fébrilement autour de moi, pour trouver de quoi me ressourcer. Jus d’orange, jus d’orange, jus d’orange, il me fallait du jus d’orange. Et une barre énergisante. Et du café.


 
Là-bas ! Parfait !

Sans perdre de temps, j’avançai vers la petite brasserie, d’où une presseuse d’orange et une machine à café étaient visibles. Je m’y installais tranquillement, entendant une petite musique de jazz, un peu déprimante, et commandais mon goûter avant d'attendre patiemment qu’il arrive. Je me sentais seule. J’avais peut-être eu tort, de le lâcher. Non, c’était certain, j’avais eu tort. Je ne savais pas comment le retrouver, et à l’allure à laquelle nous nous étions quitté, il était certainement déjà loin. Merde, quelle conne. J’étais passé à côté d’un type comme lui. J’étais sûre de ne jamais en retrouver un comme lui. Je vis à peine le serveur déposer le jus d’orange le café et le biscuit sec que j’avais demandés.


 
Fais chier, putain.

Bien élevée, je remerciais le jeune homme d’un grand sourire dès lors que je me rendais compte de sa présence. Il me lança un regard étrange, pour une raison inconnue. Peu importait, j’en revenais à mes pensées : jamais je n’aurais un amant comme lui, à nouveau. Et si je ne pouvais pas en avoir un autre comme lui, cela signifiait que c’était lui qu’il me fallait. Brusquement, je fis un cul-sec de mon jus d’orange et de mon café, je gobai le biscuit et me relevai d’un bond. Avant de partir, je pris soin de laisser quelques pièces pour le repas, mais avalai l’espace qui me séparait de la porte de quelques grands pas, à la recherche de l’amour perdu.

Je ne le voyais nulle part. Je ne connaissais même pas son nom, je n’avais sous mes yeux qu’une foule amoureuse, rien pour le retrouver que le souvenir de ses yeux tendres et l’amour que je lui portais. Le chagrin, puis le désespoir furent bien vite leur apparition. Les larmes aux yeux, je sollicitais les passants, tendant mes mains liées vers eux pour les supplier de m’aider. Mais pour toute réponse, je n’obtenais que des « Désolé, je n’ai pas le temps », « Pardon, je n’ai pas de monnaie sur moi ». Ils ne m’écoutaient même pas, feignant une compassion qu’ils n’avaient pas avant de fondre à nouveau dans leur monde de passion illusoire. Là, je ne croyais plus en l’amour.


 
Personne ne l’a vu, mon amour ! Je ne le reverrai jamais !

 
Si Señorita, ié vous entends dépouis oune momente, vous m’empêchez dé faile la siesté.

Je me retournai vers mon sauveur, découvrant un homme vêtu d’une cape et d’un chapeau noirs et armé d’une fine épée. Il leva la tête à cet instant, découvrant ses yeux ténébreux et sa petite moustache brune.


 
Vous savez de qui je parle ? Vous l’avez vu ?!


Si Señorita, ié l’ai vou… Il est palti vels l’église, pal là-bas.

 
Oh, merci, merci ! Comment pourrais-je vous remercier ?

 
Ne vous en faités pas, Lovoo est au selvice dou l’amoul, il né réchelché pas sa gloilé pelsonnelle.

Il dessina un L dans l’air avec la pointe de son épée, et partit en chantant : «  Lovoo, Lovoo, oune cavalier qui sulgit hols dé la nouit, coult vels l’amoul au galop, son nom, il lé signé à la pointe dé l’épée, d’oune L qui vé dile Lovooooo ! ».

Quant à moi, je poursuivis ma route jusqu’à l’église, sans prendre le temps de me refaire une beauté pour dire oui à mon tendre.

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Je progresse sur le temps de réponse, ia pas à dire !
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Mer 1 Mai - 15:15
Cœur goût café [3]

Elle avait dit « Oui ! ». Elle avait dit « Oui » ! C’était le plus beau jour de sa vie. Son petit cœur brisé venait de recoller les morceaux, et il souriait avec un air si plein d’amour et de tendresse à l’égard de cette demoiselle que l’on aurait dit qu’il la connaissait depuis sa plus tendre enfance. Sa main tendit le papier qu’elle signa, comme le contrat qu’on scelle pour la vente d’un électroménager. Il alla vers elle et si elle l’acceptait, l’attraperait par les hanches pour lui donner le baiser de sa vie, en échange de cet acte qui scellerait leur mariage à jamais. Leurs lèvres s’entrelaceraient dans un méli-mélo de salive et d’incompétence, tant sa manière d’embrasser relevait de l’inexpérience qu’il avait dans ce domaine. Il séparerait sa bouche, ou se prendrait un vent s’il n’avait pas réussi son action, et se retournerait vers la salle malgré tout.

- C’est un jour merveilleux pour fêter, mes amis ! Nous sommes réunis pour…
- Eh, laisse passer, on veut se marier nous aussi.
- Ah, oui, euh… Désolé.


Et il sortirait de cet endroit avec la personne qui, de toute les manières, se ferait sinon sortir de ce lieu de culte à une divinité quelconque, ou pas. Il s’en fichait, il n’avait d’yeux que pour cette merveille de la nature qui, en tout et pour tout, devait représenter la seule chose importante à ses yeux. Certes, ce n’était pas le grand amour, mais il s’en contenterait avec plaisir. D’un air concentré, il regarderait autour de lui et chercherait le nid douillet où ils allaient pouvoir faire leur vie.

- Oh, regarde donc ma dulcinée, nous allons pouvoir louer une maison, j’apporterai de quoi nous héberger et…

Il s’arrêterait, et la regarderait avec intensité. Il réalisait quelque chose d’important, quelque chose d’impensable jusqu’à présent. Il la dévisagerait sous toutes les coutures avant d’opiner du chef, comme si elle convenait finalement à ses plus savants fantasmes. D’une main experte, il se saisirait de la première rose qui trainerait et du peu de peinture rouge qu’il y avait sur une étale, et peindrait la rose blanche dans la couleur du sang. Il attendrait patiemment qu’elle sèche – oui, le temps passé avec la jeune femme était précieux et le passer à rien faire l’était encore plus – et si elle était encore là, il la mettrait comme une boutonnière de mariage au niveau de son sein gauche, sans même effleurer l’objet de tous les fantasmes des hommes. Il expirerait avec fierté et dirait :

- Bon, ce n’est pas la meilleure couleur pour toi, mais je ne sais peindre les roses blanches qu’en rouge.

Et il s’arrêterait là-dessus avant de se passer une main dans la nuque et de sourire. Ses dents étaient blanches, régulièrement lavées, et il n’y avait pas de tartre. Il semblait être sinon un peu frêle au moins assuré, et ses mouvements vifs démontraient un entraînement régulier, ancien, à l’arme légère. Ses mimiques n’étaient pas très masculines, mais on pouvait avouer que sa voix était assez grave pour compenser cela. Quand il irait chercher l’agente immobilière pour qu’elle vienne leur présenter dans la rue ses différents modèles à louer sur papier, il viendrait à chercher un compromis sur leur lieu d’habitation – lui-même s’en fichait tant que cela faisait plaisir à la demoiselle.

Et quand il faudrait inscrire leurs noms sur le formulaire, il s’en saisirait comme elle s’était saisie du contrat de mariage… Et s’arrêterait après avoir écrit le sien.

- Oh, ma dulcinée, comment t’appelles-tu ? Demanderait-il fatalement, sous le regard dubitatif de l’agente.

Un couple marié qui ne connaissait pas le prénom de l’autre ? Cela avait encore le don de la surprendre, même si c’était finalement courant sur Attraction Town.
Erwin
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Erwin
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Dim 30 Juin - 14:23
Cœur goût café [4]

L’idylle ne dura qu’un temps. Alors même que tout était parfait dans le meilleur des mondes, Erwin obtint une promotion dans son nouveau travail en tant que barman. Il dut travailler si dur qu’il en oublia de rentrer chez lui plusieurs jours d’affilés, se logeant sur la couchette d’un bar qui sentait assez mauvais. Lorsqu’il revint, la personne qu’il aimait du plus profond de son cœur, et à qui il voulait faire une énorme surprise en dépensant le salaire de ces derniers jours avait disparu. Il pensa un instant qu’on l’avait kidnappée, mais elle avait simplement pris la poudre d’escampette en l’attendant, avait confié l’agente. Elle ne s’était pas offusquée de la colère du rouquin tandis qu’il passait par différentes phases de déni.

Quand il présenta lui-même ses clefs et abandonna la surprise qu’il devait faire, il se dirigea vers l’un des bars où il but une quantité innommable de lait à la fraise. Certes, il était marié mais il n’avait pas encore dix-huit ans. D’ailleurs, il fallait qu’il fasse quelque chose pour ce mariage… Ses yeux bouffis par la tristesse tiraient son œil hagard vers l’horizon qu’était la première ligne de bières du bar. Il se demanda quel goût avait l’alcool, quand soudain une main toucha son bras. Se tournant, il observa la personne qui venait d’entrer en contact avec lui et sentit son cœur se serrer. Cette personne… C’était une véritable beauté, un dieu vivant.

Ses yeux ocres, ses cheveux bruns, son air hautain, tout était parfait. Erwin sentit que son cœur chavirait encore, et soudain quelque chose l’alerta. Il chavirait encore… beaucoup trop facilement. Que se passait-il ? Qu’est-ce que c’était que ça ? L’emprise de l’île était bien trop importante, et s’il approcha sa main de celle qui était sur son épaule, il sentit quelque chose qui le dérangeait. C’était quoi ça ? Brusquement, il attrapa l’homme, approcha ses lèvres des siennes, tout en se levant…

Et s’arrêta. Ils n’étaient plus sur Attraction Town, mais sur une autre île de West Blue. Les deux hommes échangèrent un regard dubitatif, et sentirent soudain leurs cœurs se remettre en place. Les récents événements n’étaient pas normaux.

- Tu es… ?
- Erwin, je suis désolé, qu’est-ce qu’il s’est passé là-bas ?


Ils s’échangèrent un regard. Ils se trouvaient dans une forêt, à l’orée d’une ville. Xérèse ? Oui, c’était sûrement ça, plutôt un village alors. L’endroit connu du Dog était un lieu suffisamment éloigné pour servir de point de chute au cas où quelque chose se passait mal. C’était un choix inconscient qu’il avait fait en arrivant sur West Blue. L’idée même qu’il devrait un jour l’utiliser n’avait rien d’anodin.

- Je suis Marv… Je crois qu’on était sur une île où les gens tombent amoureux, en tout cas où le sentiment d’amour est simulé. Je suis Lieutenant de la marine, j’étais venu enquêter là-bas pour… Je ne sais même plus pour quoi.

Il secoua la tête avant de mettre une main dans ses poches. Il reconnut alors l’endroit où ils se trouvaient, et ses lèvres tremblèrent devant le déplacement instantané qu’ils avaient effectué. S’il fut stupéfait, cela ne l’empêcha pas de s’interroger sur le camp auquel appartenait ce jeune homme. Ils eurent finalement une conversation assez longue en observant la nuit qui s’étendait à l’horizon, et se quittèrent en se laissant leur numéro… Au cas où.
Erwin
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