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Dim 17 Mar - 21:35
3ED2Y Début 1510 ~ Burj Babil - Coeur du Nouveau Monde
Une salle obscure.
Dans l’âtre, un bouquet de flammes oscillait paisiblement dans un doux crépitement qui résonnait dans l’austérité de la pièce, tandis que ses lueurs allaient se refléter sur les surfaces lisses qui composaient les sols et les murs.
D’un geste souple et parfaitement dosé, mon poignet pivota quelque peu, intimant ainsi un courant dans le liquide carmin retenu prisonnier dans le carcan de cristal lui-même assiégé par mes doigts gantés.
J’humai le distingué nectar, tandis que mes yeux roulèrent sur le mobilier luxueux qui m’entourait, comme pour me remémorer le doux fumet de la réussite.
Et puis, sis là , dans l’un des massifs fauteuils recouvert de velours noir, se trouvait un homme avachis, le regard perdu dans le vide situé en dessous du lustre serti de diamants qui nous surplombait. De temps à autre, son regard carmin se décrochait du vide pour s’enticher de nouveau au bout de papier disposé sur la table basse situé en contrebas de son fauteuil, pour lequel il semblait alors afficher une indolente fascination, et dont les oscillations frénétiques avaient quelque chose d’hypnotique.
D’un tic désapprobateur, je me détournais de cet être qui cristallisait en cet instant l’écrasante majorité de la déception que je pouvais éprouver. C’était simple, depuis son arrivée, il arborait le même comportement détaché et semblait accorder plus d’importance à sa maudite boussole de papier qu’à ce que j’avais pu bâtir. Et cela me déplaisait fortement.
Mon regard se porta alors une nouvelle fois par delà l’imposante surface vitrée tamisée, comme pour tenter de percer à jour les sombres ruelles qui s’étendaient à l’extérieur. Vue de l’extérieur, le bâtiment dénotait très clairement avec l’architecture locale et constituait une anomalie : ses murs lisses qui luisaient d’un éclat sombre contrastait avec les ternes façades des bâtiments voisins qui semblaient usées par le temps, ou par les échoppes de fortune qui jonchait les ruelles adjacentes.
Une hérésie architectural idéale et symbolique que j’avais érigé tel un monument venu à rappeler au monde cet immuable dogme :
« Les hommes ne naissent pas égaux. »
Et ainsi commémorer la noblesse inscrite dans nos gènes : à travers leur échec, je voulais leur rappeler ma réussite. Parmi les miséreux et autres pouilleux, nous étions l’élite destinés à surplomber tous ces insectes. Cette île n’en était-elle pas l’un des plus beaux symbole ?
Notre opulence ne pourrait avoir que le ciel pour limite.
Oui, dans cet espace clos, nous étions passablement coupés du ciel supposé nous toiser et étions à l’abri des pluies et autres intempéries climatiques. Mais les nouveaux employés de l’entreprise recrutés localement ne pouvaient s’y tromper : sous mon toit la seule chose qui daignait pleuvoir, c’était les billets.
« Alors, comme je l’évoquais à l’instant, les différentes branches d’activités sont en place : les rouages s’accordent peu à peu et donneront bientôt vie à ce formidable ensemble qui viendra compléter notre nébuleuse. »
Un véritable bijou commercial élaboré de mes mains qui décuplerait notre main mise économique sur ce bas monde. Mais plus encore, elle devait mettre en application les insidieux desseins que l’Architecte avait imaginé.
« Et notre intégration à l’assemblée ? »
« C’est désormais chose faite : nous avons acté hier les formalités contractuelles et ainsi conclut la transaction avec notre partenaire d’affaire pour la cession totale de son affaire et de son siège parmi l’Assemblée. »
Des centaines de milliards investis dans cette opération d’envergure qui nous offraient une place confortable parmi les trente plus grosses fortunes de la cité. Et nous ouvraient les portes d’une pléthore de possibilités.
« Hunter x Hunter… »
La voix rauque venait de faire voler en éclat le semblant de quiétude qui semblait régner jusqu’alors sur notre assemblée élitiste. Et pour cause : l’intervention sonnait comme un appel à la guerre, et émanait du plus dangereux de nous tous.
« Chassés ou être chassés… Chasseurs versus Chassés… Ils ont voulu monnayer notre liberté… alors nous monnayerons jusqu’à voir leurs têtes rouler. »
Edward Lawrence - Nébula Primé à ?39M de berrys
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La piraterie n'est jamais finie.
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Edward Lawrence
Jiva
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Mar 19 Mar - 19:46
3ED2Y
Là, dans la succursale d’une boutique où s’était massé un lot invraisemblable de types bien fringués ou se voulant tels. Blessures, brûlures et cicatrices ; poings serrés et jointures blanchies ; cous massifs grimés d’un même tatouage ; le tout empaqueté dans des costumes à plusieurs millions ; ornés de ceintures et holsters encombrés de ferrailles aiguisées ou sciées, un art en soi, une contradiction frisant la provocation de l'autre. Une pièce donc, plutôt un local : trois murs surdécorés et une vitre donnant vue sur l'attroupement. Celle-ci s'étriquait à mesure des négociations, une lumière qui passait de tamisée à lugubre au fil de la conversation.
-Vous n’êtes qu’un inconnu, pour le milieu. Cet acompte est pour nous une garantie. Le binoclard s’arrêta, balaya l’air devant lui comme pour se défaire d’un doute. Vous avez tout à gagner à devenir notre client, tandis que de notre côté… La voix jusqu’alors affable s’aggrava d’un coup. Croyez-vous que votre argent ne se dépense pas plus facilement que celui d’un autre ?
Spoiler:
«The Warrant» ; Phô
Son regard s’était planté dans celui de son interlocuteur. «The Warrant» avait été introduit au pirate comme le point d’entrée d’un vivier conséquent de mercenaires. Pour cause, celui-ci était affilié, selon ses dires, à l’un des sièges de l’Assemblée et contractait des portions de sa main d’œuvre pour professionnels et particuliers. L’homme d’affaire s’était ancré sur ses appuis avant de reporter son attention sur celui qui se tenait aux côtés du Baxter : Phô. C’était l’intermédiaire qu’avait dégoté Basil à sa première venue sur Burj Babil, il aurait été ancien membre de la Triade et se serait décidé à devenir un indépendant. Son offre était de mettre son réseau à disposition de ses partenaires, moyennant commission.
-Basil, à ta place je me raviserais et verserais le montant. Le criminel fit naturellement pression. -Mais, je…
Le doute sembla s’écouler sur Basil. Il s’était redressé subitement, prenant appui sur les accoudoirs d’un fauteuil glouton et inconfortable, et avait planté son regard sur la feuille que l’autre à sa droite lui tendait. Son index pointait des lignes, ci-et-là, tout en murmurant des commentaires inaudibles et certainement inutiles. Le sous-texte était pourtant clair, mais le forban préférait ne pas chercher à s'y plonger. Il ne voulait pas de ce savoir, il le refusait car il le dégoûtait.
-C’est le prix pour devenir un de nos clients. Un partenaire, même, car si vous vous montrez fiable, avec pareille offre pour nos hommes, je suis certain que notre courant d’affaire atteindra nos sommets financiers. -Tu deviendrais l’un de leurs meilleurs clients, Basil. Tu sais ce que ça veut dire ? Ces bateaux, ces têtes, tout ce que tu demandes : tu l’obtiendras.
Combien de milliard de berrys avait-il entre les mains ? Qu’allait engendrer la décision qu’il allait prendre ?
-Je… Ses lèvres se scellèrent, avant de s’étirer en une grimace paraissant de détresse. Je… Qu’est-ce que je dois faire ? Tu penses vraiment que c’est un bon choix, Phô ? -Je me tue à te le dire. L’intermédiaire sortit un stylo de sa veste, puis le tendit à Basil. Ce qui est bon pour moi, l’est tout autant pour toi. Un rictus blanc cassé ponctua sa phrase. C’est ça, d’être associés.
Le corps du pirate s’arqua puis trembla comme une branche au vent. Il semblait vouloir contenir la sensation qui le parcourait. Elle lui procurait un quelque-chose d’étrange, que ni l’alcool ni le reste ne savait lui apporter. Un soulagement le parcourut enfin, à mesure que Basil se ressaisit : ces questions n'avaient lieu d'être.
-Associé ? Il explosa de rire puis son expression vira au marbre. C’est un terme que je n’étends qu’à ma capitaine
Derrière «The Warrant», la vitre se fissura dans un bruit sourd.
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Sam 23 Mar - 22:06
3ED2Y
Burj Babil – Mars 1510
31 Octobre 1439 – Quelque part sur Grand Line
La neige s’engouffre dans chaque repli de mon manteau, cruelle, intransigeante. Une énième fois, je remonte mon col, tentative dérisoire de garder le peu de chaleur qui ne m’a pas encore quitté. Je déteste le froid. Donnez-moi du soleil. Du soleil et du vin.
Loin derrière, à peine perceptible sous le vent, le clocher sonne. Douze coups. Tous sur ce pauvre bout de terre désolée savent ce que cela veut dire. L’heure des loups. Il ne m’inquiètent pas. Si seulement il pouvait y avoir un peu de soleil. Juste un peu de soleil.
A tâtons, je cherche la poignée, grimaçant à la morsure glaciale de l’air sur la peau nue de ma main. Je referme aussitôt, inspire, crache à terre. La pièce empeste à plein poumons les excréments et l’encens. J’ai peine à me tenir debout. Les cris emplissent l’espace. Je vacille. Ainsi, l’histoire est vraie.
La vie n’est qu’un éternel recommencement. C’est que Saga disait toujours. Sans doute se pensait-il d’une sagesse profonde. Il me maintenait le menton d’une main ferme, cherchant à scruter mon âme au plus profond de mes yeux tandis qu’il m’assénait sa révélation dans un souffle de rhum et de tabac froid. Il me faisait mal. La vie n’est qu’un éternel recommencement. Un passage, un manège, un échange, un partage – mais à sens unique. Un emprunt à taux variable. C’était incohérent. Je ne comprenais pas. Je ne comprenais pas.
Il me fixe, sans vraiment me regarder. Je le regarde, sans savoir quoi voir. Cette chose improbable, mauvaise farce de la vie, anomalie du destin, mélange hasardeux de deux êtres qui n’auraient pas du se croiser. Est-il aussi perplexe que moi ? La vie n’est qu’un éternel recommencement, et nous sommes condamnés à tourner. Tourner pour l’éternité.
Les cris reprennent, et soudain, j’éclate. D’une main, je le prends aux bras froids qui l’enserrent, le soulève face à moi. Mon rire tonne dans la pièce, se mêle à ses pleurs. Ensemble, ils écrasent, au dehors, le hurlement du vent et des loups. Un instant qui dure une vie. Un tour. Nous sommes plus puissants que l’hiver. Puis, tout s’étouffe. Ma voix meurt au fond de ma gorge, aussi brusquement qu’elle y est née, disparaissant en un raclement rauque et cassant. Je crache à nouveau. Une petite flaque écarlate sur la moquette poisseuse. Il se tait, m’observe.
La vie est un éternel recommencement. Un passage, un manège, un échange, un partage – mais à sens unique. Un emprunt à taux variable. Je le lui dirai. Peut-être un jour comprendra-t-il.
Une vie, ce n’est qu’une vie. Celle-ci, comme la mienne.
Je rentre à la maison.
Je retrouverai le Soleil.
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Sa nervosité devient de plus en plus visible. Derrière les verres rectangulaires, ses yeux carmins sautent d’un point à l’autre avec attention. Léon n’aime pas cet endroit, pour la simple et bonne raison que cet endroit ne les aime pas. D’un regard mauvais, il détaille chaque devanture mal condamnée, chaque pouilleux les fixant d’un air hagard, chaque brute tatouée écrasant son cigare à la terrasse d’un bouge malfamé, chaque portier de casino ou de maison de passe les alpaguant crassement. Chacun d’entre eux bondirait en un battement de cils, s’il flairait la petite fortune facile qui se traînait devant lui.
Les doigts de sa main gauche pianotent contre sa cuisse. Un endroit pareil, ça leur ressemble bien. Il sera tranquille une fois qu’ils les auront rejoint. Pour la millième fois depuis qu’ils ont mis pied à terre, il se force à ralentir le pas. Sur son avant-bras droit, tenu à l’horizontale, les doigts noueux resserrent fébrilement leur prise. Léon réprime une grimace. Il accélère à nouveau, malgré la respiration sifflante qui lui parvient sous la large capuche anthracite.
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Sa tête penchait. La froideur du mur traversait ses vêtements, pénétrait ses os. Auparavant, le froid ne l’avait jamais dérangé ; il le sentait à peine. Aujourd’hui…
Il inspira longuement, étouffa difficilement un quinte de toux, s’essuya les lèvres du dos de la main. Quelques secondes passèrent, avant qu’il ne rouvre les yeux. Le brouillard avait disparu. L’expression nette qu’il lisait dans ceux du binoclard le révulsa au plus profond de son être. Ces trois dernières semaines, si dures euent-elles été, avaient surtout été marquées par ce changement là : cette transition, progressive mais brutale, dans le regard qu’il lui portait. Ce regard qui faisait à présent naître en lui l’intime envie d’y loger une balle. Il était devenu pathétique.
Il serra le poing, haussa les sourcils au son du papier froissé. Ce petit carré blanc qu’il serrait de toute la force de ses serres décharnées, alors même qu’il semblait tenter inlassablement de s’en extraire. La raison de leur venue. A l’interrogation silencieuse de Léon, adossé lui aussi entre les riches ornements, il ne répondit que d’un bref hochement de tête.
Il se redressa, chancela un instant, posa une paume contre les briques froides. Il s’arrêta, serrant les lèvres, sur ce cuir usé, affiné, cassant, presque transparent. Les innombrables petites taches brunâtres qui le maculaient. La petite aiguille qui courrait sous sa manche, se logeant dans ses veines. Il ne pouvait qu’imaginer ce regard dans son dos.
Il grogna, arrachant la perfusion d’un geste rageur. Quittant le mur, sa main passa sur son visage, infligeant le même sort au fin tuyau qui courait le long de sa joue émaciée pour se loger dans ses narines. A nouveau, il ferma les yeux, savourant un instant la brûlure de l’air qui emplissait ses poumons. Il était prêt. En poussant la porte, il sentait déjà la chaleur du feu l’envelopper et le nourrir.
Que le maudit verrait-il, tandis qu’il s’avançait dans la pièce, son garde du corps sur les talons? Un frêle vieillard grelottant, titubant lentement vers la tombe ? Inacceptable.
Non.
Son meilleur lieutenant, de retour.
En route vers leur plus grandiose triomphe.
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Jeu 25 Avr - 20:04
3ED2Y Début 1510 ~ Burj Babil - Cœur du Nouveau Monde
« … ainsi que sur les armements. Cela renforce donc la synergie, non seulement d’un point de vue commercial, mais surtout, cela vient compléter notre offre de service global et crédibilise ainsi notre position à propos de… »
Les palabres s’effondraient tels des objets célestes sur un bastion révolutionnaire, les unes succédant aux autres, dans un insatiable ballet dont je ne retirais qu’un profond ennui. Les réunions s’engorgeaient de débats, et les idées étaient trimballées, pesées, contrebalancées puis reformulées dans des discussions qui semblaient se vouloir plus éternelles que la neige de Yukiryu. Chaque détail devenait le prétexte idéal pour s’y attarder davantage, et ainsi poursuivre cette interminable hérésie : c’était comme si chaque participant se livrait à un concours d’endurance où seul le dernier encore apte à discuter se verrait congratuler.
« Encore les yeux fixés là-dessus, hein…? »
La palabre vint me sortir de cette boucle monotone dans lequel les messagers de l’ennui avaient tenté de cloîtrer. Pour autant, je n’y accordai aucune considération pour la simple raison que je ne portais aucun intérêt à dialoguer avec son colporteur. Sans doute tentait-il lui aussi d’y échapper, après tout, mais cela n’effacerait pas le manque de considération que…
« Avoue, elle te manque, hein... »
Cette fois l’offensive fut mouche et je fus contraint malgré moi de décrocher les yeux du bout de papier hypnotique qui captait jusqu’alors mon attention pour venir fusiller l’homme qui osait se jouer de moi. Il fallait lui reconnaître sa dextérité dans le maniement des aiguilles puisqu’il avait su distiller l’une d’entre elles avec une précision suffisamment chirurgicale pour me piquer au vif. Mon regard tenta de l’incinérer, comme pour le maudire pour son audace nouvelle, cet excès de confiance qu’il arborait depuis le désastre de San Tulum et qui lui donnait des ailes. Il ne manquait ainsi que bien peu d’occasions de m’assaillir de ses remarques aiguisées, comme s’il caressait le dessein de me percer à jour.
Visait-il juste ? Mon comportement défensif tendait à le corroborer, bien que l’absence du Haki ne pouvait au final le démontrer ni l’affirmer. Quelle posture devais-je adopter ? Une réaction excessive ne ferait que mettre le feu aux poudres et mettrait ainsi en péril le secret que je désirais ardemment protéger.
Je pestais une nouvelle fois intérieurement. Quand étais-je devenu aussi faible ? Aussi pathétique ? N’étais-je pas en train de devenir la caricature de ce que j’abhorrais ? De ce tout ce que je pouvais décrier ? Pire encore, Norton lui-même devait se retourner dans sa tombe, face à la décadence venue m’envelopper.
Je pestais encore et toujours, à défaut de disposer d’un autre remède à ce constat qui m’ankylosait. Alors, mes yeux s’empoisonnèrent de nouveau aux oscillations doucereuses qui faisaient frémir jusqu’à mon âme. Mon épiderme demeurait tatoué par la douleur, tels les échos du passé prêts à fissurer mon carcan, comme pour précipiter ma perte. Oui. Les femmes étaient les plaies de l’homme.
[...]
Et puis, les secondes chassèrent les minutes jusqu’à sonner le glas de nos tourments respectifs. Ou plutôt, cela se fit via l’écho d’une voix familière proclamée par l’intrusion d’un corps étranger au sein de cette confrérie qui complotait à l’ombre de regards indiscrets. A l’ombre, certes, mais à la lumière de nos profits grandissants, Midas se serait plu de préciser : « A l’ombre du low business, assurément ».
« Eden Chapter. »
L’écho solennel résonna dans la pièce comme pour annoncer l’arrivée de l’être fatidique qui semblait venir d’un autre temps, et dévoila ainsi son identité quelques secondes avant que ses traits ne se révélassent aux lueurs embrasées du salon.
« Si près du but… »
Oui, pour sûr il aurait pu être l’élu, s’il n’y avait pas eu ce rien pour se mettre en travers de ce qui aurait dû être une véritable master class. Sinon comment nommer l’acte qui aurait permis de se jouer de l'Impératrice ?
Un zeste de frustration qui venait inéluctablement se mêler à l’amertume d’un verre encore à moitié vide, comme si son poison ne saurait réprimer réellement cet état de fait : encore une occasion manquée.
Pour autant, celui à qui j’avais failli être redevable à vie ne cristallisait aucun ressentiment de ma part : il était au contraire la preuve qu’il était une élite précieuse parmi les lieutenants qui m’épaulaient, et qu’il épousait même parfaitement mes caractéristiques. Un potentiel sans commune mesure, et dont l’impitoyable réussite n’attendait et ne dépendait que de l’alignement des astres. Cette compétence si précieuse, celle de se créer des opportunités.
« Deux ans dans le Nouveau Monde… pour quel bilan…? »
Commençais-je par grommeler, avant d’être interrompu par le maître des lieux
« Oh pour sur, les résultats financiers sont équivoques, nous… »
La paume de ma main alla claquer le pan de mur le plus proche dans un bruit sourd, comme pour faire taire cet ahuri qui n’avait d’yeux que pour des choses superflues, et pour rappeler ma posture.
« Il suffit ! Je n’ai que faire que l’argent, alors change de disque. »
Rétorquais-je sèchement à son attention, lui notifiant clairement par le fait de la mettre en veilleuse. Et puis, la solution vint éclairer mon esprit jusqu’alors embrumé par la morosité, s’imposant d’elle-même par son irruption.
« Chapter. »
Oui, il était le vent frais venu souffler les harassants germes qui s’étaient insinués à mes côtés pour jouer les bien pathétiques conseillers.
« Donne-moi ton avis, sur notre situation actuelle. Sur le bilan que nous pouvons tirer de ces deux années. Sur la tendance future que tu entrevois pour nous. »
Il avait là l’opportunité de réaffirmer sa place au sein de nos troupes, de démontrer son expérience et son recul, et de supplanter ceux qui s’étaient trop reposés sur leurs lauriers, durant ces deux années.
Et puis, après l’avoir patiemment écouté, je poursuivrais dans mon sinistre élan, recentrant s’il le fallait sur un point de vue un peu plus personnel de notre situation.
« J’ai trop perdu… »
Murmurais-je dans un élan de dépit, tout en faisant lentement glisser ma main hors du cadre, ce qui dévoila les affiches disposées dans l’encadrement qui s’apparenterait presque à une ode à la gloire de nos meilleurs pirates, comme pour afficher leurs hauts faits et célébrer leur notoriété. Quatre d’entre elles surplombaient les autres, par leur récence, et donc l’encadrement doré était sobrement titré :
HALL OF FAME
EDWARD LAWRENCE
439.000.000
TUCKER LAW
150.000.000
EDEN CHAPTER
135.000.000
MARORN PREGWICH
104.000.000
LEON WINTER
99.000.000
LILITH
80.000.000
O-KARAI
41.000.000
JOSH
29.000.000
CELESTE
23.000.000
Prime totale de l'équipage :1.100.000.000 B
[...]
« Hall Of Fame ? Quelle ignominie, c’est plutôt Hall of Shame ! »
Crachais-je dans une amertume encore iodée par la tournure des évènements.
« Quand d’autres se paluchent sur ces montants, et consacrent leurs miséreuses existences à faire grossir ces chiffres… Pourquoi leur accorder tant d’importance ? Pourquoi dussent-ils être les fondements de nos réputations de forbans ? Alors qu’à mes yeux, ils ne sont que le reflet de cette chose si précieuse que l’on fantasme à nous retirer : notre liberté. »
Oui la liberté, c’était le trésor auquel j’avais dû renoncer au cours de ces deux années, sur bien des aspects. Et cette insidieuse vérité n’avait de cesse de me consumer, de me faire sombrer dans des insinuations qui n’avaient de cesse de me tourmenter. Le jeu en valait-il la chandelle ? N’avais-je pas fauté, appâté par les gains illusoires ?
D’une traite, je consumai le liquide contenu dans mon verre à l’intérieur de mon brasier intérieur, comme pour étouffer les tourments qui m’asphyxiaient. Mon regard s'attarda de nouveau quelques instants durant sur l'une des affiches, l'arrosant du rouge aussi profond et complexe de mes iris que pouvaient l'être mes sentiments, avant de se poser sur le vieillard dont l’heure n’était pas encore arrivée.
Un rire nerveux me fit vrombir.
Alors, je glissai jusqu’au fauteuil sur lequel j’étais avachi jusqu’à alors et le contournai pour m’accroupir devant une seconde table basse carrée, disposée dans l’angle mort du second canapé qui était adossé au premier. La surface plane était morcelée de petits carreaux clairs et foncés, sur lesquels étaient disposés des éléments parfois empilés, parfois dispersés, et eux aussi teintés d’obscur… et de lumière.
« Seikatsu… Les primes… Hadès Tenryon… La ruche… »
Comment était nommé ce passe-temps qui déjà ? Était-ce le fameux « Shogit » ? Un passe-temps découvert récemment dans ces contrées reculées du Nouveau Monde. Dans les ruelles de Burj Babil, il m’avait semblé entendre certains habitants nommer cela le « Gungi ». Mais peu importait le nom de ce passe-temps dont les règles ne m’étaient pas familières et ne me concernaient aucunement : je me plaisais à m’en servir comme d’un outil afin de modéliser des idées, des situations, et donc des opportunités.
« Faire mentir les apparences… Isoler le roi… Dos au mur… Le destin nous réserve parfois de vicieuses surprises… »
Oui, c’était cela.
« Oy oy Ed, me dis pas que… »
Josh avait d’ores et déjà compris. Après tout, il était le mieux placé pour voir venir ce type de stratégie, même s’il manquait de clairvoyance pour se défaire de mon pernicieux jeu d’acteur…
« Et alors, d’ici un an ou deux… au moins un des cinq empereurs sera tombé. »
L’annonce prophétique déferla, désarçonnant les pauvres âmes qui ne s’y étaient pas préparées. L'estimation était basse, mais pouvait aisément s'incrémenter selon divers paramètres.
« Le fondement d’une opération décisive. »
« Le battement d’aile d’un papillon qui lèvera le rideau d’une nouvelle ère. »
Le nom de l’opération était tout trouvé.
« Honeypot ! »
__________
Qui peut bien être la personne mentionnée par Josh ?
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Lun 29 Avr - 17:04
3ED2Y
Lorsque je ne sais quoi faire de mes journées, entre la chute et un nouveau saut, j’en reviens toujours à un ensemble de questions. Ces questions-là, je n’ai guère envie de les détailler ici. Après tout elles sont du genre à vous pousser dans vos derniers retranchement, vous confronter à ce que vous êtes sans artifice aucun. Vous vous retrouvez là, au milieu d’un spot de lumière blanche, vos contours dénudés, vos bourrelets accentués par les ombres. Vous vous rappelez alors ce que vous êtes : un bout de viande malformée, au mieux un esprit mal fagoté.
Alors tout se résume qu’à une seule question.
Quelle vie est-ce que je mène pour en arriver là ? Puis, aux conseils de cette gamine, je me munis d’un carnet et d’une page blanche.
« Une vie humble et simple. »
Banale, même.
Le plaisir d’accueillir l’ennui dans son quotidien. Le laisser s’installer à nos côtés et nous permettre de prendre du recul sur ce que l’on fait, sur ce que l’on a fait, surtout sur ce que l’on va faire. Et… à ce moment-là est censé venir, du moins je suppose, l’excitation. Celle de pouvoir se lancer dans ce que l’on souhaite, sans se soucier du passé, celle de pouvoir ouvrir un tout nouveau carnet, le plaisir de découvrir sa première page blanche. Se demander comment on compte la remplir, avec quel mot commencer. Plutôt que d’imaginer la fin, se contenter de la dynamique des phrases : un mot en entraîne un autre, forcément, un sujet se lie à un verbe, celui-ci induit une action qui se doit d’être décrite.
Une page se tourne ainsi, tandis qu’un nouveau récit s’esquisse. Alors on peut s’estimer heureux, le projet est lancé et rien ne saurait l’arrêter. Après tout, le plus complexe est, ici, de débuter. Mais, dans mon cas, je me sens bien rapidement rattrapé par cet amas de mots qui se succèdent sous mes yeux, qui ont pris le contrôle de mon pouce et de mon index pour s’écrire d’eux-mêmes, dans le seul but de compléter une phrase puis un paragraphe.
Soudaine pause.
Là, à cet instant précis, je me condamne.
Je fais l’erreur de m’arrêter, de me soustraire à cette dynamique hypnotisante. Mes yeux peuvent ainsi se pencher sur le texte pondu, mon cerveau sur son possible sens : plus que la forme, il requiert le fond. Qu’est-ce que ce texte raconte ?
Ces mots reviennent ainsi, toujours souligner le pathétisme de mon quotidien. Parfois, on pourrait y retrouver un élan d’ambition. Un élan, tout au plus, car on en revient toujours à la même chose : de l’apitoiement, un semblant de mélancolie, puis de la nostalgie d’une vie passée… sans le moindre encombre. Sans la moindre saveur, mais aussi et surtout sans la moindre difficulté.
Alors l’affligeant constat me tombe dessus en chape de plomb. Le spot se rallume pour me planter là, dans l’obscurité, face à ce miroir se muant en page blanche.
Je me laisse aller, une nouvelle fois et encore une autre j’écris un truc de ce genre.
« Un truc », hein.
C’est bien ça : mes ambitions. Un truc. Car il n’y a d’autres mots pour les décrire, un rêve de s’élever aux sommets pour voir ce qu’il s’y trouve. Je m’élance ainsi dans cette quête qui se devrait d’être exaltante, presque héroïque, je me serais transformé en un homme en mission : un être dont la volonté le mènerait, envers et contre tout, à sa finalité.
Puis je vis et l’histoire s’écrit. Alors je fais pause et je lis.
Je… comment un texte peut-il réussir à m’ennuyer à ce point ? Est-ce que c’est que je n’ai déjà plus rien de bon à raconter ? Là, loin des affres du néant, des tribulations imposées par l’ennui, mes habitudes ankylosantes et mon pessimisme cancéreux ? Sans l’ensemble de ces défauts, de ces saletés qui viennent noircir le tableau, texturer mes textes de ces mots me définissant… cette quête, la vie qu’elle implique me paraît étrangement fade.
Insatisfaisante.
Mes entrailles me tiraillent. Elles me réclament un plat gourmand, à défaut un ignoble plat pourvu qu’il soit rassasiant. Un tord-boyaux.
Je veux tout foutre en l’air, plus que regarder en arrière, sauter de la falaise, délaisser la femme que j’ai parasitée pour parvenir jusque-là.
Le vide appelle le vide, aussi ma nature me rappelle à elle. Elle ne souhaite pas changer, je me demande même si elle peut. Mon désir d’une autre vie n’aurait donc été qu’une fabulation ? Un moyen trouvé par mon esprit, dans un énième moment de faiblesse, pour me soustraire à ma réalité, à ce que j’étais. Me projeter dans la peau d’un autre, un de ceux dont les contes me rendaient envieux. J’avais d’eux une partie, après tout. Un esprit morcelé, constamment pris entre deux feux. Tiré par chaque bras comme une vulgaire poupée que se bataillent deux enfants. Un capricieux qui refuse de déménager de son confort chaotique, l’autre souhaitant s’émanciper de son foyer devenu trop petit pour lui.
Je me trouve à la parfaite lisière. Au mieux stagne, au pire régresse face au temps qui défile. Je perds, je me consume dans le silence sans rien produire en échange. Pas même une ténue flamme qui se ferait balayer d’un simple geste.
Ma vie ne se résume qu’à un simple constat. Je le sais bien et me dois de l’accepter. Mais rien qu’à y penser j’en ai honte. Je me sens ridicule.
-Basil. Basil Baxter.
Si la vie n’était qu’un livre, je ne serais sûrement pas son protagoniste. Et, je n’ai pas envie de le devenir. Ca me pousserait à confronter l’existant pour lui prendre la place. A comprendre que, s’il est morcelé comme j’estime l’être, c’est pour une bonne raison. Une meilleure que mes défauts de bon à rien. Une raison que je n’ai guère envie de connaître, d’ailleurs, car je suis certain que je ne pourrais la survivre.
J’en suis certain, désormais. Je ne peux me permettre de prétendre devenir comme ça, de rêver de sommet et de faire face aux épreuves que ça implique. Comment le pourrais-je ? Je ne peux même pas supporter la présence d’une simple personne. Comment pourrais-je soutenir l’être ?
-Fais-le.
J’en tremble. Mes jambes sont tétanisées, mes épaules écrasées. J’ai du mal à respirer. La vitre s’est brisée, le sol fissuré. Les faces-de-carte en costard se sont ratatinés sur eux-mêmes avant de choir, et ces deux types qui ont essayé de m’extorquer sont désormais inertes, les yeux révulsés.
Il n’a fallu qu’une chose pour causer ce désastre. Il en faudrait bien moins pour m’écraser aussi, me réduire à rien sinon qu’à ce que je suis : de la chair boudinée jonchant le sol. Mon corps frisonne, mon crâne est comme ceint d’un arceau, je peine à lever l’index pour obéir à l’ordre que l’on m’a donné. Mes paupières frémissent, mes yeux me renvoient qu’une feuille dont les numéros inscrits se confondent à mesure que je respire.
-Bien. Dis-le, quand c’est bon.
L’appareil m’est plaqué contre le menton alors qu’il se met à tonner. Je me rembrunis étrangement, comme si la pression exercée sur mon corps se faisait moindre. Je me tente à lorgner cette conne qui me tient par le col, sa chevelure écarlate et ses traits drôlement doux. Comment peut-elle ne pas être ridée à force de côtoyer une telle présence ? Si lourde et étouffante.
???
-Quatre mots, pas plus.
Mon regard la délaisse, pour se diriger vers l’ombre de laquelle je ne pouvais discerner que la silhouette. Elle était aussi découpée par les spots de lumière, mais ne semblait en souffrir comme quand j’y suis exposé. Non, la lumière semble la mettre en valeur.
« Gatcha »
-Basil Baxter, San Tu-
Le gastéropode m’est arraché vivement par la gosse avant qu'il puisse retranscrire tous mes mots, de là il se met à flotter et fuser jusqu’à l’ombre solidement ancrée à l’entrée de la pièce. Soudain, je sens son poids m’aplatir à mesure que je la fixe, mes genoux cèdent, puis je m’écrase de moi-même sur un sol fissurant. J’en suffoque presque et bataille pour rester conscient. Car, je sais que si les ténèbres me saisissent, je ne pourrais m’en relever si facilement.
Je repense aux sommets. A ce livre de la vie. Cette envie d’être protagoniste.
Une vague noire d'inconscience me noie.
« Une vie humble et simple ? »
???
-Dead-End. Jorogumo. Ren Tao. La Triade. La Mafia de Konan, la Cour Décima, Paradise, l’Alliance des Chasseurs de Prime et… était-ce trois des quatre Empereurs ?
Une voix sévère et nette portant une question ayant le tranchant de l’ironie. Le gastéropode traversé par celle-ci plissa des yeux un instant, cherchant à étudier des traits qui n’était que plis inquiétants tapis dans l’ombre.
-Maintenant quoi, Basil Baxter ? Le premier pirate croisé ? L’anonyme n’aurait laissé le temps à son interlocuteur de répondre, sa pause fut brève pour ajuster son ton. Perdez-vous la tête, Mr H ?
Une seconde pause, plus longue cette fois-ci. Comme pour laisser à ce dernier mot la possibilité de respirer, enfler dans l’esprit de son interlocuteur sinon y résonner en écho d'une entreprise déjà lointaine.
-Cet appel est sécurisé, par respect plus que par nécessité. Je suis sur Burj Babil, au 41ème étage. J’ai une offre à vous faire, une que vous ne pourrez pas refuser. Rencontrons nous.
Là, le Den-Den Mushi se tint dans un silence opaque. Il attendait réponse.
« Comment vivre simplement, lorsque l'on a osé lorgné le sommet ? Lorsque l'on a constaté qu'il n'y a de sommet qu'un trône vacant.»
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Jiva
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Ven 17 Mai - 15:07
3ED2Y
Burj Babil – Mars 1510
Si près du but.
Oui. Il détourna le regard, moins par gêne que par dépit. Sa mâchoire, saillante sous une peau tirée, se serra. Fut un temps où ce genre d’annonce aurait piqué à vif sa fierté. Fut un temps où ce genre d’annonce n’aurait pas été faite.
Il s’écroula plus qu’il ne s’assit dans le siège que Léon avait tiré pour lui, au plus près du feu. Il ne prit pas la peine de détailler les convives. Peu comptaient. Le visage penché, ses yeux restèrent fixés un instant sur ces mains hideuses, difformes, qui, plus que tout le reste, trahissaient sa condition. Un rappel, douloureux et constant, de tout ce qu’il était. Si près du but, oui. Il les fourra rageusement dans les poches de son imperméable, lutta pour se redresser. Son sourcil se dressa lorsqu’il fut hélé.
Un soupir.
Le futur. Depuis leur première rencontre, l’explosif Nebula n’avait jamais eu que ce mot à la bouche. Comment aurait-il pu en être autrement ? C’était là toute sa force. C’était, après tout, pour cela qu’il l’avait choisi. Trente ans, et l’Univers face à lui. Le futur. Une richesse inestimable. Plus que jamais, le vieillard se sentait dévoré par l’envie. Le voile gris pâle de ses iris, vidé de toute âme, plongea dans le brasier incandescent de celui qu’il aurait dû suivre au sommet. La vie avait un drôle d’humour.
- Ca pourrait êt’ mieux, finit-il par accorder. Depuis leur dernière rencontre, sa voix était s’était réduite à un souffle rauque et traînant, à peine compréhensible pour qui ne tendait pas soigneusement l’oreille. Les choses avancent, mais on s’fait devancer. On est dev’nus lents… Parc’qu’on manque de moyens. On a l’or, oui. Mais on est seuls. C’qu’il nous faut, c’est les appuis. Les voix. L’amplifi...
Sa voix s’effaça, et il dût s’interrompre quelques secondes, cherchant son souffle. Il toussa et cracha au sol, puis son regard balaya pour la première fois l’audience, défiant certains de ceux qui jalousaient sa place, l’attention que lui portait leur capitaine. Les hyènes couardes qui n’attendaient que de le voir s’épuiser.
- C’qu’on a accompli ou non, poursuivit-il en s’attardant sur le maître des lieux, au final on s’en fout un peu. C’est du fond. C’qui compte, c’qui compte vraiment, c’est l’narratif. L’histoire. C’qui s’dit, c’qui s’pense. C’que le monde retiendra.
Il ferma les yeux un instant, inspira longuement. Doucement, presque imperceptiblement, sa posture sembla se redresser. Son visage reprendre le peu de couleur dont il disposait. Ses doigts, serrant fébrilement l’accoudoir, s’allonger. Lorsqu’il ouvrit les yeux, ses paroles se furent plus sures. - Qui est Edward Lawrence ? Qui est-il, et qu’est-il ? Que fait-il dans le Nouveau Monde, depuis maint’nant deux ans ? Qu’a-t-il construit ? D’où vient-il, et où va-t-il ? Quelle place occupe-t-il, dans le grand ordre des choses ? Et surtout, quelle place occupera-t-il demain? Pourquoi le monde doit-il entendre son nom?
Il fronça les sourcils, et baissa les yeux sur sa main droite qu’il ferma et ouvrit à plusieurs reprises, faisant craquer ses jointures.
- Ce qu’il nous faut, c’est reprendre le contrôle de l’histoire. Devenir les narrateurs.
Les primes, la notoriété, la puissance, l’influence, la richesse. Le destin. La vie. Des leurres. Des mirages, des accessoires de scène, d’habiles jeux d’ombres et de lumières au service de la seule narration. Le vieil archiviste avait pu s’en convaincre, désormais ; son obsession pour la documentation avait été futile. L’histoire se passait dans les yeux du lecteur. Les mots lui faisaient prendre forme. Elle était ce que l’on faisait d’elle. Son impétueux capitaine, si jeune soit-il, semblait le comprendre. Tandis qu’Edward Lawrence dévoilait les fruits de son esprit, un sourire carnassier étira lentement les lèvres du châtelain, dévoilant une dentition tordue et jaunie et déformant hideusement son visage. Oui. Oui. Il était là. L’homme qui deviendrait légende.
Et puis, la sonnerie. Le discours, arrogant, accrocheur. Le silence, calculé. Un appel qui en rappelait un autre auquel il avait assisté, deux ans plus tôt. Pour le même résultat ? Mais ce ne fut pas ce qui l’interpella. Au bout de la ligne, la confiance n’était pas injustifiée. Comment n’avait-il pas su plus tôt ? Haussant les sourcils, celui qui aurait dû, eussent les choses été différentes, porter le sobre nom de Mr K s’enfonça dans son siège, guettant avidement la réaction de l’homme que l’Univers s’acharnait décidément à placer sur son chemin.
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Edward Lawrence
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Dim 28 Juil - 23:06
3ED2Y Début 1510 ~ Burj Babil - Cœur du Nouveau Monde
La voix fébrile de l’ancien résonna entre les murs de l’éloquente pièce, parfois entrecoupée par les hoquets et autres quintes de toux qui offraient un rappel de ce qu’il demeurait aux yeux de tous, mais surtout aux yeux du temps. Un être d’une autre époque, las de la longue vie qu’il avait mené et sans doute encore plus las de l’éventuel épilogue auquel il ne saurait se dérober.
Ses palabres se succédèrent lentement, dans des crachats aussi horrifiques que sublimes, insinuant des idées et des images auxquelles il était difficile de rester insensible. C’était là la sagacité des anciens, cette fabuleuse faculté à se servir de leur vécu pour voir clair dans les desseins là où leurs yeux fatigués peinaient à détailler le moindre dessin.
Aussi fascinant qu’ennuyeux, aussi majestueux que vicié : telle était la douce contradiction qui ne cessait de s’étioler à mesure qu’il s’employait à l’édifier. Comme pour légitimer que le paradoxe était le maitre-mot de ceux dont le patronyme arborait un ‘Ed’.
Et tu demeurais là, comme emmuré dans ton propre château, t’abreuvant de ses paroles comme s’il s’agissait de la dernière pluie dans le désert de tes incertitudes, au sein d’une coupe dont le reflet n’avait bien qu’une seule certitude : tous les jours allaient à la mort. Tels des grains qui s’échoyaient inlassablement, prisonniers de leur palais de verre.
--
Tu te délectes de ses mots qui entrent en résonnance avec les idées houleuses qui germent dans ton esprit nébuleux.
Tu te réjouis de sa présence à tes côtés et te redresses comme pour mieux apprécier son discours, une leçon de vie adressée à ces jeunots qui n’usent que bien trop des mots.
Tu apprécies sa clairvoyance et ce à quoi il se réfère probablement, ce qui t’as jadis marqué. Bouleversé, désarçonné, désassemblé, dévasté, détruit.
Et qui a fini par donner naissance à ce que tu es aujourd’hui. Ou du moins ce que tu t’efforces de devenir.
« Toutes nos légendes finissent mortes ou déchues. »
Te fends-tu, comme pour adouber le propos tenu en rappelant cette évidence.
Et puis ton nom résonne, ce qui flatte ton égo. Cet obséquieux égo qui bouillonnait dans tes veines avant même ta naissance et dont tu n’as jamais pu réellement te défaire.
Un premier avertissement, une première évidence… que tu balaies pourtant sans ménagement, dans cet éternel déni qui vous caractérise tant, toi et tes devanciers
Irrécupérable.
Tant pis, tu laisses ses questions affluer, faisant miroiter en toi des insinuations et autres vagues desseins. Tu sais, tes fameux projets. Et cette question existentielle, à laquelle il t’est fondamentalement impossible de répondre.
Tu arbores un sourire, comme pour confirmer à ceux qui douteraient encore que le vieux briscard ait pu dispenser la juste parole. Sans doute attendent-ils un autre de tes discours animés. Pour faire ce que tu fais si bien, fédérer tes troupes en matérialisant une idée. Et surtout, les actions concrètes à mener.
Mais tu demeures interdit. Entravé par cette force invisible venue saper les tiennes. Car cette fois, tu ne parviens pas à t’y soustraire.
Tu frissonnes.
Des émotions indésirables te traversent, pour te ramener à un écho que tu aurais voulu voir disparaitre. Mais tu es naïf que croire que tes fantômes cesseront un jour de te hanter.
Tu te mets alors à haïr ce vieil homme déjà en train de se fossiliser. Lui qui représente à la fois la source et le combustible qui alimentent ces maux qui déchiquettent doucereusement ton âme.
Ton regard perd son éclat.
La sensation de froid s’intensifie et se propage dans tous les pores de ton corps. Puis, les traits de l’anciens semblent se froisser, sa silhouette s’épaissir, sa chevelure s’affiner et se saturer légèrement vers l’ocre. Jusqu’à dissiper ton déni.
Une douleur lancinante te martèle le crâne. De très légers spasmes ankylosent ton corps. Et le contrôle de ton Haki t’échappe alors totalement.
Tu es risible Lawrence.
Toujours hanté par l’image de ce vieillard tremblant dont les traits autrefois vigoureux ne font que s’effondrer sur eux-mêmes, et dont le teint est nettement influencé par la surconsommation d’alcool.
Tu es ainsi fait Lawrence.
Tel est ton héritage : chacune de tes inspirations viennent le réaffirmer, mais sans dévier le message inéluctable qui parcours tes veines.
Ainsi tu es fait, Lawrence.
Tel est ton naufrage : chacune de tes expirations viennent te renfrogner, mais te vider de la moitié du cépage indésirable serait chose vaine.
Alors tu les entends de plus belle, ces échos qui se multiplient. Ceux de chaque vie qui s’émeut, qui s’épie.
Leurs pensées sont mortifères alors leurs existences t’indiffèrent. Tu les jauges éphémères, ainsi leur destin te sont offerts. Les réduire au silence serait la seule chose à faire.
Est-ce le mal qui te ronge ou la mer qui t’y plonge ?
L’empathie est une bien douloureuse calomnie. Elle te consume, et malgré toute ton éminence, t’enlise dans cette évidence.
Tu t’agites.
Tu oscilles la tête de manière frénétique. Tu tentes de réprimer ces émotions qui te gangrènent. Les étouffer avant qu’elles ne parviennent à éventer ton secret.
Un souffle froid s’extirpe de ta caverne buccale. Tes yeux s’affaissent.
Être Lawrence, c’est ça ta plus grande faiblesse.
Ta vision se floute, le monde pivote autour de toi et ses couleurs déchantent. Ton désespoir s’étire davantage à chaque seconde qui s’échappe.
Inexorable. Indomptable. Immuable.
Tu ne peux t’en défaire. Au fond, personne ne le peut.
Cesse de lutter, et laisse-moi simplement t’enlacer. Laisse-moi t’ôter ces chaines qui te retiennent.
Mais tu continues de te dérober, comme si cette liberté tant fantasmée n’était qu’un mirage destiné à te faire perdurer.
Pourtant le compte à rebours est bel et bien enclenché.
Son cliquetis frénétique te martèle le crâne dans une vive douleur comme pour façonner ton tombeau.
Le temps est compté, Lawrence.
Et bientôt, nous serons de nouveau réunis.
--
Les échos lointains de la vie qui fourmille autour de toi ne semblent plus t’atteindre. Pourtant, tes pairs s’agitent lorsque résonne le chant équivoque du mollusque jusqu’à enfin être interrompu. Pas la moindre réaction de ta part. Tu demeures cloitré dans ton inertie, comme vidé de ton essence.
Des sourcils autres que les tiens se froncent lorsque résonnent des palabres qui pour certains demeurent familières, sur un ton qui aurait presque pu être moqueur. Et puis, la mèche tapie dans tes yeux s’allume lorsque le briquet vient à s’enclencher.
« C’est curieux, y’a deux ans, personne me calculait. Mais depuis cette nouvelle prime, le den-den se remet à sonner… »
L’hypocrisie dans toute sa splendeur. L’importance n’est pas accordée au nom du potentiel latent et des projets avancés, mais au poids d’une renommée attribuée arbitrairement par une entité extérieure. Rien qui puisse garantir la fiabilité de cette mesure, en somme.
« Combien de grands noms ont été des Basil Baxter avant de tutoyer les sommets ? La grandeur s’obtient des débuts modestes. Et les derniers seront premiers. »
Basil Baxter, Josh et même Edward Lawrence et Zetsu Fudo. Des individus pas bien différents, au fond. Qui n’étaient rien au départ, et qui se sont affirmés, avec le temps. Ou le feront, à l’avenir. Certains dans la pleine lumière, certains dans l’ombre. Au travers des faits que l’Ignorant et l’Aveugle ne peuvent voir.
« Et toi ? Qui es-tu pour prétendre savoir qu’un pirate n’ira nulle part ? Empêche-nous de rêver et on t’empêchera de dormir. »
Tes veines se congestionnent et viennent afficher la rage latente qui t’anime.
« Nous verrons qui de nous deux va perdre la tête, tocard. Je me rends au 41ème étage, il sera pas assez vaste pour que tu puisses t’y cacher. »
Le temps est compté.
N'est-il donc pas tant de brusquer vos rêves ?
__________
Ed a écrit:
Bonjour, Je souhaitais rendre hommage à travers ce poste à mon cher compagnon d'écriture et d'infortune Eden Chapter, à qui je dédie ce poste, après avoir été touché par le sien. Quoi de plus normal de laisser transparaitre ce qu'il a pu m'inspirer dans mon propre poste et à travers Edward Lawrence qui s'en voit à son tour relativement bouleversé. Et d'y accorder suffisamment d'importance pour que cela influence la suite de ce rps et même des prochains (en particulier sur le pillage)... Merci Chap de ce temps que nous passons ensemble à nous lire et nous écrire. C'est une belle aventure et avec les aléas de nos vies respectives, au fond, on ne sait jamais vraiment combien de temps elle peut encore durer. Alors continuons de profiter de chaque poste comme si c'était le dernier, porté par le vent de nos inspirations respectives. Merci, Ed.
_________________
Membre du club officiel des "Victimes d'Erwin le vicieux" et des "Victimes de Pumori".