Alors que Kanäe était intervenue et avait obtenu une réponse plus que complète et descriptive sur l’état de santé du petit Silver ; ce magistral « Beuh » synonyme de résistance impressionnante face à la douleur ou d’un désintérêt total. Alors que Luiz s’était pointé, avait repris en main son neveu et commençait déjà à s’éloigner après l’avoir mis sur son dos ; Lydia réfléchissait, quelque chose avait attiré son attention, un détail sortit de la bouche de l’enfant. Après tout, c’était bien connu que la vérité sortait toujours de la bouche de ces derniers inspirés par la candeur et la fougue de la jeunesse. Non définitivement, quelque chose ne collait pas.

Si, au premier abord, on pouvait penser que la belle pipelette balançait phrase sur phrase et recueillait réponse sur réponse sans s’en souvenir quelques minutes plus tard, la réalité était bien différente. En effet, la mouette déblatérait beaucoup mais en toute bonne commère qu’elle était, elle conservait en mémoire toute les informations pour pouvoir les répéter fidèlement, ou au moins les réutiliser pour son compte ou celui de sa faction. Il en ressortait que le tonton avait précédemment parlé du père du moineau comme d’un homme que ce dernier connaissait, étant donné qu’il les attendait. Cependant, et problème plus important à ce stade, le jeune g arçon avait quant à lui sous-entendu qu’il ne connaissait pas l’identité d’aucun de ses parents, ou à tout le moins leur couleur de cheveux. Le mensonge du hors-la-loi était révélé mais la tchatcheuse en était encore loin, seuls des doutes persistaient. Loin d’être suspicieuse mais étant beaucoup trop attachée à la recherche d’information, la brune rattrapa le duo d’inconnu pour finalement s’adresser aussi bien au petit Silver qu’à l’oncle présumé.



Puis, toute innocente, elle oublia complétement Luiz pour ne s’adresser qu’au blessé.



Dans l’intermède, Kanäe n’avait pas suivi le mouvement, et après avoir rendu son geste d’au revoir au petit, il s’en était retournée en direction du chariot, imitée par le boss et le sprinteur qui voyait que la pipelette prenait sur elle de raccompagner les intrus vers la porte. La verte était plus loin mais gardait un œil sur ce gamin, il y avait quelque chose en lui d’attachant et de singulier… Se tournant nonchalamment vers le tacticien, elle dit en souriant :



Elle n’obtint pour simple réponse qu’un signe de tête affirmatif de son interlocuteur qui ne tenait finalement absolument pas compte de cet enfant dans ses calculs stratégiques. Pour lui, il était seulement important que les importuns dégagent de façon à minimiser les risques d’espionnage au maximum. Quoiqu'il en soit, la belle percevait chez ce gosse une certaine propension à se mettre dans les soucis et à faire suer sa pauvre famille qui ne cherchait, en apparence, que son bien.

La verte continuerait donc à charger tranquillement si les inconnus partaient et prendrait du temps à arriver s’il se passait quelque chose.

L’histoire de cet enfant devait être atroce, horrible, un véritable purgatoire pour les âmes sensibles en somme. Mais Lydia était la seule parmi le groupe gouvernemental à l’avoir entendu, mais dans le fond elle ne se sentait pas si mal car elle avait appris que le petit blanc avait une nouvelle figure paternelle, un être qui semblait l’aimer et bien s’occuper de lui. Ce dénommé Kita devait être un grand homme débordant d’amour. Peut-être d’ailleurs que Lydia avait permis à leur histoire de prendre une nouvelle direction, peut-être que grâce à elle le père et le fils seraient plus proches : il l’appellerait finalement papa. Le nom de Kita ne disait rien à cette femme, peut-être le chef du groupe connaissait la véritable identité de cet homme, un leader de groupuscule hors-la-loi, mais lui était trop loin pour avoir eu l’information. Cependant, au retour, ce nom serait retranscris dans le rapport de la mouette bavarde, et un jour serait-il utile à un autre ; peut-être.

Quoiqu’il en soit, la brune se mit à remuer la main pour rendre son adieu au petit blessé transporté par son oncle Luiz. Quel petit bonhomme étrange, il appelait son oncle par son prénom, son père adoptif par son prénom et ne parlait pas de sa mère : une famille vieux jeu probablement. Mais elle s’en moquait, elle avait été très heureuse de rencontrer ce gosse, contrairement au reste de la troupe qui avait dû faire face à la brute idiote, au boss pour cette tâche dans son dossier et à la Toupex pour les tâches de sang sur ses dagues.



La voix de la belle perça le silence de cet entrepôt qui retrouvait petit à petit, une activité normale. La charrette gouvernementale était maintenant pleine et les intrus avaient mis les voiles. Cet épisode si étrange était donc terminé. Le soir même, et sans attendre un instant de plus, les mouettes reprendraient la mer. Elles étaient certes censées rester encore une journée mais le récent comportement du boulet les obligeait à décamper bien plus rapidement de l’île de Trader. Sur le chemin du retour, le rebelle chargé dans la chariote, le leader hurlait sur ses recrues. Quelle infamie, quel bordel, que dire ! Quelle merde ! Lui qui voyait en cette mission une expédition lassante mais simple qui ne pourrait que favoriser son avancement, en fin de compte cela ne s’était révélé qu’être qu’une catastrophe qui marquerait plutôt son manque de leadership, de charisme, d’initiative et de capacité à remplir un poste à responsabilité. Qui irait confier des hommes à un homme infoutu de calmer et de gérer un gamin. Enfin, tout cela était trop tard et à part essayer de limiter les dégâts il ne pouvait rien faire.

Les évènements seraient retranscris dans les rapports et il fallait demander aux recrues de ne pas tout mentionner dans le dossier. Seul problème : le tacticien, le sprinteur et la Toupex étaient tous relativement incorruptibles. Il le savait, il était mort militairement.

Pour Kanäe il s’agissait là d’une rencontre intéressante, d’une mission instructive et une première rencontre avec un éventuel futur ennemi.