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Nous portons tous un masque. [FB PV Lidy]
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Heziel Coffe
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Jeu 5 Juil - 20:45
Spoiler:





Mauvais endroit, mauvais moment ?


- Mais je te dis que ça me va très bien !

- Tu ne veux pas celui-ci, mon petit chou des îles ? Il est bien plus soyeux, bien mieux confectionné, bien mieux...

- Il est surtout bien plus cher, Zara ! Merci, ça va aller. J'ai tout ce qu'il me faut, tu es la meilleure !

Ce petit compliment venant du fond du coeur vint rasséréner la tenancière des Beautés Nafnaf, qui soupira avec un air à moitié réprobateur et à moitié amusé. Son petit protégé avait l'air tout à fait fringuant, il fallait bien l'avouer, ainsi vêtu comme... un bandit quelconque ! Tous les clichés y étaient, comme on pouvait s'y attendre chez quelqu'un du commun désirant personnifier un hors-la-loi. Des babioles supposées faire peur aux fausses armes en passant par les habits sombres, le Coffe se sentait prêt à rejoindre la grande fête qui allait bientôt battre son plein à Notebouque : Dimargras, une vieille tradition locale qui consistait à manger des crêpes en se déguisant en tout et n'importe quoi, tant qu'on s'y amusait. Il faisait cette fête tous les ans et devait admettre que cela lui permettait de souffler un peu ! Sortant de la boutique après avoir fait ses salutations, enserrant l'écharpe grise autour de son cou et la remontant devant ses mâchoires - dont-il était persuadé que ça lui donnait un look "mystérieux"- il se dirigea d'un pas décidé vers le nord de la ville, plus particulièrement de l'île.

Ces derniers temps étaient difficiles en termes de travail pour le jeune homme : malgré ses talents en cuisine, il en était arrivé à cette étape où il ne pouvait pas gérer la popularité du restaurant avec si peu d'effectifs ! Ses collègues semblaient avoir décidé de tous s’éclipser en même temps, ces dernières semaines... aussi, dès qu'ils étaient rentrés, il avait malicieusement prévenu en amont qu'il ne serait pas disponible pour au moins trois jours ! Ce qui, pour lui, était assez considérable à l'époque... aussi allait-il profiter au maximum de la petite sauterie organisée dans l'intégralité de l'île, plus particulièrement sur la côte nord : les falaises donnaient une vue imprenable sur la mer, en plus d'être bordées de plaines accueillantes et assez planes pour y monter de nombreuses activités, en passant de cirques improvisés à la grande roue sans oublier les stands de fléchettes ou les concours de boisson. Le temps était alors à la liesse pour tous les locaux, qui s'échangeaient pitreries, boisson et nourriture en toute amitié. Même les vieilles querelles se taisaient durant cette période sacro-sainte, qui ne devait sa pérennité qu'à l'aspect tranquille de East Blue ainsi qu'à la popularité suffisante mais assez ordinaire de Notebouque.

En ce qui le concernait, non sans avoir jeté quelques regards meurtriers sur sa route -ce qui, au final, revenait à des yeux très suspicieux qui ne faisaient pas si peur que ça chez lui- le Coffe était tout droit parti pour l'une de ses activités favorites : le marteau ! Le principe était simple : il fallait soulever un marteau au dessus de sa tête, avant de faire un tour sur soi même sans trébucher, avant de frapper une planche basculant sur un axe central qui permettait d'expédier une boule de peinture dans les airs. Un homme doué avec les armes à feu l'abattait au vol, faisant pleuvoir la peinture sur tout le monde. Oh, il ne fallait pas être très regardant de l'état de ses habits après la fête... raison de plus pour ne pas les payer plus cher qu'une caravelle chez Zara qui, même si elle conseillait et vendait très bien, n'avait parfois pas conscience des prix excentriques de ses marchandises.

Le marteau dans les mains, tout sourire comme à son habitude, il commença à lever l'arme au dessus de sa tête. Souvent, la phase du tour sur soi même était la plus difficile... en vérité, peu d'hommes arrivaient à seulement finir le mouvement, ce qui était un pur bonheur pour l'homme de spectacle qui vendait les tickets : il économisait tellement de peinture... sauf quand ce jeune blanc-bec était là. S'il avait pu se débarrasser de ce gamin, ne fut-ce qu'une année... m'enfin. Il allait devoir faire avec : il avait visiblement une force d'éléphant et d'un instant à l'autre, une peinture multicolore pleuvrait sur la foule en train d'applaudir et de rire de bon cœur.



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Lidy Olsen
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Dim 8 Juil - 10:38

Nous portons un masque [1]


- Tu connais ta mission ?
- Oui.


La jeune femme raccrocha sans plus de cérémonie. Elle portait une petite robe d’été légère, et un masque de kitsune. Après tout pour se mêler à la foule il fallait bien être à l’image des locaux : totalement débraillés. L’homme qui se trouvait sur l’île devait appartenir à un cartel de hors-la-lois que Némésis voulait exterminer. Son rôle à elle était de trouver les hommes de cette organisation, de les acculer et d’abattre leur chef tandis que le « Marteleur » et la « Sangsue » tueraient les petites frappes. En soit, c’était une simple formalité pour récupérer leur commerce. Elle, la « Rêveuse » n’avait pas le plus grand rôle. Le leader était particulièrement faible à ce qu’on disait.

En attendant d’être en contact avec l’homme de la situation, la jeune femme devait trouver son contact dans la foule. Il s’agissait d’un homme habillé en hors-la-loi, parce qu’on n’est jamais mieux caché qu’en étant soi-même. Lorsqu’elle commença à faire le tour de l’île, Lidy sourit en observant les stands qui y étaient disposés. Elle n’avait jamais eu l’occasion de participer à ce type d’événements sans qu’on lui ordonne de faire une mission pénible. C’était encore le cas aujourd’hui, mais…

- Je me prendrais bien une pomme d’amour, fit-elle en se saisissant de la sucrerie et en donnant quelques berrys au vendeur.

Bien, maintenant qu’elle était munie de l’essentiel, elle leva une partie du masque amovible pour croquer à pleines dents dans le plaisir coupable qui pourrait lui octroyer des carries, si elle ne faisait pas attention. Souriant, elle s’approcha finalement des stands de jeu… Et à l’un d’entre eux put apercevoir son contact, en train de s’amuser. Enfin, elle supposait qu’il s’agissait de son contact, après tout il avait tout : le costume de hors-la-loi qui était exagéré avec tous les stéréotypes du genre possible. En fait, il était vraiment déguisé, se dit-elle en le regardant. Peut-être un peu plus fun que prévu, du coup. Il pourrait l’amener jusqu’au cartel pour qu’elle puisse y faire le sale boulot.

S’approchant, elle n’aperçut qu’au dernier moment l’action qu’il était en train de faire. « Cet abruti ! » lâcha-t-elle dans sa tête tandis qu’elle se protégeait les cheveux. Trop tard, la peinture avait commencé à pleuvoir sur une foule hilare. C’était bien sa veine ! Maintenant elle était recouverte d’une peinture… Et en sentant sa composition, elle se disait qu’elle avait de la chance que ce ne soit pas corrosif. A terme, sans prendre de douche, peut-être que les couleurs lui tiendraient à la peau. Elle fronça les sourcils sous son masque et finit par dire sur un ton mi-sérieux, mi-amusé :

- J’aimerais que vous fassiez attention la prochaine fois ! Il en manque un peu là.

Elle désigna une partie de son corps qui n’avait pas été touchée par la peinture, ironiquement. Il fallait bien commencer quelque part, et le premier contact devait lui permettre d’utiliser le code qu’ils avaient mis en place. Ainsi, elle se rattrapa immédiatement en disant sur un ton plus énigmatique :

- Je suis prête à aller au trou à rats.

Ils auraient pu choisir quelque chose de plus discret, mais Lidy n’était pas du genre à être embarrassée. Une fois, elle avait dû retrouver un collègue hors-la-loi et lui dire : « Je ne suis pas ta femme, je suis coqueluche. »… Une vrai foire aux phrases qui perdaient leur sens. Quoiqu’il en soit, elle commença à enlever une partie de la peinture avec ses mains et observa attentivement la personne en face d’elle : il était mignon sous ses airs de hors-la-loi. Il aurait pu, avec un peu d’entraînement, faire tomber une Vice-Amirale amoureuse de lui.

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Lidy Olsen
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Jeu 23 Aoû - 21:01




Mauvais endroit, mauvais moment ?


- Oh la belle bleue !

Il rit à son tour, observant les dernières traces de peinture qui retombaient sur les alentours, tandis que quelques applaudissements de circonstance éclataient dans les airs. Il reposa le marteau sur le côté, avant de poser sa main gauche sur la hanche correspondante et de s'essuyer le front. Il en avait reçu une bonne portion, lui aussi... enfin, quoi de mieux que de participer aux festivités ? Il n'était pas du genre à rester passif et observer les gens avoir tout l'amusement pour eux. Avec les années, il avait appris à considérer cette île comme une seconde maison, et ses habitants comme une autre grande famille. Il fallait dire qu'il ne passait pas inaperçu : entre ses talents de cuisinier, ses capacités physiques en dehors des clous et son bon coeur, il n'était pas difficile de trouver quelqu'un connaissant Heziel Coffe à Notebouque, de près ou de loin. Il fut tiré de son début de rêverie par une femme, qui venait de l'interpeller.

- Désolé, désolé ! Je manque de pratique. J'aurai peut-être dû devenir peintre ?

Il rit doucement, détaillant la nouvelle venue : elle était habillée légèrement, ce qui allait parfaitement avec le climat. C'était assez joli, d'ailleurs. Son visage, en revanche, était caché par un masque de Kitsune. Qui était donc cette mystérieuse inconnue qui l'avait abordé ainsi, sans raison particulière ? Il était assez curieux de le savoir et, en réalité, désireux de passer cette fête en bonne compagnie. La chance se présentait peut-être ! Lorsqu'elle lui annonça être prête à aller au trou à rat, il plissa les yeux un instant... le trou à rat... le trou à rat ? Oh oui ! Bien sûr ! Le trou à rat ! Pourquoi n'avait-il pas trouvé plus tôt, lui qui se maintenait pourtant bien au courant des nouveautés de cette année ?

- Ce sera avec plaisir ! Suivez-moi donc, yarrr !

Son intonation de pirate, relativement faussée mais pleine de bonne volonté, serait sans doute plus comique qu'autre chose. Il était tout à fait à l'aise dans cette foule et personne n'aurait jamais pu le soupçonner de quoi que ce fut : un parfait agent secret qui s'ignorait, pourtant malgré lui aux abords d'une aventure assez spéciale. Il s'assurerait que la demoiselle continue de le suivre jusqu'à leur destination, passant dans les déguisements bariolés et pleins de rires, virevoltant entre les silhouettes endiablées des locaux en pleine fête, se faufilant dans cet environnement agité sans se perdre un instant ou manquer de percuter quelqu'un. Une fois arrivés à destination, quelques minutes plus tard, il ouvrirait grand les bras avant de s'exclamer.

- Tadaam ! Voici le Trou à Rat ! Qui l'eut cru, pas vrai ?

Devant eux se tenait une authentique attraction, assez complexe de surcroît : une sorte de maison fantôme retapée pour l'occasion. Il s'agissait d'un vieux parcours d'horreur de Dimargras, qui avait longtemps, de ce qu'en savait le Coffe, fait frémir petits et grands sur l'île par le passé. Suite à un accident malencontreux, il avait été décidé qu'on ne le présenterait plus... mais suite à d'habiles négociations menées par son nouveau propriétaire, qu'on disait prêt à graisser des pattes ou tout à fait réglo selon les interlocuteurs, cette nouvelle version était en piste. Sur la thématique des égouts, il paraissait qu'on y trouvait des créatures difformes et des rongeurs tout à fait diaboliques... étant aisément pris dans le moment, bien que parfois complètement à côté de la plaque, le noiraud était particulièrement friand de ce genre de jeu. Il se précipiterait alors vers le guichet, faisant un signe de victoire de sa main droite... ou plutôt, commandant deux tickets. Il se tournerait ensuite vers sa nouvelle connaissance, jouant le jeu du brigand, adoptant un air à son sens tout à fait terrifiant puis un sourire malicieux.

- Préparez vous... ce qui nous attend à l'intérieur pourrait nous surprendre !



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Lidy Olsen
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Mer 24 Oct - 16:21

Nous portons un masque [2]


Elle haussa un sourcil sous son masque, invisible marque de son incrédulité : cet homme était-il ivre ? En réalité, et à défaut, il était plein de bonne volonté. Il n’avait pas l’air farouche, en réalité. Elle se contenta donc de le suivre en ignorant l’accent de pirate qu’il avait pris pour se donner des airs, émettant un rire de circonstance. Elle continua donc la route qu’elle avait entamée plus tôt, et observa les alentours. Ce n’était pas une île très agitée selon ses informations. Quelques têtes étaient connues dans les environs pour sortir du lot, mais il s’agissait surtout de personnes « gentilles ». Les hors-la-lois qui étaient venus ici ne l’étaient que pour le temps du festival, et elle espérait bien qu’ils ne finiraient pas leur séjour en un seul morceau. L’espérait-elle ? Elle n’en avait rien à faire, en toute vraisemblance : ces hommes étaient aussi peu importants pour elle que la réussite de cette mission. On lui demandait de tuer, mais en était-elle capable ?

Son sourire sous le masque fut tout de suite stoppé par la vision d’une maison hantée. « Le trou à rat ». C’était… une… maison hantée ? Elle se sentit frémir un instant. Elle n’avait pas peur des zombies, des vampires et autres fantaisies dans le genre, bien sûr que non. Mais « hanté » ne voulait pas dire qu’il y avait des monstres dedans. Non, ça parlait de fantômes. Les fantômes, ça n’existait pas, hein ?

- Ce sont des égouts, fit une voix derrière la Olsen. Ouais, créatures difformes, tout ça…

« Pas de fantômes. ». Ouf. Pas de fantômes. Elle sourit sous le masque : son objectif devait se trouver à l’intérieur de cet endroit. Devant, la terre battue avait été piétinée de nombreuses fois, prouvant que l’attraction, même si certains endroits étaient bidons, était relativement appréciée. Elle sourit : il ne pouvait rien lui arriver de mauvais, n’est-ce pas ?

- Alors, on va là-dedans ? Dit la bleue en faisant mine d’être impatiente.

Elle était terrifiée. Ce costume de pirate était ridicule, tout comme son irrationnelle peur des fantômes. A vrai dire, elle n’appréciait pas d’être prise dans ce petit manège, et elle risquait de hurler de terreur si on lui mettait autre chose que des monstres difformes. Ses pas mécaniques la conduisirent vers le guichet où un homme pâle vendait des tickets. Elle le regarda et il eut un sourcil qui partit de travers. Sa main squelettique se dirigea vers la jeune femme et tenta de lui toucher le masque, mais soudain…

- AAAAAAAHHHHH !

Elle hurla, comme s’il était en train de l’attaquer, tombant à la renverse en reculant. Il fut si surpris qu’il en resta coi. Ses yeux exorbités étaient le signe d’une fatigue et d’une maigreur extrêmes, mais jamais on n’avait eu aussi peur de lui. Pauvre Michel.

- Je voulais juste… remettre… votre masque…

Elle avait effectivement oublié de le rebaisser. D’un geste simple, elle le remit en place et se releva, époussetant ses habits en essayant de reprendre un peu de contenance. C’était sa seule phobie, la seule chose qui pouvait lui faire perdre ses moyens. Elle n’avait peur de rien d’autres, du moins le pensait-elle.

- Je veux bien un ticket… S’il-vous-plaît.

Finalement, cela risquait d’être plus difficile que prévu. Elle observa le jeune homme qui devait toujours être à ses côtés, comme pour s’excuser d’avoir hurlé sans raison apparente.

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Mar 4 Déc - 15:37




Mauvais endroit, mauvais moment ?


- Ouf, vous m'avez fait peur ! Yarr !

Il ricana doucement en voyant la demoiselle aux cheveux bleutés se relever. Elle avait eu si peur du guichetier qu'elle en était tombée à la renverse ! Eh beh dis donc, ils n'étaient pas sauvés. Le parcours promettait d'être exaltant, à tout le moins. Même s'il était dit que la thématique des égouts avait été creusée au maximum, il n'en restait pas moins que croiser d'autres frayeurs n'était pas exclu... après tout, au bout d'un certain moment de terreur, n'importe quelle vision susceptible de provoquer l'effroi instantané devenait un outil valide pour poursuivre le manège. Le futur forban se massa le menton, un peu circonspect. Devait-il vraiment en parler ? Oh, non. Cela aurait gâché la surprise, après tout. Il voulait que la demoiselle profite de son tour d'attraction ! En plus de ça, son père lui avait un jour dit "les filles aime bien qu'on les protège". Il avait toujours eu du mal à le croire, considérant l'aspect parfois draconien de l'autorité de sa mère, ainsi que son assurance. Mais bon, peut-être que ça marchait bien. C'était l'occasion de jouer les... pirates chevaliers servants ? Ou de prouver que la théorie ne se transformait pas bien en pratique...

Il lui fit un signe de la main, souriant, avant de progresser vers l'entrée du terrible circuit. Les tickets en main, ils se présentèrent rapidement devant un tourniquet, avec un agent de sécurité qui vérifiait qu'aucun sacripant ne vienne profiter d'un tour de manège gratuit. Martin n'avait jamais voulu se retrouver là, mais il n'avait pas vraiment la matière grise suffisante pour s'en rendre compte : il était grand, costaud, particulièrement attaché aux règles qui avaient régi sa vie depuis son enfance et il n'hésitait pas à mettre la main à la pâte lorsque c'était nécessaire. En d'autres termes, il faisait l'employé de surveillance parfait, puisqu'il ne savait pas très bien compter et qu'il n'était pas dur, par dessus le marché, de l'arnaquer sur son salaire... autant de choses auxquelles, comme d'habitude, il ne pensa pas lorsqu'il "validationna" les deux tickets pour laisser les jeunes gens passer.

- Trop bien !

L'intérieur en jetait un max : le plafond, peint plus sombrement et éclairé avec doigté, semblait à la fois proche et trop lointain pour être vu. Une sorte de vaste voile opaque au dessus de la tête de nos deux aventuriers. Des arches moussues, usées et humides recevaient le scintillement verdâtre d'une eau dont on préférait ignorer la composition exacte, même si cela ne relevait au final que de l'artifice rondement mené. Une sorte de quai, constitué de pavés irréguliers dont la pierre en toc n'avait de minéral que l'apparence, amenait à une sorte de petite barque abimée avec une lanterne n'éclairant qu'un pauvre mètre autour d'elle. S'y dirigeant, s'assurant que la demoiselle le suivait bien, il l'inviterait à monter d'abord avant de la suivre. Une sorte de mécanisme de sécurité semblable à une barre de fer les empêchant de tomber serait alors installé, les bloquant à l'intérieur de la petite embarcation... pour le tour complet : il existait plusieurs formats et Heziel, souhaitant faire bonne impression, avait opté pour le parcours le plus long. Ils en avaient pour un moment.

Ce n'est qu'une fois que la Olsen, bien malgré sa volonté, serait coincée dans ce guet-apens qu'il dévoilerait naïvement son inadéquation avec l'homme qu'elle recherchait. Tandis que les rails enfoncés dans l'eau commenceraient à les amener, inexorablement, vers les tréfonds de cette énorme maison hantée revisitée, il se présenterait tout simplement.

- Au fait, je suis Heziel ! Enchanté ! Quel est votre nom, mademoiselle ?



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Dim 17 Fév - 16:40

Nous portons un masque [3]


C’était, loin d’être rassurée, que la Olsen suivit son guide. Ce hors-la-loi correspondait bien à la description qu’on lui avait faite, mais elle n’était pas persuadée qu’il serait à même de lui donner exactement ce qu’elle voulait au « trou à rats » à présent. Ce n’était sûrement qu’un intermédiaire parmi tant d’autres, pour cette foire. Elle gardait son masque sur le visage, et quand elle entra dans le wagon fut déçue de se dire qu’ils allaient sûrement en avoir pour un moment avant d’arriver jusqu’à leur destination. Mais alors qu’elle commençait à se dire que ses frayeurs n’étaient pas terminées, elles ne firent que commencer.

- Hein ?

Heziel. Grand bien lui en f… Et merde, merde, merde. Elle s’était trompée. La barre de fer bloquait ses mouvements. Elle retira son masque, le posant à côté d’elle, sa mine totalement déconfite. Ce n’était pas son contact, il n’avait rien d’un hors-la-loi, c’était juste un costume. Elle pouvait le comprendre maintenant rien qu’à ses traits d’abruti.

- Tu n’es pas… Oh, ça veut dire que nous n’allons pas au bon endroit…

Elle soupira. Le trou à rat, c’était pourtant bien ce lieu. Il s’agissait d’un malentendu, et elle ne pouvait s’en défaire. La barque s’était mise en route, et il n’y avait personne devant eux, ni derrière eux. C’était encore un traquenard : un mètre de visibilité. Ça lui apprendrait à être crédule comme ça. Il fallait qu’elle soigne cet aspect-là de sa personnalité : sauter aux conclusions, alors qu’elle était censée être la plus lucide de Génésis, tout cela grâce à son fruit du démon. Fruit du démon. Eau. Encore une erreur qu’elle venait de commettre. La demoiselle déglutit.

- Je suis… Lidy.

Elle dévoila son véritable prénom. Qu’importe. Il n’était ni l’allié, ni l’ennemi. Ce n’était qu’un pauvre garçon qui venait de lui faire perdre du temps dans sa mission. Elle allait devoir ressortir rapidement.

- Combien de temps devrait durer ce trajet à ton avis ?

Elle aurait sûrement une mine atterrée en entendant la réponse, et encore plus si cela dépassait la demi-heure. Ce trajet était prévu pour durer, et pour provoquer des frayeurs. Et elle allait être servie : à peine eurent-ils quitté leur lieu de départ que déjà une ombre se profilait sur le côté. Elle frémit. « Ce n’est pas réel. Ce n’est pas réel. Ce n’est pas ré… ». Ses traits devinrent blêmes quand elle comprit de quoi il s’agissait : un fantôme passa au-dessus de leurs têtes. C’était une illusion d’optique, mais elle ne vit pas ainsi, et un hurlement sortit de sa bouche tandis qu’elle attrapait, agrippait la chose la plus proche d’elle : le pauvre bras de son tortionnaire malgré lui.

Quand elle se rendrait compte après quelques longues secondes de ce geste, elle se séparerait brusquement de lui et toussoterait sans vouloir admettre ce qu’elle venait de faire. Cela promettait d’être long et terrifiant, d’autant plus si les personnes qui avaient conçu ces machines étaient d’une inventivité remarquable. Et c’était à n’en pas douter une réalité…

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Mer 27 Fév - 11:59




Mauvais endroit, mauvais moment ?


- Hmm ?

Il n'avait pas entendu la référence de sa compagne d'infortune au fait de ne "pas aller au bon endroit", mais il était certain de l'avoir entendu parler : mince, il devait prêter plus d'attention à ce qu'elle lui racontait... mais ce n'était pas évident, avec la classe indéniable de l'attraction ! Se tournant finalement vers elle, il se concentra sur la discussion et découvrit le nom de la demoiselle aux cheveux bleutés.

- Lidy... c'est un joli prénom.

Souriant naïvement, il pensait simplement ce qu'il disait. Il observa quelques instants le décor, puis la fluette qui venait de retirer son masque, tour à tour. Il ne fallait pas être un expert pour voir qu'elle n'était pas très à l'aise... après tout, elle avait été surprise à l'entrée ! De fait, il n'était pas incohérent de parier qu'elle risquait fortement d'en voir de toutes les couleurs lors de ce "petit" trajet... ce fut rapidement confirmé, lorsque la silhouette montée de toute pièce d'un esprit apparut dans leur sillage, provoquant une réaction trépidante de la belle. Cette dernière s'accrocha fermement à son bras, si bien que le Coffe en fut abasourdi : elle avait de la poigne, lorsqu'elle était effrayée ! Bien qu'elle rétablit rapidement la courte distance les séparant, le noiraud comprit une chose : il ne pouvait nier que ça avait eu quelque chose de plaisant... et c'était l'occasion de jouer les chevaliers protecteurs. Néanmoins, restait à répondre à son interrogation première... qui, à n'en pas douter, semblait cruciale pour elle. Taquin, le brun sembla réfléchir quelques instants lorsque la Olsen lui demanda combien de temps le trajet durerait. Une idée germa dans son esprit, assez naturellement.

- Eh bien, la fête va se prolonger tard, sur plusieurs jours, et différents formats ont été proposés... moi, j'ai pris celui de quatre heures !

Il laisserait quelques secondes s'écouler, durant lesquelles la mine déconfite de Lidy risquait, s'il avait visé juste, de s'accentuer fortement. L'idée n'était cependant pas de la faire paniquer, bien sûr, aussi reprendrait-il très vite la parole en ricanant légèrement. Ah, bénie fut cette époque où son esprit était encore farceur et plein de légèreté !

- Je rigole ! On devrait en avoir pour une trentaine de minutes, environ. Mais quelque chose me dit que ce sera plus qu'assez, pas vrai ?

Comme pour venir supporter sa théorie, un claquement sec arrêta la progression de leur petite barque rapiécée d'apparence, au beau milieu de ce qui semblait être un couloir d'égout assez bas de plafond. Ils ne pouvaient pas bouger, ils manquaient d'espace, la visibilité était quasi-nulle... heureusement que tout ça, c'était du toc ! S'il avait eu du pop-corn, Heziel s'en serait sans doute emparé pour attendre la suite, qui ne tarda pas à s'inviter à la fête : dans le noir, devant eux, un grognement surnaturel retentit et se réverbéra sur les faux murs, alors que deux yeux rouges apparaissaient dans l'ombre. Par un jeu formidable de lumière, un visage terrifiant suivit bientôt, avant qu'un nouveau claquement ne se fasse entendre. La vache, c'était super bien fait ! L'illusion d'une charge de la bête non identifiée, provoquée par un jeu de lumières et une série de Den Den savamment placés, ne manquerait pas de faire sursauter le coeur de la demoiselle si elle y était réceptive. De son côté, le brun vivait plutôt ça comme des montagnes russes : c'était géant !

En parlant de ça...

La barque pivota soudainement, comme pour éviter l'attaque virtuelle de la bête factice, avant d'accélérer vers une grille qui s'ouvrit juste à temps pour les projeter dans un nouveau canal, cette fois descendant... le rebord approchait à grande vitesse, le rugissement continuant dans leur dos... la descente promettait d'être rapide et sans pitié ! La voix enthousiaste du Mormoilnien résonna dans le conduit. Il s'amusait déjà comme un fou !

- Prête, Lidy ?

Puis, finalement... le début de la chute.



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Mer 27 Fév - 16:12

Nous portons un masque [4]


Quelques minutes plus tôt, plus loin sur l’île de Mormoilnoeud

- Chef, l’indic’ est pas venue.
- Comment ça ? Putain, c’était censé être une grosse transaction.


L’homme au bout du fil semblait rager mais l’idiot en tenue de pirate ne réagit pas. Il n’avait pas compris l’enjeu de tout cela, et s’il devait bien avouer quelque chose, c’était qu’il s’amusait beaucoup trop pour cela. On savait que la demoiselle portait un masque de renard, tant et si bien que le réseau fut mis en action pour la retrouver, à l’inverse de ce qui était prévu à l’origine. Le Boss voulait cet accord avec Némésis. Certes, tout allait de travers à présent, mais il comptait bien retrouver sa piste… Et il fut surpris d’entendre dire qu’elle avait pénétré le « Trou à rats ». Comment ça se faisait qu’elle soit déjà au bon endroit avec quelqu’un ? Le mystère restait entier, mais qu’importe, ils allaient bientôt pouvoir la voir en direct live.


Ce fut une mine sidérée, torturée qui apparut aux yeux du Heziel qui s’empressa de rectifier le tir. Elle avait failli suffoquer, mais son teint était redevenu sensiblement clair quand la vérité s’était dévoilée. Un air inquiet, elle se demanda où se trouvait la vérité, mais elle lut qu’elle se trouvait là, devant ses yeux, sous le nom d’Heziel Coffe. Il n’était que taquin, et les joues gonflées la demoiselle détourna le regard. Quand avait-on joué avec elle à ce point la dernière fois ? Les hommes s’en mordaient les doigts en général, mais lui… Il avait quelque chose d’enfantin. Finalement, d’un simple signe de la tête, elle acquiesça et se concentra, en appréhendant, sur les prochaines projections fantasmatiques.

Elle ne tarda pas à arriver. Ses yeux rouges n’étaient pas terrifiants, mais l’image qu’on leur renvoyait était sensiblement similaire à celle d’un fantôme. A nouveau, un cri terrifié résonna. Lidy ferma les yeux, espérant que l’image disparaisse quand elle les ouvrerait, mais une barrière s’ouvrit et le mouvement de leur paquebot la perturba. Elle avait été si concentrée sur le fantôme qu’elle n’avait pas réussi à se préparer à ce qui arrivait : un mouvement brusque du navire qu’elle encaissa sans problème, une chute qui ne la terrifia pas le moins du monde. En effet, sa peur provenait des fantômes, mais elle ne craignait presque rien d’autre si ce n’était la mort elle-même, la mort et l’oubli.

- C’est assez sim-

Une main sortit de l’ombre et sembla prête à attraper Heziel. Instinctivement, elle tira le jeune homme tout contre elle, mais les barres de fer l’en empêchèrent. Cela résulta par un mouvement de son propre corps contre celui du local. Un air surpris, elle vit la main se retirer, mais elle savait à présent : quelqu’un essayait de les attraper. Cette attraction était déjà terrifiante, elle promettait de devenir dangereuse.

Plus loin, à quelques mètres de là, alors que Lidy Olsen essayait de retrouver son calme et retira sa main de celle du Coffe, s’il ne l’avait pas empêchée de faire ce geste anodin, une ombre se projeta au plafond et grandit, grandit, grandit… Promettant d’engloutir tout ce qui se trouvait devant. Elle eut le sang glacé par cette information, et tandis qu’elle tentait de se protéger avec ses bras, elle dévoila un air magnifique : celui de la demoiselle qui combat ses peurs sans réussir à les vaincre.

Quand l’ombre laissa place à une nouvelle projection qui traversa cette fois-ci les deux participants, cela glaça le sang de la Olsen qui commença à laisser échapper une larme. Elle était vraiment très mauvaise avec cela. Pendant ce même temps, une nouvelle main s’approcha du Coffe, cette fois-ci plus à même de le décrocher de son siège grâce à une force spectaculaire.

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Mer 27 Fév - 16:53




Mauvais endroit, mauvais moment ?


- Yaaaaahoooo !

S'il avait peur ? Non... mais qu'est-ce qu'il s'amusait ! La descente s'était avérée pleine d'adrénaline : conformément à ses attentes. Il y en avait plusieurs, dans ce grand complexe qui ressemblait de l'extérieur à un gigantesque bâtiment. Il espérait que les prochains virages à sensations seraient aussi frissonnants que celui là. Lidy, de son côté, sembla étonnamment calme lorsque leurs estomacs se firent naturellement la malle sous les effets de la gravité : elle était donc effrayée par les animations, mais pas gênée par la vitesse et les déplacements... intéressant ! Heziel était assez curieux. Cette demoiselle avait l'air assez singulière et, la proximité faisant, il ne pouvait s'empêcher d'être piqué dans son intérêt.

Elle sembla prête à dire quelque chose, mais se ravisa finalement et se serra tout contre lui, assez vindicativement. Interloqué, il regarda aux alentours : il avait peut-être loupé un fantôme ? Ils semblaient faire beaucoup d'effet à la demoiselle aux cheveux d'azur. Cela faisait deux fois en peu de temps... il tenta d'y réfléchir et se heurta à un mélange d'incompréhension, de naïveté et de théories fantasques. Peut-être qu'il y réfléchissait trop. Son père lui avait toujours dit de laisser les choses se faire, avec les femmes : que tenter de les comprendre, c'était prendre des risques. Il n'avait jamais compris et, en toute transparence, il n'avait jamais été foncièrement d'accord : cependant, par un savant mélange de confiance familiale, d'éducation et d'ignorance, il se contenta de suivre cette sacro-sainte instruction. Aussi laissa-t-il la Olsen faire, se montrant relativement réceptif.

Puis, la lumière mourut complètement devant eux. Où étaient-ils ? Oh oh oh, c'était super. Décidément, ils avaient fait un sacré remake ! De son côté, Lidy adopta une posture qui laissa le Coffe songeur : il avait toujours eu un faible pour le "côté princesse" des femmes. Encore plus lorsqu'il ne crevait pas les yeux. En l'occurrence, les oscillations entre sursauts soudains et composition placide de la demoiselle ne le laissaient pas indifférents, surtout si elles menaient à ça. Instinctivement, il mit une main sur son épaule, s'apprêtant à la rassurer : il n'y avait même pas réellement réfléchi.

- Ne t'en fais pas, c'est juste une...

Un nouveau fantôme passa, et l'expression de son interlocutrice changea du tout au tout : elle qui était déjà blême devint livide et, dans un mouvement saccadé, elle laissa une larme perler le long de sa joue. Un profond malaise s'empara alors de Heziel, qui ne s'attendait pas à une réaction aussi vivace : certes, l'attraction était faite pour jouer avec les peurs, pour provoquer des frissons de terreur, pour faire sursauter... mais tout ça n'avait pas d'intérêt sans un bon rire de soulagement. Une chose que la jeune femme, de plus en plus atterrée par l'expérience, semblait ne pas être en mesure de s'offrir. Il se pencha vers elle, un air réellement inquiet sur le visage, et reprit d'une voix plus sérieuse et sereine. Certes, elle lui avait demandé de venir ici... mais quelle idée avait-il eu de prendre le plus long trajet, sans même réellement savoir si elle était taillée pour ça ? Cela lui apprendrait à agir sans réfléchir.




- Tu vas bien ? Tu veux qu'on sorte ? Ils ont du prévoir ce genre de chose. Attends, laisse moi...

Alors qu'il commençait à trifouiller la barre, qu'il préférait éviter d'avoir à disloquer, une poigne ferme s'empara de son biceps gauche et le tira avec une force surprenante hors de la barque. Hoquetant, il s'accrocha par réflexe à la barre, qui grinça sous la tension qui lui était infligée. Il tint néanmoins bon et, s'il fut agréablement surpris du réalisme de la chose, il se rendit vite compte que plusieurs éléments clochaient : premièrement, il était actuellement à moitié sorti de la barque, alors quelqu'un de normal aurait tout simplement été arraché à cette dernière. Deuxièmement, la main ne le lâchait pas... troisièmement, il aurait du être capable de rester entièrement dans son siège, considérant sa propre force.

- Heu... hey, temps mort ! La demoiselle ne se sent pas bien !

Pas de réponse, seulement une nouvelle traction douloureuse. Quelqu'un essayait clairement de le sortir de là : ça aurait pu être amusant en d'autres circonstances, mais là, ça devenait consternant. Grognant, il parvint à revenir à son siège, non sans déployer un effort notable, avant de se décider : il s'arrangerait avec les gérants plus tard. Là, quelqu'un avait besoin de lui.

- Bon, ça suffit, là !

S'emparant de la main au niveau du poignet, il augmenta rapidement sa poigne sur l'articulation, jusqu'à faire lâcher son assaillant mystérieux. Son retour à sa place se fit avec pertes et fracas, et il se cogna la tête dans le procédé, sans trop de mal cependant. Se frottant le haut du crâne tandis que la barque reprenait précipitamment son chemin, non sans remous et secousses qui ne manqueraient pas de rendre l'expérience un peu plus corsée, le noiraud souffla : bon sang... qu'est-ce qui venait de se produire, exactement ? Il se gratta les cheveux, faisant fi de la légère douleur de tête qui l'accablait, avant de reprendre ses esprits.

- Outch... pas cool... ça va ?

Cette attraction devenait un peu trop réaliste à son goût...


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Mer 27 Fév - 19:09

Nous portons un masque [5]


L’expérience prit une tournure à nouveau dérangeante quand la Olsen se rendit compte que la main dans les ténèbres vint tenter d’arracher son preux chevalier qui décolla peu de son siège. De toute évidence, ce garçon avait du répondant, suffisamment pour inquiéter un membre d’un cartel qui ne savait pas se tenir. Elle eut peur un instant qu’il ne soit en danger, mais fort heureusement tout se passa comme sur des roulettes… Ou sur une barque. Un grincement se fit entendre au loin, comme si quelque chose bougeait, et la demoiselle sentit que l’attraction devenait de plus en plus tordue. Est-ce qu’on tenterait d’avoir sa peau ici ? Elle en doutait fort. Ils essayaient sûrement d’isoler ce garçon qui n’était pas des leurs, dès lors qu’ils avaient remarqué qu’elle n’était pas seule. Ils voulaient l’avoir elle, seule, dans le but de marchander. Peut-être était-ce leur plan à l’origine : la kidnapper et l’obliger à répondre à leurs attentes. Quelles pourritures… Ils n’avaient aucune forme de loyauté.

Elle se contenta cependant d’afficher un air soulagé, puis remarqua quelque chose d’étrange. Les animations s’étaient arrêtées, et les décors devenaient désuets, pauvres. Ils avaient l’air d’être sortis tout droit du passé : certains prenaient la poussière, des mécanismes ne fonctionnaient pas… En soit, tout avait déconné avec le temps.

- C’est l’ancien trajet, déclara-t-elle en frissonnant. Nous sortons du parcours principal, c’était sûrement ça le bruit…

Et effectivement vint un moment où les murs devinrent lisses et où les échappatoires s’évaporèrent comme le rêve de renoncer à cette vie de crapule. Elle fronça les sourcils et remit son masque, puis se tourna lentement vers Heziel. Le jeune homme était d’une énergie débordante, il était charmant et plein de retenu. C’était un milieu où il ne devait pas être mêlé, mais il avait rencontré la mauvaise personne au mauvais endroit. Elle ferait tout pour qu’il n’en subisse pas les multiples conséquences.

- Joue le jeu, dit-elle simplement avec un soupçon d’angoisse qui lui serrait la gorge.

C’était regrettable qu’elle ait regagné son humanité à ce moment-là. Elle avait fait des choses, des choses dont elle n’était pas fière, mais ça, c’était à l’encontre du moindre de ses principes. Elle gageait par loyauté, et eux se permettaient de faire un écart significatif à cette affaire. Fermant les yeux, elle pria un court instant avant de passer une main sur le bras de Heziel pour lui prendre la main à nouveau. Quand la lumière se fit, une demi-douzaine d’hommes se trouvait ici, le regard concentré et des armes en main.

La Olsen sentit sa barre se soulever. Elle se leva et invita son camarade à en faire de même, avant de mettre un pied sur la rive. D’un geste qu’elle voulait sensuel, elle alla une fois sur le sol ferme, se coller contre le torse du gaillard. Elle y mit une main fine, qui pourrait être interpréter comme de la crainte si on ne comprenait pas la situation, mais qui était en réalité une manière d’empêcher les hostilités de commencer.

- Tu étais censée venir seule, Rêveuse.
- J’ai ramené mon copain après avoir compris que votre stupide recrue ne me mènerait pas là où je voulais dans les temps. Et j’ai réussi, apparemment.


Elle resta un instant coite, avant de tenter de reprendre. Elle fut très rapidement interrompue par la personne en face d’elle qui semblait bien plus fort que le Coffe. C’était un crâne rasé, tatoué, qui avait l’air de chercher à en découdre.

- J’y crois pas, prouve-le, lâcha-t-il avec un rire rauque.

Lidy regarda le jeune homme, mais elle était clairement plus entreprenante que lui. D’un geste simple, elle mit une main sur son visage et releva une partie de son masque, cachant son front et sa chevelure à ce moment-là. Alors, ses lèvres se dirigèrent vers celles de Heziel pour lui voler un simple baiser.

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Mer 27 Fév - 20:00




Mauvais endroit, mauvais moment ?


- L'ancien... trajet...

Ce n'était pas normal, et les éléments anormaux semblaient s'accumuler rapidement. Effectivement, maintenant qu'il y pensait, leur trajet n'avait rien eu de naturel depuis son empoignade dans les ombres : les murs semblaient décrépits, usés. La poussière recouvrait les environs et lui titillait la gorge. Une odeur de renfermé emplissait l'espace clos qui les entourait, ajoutant  à l'oppression. Un dysfonctionnement mécanique, peut-être ? C'était peut-être ça, oui... ou peut-être tout autre chose. Heziel avait beau être naturellement optimiste et enclin à la naïveté, il avait déjà vécu son lot d'événements difficiles et d'aventures dangereuses : et celle là commençait à rassembler différents critères clés de la catégorie "ça sent pas bon". Primo, il n'avait pas d'explication tangible. Deuzio, il avait failli être blessé, à tout bien y réfléchir. Tertio, personne ne semblait enclin à leur apporter de l'aide : le manège ne s'arrêtait pas. Un claquement le ramena à lui tandis que la barque crissait sur son rail distordu, dans une eau désormais quasiment absente qui ressemblait plutôt à de la bouillasse.

Lidy s'équipa à nouveau de son masque, tandis qu'Heziem observait les alentours. Effectivement, à tout bien réfléchir, ça lui disait quelque chose... du moins, de ce qu'on avait pu lui raconter. Les vieilles voiturettes colorées s'écaillaient sous les affres du temps, tandis que les murs défraîchis voyaient les tapisseries biquer sous forme de boucles décollées et mollassonnes. Puis, les murs se firent plus lisses à nouveau, alors que l'obscurité continuait de régner. La belle aux cheveux océaniques lui glissa alors une directive qui le laissa perplexe.

- Jouer le jeu ?

Jouer le jeu de quoi ? Savait-elle quelque chose qu'il ignorait ? Il n'eut pas réellement le temps d'étudier la question, même si cette phrase de la Olsen le laissa dubitatif. Il sentit la main douce et féminine de Lidy se glisser dans la sienne et, s'il ne se montra pas réfractaire au contact, il mit malgré tout deux secondes avant d'acquiescer à cette union en y joignant une pression légère. Il ne savait pas ce qui se passait ici, mais il ne comptait pas se laisser faire. Les événements se déroulaient trop vite pour qu'il puisse réellement y trouver des explications jusque là cachées : pourtant, s'il avait eu le temps de recoller les pièces du puzzle et s'il avait été plus attentif, il aurait pu commencer à comprendre que la demoiselle trempait dans des affaires étranges de lui même : la vie s'en chargea pour lui.

Lorsque les lumières jaillirent à nouveau des vieux spots poussiéreux, six hommes dont l'apparence ne donnait pas envie de s'en faire des amis se tenaient là, armés et visiblement pas désireux de s'installer pour le thé. Le corps de Heziel se tendit : c'était une réaction naturelle, surtout pour un homme comme lui qui avait appris à reconnaître le danger et s'y préparer. La partie innocente de son être fit place à celle, plus pragmatique, du combattant formidable qu'il serait amené à devenir. Pour l'heure, personne ne bougeait. Ils avaient l'initiative... mais visiblement, l'idée n'était pas de combattre. Circonspect, il suivit la bleutée lorsqu'elle se libéra de la barre, ou plutôt lorsqu'on les en libéra : ces inconnus pilotaient visiblement le circuit d'une main de maître. Ses pas l'amenèrent hors de la barque, non sans lui apporter un semblant de réconfort, de sécurité : il était désormais en pleine mesure d'utiliser ses jambes pour se défendre ou fuir, deux actions qui lui étaient très difficiles auparavant... voire même impossibles. Si les choses tournaient au vinaigre, il pourrait au moins se défendre proprement.

Il n'objecta pas, à aucun moment : il fit ce que la demoiselle attendait de lui, conscient que se la jouer rebelle ne lui apporterait rien. Rester sur ses gardes, comme un félin prêt à bondir, restait la meilleure des choses à faire. Il n'était plus aussi absolu que quelques instants plus tôt, mais Lidy semblait tout aussi appréhensive de cette tournure des événements que lui. Il n'avait, pour l'heure, pas de raison de lui faire faux pas... aussi la laissa-t-elle jouer son petit manège, non sans transposer sur son faciès l'air de tension évident qui régnait : une chance pour lui, ça pouvait passer pour un comportement tout à fait naturel, entre criminels. Un monde qu'il ne connaissait qu'assez peu, à l'époque.

"Rêveuse" ? Quel était ce code étrange ? Elle était censée venir seule ? Elle n'avait pas trouvé son contact ? Tandis que le silence appesantissait les environs, le noiraud commença à relier les éléments entre eux. Elle voulait aller au trou à rat... elle voulait savoir combien de temps le trajet durerait... elle connaissait, au moins de très loin, ces hommes. Que lui voulaient-ils ? Dans quoi s'était-il encore fourré ? Alors qu'il tentait de se situer dans tout ce bordel, la provocation du mastard d'en face résonna, clairement, et il le fixa avec insistance. Il ne l'aimait pas... pas du tout. Il n'eut pas le loisir d'approfondir les raisons de ce sentiment viscéral : la demoiselle l'attira légèrement à lui, relevant une partie de son masque. Il vit ses lèvres s'approcher et eut un instant l'envie de reculer, trouvant que tout cela allait définitivement trop vite. Pourtant, il se laissa finalement faire, malgré un petit soubresaut quasiment imperceptible : il devait jouer le jeu.

C'était doux. Doux et agréable. En d'autres circonstances, il aurait volontiers partagé un moment de cet acabit pendant un peu plus longtemps. Instinctivement, il plaça une main dans le dos de Lidy. Ou était-ce calculé ? Nul ne le savait réellement, peut-être pas même lui, qui n'était pas vraiment préparé à une telle surprise. Finalement, leur étreinte dû toucher à sa fin, car l'urgence de la situation balaya tout l'aspect positif de ce court échange. Retirant doucement sa main du dos de la demoiselle, il se tourna vers le gars au crâne rasé, ne pouvant retenir une remarque qui signifiait clairement qu'il n'était pas impressionné.

- T'es content ?

Il commença alors à détailler ces gaillards, un à un. Il le sentait mal. Vraiment mal. Il ne savait pas ce qui se tramait, il ne savait pas ce que Lidy lui cachait. Tout ce dont il était à peu près certain, c'était qu'elle n'était pas contre lui... mais même ça, ça restait à découvrir. En tout cas, il devait en apprendre plus sur ses ennemis, sur ce qu'ils étaient capable de faire : il détaillerait donc chaque arme, chaque posture, chaque cicatrice. Chaque élément capable de lui en apprendre un peu plus sur ce qu'il aurait à combattre en cas de pépin. Du reste, il était bien trop perdu dans ses spéculations pour être d'une quelconque aide dans les négociations qui risquaient de débuter. "Les femmes, c'est dangereux" disait Papa. Ouaip... il était peut-être plus clairvoyant qu'il n'en avait l'air...



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Mer 27 Fév - 21:07

Nous portons un masque [6]


Finalement, c’était d’autant plus étrange que c’était agréable. Heziel… Il était gentil. Contrairement à tous ces hommes qui lui écrasaient les lèvres, à tous ceux qui lui attrapaient goulument le visage comme s’ils espéraient l’aspirer, elle, avec sa salive, lui était… vraiment charmant. Elle rougit et rebaissa son masque tandis que le jeune homme fut le seul qui put voir la couleur occuper ses joues. D’un air satisfait, l’homme en face d’eux s’avança, comme pour les menacer, mais il sentit une tension s’échapper de la Olsen et comprit qu’il ferait mieux d’arrêter de jouer avec le feu. Ce sentiment qu’il ressentait, c’était jamais bon il était peut-être à deux doigts de faire foirer leur plan.

- Bien… On va voir le patron. La prochaine fois, tiens-toi en à ce qu’on a dit.
- Oui… Bien sûr,
fit elle sur un ton sec.

Cette fois-ci, elle prit les devants, se rendant en direction de l’endroit qui n’avait pas encore été indiqué mais sans éprouver la moindre difficulté. Elle pourrait bien justifier cela par un Haki, ou quelque chose dans le genre, si on lui posait la question. A vrai dire, personne ne le fit puisque personne ne remarqua le léger décalage entre les mouvements de l’homme et ses mouvements à elle. Ils étaient trop concentrés sur leur mission.

Comme si elle était toujours en avance, elle abandonna un instant le Coffe qui fut approché par des hommes de main. Si elle s’approcha un peu trop du crâne rasé, celui-ci ne le commenta pas. Il n’était pas vraiment dérangé par la proximité des femmes masquées, même si celle des femmes tout court le gênait.

- Touchez à un cheveu de mon ami, et toute votre organisation disparaîtra dans les flammes de l’Enfer. Compris ?
- Ou… Oui.


Il déglutit. Les rapports de force s'inversaient rapidement. Elle lui laissait un mauvais pressentiment, et s’il n’avait pas acheté ce chaste baiser, il ne reviendrait pas dessus. Pour le bien de l’arrangement, et le bien de ses hommes. Leur patron les attendait de toute façon, il fallait mettre la demoiselle dans de bonnes dispositions. Némésis avait largement les moyens de mener une vendetta contre leur cartel.

Quelques secondes de silence s’écoulèrent pour les deux meneurs de rangs, quand soudainement Lidy se retourna d’un geste féminin, faisant bouger ses hanches avec beaucoup de grâce. Elle lâcha un petit signe de la main à Heziel avant de le rejoindre. Sa façon de s’approcher était déterminée : allait-elle tenter de lui arracher un de ses somptueux baisers ? Loin d’elle cette idée. Au contraire, elle s’était laissée amadouée par cet homme, mais elle n’en oubliait pas sa mission qui passait par-dessus tout.

- Veuillez m’excuser, j’aimerais dire un mot à mon ami. Continuez d’avancer.

Le crâne rasé accepta sans dire mot, et fit avancer ses hommes. Quand ils furent assez loin, elle remonta un peu son masque.

- Je m’excuse de t’avoir mêlé à cette situation. Je… ferai en sorte de finir tout cela rapidement. C’est un accord commercial, mais ce qu’ils vendent est peu conventionnel. Des armes, principalement, pour certaines populations d’East Blue. Mes amis à Némésis m’ont envoyé ici. Si les choses tournaient mal, je les contacterais. Alors ne te mets pas en danger. D’accord ?

Elle savait qu’elle pouvait lui demander les choses et qu’il les dirait sûrement telles qu’il les pensait. Qu’importe, elle lit quand même dans ses pensées pour s’assurer qu’il ne ferait rien de stupide, et surtout s’il ne comptait pas faire foirer son affaire. A la fin de la journée, ces hommes seraient de toute façon morts.

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Mauvais endroit, mauvais moment ?


Une hache. Dangereuse, mais lourde. Un peu freluquet, l'homme qui la maniait pouvait facilement être emmené dans ses mouvements. Dans un endroit clos et relativement bas de plafond, ça pouvait devenir un désavantage colossal. Deux des malfrats portaient de simples couteaux de boucher, armes rudimentaires mais efficaces dont il faudrait se méfier. Le baraqué, lui, n'était pas spécialement armé : il semblait faire confiance à sa carrure, comme beaucoup de types de son acabit. Le cinquième, d'une stature relativement endomorphe, faisait dans l'artisanal avec une sorte de vieux marteau rouillé auquel Heziel n'aurait pas fait confiance pour enfoncer un clou. Par contre, le dernier avait une arme à feu : c'était problématique, très problématique. Si les choses tournaient mal... il devrait le neutraliser en premier, tout en évitant de se faire cribler de balles. Un art dans lequel il avait encore beaucoup à apprendre, à l'époque.

Néanmoins, il n'était pas plus apeuré que ça. Il connaissait ce genre de types, sans pour autant y avoir été confronté dans des situations aussi limpides que celle-ci. Il connaissait les excès de confiance, la surprise passagère provoquée par ce qu'il savait faire. Il savait qu'il n'aurait qu'une courte fenêtre pour agir en cas de pépin, mais il comptait fermement la saisir s'il devait le faire. Le souvenir du rose sur les joues de Lidy le déconcentra momentanément. Il souffla silencieusement et se reprit, suivant le mouvement après que le gars au crâne rasé eut changé d'avis : pour une raison qu'il ignorait, il avait reculé alors même qu'il semblait enclin à les approcher, l'air mauvais.

Lorsque la demoiselle au masque de renarde s'écarta de lui, le noiraud se retrouva rapidement entouré de l'aimante chaleur des bandits qui le lorgnaient d'un air mauvais. Avaient-ils peur ? Se sentaient-ils obligés de le ceinturer ainsi ? Etait-ce une marque d'inconfort, ou au contraire, la trahison d'un sentiment de supériorité ? Ils cherchaient sans doute à l'effrayer. Laissant une légère moue marquer son visage, il retira de cette approche une certaine aise : le pistolet était à sa portée. S'il devait agir rapidement, il pourrait commencer par là. S'en retournant vers la belle, qu'il voyait désormais de dos, des questions fusèrent dans son esprit. Qui était-elle ? Que voulait-elle vraiment ? Quels étaient les liens qui la reliaient à cette bande ? Et... lui, dans tout ça ? Comment le voyait-elle vraiment ? La dernière interrogation n'avait pas à être liée avec le reste, mais la situation la rendait critique. Pourtant, quelque chose lui disait de lui faire confiance. À défaut d'être serein, il n'était pas complètement confus.

Puis, après avoir glissé quelques mots à l'homme de main qui l'accompagnait, elle se retourna élégamment avant de revenir vers le cuisinier. Ce dernier plissa les yeux, ignorant ce qu'elle avait en tête, mais ses propos étaient clairs : elle avait visiblement un levier dans cette affaire, dont elle usait en toute transparence. Les brigands s'éparpillèrent, laissant les deux jeunes gens revenir à leurs moutons. Lorsqu'ils furent seuls, elle lui expliqua sommairement la situation dans son ensemble : de la vente d'armes ? Pour des populations d'East Blue ? Il n'aimait pas ça. Il n'aimait pas ça, mais l'heure n'était pas au cafouillage : s'il venait à présenter son point de vue sur l'affaire, une oreille trop attentive aurait aisément pu soulever sa mascarade. Par contre, ce qui l'inquiétait, c'était le fait qu'un accord de ce type soit effectué sur son île... Notebouque était sans histoire, calme, paisible. Certes, il y avait parfois des gredins, mais... pas de ce genre. Il l'observa d'abord avec des yeux relativement durs, qui suintaient la défiance, avant de soupirer. Qu'y pouvait-il ? Il était déjà là, alors autant essayer de rester dans les clous. Ce que Lidy pourrait cependant voir, c'est que sa volonté de se tenir tranquille aurait ses limites : si l'on venait à s'en prendre à lui, il ne se laisserait pas faire. Si l'on s'en prenait à elle ? Sans doute pas non plus. Et les pensées multiples de combats qu'elle pourrait lire, comme une couche sous-jacente de sa personnalité, lui confirmeraient qu'il savait un peu plus que se débrouiller, à minima. Les quelques évocations lointaines des prouesses physiques dont il était capable également.

- D'accord... je te suis, et je ne ferai rien tant que ça ne tourne pas au vinaigre. Mais je vais avoir quelques questions, par la suite.

Qui étaient ces types ? Que faisaient-ils sur Notebouque ? Ce genre d'échange était-il fréquent ? Némésis ? Autant d'interrogations muettes qu'il relégua au second plan, décidé à jouer le jeu encore un peu. Il craignait aussi qu'une erreur de sa part ne mette la population en danger : sa famille, si l'on venait à tracer tout cela jusqu'à eux. Il ignorait la portée de ce cartel étranger, mais il préférait ne pas la découvrir au dépens des gens qu'il aimait. Les couloirs défilèrent quelques instants, sans doute dans un silence de plomb si la bleutée venait à ne pas surenchérir dans la discussion. Finalement, ils arrivèrent dans ce qui semblait être une ancienne salle de contrôle, réaménagée et retapée pour l'occasion : les lumières étaient ici plus agréables, le sol propre et la pièce belle à l’œil. Une partie des mécanismes avaient été retirés, ce qui corroborait la théorie d'un vieux circuit abandonné. Heziel se souvint des quelques rumeurs parlant de financements louches : elles étaient certainement fondées...

- C'est là.

L'homme au crâne rasé grommela avant de les laisser avancer, tandis que les brigands se plaçaient aux quatre coins de la pièce. Ils n'étaient pas idiots... il regretta presque de ne pas s'être occupé d'eux plus tôt. Il n'avait plus le choix, maintenant. En face d'eux, un vieil homme aux allures de criminel de roman les invita d'un geste à s'approcher. Il était installé dans un fauteuil en cuir de bonne facture. Devant lui, une table basse sur laquelle quelques documents étaient posés le séparait d'un canapé rouge pétant, qu'il pointa du doigt.

- Installez-vous, Rêveuse.

Encore ce surnom... mais celui-ci semblait moins brusque que les autres. Ses vêtements, plus soignés, laissaient transparaitre sa position d'autorité. C'était l'homme important, dans cette salle, Heziel le sentait clairement. L'âge lui tirait les traits, le dotant d'une certaine sagesse. Il semblait austère, rigoureux. Malgré son comportement plus propre que celui des hommes qui travaillaient visiblement pour lui, le Coffe sentait quelque chose de dangereux émaner de lui. Il ne manquerait certainement pas de constater la présence malvenue du brun, mais le pugiliste laisserait ce genre de détail à sa compagne d'infortune.



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Mer 27 Fév - 22:47

Nous portons un masque [7]


Les pensées du cuistot ne laissèrent pas Lidy indifférente. Elle n’avait pas l’habitude qu’on pense à la protéger, du moins pas sans arrières pensées. Bien sûr, en étant récompensé par une petite sucrerie, n’importe quel animal pouvait faire de grandes choses. Cet homme semblait différent, il avait des intentions plus… simples. Elle ne rougit pas cette fois-ci, et si elle l’avait fait le masque qu’elle remit en place ne laisserait rien transparaître. En revanche, elle constata qu’elle aurait du mal à échapper à toutes les questions qu’il comptait lui poser. Là encore, ce serait sûrement difficile de les esquiver, et elle n’avait pas encore choisi quel mensonge elle sortirait, quelles larmes elle abattrait.

Quand ils arrivèrent dans la salle principale, suivis par un silence religieux, la demoiselle se posa sur le fauteuil tout en observant le mafieux avec un grand intérêt. Il était en train de la dévisager, de se demander ce qu’elle faisait avec cet « homme ». Il la croyait plus professionnelle, mais qu’importe, qu’il soit un garde du corps ou un simple habitant de l’île, il s’en fichait. Le contrat devait se faire pour qu’il puisse atteindre Némésis et rejoindre l’Organisation. Il voulait faire partie des hauts gradés pour pouvoir y imposer son commerce et multiplier ses profits grâce aux contacts formés là-bas. Ainsi, il n’avait compris comment fonctionnait Némésis, se dit la Rêveuse en soupirant intérieurement.

- J’ai déjà préparé les termes du contrat discutés avec votre Boss. Nous sommes ici pour finaliser l’accord. L’Apocalypse approche et nous sommes un peu pressés… Mais avant.

Il frappa dans ses mains, et une porte s’ouvrit. Il y avait à côté d’eux un animal rare, exotique : un lapin des neiges tout droit venu du Royaume de Drum. La demoiselle dévisagea l’animal qui avançait à petits pas, un collier au cou. L’homme eut un sourire malsain tandis que la Olsen comprenait la souffrance qu’avait vécue cette créature. Elle n’y accordait que peu d’importance, mais son acolyte devait y être beaucoup plus sensible. D’un geste simple elle alla donc consoler l’animal qui était à présent à sa portée.

- C’est un cadeau, un présent pour vous.
- Un présent n’est jamais gratuit dans ce milieu. Que voulez-vous ?


Question stupide : elle en connaissait la réponse. Avec un air concentré, elle écouta le laïus de cet homme qui dura une bonne demi-douzaine de minutes durant lesquelles une pression s’était installée dans le cœur de la bleue. Elle détestait par-dessus tout qu’on martyrise des créatures sans défense, en rapport avec son passé dans les ruines. Donnez une arme à chaque homme et ceux qui voudront suivre le combat suivrons… Mais la règle d’or était de ne jamais, au grand jamais, s’en prendre à un innocent, et surtout pas un faible. Elle détestait cela par-dessus tout : d’une certaine manière, c’était pour ça qu’elle était pour les laisser-pour comptes.

- J’entends bien vos paroles, sourit la Olsen une fois que son interlocuteur eut terminé. Je serais ravie de vous offrir une place là où vous le désirez, mais je ne suis pas seule décisionnaire. Je peux plaider votre cause auprès de…
- Appelez-les alors.
- Ce n’est pas comme cela que ça fonctionne.
- Appelez-les, ou il y passe.


Il pointa le noiraud avec un calme étrange. La demoiselle fronça les sourcils : elle allait devoir ruser, se montrer plus forte, mais elle eut surtout un mouvement de défense envers le futur pirate, mettant son bras devant lui.

- Très bien, sourit-elle finalement. Veuillez m’excuser.

Elle sortit son Den Den Mushi d’une poche intérieure de son habit et s’apprêta à appeler Némésis. Enfin, du moins, si quelqu’un daignait répondre. En attendant, le « parrain » eut une remarque à l’adresse de Heziel avec un pragmatisme terrifiant :

- Les femmes nous embarquent dans des situations incroyables… Ta petite-amie a du caractère, hein ?

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Jeu 28 Fév - 0:05




Mauvais endroit, mauvais moment ?


Les minutes s'écoulèrent, longuement. D'un œil mauvais, Heziel lorgnait les sous-fifres du caïd qui s'étaient étendus autour d'eux, bloquant les différents coins de la salle. Ils étaient prêts à faire usage de la force, prêts à bloquer les sorties. Ils attendaient de pouvoir se refermer comme un piège sur eux, comme des vautours sur une carcasse. Lorsque la créature étrange fit son apparition, penaude et sertie d'un collier rappelant celui d'un animal de compagnie pauvrement traité, Heziel vit sans mal dans les yeux de Lidy une lueur particulière. Il n'en était pas certain, mais... il la sentait touchée. Lorsqu'elle se leva pour aller encercler l'énorme lapin, dont il ignorait encore alors la provenance, de ses bras, il sentit que le geste n'était pas anodin. Il garda ses commentaires pour lui, mais ça enflait peu à peu : une colère noire, envers ces hommes qui ne semblaient rien respecter. Quel était le but de cette manœuvre ? Il le dépassait, assurément. Il n'était après tout qu'un cuisinier plus extraordinaire que la moyenne... il n'avait rien d'un diplomate, d'un commerçant de l'ombre ou d'un analyste confirmé. Mais cela ne l'empêchait pas de sentir cette mauvaise fibre dans les airs.

L'Apocalypse... un terme étrange. Parlait-t-il réellement d'une apocalypse au sens propre ? Cela ressemblait plutôt à un autre nom de code étrange. Mais ça restait choquant... inquiétant. Il tourna un regard, après tout, vers Lidy. Le contact de ses lèvres, cette étrange attraction, la façon dont elle traitait cet animal et dont elle l'avait traité lui jusqu'à présent... peut-être qu'il était biaisé. Non, il l'était, clairement. Mais... il avait du mal à la voir travailler pour un projet sordide, de son plein grès. Bon dieu, Lidy... dans quoi s'était-elle fourrée ? La question restait entière et, finalement, le monologue du gangster acheva de figer l'avis du noiraud dans le temps : c'était une raclure. Il était prêt à tout : pots-de-vin, rapt, meurtre, violences physiques et morales... tout pour faire monter la notoriété et la puissance de son empire malsain. Pendant un instant, le Coffe se demanda comment la bleutée allait réagir.

Le tact qu'elle déploya le fit frissonner.

Pourtant, ça sonnait faux. Il avait entendu cette même voix lui glisser des propos empreints d'une émotion particulière, et son ton sonnait creux. Elle abdiquait par politesse, par jeu, par intelligence pure et dure. Pourtant, le mafieux ne l'entendait pas de cette oreille : finalement, sa véritable nature éclata au grand jour lorsqu'une ultime menace envers le brun s'échappa des lèvres du bandits : il voulait des résultats, il les voulait tout de suite. Il était prêt à forcer pour ça. Il ne laisserait pas le rapport de force tourner en sa défaveur. Il n'était pas comme ses sbires, craintifs et incapables de prendre des décisions cruciales par eux-mêmes. Les yeux du Coffe se plissèrent, tandis qu'une unique pensée tournait dans sa tête : à la moindre émanation de danger dans les environs, il agirait. Que le Den Den réponde ou non, il agirait. Il ne laisserait personne tuer personne dans cette pièce, et le menacer lui était certainement la dernière des choses à faire pour l'intimider.

La Olsen, pragmatique, acquiesça et lança l'appel. De son côté, le Coffe s'attendait au pire. Malgré une posture plutôt détendue, les doigts croisés, les coudes posés sur les genoux et le buste penché vers le chef du cartel, il n'était pas impossible de voir la tension qui circulait dans son corps tout entier. Le Den Den sonna, plusieurs fois, dans le vide. La menace à peine voilée du leader lui parvint.

- Il faut croire qu'on s'est bien trouvés.




La sonnerie retentit, encore et toujours. Dans le vent. Les secondes semblèrent s'étirer dans le temps, tandis que le martialiste observait les environs. Puis, la dernière sonnerie vint à son terme... sans réponse. La menace de la demoiselle tombait à l'eau. Le soutien n'arriverait pas : dans ces conditions, ils étaient livrés à eux-mêmes...

- C'est dommage. Je pensais votre organisation plus proche de ses membres. Peut-être qu'un rappel à l'ordre leur donnera envie de décrocher, la prochaine fois.

Le cliquètement d'un pistolet qu'on arme lui parvint, sur sa gauche. Une chance, se dit-il : Lidy n'était plus dans la trajectoire du tir, malgré son geste défensif à son égard qui avait achevé de le conforter dans sa décision. Il était la seule cible, pour l'heure... tant que ça resterait ainsi, il s'en sortirait. Il le devait. Un pas de la part du tireur. Il voulait s'assurer de ne pas louper : il avait une chance. Ses mains se serrèrent. Le parrain sembla afficher un air entre déception et nonchalance. Puis vint le début d'un signe de main, destiné à enclencher la manœuvre morbide.

D'un coup de pied vif, Heziel percuta la table qui se trouvait devant lui, l'envoyant droit dans le mafieux. Il n'eut pas l'occasion de vérifier le résultat de son effort : il avait d'autres chats à fouetter. Il accentua son mouvement, glissant le long du canapé. Un tir retentit, avant qu'il ne se retrouve au sol, se récupérant habilement. D'un geste déjà expert pour quelqu'un de son niveau, il se remit sur pieds et agrippa le fauteuil : c'était lourd, mais loin d'être hors de sa portée. Il le fit violemment glisser au sol, jusqu'au tireur qui hoqueta, surpris. Se ruant sur lui, il lui asséna un coup sur l'arrière du crâne lorsque sa cible se retrouva percutée par le mobilier, se pliant vers l'avant. Le pistolet tomba au sol, trop loin de la poigne de son propriétaire, si ce dernier venait toutefois à être en mesure de le récupérer. Le cuistancier se retourna, alerte, juste à temps pour voir le manieur de hache lui sauter dessus. Comme prévu, la manœuvre fut bien maladroite et se solda en un échec retentissant lorsqu'il s'évada sur le côté, avant d'asséner un coup de pied puissant dans la mâchoire offerte. Un cri étouffé marqua l'impact, avant que le gringalet ne s'écroule.

- Ack !

Une pêche vint le cueillir en pleine arcade et l'envoya quasiment au sol, où il se récupéra avec une certaine adresse. Le type musclé : il était plus fort que la moyenne. Restaient les deux bouchers et leur copain charpentier, qu'il faudrait maîtriser aussi. Ses pensées se tournèrent vivement vers Lidy, qui était restée auprès de l'animal. Il releva la tête, un mince filet de sang dégoulinant de sa lèvre partiellement éclatée : il pouvait se les faire. Non : il DEVAIT se les faire. La brute, elle, l'approcha avec un sourire narquois.

- "T'es content", minus ?

Il n'avait pas idée qu'à quel point il avait raison, d'une certaine façon.



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Jeu 28 Fév - 11:54

Nous portons un masque [8]


Il n’y avait pas un nombre infini de réponses au danger. L’air absent pendant l’appel, Lidy se demanda simplement quelle serait la réaction du Coffe quand son coup de fil n’aboutirait pas. Car il n’aboutirait pas : Génésis ne répondait qu’à une certaine tonalité, à un certain nombre d’appels successifs dans le but de limiter les échanges. Chacun pour soi, et les urgences seraient bien gardées. Cela, la Olsen le savait, mais elle ne croyait pas que l’homme était capable de les envoyer au bûcher si rapidement, elle faisait juste preuve de bonne foi… Ce qui fut aisément inutile, puisqu’il engagea les hostilités à la seconde même où le silence s’imposa.

Tout dégénéra en une plate cacophonie. Heziel eut de nombreux mouvements salvateurs et avait fait une analyse de la situation qui leur valut à nouveau quelques secondes de répit, de survie. La table vola, et tout s’accéléra au point où la demoiselle n’arrivait plus à suivre. Elle frémit, se questionna mais ne resta pas inactive. Ce n’était pas une princesse en détresse qui attendait d’être sauvée. La brute semblait se diriger vers son camarade : très bien, elle ne serait pas de poids. Elle devait s’emparer de l’arme qui avait glissé sur le sol, et c’est ce qu’elle fit en un rien de temps.

Arborant l’arme alors que le combat s’écourtait contre le manieur de hache, elle assista impuissant à l’attaque qui prit la lèvre de Heziel. Elle allait gonfler dans les prochains jours : enfin, qu’importe, ils allaient survivre, c’était tout ce qui comptait. Elle allait renvoyer ce lapin à Drum, et elle ferait avec certitude leur fête à ces hommes. Pas devant Heziel. Elle ne devait pas briser leur innocence.

Deux coups de feu retentirent, brisant le silence tandis que le regard de la bleutée échappait à celui de son camarade d’infortune. Ce n’était pas ce qui était prévu à l’origine, ils avaient sous-estimé la gourmandise de ces hommes et tous devraient en payer le prix, à présent. Les épaules des criminels furent fauchés avec une précision approximative, mais ils furent incapables de tenir correctement leurs armes avec leur main directrice.

- Maintenant, ça va se passer tranquillement, fit elle en vérifiant le nombre de balles qui lui restaient. Soit vous abdiquez, soit vous payez le prix de votre impudence. Némésis récompense ses alliés, et détruit ses ennemis.

Elle sourit derrière son masque. Les menaces, ça fonctionnait souvent. Ce sourire s’effaça lorsqu’elle lut dans le baraqué qu’il n’en avait pas terminé avec eux, et ce n’était pas le patron qui avait encore du mal à se relever qui allait lui dire le contraire. « Et merde ! » pensa-t-elle avec un instant de lucidité. Heziel était encore en danger, et le lapin… Les deux hommes qui entouraient le grand gaillard n’étaient pas assez forts les inquiéter cependant. Il y avait encore une chance de victoire pour eux. Une victoire totale.

Comme s’il n’avait pas entendu, il s’avança vers le Coffe de toute sa carrure. C’était comme s’il attendait cela depuis qu’ils s’étaient rencontrés. La Olsen visa le grand gaillard et tira une balle qu’il esquiva sans difficulté. C’était sa dernière. Elle lâcha le pistolet au sol en grommelant, et vit des deux hommes s’approcher. Elle lisait leurs mouvements avant même qu’ils aient le temps de les effectuer.

- Je m’occupe d’eux, annonça la bleutée en s’avançant tranquillement vers les bouchers.

Le combat, ce n’était pas son fort, mais elle maîtrisait quelques techniques pour se défendre. Ce serait maigre, à l’image de son utilisation du pistolet, mais ça ferait l’affaire. Lorsqu’ils s’élancèrent sur Lidy, celle-ci bloqua les coups avec aisance et envoya le premier vers le sol. Le second tenta de la prendre de court, mais elle avait déjà anticipé son attaque et la stratégie qui allait avec. D’un geste simple, elle balança le gaillard par-dessus son épaule et lui écrasa la tête contre le sol, pas suffisamment fort pour l’assommer mais assez pour lui mettre des étoiles dans les yeux.

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Jeu 28 Fév - 16:09




Mauvais endroit, mauvais moment ?


Se redressant sur ses appuis, Heziel jaugea rapidement la situation. Le patron avait encore du mal à se remettre sur pieds : bien. Il avait mérité son coup de table, assurément, et il n'était pas dit que c'était le dernier... le tireur ne se relevait pas, visiblement séché par l'assaut vindicatif dont il avait été la cible. Le type à la hache, gigotant faiblement par terre, présentait tous les signes d'un K.O technique dont il revenait seulement avec une très grande difficulté. Restaient les deux types armés de couteaux, le gars avec le marteau et le colosse qui avançait désormais vers lui. En passant dans le sillage du canapé à moitié renversé et de sa victime, le noiraud constata que l'arme était absente... avant que deux coups de feu n'éclatent dans la pièce, calmant les animosités l'espace d'un instant.

Se tournant vers l'origine du tir, craignant un instant le pire dans un battement de coeur raté, le brun fut soulagé de constater que c'était Lidy qui tenait l'arme encore fumante. Elle savait se servir d'un pistolet ? Oh, et puis de quoi s'étonnait-il ? En premier lieu, il n'était pas réellement un exemple d'adéquation entre apparences et capacités... en second lieu, elle lui avait dévoilé les prémices d'un monde fourbe et dangereux, dans lequel chaque détail était autrement plus saisissant qu'une femme d'apparence fluette et innocente capable de viser avec une arme, de sang froid. Elle menaça clairement les hommes, appuyant à nouveau sur l'existence de cette fameuse Némésis, sur ce qu'elle pouvait faire pour les détruire. Elle tira sur la ficelle de l'intimidation, une nouvelle fois, maintenant qu'elle avait prouvée pouvoir se défendre... et que le Coffe, pour l'heure considéré comme quelqu'un la suppléant, s'était montré aussi punitif dans ses réactions. Peut-être que ça pourrait marcher, se dit-il. C'était sans compter sur le manque de lucidité barbare du plus musclé du lot.

Il s'approchait de lui, pressé d'en découdre. Malgré le dédain qu'il éprouvait pour lui, le cuisinier ne pouvait pas nier éprouver le même sentiment. La manière dont il les avaient observés, la façon dont il avait voulu jouer avec eux, les intimider, les menacer... il aimait ça. Il aimait faire mal à plus faible que lui-même et ça, Heziel ne pouvait pas le tolérer. Jamais. Alors qu'il vienne, se disait-il, brûlant d'envie d'en finir : qu'il vienne, pour mieux se faire rouler dessus. Le jeune homme ne savait pas exactement ce qui se tramait ici, mais une chose était sûre : s'il en avait l'opportunité, il s'assurerait que cette gangrène quitte son île, sans concessions possibles. Un nouveau coup de feu quitta le canon de Lidy, qui se dirigea tranquillement vers deux assaillants : le brun n'eut pas le temps de céder à l'inquiétude qu'une nouvelle mandale manqua de le percuter dans la tempe.

- Les gars comme toi, ça me débecte.

Il les détestait, ces hommes là. Ces fringants et chics types, qui s'attiraient naturellement les attentions des femmes. Oh, il ne connaissait rien de Heziel : il ne savait rien de sa vie passionnée de cuisine, de son inaptitude à trouver la bonne phrase lors d'un rencard au moment crucial, de ses faiblesses et de ses failles qui le rendaient plus proches du petit ami niais que du véritable séducteur. Mais son physique parlait pour lui : il était relativement beau garçon, fort, avec un tempérament solide. Cela lui rappelait toujours ce salopard... s'il n'avait pas existé, sa mère ne serait pas partie. Un beuglement de rage quitta sa gorge alors qu'il fonçait vers l'avant. Le Coffe fouilla dans une sacoche qui le ceinturait toujours avant de glisser entre les jambes de son grand opposant, jetant sa main droite vers le haut. Esquivant ainsi l'attaque, il se réceptionna dans une roulade tandis que le gros gaillard toussait et pleurait tout son saoul : une poignée de poivre en pleine figure, il n'y avait que ça de vrai pour déconcentrer un mec un peu trop sûr de lui.

Il fit volte face, son corps se déplaçant avec dextérité dans l'espace. Il sentait son cœur battre et, au fond, il aimait ça. Il esquiva un swing latéral, un deuxième, un troisième ascendant. Le marteau n'atteint pas sa cible. En lieu et place, la main manipulatrice fut saisie fermement, la deuxième tentant un coup de poing maladroit qui fut dévié tout pareil. Un coup dans le plexus coupa la respiration du bandit, puis une frappe du coude dans sa mâchoire le bouscula sèchement. Le pied droit du Coffe, après un coup de pivot de ses hanches et un habile jeu de jambe, vint faucher avidement les appuis du malfrat. Ce dernier se retrouva au sol, haletant, avant que son marteau ne lui retombe sur la tête. Le mormoilnien aimait combattre, et il le savait. C'était peut-être pour ça qu'il avait voulu tempérer ses ardeurs par la rigueur d'un exercice disciplinaire et martial. Pour éviter de devenir comme ceux qu'il combattait désormais... comme ce type en face de lui, capable du meilleur, mais ayant décidé de faire le pire. Pendant que le chauve s'échinait à retrouver une vue correcte et des voies respiratoires libres de toutes contraintes, le noiraud aperçut la jeune femme aux cheveux bleus se défaire d'une façon experte du deuxième homme, le premier étant déjà mal en point. Il eut un sourire de coin : elle savait se défendre... plutôt bien, même. Assez pour mettre en déroute deux voyous, ce qui était déjà plus que beaucoup de monde. Sa curiosité et son intérêt envers la Olsen gonflèrent de concert, mais des sujets plus pressants l'attendaient.

- FILS DE CHIENNE !

Une poigne vorace s'accrocha à une partie de son costume, qui se déchira sous la tension vive provoquée par une esquive millimétrée de la part du Coffe. Soulevant une jambe, il infligea deux coups puissants dans les côtes de son adversaire, qui grogna de douleur avant d'opposer son bras à une troisième offensive. S'agrippant à la cheville du brun, il le projeta contre un mur dans lequel ce dernier atterrit lourdement, non sans provoquer un scintillement singulier dans les spots lumineux, qui n'étaient peut-être pas si efficaces que ça. Une douleur sourde déchira le flanc gauche du cuisinier : une douleur qui n'était pas liée à cet impact, mais qu'il avait déjà trop longtemps occultée. Il toussa tout en se redressant sur ses avant-bras, le souffle court. Son adversaire, lui, réduisait la distance entre eux tout en continuant à se frotter les yeux et à éternuer furieusement de temps à autres.

De son côté, le gangster terminait de se relever, le nez en sang et les habits tâchés. Une fureur noire s'était emparée de lui. Pourrait-il seulement être résonné ? Nul ne le savait vraiment. En tout cas, ce petit couillon qui s'était amusé à lui refaire le portrait devait payer son impudence. La petite garce qui l'accompagnait ferait un bon exemple de la crainte qu'il devait inspirer, s'il ne la laissait simplement pas à ses gars pour s'amuser. Quant à ce lapin monstrueux venu de Drum... il n'avait plus lieu d'être, dans ces conditions. À tâtons, tout en se tenant le nez d'une main, il chercha dans la doublure de son veston une arme à feu dont il ferait fort certainement un usage létal dans les secondes à venir...

- Bande de déchets...



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Jeu 28 Fév - 17:25

Nous portons un masque [9]


Ils lui faisaient une fleur en étant aussi mauvais. Les deux hommes tentaient de revenir à la charge. Le second, un peu sonné, avait l’air d’être encore capable d’avancer mais à taton. Le premier en revanche était en pleine possession de ses moyens, et il sortit son couteau de sa main non-directrice, tandis qu’un air menaçant passait sur son visage. En temps normal, cela suffisait pour que ses cibles n’arrêtent leur mouvement. Dans le cas présent, il se frottait à une tête de mule doublée d’une maudite capable de décrypter ses réelles pensées. Ainsi, quand les mains de l’homme partirent en direction de Lidy, cette dernière savait exactement où il comptait frapper et esquiva le geste, s’en servant pour appuyer sur sa blessure.

Tout était affreusement douloureux pour cet homme. Ses mouvements le peinaient tandis qu’il tentait de surmonter la douloureuse vérité : l’ennemie allait les vaincre, et il n’y pouvait rien. Elle sourit devant cette pensée, et finalement abattit un coup de genou dans l’entrejambe du second adversaire qui venait à peine de reprendre le combat. Cela suffit à l’obliger à rouler à terre.

- Ne vous relevez pas, ordonna-t-elle sèchement.

« Ou vous mourrez ». La menace sous-jacente ne pouvait être évoquée à voix haute : déjà parce qu’elle serait une promesse non-tenue en la présence du Coffe, mais aussi parce que Lidy n’avait jamais été le juge et le bourreau en même temps. Quand elle retourna son attention sur le combat de Heziel, son attention se porta un instant sur le mafieux… Qui avait une idée derrière la tête. Elle soupira simplement : il devait être fou pour croire qu’il pourrait s’en sortir à présent avec son organisation.

Alors qu’il cherchait une ouverture, elle s’approcha de lui et lui saisit la main qui se trouvait à l’intérieur de son gilet pour casser son mouvement du poignet. Il serait incapable de tirer à cet instant même, sinon sur lui. Quand elle sortit l’arme de sa poche, l’homme tenta de baoufiller mais c’était déjà trop tard. Trop tard depuis le moment où il avait menacé la vie de Heziel. Trop tard depuis la minute où s’était positionné en traitre à Némésis. Il mourrait. De la main de la Rêveuse ou de celle de quelqu’un d’autre.

- Dîtes à votre homme d’arrêter.
- Jamais. JAMAIS ! Hurla-t-il en tremblant de sueur, le corps flagellé par sa propre bêtise.
- Dîtes votre homme d’arrêter, ou je vous tue, lâcha-t-elle froidement en pointant le canon de l’arme sur l’endroit précis où se trouvait le cœur de ce lâche.
- Je… je…

Il n’ajouta rien. Se murer dans le silence ? Sérieusement ? C’était une solution à très court terme. Tant que l’un de leurs camarades n’aurait pas gagné le combat, n’aurait pas dominé l’autre, ils n’auraient pas de moyen de pression. Alors, elle décida de mentir, de réduire cet homme mentalement en charpie. Il fallait non pas donner une demi-vérité mais un complet mensonge.

- Némésis est déjà au courant de votre traîtrise. Dans une heure vous êtes mort. Nous avons des assassins qualifiés, vous le savez. Alors… arrêtez…. Votre… homme.

Elle lui fit découvrir un micro, certes inactif mais il ne le savait pas. Le teint de l’homme blanchi au point où on ne savait plus s’il était encore réellement vivant. Il ne pensa pas plus, occultant de son esprit toutes les questions qui n’avaient pas rapport à sa survie. D’un geste, il tira sa main en avant et ouvrit sa main.

- A… Arrête-toi ! On… on va…
- Dîtes-le, et je plaide en votre faveur.
- On va quitter l’île. Se cacher. S’il-te-plaît…


Il lui demandait une faveur et il venait de perdre son poste de leader dans tous les cas. C’était une bonne chose. N'est-ce pas ?

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Jeu 28 Fév - 18:58




Mauvais endroit, mauvais moment ?


Heziel commençait à voir des étoiles, et c'était mauvais. Dans un coin de la pièce, le lapin géant demeurait prostré et tremblant : la créature avait du en voir de toutes les couleurs et, considérant l'intellect et la sensibilité des animaux, c'était en dire long sur ses sévices... malgré sa carrure, elle semblait incapable d'agir, de se défendre, de se battre : elle restait, terrifiée, incapable d'aider ceux qui seraient sans doute ses sauveurs dans la durée. Crachant un peu de salive, le noiraud termina de se redresser, tandis que Lidy s'en prenait au chef de gang. Sa vue fut bientôt occultée par celle, bien moins agréable et rassurante, de l'armoire à glace qui semblait ne pas en avoir terminé. Saisissant Heziel au cou de ses deux mains, le mastodonte plaqua le futur forban contre le mur dans un grognement. Il le tenait ! Maintenant qu'il le tenait, il ne lui restait plus qu'à l'écraser. Qu'à l'étouffer, l'étrangler. Qu'à tenir assez longtemps pour que son corps encore plein de vie n'exécute quelques ultimes soubresauts avant de refroidir...

... mais ce n'était pas aussi simple. Grinçant des dents, les yeux écarquillés, Heziel se défendait comme un beau diable. Il parvenait à réduire la pression sur sa gorge avec brio, faisant perdre un temps précieux à l'homme de main qui voulait sa mort. Il se permit d'ailleurs ou ou deux coups de pieds bien sentis, qui firent vaciller momentanément le gorille. Ce dernier tient cependant bon et, s'il sentit qu'il prenait momentanément l'avantage, une directive de son "chef" lui glaça le sang : arrêter ? Se cacher ? Laisser ce marmot et cette truie en vie, pour qu'ils aillent gambader dans les près amoureux de leur organisation de merde ? Il n'avait pas signé pour ça, lui. On lui avait promis monts et merveilles, des contrats intéressants, de l'argent à dépenser. Qu'est-ce qu'il obtenait, finalement ? Des suppliques, venant de celui même qui lui avait servi ces balivernes sur un plateau d'argent ?

- Tu te fous de ma gueule ? Et puis quoi encore ?! On se cachera combien de temps, hein ? S'ils veulent nous retrouver, ils le feront et tu le sais ! Espèce de rat ! Une fois que j'en aurai fini avec eux, je...

Un mouvement violent dans sa poigne le prit de cours. Heziel, dans un effort colossal, venait de ramener ses jambes au niveau de son torse tout en s'offrant un peu de répit par le biais d'une traction admirable sur les mains douloureuses de son ennemi. Dans un grognement, il lui enfonça une détente virulente des jambes en plein dans la figure, un craquement marquant la rupture de l'os du nez et du cartilage qui était sur la trajectoire. Il lâcha prise, surpris et tétanisé par la douleur violente qui s'empara de lui. Retombant sur ses pieds, difficilement, le brun souffla un bon coup tout en maintenant une pression sur son flanc droit, à un endroit où les parties claires de son attirail étaient teintées de rouge. Il fit un pas, deux pas, ne pipa mot tandis qu'une main ouverte vers l'avant indiquait que son adversaire cherchait à minima à contenir ce qui allait suivre. Il n'en fit que peu de cas : il passa sous la tentative timorée, profitant de la différence de taille, avant d'y mettre tout ce qu'il avait. Tout ce qui lui restait, d'ailleurs. Son poing, d'une puissance renouvelée, vint cueillir la brute au niveau du menton. Sa tête, secouée comme une boisson gazeuse, vrilla. Le monde tourna bizarrement, les couleurs s'affadirent, les sons s'épaissirent en une mélasse incompréhensible et sifflante. Le colosse tomba vers l'arrière et s'étala de tout son long, dans un grand fracas.

- Putain de mur de briques...

Se tournant vers Lidy, épuisé, Heziel laissa un sourire presque aussi naïf que celui de leur rencontre éclairer son visage. Ils étaient vivants. Elle allait bien... elle semblait maîtriser la situation et, à part leurs propres sons, seules quelques suppliques étouffées venues des malfaiteurs entre l'inconscience et la souffrance perçaient le silence. Il n'eut pas réellement le loisir de penser plus loin : il leva une main teintée de sang vers son visage, avant de soupirer, sentant la tête lui tourner. Maladroitement, il se laissa tomber vers l'arrière, s'appuyant sur un mur avant de s'asseoir. La balle l'avait traversée dès qu'il s'était laissé glisser du canapé... malgré l'imprécision du tireur. Elle n'avait rien touché de vital, du moins pas de son point de vue : il se trompait peut-être.

- Je crois que je ne me sens pas très bien...

Une quinte de toux suivit, alors qu'il haletait quelque peu : l'effort était terminé, mais il avait prélevé un lourd tribut sur son corps. Après tout, il n'avait pas chômé, alors même qu'il avait été blessé dès le départ... mais l'adrénaline faisait des miracles chez un individu en position de vie ou de mort. Dans son cas, c'était tout à fait avéré. S'il avait seulement su à cette époque ce qu'il deviendrait alors, il n'aurait pas trouvé cela plus inquiétant qu'une piqûre maladroitement réalisée par un novice.



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Jeu 28 Fév - 19:42

Nous portons un masque [10]


L’inquiétude, l’incertitude se lisaient sur les traits de la Olsen. « Et maintenant, que faire ? ». Elle s’était rarement retrouvée dans une situation où ses secrets étaient aussi désespérément mis en danger. Bien sûr, à cette époque, elle n’avait pas l’ambition d’infiltrer le Gouvernement Mondial, mais que quelqu’un connaisse sa véritable identité. Pendant un instant, un très court instant, elle pensa que la seule solution devrait être de se débarrasser de Heziel, l’homme qui venait de l’aider. Il était en mauvais état. Il suffisait d’une pression, d’une détonation… Non, jamais. Elle était attachée aux valeurs de son frère, mais jamais elle ne tuerait un innocent, encore moins de sang-froid. D’un geste simple, elle assomma le truand et s’élança en direction de son compagnon.

- Heziel ! Lâcha-t-elle avec inquiétude.

Elle alla rattraper le jeune homme mais sut dès cet instant qu’elle ne pourrait pas le porter toute seule. Regardant les deux hommes au sol, ceux qu’elle avait martyrisé à petit feu, elle soupira. C’était inutile de tergiverser : il fallait qu’ils acceptent sa proposition, sinon elle serait dans de beaux draps.

- Vous deux. Vous êtes engagés par Némésis. Vous allez m’aider.

Elle venait de faire quelque chose de stupide, sans l’accord de ses pairs, dans le seul but d’aider un semi-étranger. Qu’importe, ils s’échangèrent des regards dubitatifs mais ils savaient, intérieurement, que c’était leur meilleure porte de sortie pour finir vivant. Et ils acceptèrent en hochant simplement la tête. Blessés à l’épaule, ils combattirent cependant la douleur à grosses gouttes en soulevant le futur pirate avec beaucoup d’ardeur. La Olsen regarda la pièce où ils se trouvaient et fronça les sourcils, laissant partir les trois têtes devant elle sans réellement laisser le choix à son compagnon d’infortune. Elle tira alors son escargophone et entama la procédure au terme de laquelle quelqu’un lui répondit enfin.

- Rêveuse.
- Nettoyeur. La mission est un succès, vous vous occuperez de nettoyer, comme d’habitude.
- Très bien, pour les dispar-
- Tuez-les. Le patron et ses sbires, ceux présents dans le sous-sol de l’attraction « Trou à rat ». Et ne laissez pas de traces : ils doivent avoir disparu.
- Très bien.


Il raccrocha sur ces paroles. Elle avait le cœur lourd, mais c’était la seule solution. Une fois l’opération terminée, elle convaincrait Némésis de laisser cette île en paix, et de ne plus y revenir pour faire du trafic, tout en faisant croire aux criminels que le territoire était déjà annexé. Ça n’empêcherait pas les Konan et autre tyrans de faire leurs affaires, mais au moins ils seraient tranquilles avec les petites frappes. Lâchant son appareil dans sa poche, elle prit le chemin qui menait à l’extérieur, et non plus aux barques. Fini les films d’horreurs, elle comptait bien dire « Au Revoir » à cet atmosphère. Du moins c’est ce qu’elle crut.

L’endroit était lugubre à souhait. Les quelques ombres qui planaient étaient dirigées par des torches qui donnaient l’impression qu’elles étaient vivantes. Les ténèbres, douces amantes de la nuit, revêtaient des habits toujours plus frivoles, dansants. La Olsen sentait que le souffle glacial de la mort habitait cet endroit depuis un long moment. Brusquement, une image terrifiante la heurta : un visage fantomatique qui hurlait à la mort quelques mots déformés par les échos du couloir. Elle-même cria, d’un cri strident et terrifié, tandis qu’elle se mit à courir hors des lieux. Son cri continua encore quelques minutes avant qu’elle ne sorte à la lueur de la lune toute juste naissance.

Sa course devait l’avoir faite rattraper les trois gaillards, et elle se jeta alors dans les bras d’un Heziel encore malmené, avant de se rendre compte de son erreur.

- Oh… Excuse-moi, je… Vite, amenons-le au médecin le plus proche.

Elle demanderait alors aux passants la direction de celui-ci, sans perdre de temps.

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Jeu 28 Fév - 20:36




Mauvais endroit, mauvais moment ?


La suite des événements ? Floue. Sa blessure lui faisait souffrir, sans compter les différentes contusions sur son corps et la quantité astronomique d'huile de coude qu'il avait du fournir pour se débarrasser de ces voyous. Le mastard qui l'avait coincé contre le mur était réellement un adversaire de bon calibre : sans cette fenêtre d'inattention de sa part, le noiraud n'aurait pas donné cher de sa peau, une fois coincé ainsi... pourtant, il en avait dans le ventre. Mais tout ça, ça devenait un peu trop lointain de son esprit pour faire office d'un sujet de réflexion pertinent. Il se sentit soulevé et, s'il protesta sur le coup, il remarqua qu'il n'y avait pas d'animosité dans le geste. Il s'y abandonna donc, se concentrant sur la voix de Lidy. Le lapin géant, dans leur dos, suivait avec appréhension, se cachant souvent, frissonnant au moindre bruit. Avec un peu de chance, il serait récupéré par un habitant. Ou peut-être que Lidy s'occuperait de lui directement ? Encore des questions stupides.

Le dédale sombre de couloirs et ses animations terrifiantes fantoches furent le dernier des soucis du trio tandis qu'il progressait, à distance de la bleutée. Si le noiraud se concentra sur le fait de rester éveiller tout du long, il ignora les paroles des deux larrons. Ils évoquèrent la possibilité de le suriner ici et de prendre leurs jambes à leur cou : mais après ce qu'il s'était passé, ça revenait à se tirer une énorme balle dans la tête. Ils croyaient, à tort ou à raison, en leurs chances de rejoindre l'organisation et d'y trouver une place pérenne. L'avenir dévoilerait la vérité à ce sujet... en tout cas, les hommes le portèrent à bon port : hors de ce labyrinthe maudit dont il s'assurerait, une fois remis sur pieds, de provoquer la fermeture définitive.

Il prit une bonne goulée d'air frais. La lune rebondissait sur les murs de chaume et de pierre, étendait son halo timoré sur l'herbe et les sentiers, soufflait un vent calme et serein. Il entendit un cri dans son dos et s'inquiéta, reconnaissant immédiatement la voix de Lidy. Pourtant, il ne fut pas en mesure de se porter à son secours. Finalement, elle lui arriva dans les bras comme une balle, lui arrachant un signe évident de douleur : idiote... elle avait pris peur ? Il toussa quelques peu et lâcha un faible sourire. Ses pensées n'étaient pas courroucées, tout du contraire : retrouver l'air libre lui faisait le plus grand bien.

- Oh mon dieu, mais c'est...
- Heziel ! Qu'est-ce qu'il s'est passé ?
- Pas de temps à perdre, il lui faut un médecin !


La communauté de Notebouque, comme dans de nombreux cas sur East Blue, était composée de gens simples : des gens qui ressemblaient plus ou moins au cuisinier, au final. Des gens désireux d'aider, de partager et de vivre pleinement une vie qui se voulait pacifique et sereine. Du fait de ses actions bénéfiques répétées, de sa bonhomie et de sa réputation de maître-coq, le noiraud s'était fait un cercle assez large de connaissances et plusieurs étaient encore dehors à cette heure, revenant justement du festival qui perdait malgré tout en fréquentation. C'était souvent le cas du premier jour : les gens s'y précipitaient dès l'ouverture et repartaient tôt, lessivés. On indiqua rapidement aux deux hommes et à la demoiselle l'accompagnant la direction d'un médecin, direction confirmée par le local lui même, faiblement. S'était-il blessé dans une attraction ? Un danger guettait-il les gens de la ville, dans cette fête ? Cela ne manquerait pas de faire des remous !

Leurs pas les amenèrent naturellement à un cabinet assez propret et cosy, dans lequel un vieil homme avec un œil de verre les accueillit. Papa Steure, puisque c'était son pseudonyme, était un vieux loup de mer qui avait appris sur le tas dans de nombreuses circonstances dramatiques : il avait le cuir dur et savait prioriser. Il ne s'épancha pas en discussions inutiles, leur indiquant de l'allonger sur une table, s'équipant à la va vite du strict nécessaire après avoir chassé les curieux qui restaient là pour regarder. Lorsque le noiraud lui offrit son sourire le plus rassurant, il tiqua et siffla de mécontentement. Ce n'était pas la première fois que ce patient particulier finissait ici en urgence... une habitude qui ne plaisait guère au septuagénaire aux cheveux en bataille et aux traits usés. Il le réprimanda quelques instants, avant de reprendre sa tâche. Vint la question fatidique.

- Cette blessure... comment est-ce arrivé ?

Il ne serait pas facile à duper : l'âge était un atout de sagesse formidable.



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Jeu 28 Fév - 21:01

Nous portons un masque [11]


Préfèreraient-ils la vérité ou le mensonge ? Les inquiétudes des habitants étaient sincères, et pour une nomade comme Lidy, un véritable mystère. Elle ne comprenait pas ces liens qu’elle lisait à la volée dans les esprits des habitants de cette île. Au contraire, et bien évidemment, elle préférait savoir s’ils étaient avec elle ou contre elle, et en réalité ils se fichaient bien de sa présence, bien trop préoccupés par les blessures que portait le jeune coq. C’est d’ailleurs à ces souvenirs volés qu’elle apprit qu’il était cuisinier, une information qu’elle se devrait de trier dans la catégorie de celles qu’elle ne devait pas dévoiler sous peine de paraître suspecte. D’un air nonchalant, elle suivit le groupe tout en indiquant au lapin de Drum de les suivre à son tour. L’être de taille humaine, et même un peu plus grand, ne rentra pas à l’intérieur de la maison du médecin et resta à la place devant, tenant place de « garde » improvisé, malgré ses blessures.

La demoiselle prit son temps pour observer les déboires de cette journée. Une rencontre loupée suivi d’un contrat raté, malgré un objectif atteint en fin de compte : ils allaient pouvoir reprendre le commerce, de manière beaucoup plus subite que prévue. Le sous-sol du trou à rat était le dernier endroit qu’ils devaient trouver pour localiser le malfrat, et si elle n’en fit pas d’état, elle se sentait malgré tout libérée d’un poids.

Quand vint la question fatidique, la demoiselle ferma les yeux et lâcha un lourd soupir. Heziel comptait-il mentir ou dire la vérité à ce sujet ? Si c’était le cas, elle portait de toute manière encore son masque et pourrait partir avant que le médecin ne réussisse à appeler la garde. Dans le doute, mieux valait être le plus proche de la vérité possible, en éloignant les questions sur les potentielles zones d’ombre.

- Heziel m’a suivi lors d’une transaction commerciale qui a mal tourné. L’homme en question ne causera pas de soucis à l’île : il a promis de partir et de ne plus jamais revenir. Malheureusement, son garde du corps n’était pas un cadeau du ciel et lui a fait subir quelques dommages corporels.

Si dans un premier temps les mots étaient froids, la demoiselle s’approcherait de son camarade pour lui prendre la main et l’embrasser. Elle était soulagée, si soulagée qu’elle soulèverait une partie de son masque pour se faire. Elle laisserait un instant les choses telles qu’elle avant de lâcher d’une voix désemparée :

- Je suis désolée, véritablement désolée de t’avoir traîné dans cette histoire. Tu n’aurais jamais dû y être mêlé, c’est ma faute…

Elle s’arrêta et passa la base de main sur une petite larme qui commençait à couler dans une voix bercée d’émotions, suffisamment pour étonner les gardes qui croyait leur interlocutrice plus inhumaine que nature. A vrai dire, ils ne savaient pas si cela faisait partie d’un acte de manipulation, ou si c’était une véritable émotion… Et elle non plus.

- Je reviendrai te voir quand tu auras été soigné. Et je t’expliquerai ce que tu veux savoir à ce moment-là, d’accord ?

Elle n’attendrait pas réellement sa confirmation, sachant que le vieillard voudrait commencer son œuvre le plus rapidement possible. Alors, sans réellement se presser, elle quitterait la maison avec regret. S’il désirait qu’elle sorte de sa vie immédiatement, il s’en accommoderait, bien qu'un peu triste.

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Jeu 28 Fév - 21:49




Mauvais endroit, mauvais moment ?


Lorsque le médecin comprit la teneur de la situation, il fronça durement les sourcils. Sa désapprobation serait lisible, aussi bien sur ses traits que dans son esprit. Une "transaction commerciale" qui tournait mal à ce point ? C'était une blessure par balle, pas des moindres. Et le contusions ? Elles étaient nombreuses... dans quoi ce jeune idiot s'était-il fourré ? Il avait déjà eu des altercations avec des voyous, il avait déjà trempé dans des histoires un peu bizarres, mais seulement pour en ressortir avec des actions concrètes et bénéfiques pour la communauté... et pas en cédant à la corruption, loin de là. Alors pourquoi ? Le vieil homme, abreuvé par la vie de nombreuses expériences, avait bien une petite idée derrière la tête.

- Vous vous rendez compte de ce qui lui arrive, jeune fille ? Un peu plus, et il aurait pu...

- C'est bon, Papa...

Il s'arrêta et jeta vers le jeune homme un regard qui en disait long. Grommelant, il laissa les deux jeunes gens se livrer à un court rapprochement, sans objecter lorsque la demoiselle au masque de kitsune évoqua la possibilité de revenir le voir pour éclairer sa lanterne et aplanir les choses. Il n'était pas favorable à une telle chose : il n'avait pas forcément d'aprioris sur la "mauvaise graine" comme on l'appelait parfois, ayant lui même vécu de nombreuses affaires sordides... mais il savait justement, mieux que beaucoup, qu'il était préférable de se tenir écarté des affaires de ce type. Une chose que le jeune cuisinier semblait avoir du mal à se carrer dans le crâne, y compris si l'on prenait en compte son souhait secret de rejoindre un jour la piraterie avec son ami d'enfance, dont le chirurgien était l'un des rares détenteurs. De son côté, le brun observait la Olsen avec un regard brillant. Il n'était pas rancunier. Après tout, il avait choisi de "jouer le jeu".

- Je t'attends ici... je vais pas... me faire la malle...

Il voulut rire, mais la douleur dans ses côtes l'en empêcha et il ne parvint qu'à laisser un faible bruit s'échapper. Il n'avait pas contredis sa version des faits : il savait pertinemment ce que cela pourrait amener... il ne lui souhaitait pas de trouble. Elle lui avait dit qu'elle lui expliquerait. Il lui faisait confiance, et il comptait certainement connaître le fin mot de l'histoire. Elle disposerait d'une relative tranquillité, si l'on excluait les curieux qui s'empresseraient de vouloir connaître son état. La milice n'avait pas à se mêler de cette affaire.

- Laissez nous. J'ai besoin de m'occuper de son cas.

Ce qu'elle était partie pour faire, à la base. Elle quitta la pièce. Soufflant lourdement, le brun se prépara à la suite des festivités, qui promettait d'être peu reluisante : même s'il aurait sans doute le droit à quelques herbes et médecines pour atténuer la douleur, Papa Steure n'était pas connu pour faire dans la dentelle, et cette affaire le courrouçait passablement. Il voyait dans ce jeune, impertinent et fougueux à ses heures, une version plus prometteuse de ce qu'il avait pu être... c'était précisément ce qui, parfois, lui faisait peur. Il prépara ses outils, une bassine et des linges propres, tout en s'armant de ses flacons et de ses fioles. Il avait déjà procédé à ce genre d'opération, plus d'une fois... celle-ci, il la réussirait d'une main de maître. Leur intimité retrouvée, il grommela.

- Tu es un idiot, doublé d'un imprudent. Tu es sûr de vouloir la revoir ?

- Je sais que... je ne la connais pas beaucoup, mais... quelque chose me dit que ce n'est pas une mauvaise personne...

- Ce "quelque chose", c'est tes hormones. Maintenant, tais toi et bois ça.

La nuit promettait d'être relativement longue... mais il se rétablirait vite. Il le faisait toujours. Dès le lendemain, il essaierait sans doute de gambader comme un lièvre pour aller retrouver sa copine. Le vieillard soupira à cette pensée : il avait rencontré de nombreux lascars assez originaux, mais celui-ci le laissait toujours pantois. Il n'avait jamais vu un homme aussi désireux de protéger ceux qu'il appréciait, et pourtant si peu regardant de son propre état... l'abnégation dont il faisait preuve lui jouerait des tours, un jour. Il ne savait pas à quel point il avait raison.

Il se mit au travail, concentré, comme toujours. Il était temps d'extraire du plomb de ce gamin qui en manquait clairement dans la cervelle, par moments.



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"Are you a man... or a monster ?"

Heziel Coffe
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Lidy Olsen
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Lidy Olsen
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Jeu 28 Fév - 22:23

Nous portons un masque [12]


La demoiselle ne pipa mot mais fut reconnaissante de la discrétion de son camarade. Elle s’éloigna un peu de l’habitat et observa longuement le lapin qui se trouvait là. Il avait été maltraité, et s’il n’était pas rapidement pris en charge par un vétérinaire, il risquait des séquelles. Cet être étrange mais pas moins familier se grefferait-il aux affaires sordides de son organisation ? Il en était hors de question. Une fois qu’il serait rétabli, elle le renverrait à Drum, quitte à l’accompagner en délestant sa prochaine mission. D’un geste timide, elle vint lui caresser la tête. Il eut d’abord un geste de recul, puis accepta la tendresse dont faisait preuve la jeune femme. Les deux hommes derrière elle lui jetèrent un regard interrogateur avant de se demander s’ils ne devraient pas en profiter pour filer, prendre la poudre d’escampette, d’un duo de voix de toute évidence passablement inquiètes.

- Je doute que ce soit une bonne idée. Mes collègues auront tôt fait de vous retrouver. Je suis sérieuse, nous récompensons nos alliés et vous m’avez aidée.

Elle sortit un calepin de l’intérieur de sa veste et un stylo avant de griffonner une adresse sur East Blue. C’était un lieu de rendez-vous clandestin où ils pourraient trouver tout ce dont ils avaient besoin, y compris un travail. Des gardes du corps, c’était toujours utile, d’autant plus s’ils étaient affiliés à leur organisation dans l’ombre. Elle leur expliqua de faire preuve de la plus grande discrétion quant à leur affiliation, et qu’ils seraient à même de comprendre que s’ils trahissaient sa confiance, ils en paieraient le prix fort, d’un jour à l’autre.

Les deux protagonistes s’en allèrent avec l’amer sentiment de s’être fait arnaqué, mais sans risquer réellement leur chance. Ils n’étaient pas très intelligents, et si le simple fait d’être traités comme des enfants dans cette affaire ne leur plaisait pas, ils avaient au moins l’esprit tranquille quant à leur futur travail. En arrivant à East Blue, la promesse de la belle serait réalisée sans attendre, et ils pourraient entamer leur nouvelle vie de mercenaire.

En attendant, la Olsen rejoignit le port de l’île où se trouvait un vétérinaire de proximité qui prit en charge l’animal dans des délais très raisonnables. Elle le régla directement avec une petite partie du reste des économies qu’elle avait réservé pour cette mission, et alla prendre la chambre d’auberge réservé au nom d’Iliane. Quand elle fut enfin allongée sur son lit, elle retira le masque qui cachait ses airs un peu alertes. Finalement, elle s’endormit après avoir pensé à ce qu’elle allait dire au noiraud. De toute évidence, ce ne serait pas de très franches révélations qu’elle lui ferait. Il avait réussi à l’attendrir, mais ce masque qu’elle portait, c’était sa garantie, sa survie.

Le matin, quand elle rouvrit les yeux, le soleil était déjà haut dans le ciel. Elle inspira un coup et sentit une odeur de brûlé : c’était un stand installé devant l’auberge qui venait réveiller son estomac. Un marché s’était érigé sur le port, permettant aux commerçants des environs de vendre leurs produits. La demoiselle ne s’éternisa pas dans sa chambre et descendit, sortant sur le port où une impressionnante foule avait déjà commencé à occuper les lieux. Elle portait toujours son masque tandis que les costumes du festival continuaient de défiler sous ses yeux.

Ses pensées se perdirent dans celles de la foule. Elle écoutait les inquiétudes, les pensées impures et les pensées innocentes. Ses préférés, c’était celles des enfants. Ils ne pensaient jamais réellement à mal : ils testaient, ils choyaient, ils vivaient leurs émotions à toute vitesse. Avec un manque flagrant de pragmatisme, heureusement loin de leurs âges auxquels Lidy avait progressivement gagné le sien.

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Lidy Olsen
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Heziel Coffe
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Jeu 28 Fév - 23:28




Mauvais endroit, mauvais moment ?


- On se réveille, la belle au bois dormant ?

Un souffle long et quelque peu plaintif fut le premier signe de vie que Heziel donna de son conscient, le lendemain matin. Le plafond blanc de l'infirmerie installée par Papa Steure dans l'arrière salle de son cabinet fut la première vision qui l'accueillit lors de son retour chez les éveillés. Il tourna doucement la tête, provoquant un bruit de frottement timide contre le coussin immaculé. Le soleil était déjà levé, dehors. Il voulut se redresser, mais son flanc gauche lui faisait un mal de chien. Les souvenirs lui revinrent, brumeux d'abord, plus clairs au fil des secondes, comme les restes d'une soirée alcoolisée ayant un peu trop duré... l'impact de balle en bonus. Pivotant finalement la tête de l'autre côté, il vit son hôte assis sur un tabouret, en train de mâcher un stylo tout en prenant des notes. Ce dernier sortit une montre à gousset de sa blouse, avant d'opiner du chef avec une légère moue.

- Onze heures de sommeil... comment tu te sens ?

- Quelque part entre "vivant" et "vivant après être passé sous un train des mers", j'imagine...

- Tu vas pas commencer à te plaindre. À jouer avec le feu, on se brûle.

Se laissant retomber mollement du peu de hauteur qu'il avait réussi à acquérir, Heziel soupira à nouveau. Le vieil homme avait sans doute raison, comme toujours. Son esprit fourmillait de questions qui s'entrechoquaient sans jamais lui offrir d'élément de réponse. Lidy... elle constituait un véritable mystère, auquel se frotter ne lui avait pas foncièrement fait du bien. Pourtant, sa nature n'était pas prête de changer, pas avant un moment et une série de déconfitures autrement plus sordides : sa curiosité prit le pas sur sa raison assez vite et, alors que le médecin levait les yeux au ciel en entendant la première partie de sa phrase, le Coffe souleva une interrogation qu'il attendait fermement.

- La femme qui était avec moi, hier... est-ce qu'elle est passée ?

- Non.

Se redressant lentement, au rythme que lui imposaient ses vieux os usés et une vie passée à barouder de bon coeur, le docteur fit claquer son calepin avant de ranger son crayon dans l'une des poches pectorales de son habit clair. Il pointa le jeunot d'un doigt qui faisait autant office d'accusation que de mise en garde, avant de se diriger vers une cafetière qui chauffait un peu plus loin.

- Et si tu as vraiment retenu la leçon, tu t'en contenteras et tu retourneras à des occupations plus raisonnables que traiter avec des types louches.

Se servant une tasse, il l'empoigna d'une main avant d'en servir une deuxième pour son patient. Il s'approcha du lit à l'armature de zinc avant d'installer l'une des boissons sur une petite table de chevet, assez proche pour que le brun s'en saisisse... s'il faisait l'effort requis pour, bien entendu. Il l'observa se relever, sans l'y aider aucunement, jaugeant ses capacités. Ce gosse avait une capacité de récupération qui défiait clairement la banalité... mais, du fait de ses histoires passées, l'ancêtre savait pertinemment qu'il n'était pas le seul dans le monde à bénéficier de cette caractéristique. Combien de temps, avant qu'il ne tombe sur un os fatal, une déconfiture dont il ne pourrait pas revenir ?

- Je te trouve quand même vachement... nghh... sceptique...

Il parvint à s'asseoir dans le lit, avant d'observer son torse mis à nu. Un épais bandage, encore propre et donc changé peu de temps auparavant, recouvrait la majorité de son abdomen. Les quelques contusions prenaient une teinte violacée caractéristique. Des bleus qui ne tarderaient pas à disparaître comme ils étaient venus. Lâchant un "pfff" qui en disait long, le médecin s'approcha de la fenêtre avant de siroter tranquillement.

- Venant d'un garçon qui se retrouve quasiment tous les mois dans mon cabinet pour ne pas avoir remarqué où il mettait les pieds, tu me permettras une pointe de doute.

Un sourire gêné marqua le visage de Heziel.

- Que s'est-il passé ? Vraiment.

Quelque peu interloqué que Papa Steure attaque aussi vite dans le vif du sujet, le brun levant douloureusement un bras pour se gratter les cheveux. Ses souvenirs étaient encore un peu embrumés, mais il se rappelait de l'essentiel. Les détails de l'affrontement étaient encore incertains. Tout s'était passé si vite. Pourtant, il opta encore une fois pour une semi vérité qu'il pensait plus salvatrice... après tout, il n'était pas foncièrement du genre à balancer de but en blanc les détails les plus croustillants. Cependant, le vieux le connaissait assez bien, ce qui jouait en sa défaveur.

- Mauvais endroit, mauvais moment... quiproquo, si tu veux. Il y avait effectivement des types louches dans le Trou à Rat. Elle devait faire affaire avec eux, mais elle ne pensait pas que ça tournerait comme ça. Mal. J'ai du me battre et... ils ne poseront plus de problème, désormais.

La bonne nouvelle, c'était que ça n'avait pas tourné en bain de sang : le médecin en avait la certitude. Si son protégé du jour lui racontait ça avec autant de légèreté, c'était assurément le cas. Un tel événement l'aurait marqué. C'était un bon garçon, avec un grand cœur qui avait tendance à prendre trop de place dans ses raisonnements et ses réactions, mais certainement pas un meurtrier... même par nécessité.

- Lidy. Tu peux arrêter d'occulter son nom, tu as déjà vendu la mèche pendant que tu délirais.

Choqué de l'apprendre, le noiraud sentit une certaine chaleur lui monter aux joues. Un énième soupir de la part de son aîné lui annonça la suite du programme : comme prévu, il ramena un tabouret et s'installa près du lit, tandis que le cuisinier sirotait silencieusement son café avec des yeux qui retranscrivaient sa conscience du fait qu'il avait sans doute fait une bêtise.

- Tu dois arrêter ce genre de trucs, petit. Des bleus, d'accord. Une lèvre et une arcade gonflées, passent encore. Des hématomes, je peux comprendre... mais une balle ? Si elle avait atterri entre tes deux yeux, j'aurais pas pu te requinquer, même avec toute la bonne volonté du monde. Et tu sais que ça n'engagerait pas que toi.

Abattu, tout à fait au fait de sa part d'implication dans son propre état, le futur forban baissa la tête. Le noir de son café lui renvoyait un reflet étrange. Le silence perdura quelques instants, sonnant aux vieilles oreilles du chirurgien comme un accord. Il plaça une main chaleureuse sur l'épaule de son cadet. Il avait vécu, lui aussi. Quand ça en venait aux femmes, certaines choses prenaient vite un tournant étrange... surtout quand on était naturellement aussi aventureux et curieux que ce jeune coq. Un sourire étira les traits de Papa, qui se releva finalement. Il savait bien que ça n'empêcherait sans doute pas Heziel de revoir cette demoiselle... mais il espérait qu'un peu de plomb dans le crâne, et pas du genre à tuer, lui donnerait des perspectives plus mesurées sur les choses.

- Fais ce que tu veux, mais ne te surmène pas. Quelqu'un de normal dormirait encore, à ta place... mais ne pas être normal ne veut pas dire que tu peux faire n'importe quoi. Vu ?

Le brun hocha de la tête, avant de continuer à boire silencieusement. Les questions revinrent, privées des réponses tant désirées. Il n'aimait pas ce sentiment : celui d'être perdu, de ne pas savoir quoi faire. Ses émotions étaient mitigées, mais une chose était certaine : il espérait encore que la frimousse délicate de la bleue pointerait le bout de son nez dans le coin... il en avait besoin, à vrai dire, pour au moins clore ce chapitre trépidant. Sacrée début de Dimargras.



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