Mon nom est Thomas. Je suis un jeune de 19 ans et j'adore la vitesse. J'ai donc trouvé ma vocation alors que je publiais des vidéos de moi, dans mon ancien véhicule en train de faire des courses et des cascades. Certes, vous allez vous dire que je suis jeune, mais vous ne connaissez pas ce sentiment qui grandit en moi. Ou du moins, qui grandissait. Mon père est venu me voir aujourd'hui. J'étais content. Lui, pas trop, il avait la tête basse. Il faisait comme si de rien était. Toujours aussi fort qu'il l'était ce vieux croulant. Il m'a donné un bouquet de fleurs, sauf que j'étais tellement ému de le voir, que je n'arrivais guère à communiquer avec lui. Il est reparti par la suite et ce, sans rien me dire. J'ai l'impression qu'il est triste. Il va finir par me le dire sûrement. Du moins je l'espère. Je n'aime pas trop le voir dans cet état. J'ai l'impression que tout est de ma faute. Mais pourtant, je n'ai rien fait. C'est la vérité, je vous l'assure. Il ne veut peut-être pas me le dire, mais j'ai l'impression qu'il a une mauvaise nouvelle. Sûrement son cancer qui revient. Je souhaite de tout cœur que ce ne soit pas le cas.
Le lendemain, il est revenu me voir. La nuit avait été froide. J'ai dû camper. Moi qui n'aime pas le camping. J'ai eu l'impression d'être confiné à ce lieu sombre, sans couverture, ni oreiller. Mon manager aurait dû me prévenir que la nuit serait froide et qu'on camperait. Je me serais préparé à l'avance. Mais non. Foutu manager à la con qui me prévient à la dernière minute. En plus, il ne m'a même pas prévenu. J'ai fini ma dernière cascade et je ne l'ai pas revu depuis. Il est bête. Bref, mon père semblait de plus en plus attristé. Il me rappelait plein de trucs, en riant, après en pleurant, essuyant ses larmes parfois, puis en s'excusant. Je ne comprenais pas pourquoi il s'excusait. Il avait fait quoi ? J'espérais qu'il me le dise bientôt, mais je n'ai pu lui poser la question, puisqu'il est parti de nouveau sans me laisser le temps de parler. Ça commençait vraiment à me faire suer. Du coup, je me suis mis à arracher les fleurs sur le sol. Elles étaient si délicates. Je m'étais appuyé contre cette pierre et je me suis mis à remettre ma vie en question. Repenser à ce que j'aurais pu devenir au lieu d'être cascadeur. Je m'imaginais déjà dans un laboratoire à expérimenter toutes sortes de médicaments au nom de la science. J'aurais peut-être dû poursuivre mes études. Mais bon, j'avais déjà tout ce dont je voulais. Le véhicule de rêve, voyager partout dans le monde, jouer le rôle de doublure dans des films. J'étais bien payé.
Mon père revint le troisième jour. Les fleurs avaient repoussé, puis il en replanta d'autres. Dans ma logique à moi, les plantes ne poussent pas si vite. C'est comme si elles avaient été plantées il y a quelques années déjà. En tout cas, mon père aussi devenait vieux. Il avait gagné quelques rides en l'espace de trois jours. C'était hallucinant. J'espère ne pas vieillir aussi vite que lui, je vais mourir avant mon temps si c'est le cas. L'homme qui m'avait élevé en tant que père monoparental s'était remis à pleurer. Il faisait face à la même direction, chaque fois qu'il venait. J'ai décidé de me lever et de faire face à la même direction que lui. J'ai compris rapidement que tous mes rêves ne pouvaient plus être changés. Sur la pierre contre laquelle j'appuyais mon dos depuis trois jours, on y trouvait gravé; En la mémoire de Thomas Auger, Repose en paix.
J'avais échoué…