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Race : Humain
| Mer 15 Jan - 0:05 Tic... Toc. Un épais manteau couvrait mes épaules pour me protéger des vingt degrés négatifs qui gardaient l'île captive dans une ère glaciaire à basse échelle. Je détestais les températures basses ! Je détestais devoir porter une tonne de vêtement pour ne pas attraper la crève ! Franchement, cet endroit était une véritable torture et je ne venais ici que pour répondre à l'une des attentes de Miu : Faire un bonhomme de neige. Je recherchais donc toute île à basse température qui pourrait correspondre à ce profil. Mais quelle erreur de venir en ces lieux ! Pas de neige, la température et l'atmosphère n’étaient pas idéales. Par contre, la glace aurait pu envahir les lieux si une énorme brume qui ressemblait à de la pollution ou à une catastrophe dans le genre n'envahissait pas le ciel obscur déjà recouvert de quelques nuages incertains. Peut-être était-ce aussi du au fait que la saison n'était pas propice au gel de l'eau.
Le seul endroit de l’île où trouver un peu de chaleur était le bar, dans mon cas. C’était l’un des rares endroits que je pouvais côtoyer sans avoir besoin de justifier la présence d’un animal à l’espèce indéterminée mal vu par la populace locale - Mon compagnon Miu. Les habitants n’étaient de toutes les manières pas mieux avec leurs yachts aux couleurs salies par la pollution. J’en avais vu quelques-uns et ils faisaient peine à regarder.
En arrivant dans la beuverie, j'observai les lueurs tamisées habituelles au-dessus du comptoir. Tous ces endroits, sur toutes les îles que j'avais pu visiter, se ressemblaient. Un homme à côté de moi, la tête baissée et le cou légèrement déformé vers l’avant, passa la porte en la claquant trois fois. Arrivé au bar, il prit le tabouret et le remit à sa place trois fois d’affilée, attirant mon regard curieux et mon esprit analytique. Il était sûrement sujet à des tocs, des troubles neuronaux que j’avais pu observer lors d’un de mes voyages sur une île de Grande Line spécialisée dans la médecine. Elle était aussi, entre autres, avant-gardiste dans son utilisation de sangsues pour guérir les patients suite à certaines chirurgies.
Il semblait mal à l’aise. Ses mouvements se répétaient toujours en cycle régulier, à peu près toutes les quarante-cinq secondes il répétait trois fois le même mouvement. Que ce soit de déplacer un tabouret, de claquer une porte ou encore de tapoter le bar avec trois de ses doigts. Ce n’était sûrement pas quelqu’un de dangereux, ce genre de problèmes était peu étudié à ma connaissance et on ne connaissait pas de méthode efficace pour les effacer complètement. Les gérer, oui. Les effacer, non. C’était une malédiction, elle ne pourrait certainement jamais, contrairement à la mienne, lui être utile dans certaines circonstances.
Mon sujet d'observation était un homme d’une trentaine d’années En plus d’avoir le cou vers l’avant, son dos était naturellement courbé et sa main droite n’affichait que trois doigts – il avait perdu l’annulaire et l’auriculaire – légèrement crochus. Ses cheveux noirs semblaient naturellement gras et recouvraient en partie un crâne dégarni. Ce n’était pas très encourageant comme physique quand on le regardait de près. En tournant mon regard derrière moi, je fis un sourire gêné à plusieurs filles présentes dans la salle. Étonnant d’en voir de si jolies dans ce petit coin de paradis perdu !
« - Une petite liqueur locale, demandai-je au patron dans l’espoir que cela me réchauffe un peu. »
Lorsqu’il m’apporta ma consommation, l’homme assis à deux chaises de moi avait déjà bu trois verres d’alcool pur et commençait à 'se sentir bien'. Sa descente rapide n’effaçait malheureusement pas ses tocs mais l’écart entre chaque triple répétition s’était élargi de dix secondes supplémentaires. Toutes les cinquante-cinq secondes, il cognait son verre trois fois contre le bar, donnait un coup de pied dans son tabouret trois fois d’affilée ou marmonnait le même mot à trois reprises.
Et quand il aperçut une demoiselle qui lui plaisait bien dans l'assistance, il se dirigea vers celle-ci pour essayer de la draguer. Peu importe qu’il ait des tocs, qu’il soit laid comme un pou ou doté du QI d’une pomme de terre desséchée. Les filles risquaient d’être confrontées à un phénomène. | | | | |
| | Jeu 16 Jan - 15:35 Si sur une île, il y a un bar, ne cherchez pas plus loin, c'est là que vous trouverez Emeryn. Comment ça c'est une alcoolique! Bien sûr que non! Seulement, quand il fait tellement froid dehors que même la neige refuse de tomber, la bouteille, y a que ça de vrai!
La soirée avait plutôt bien commencé. Le bruit des conversations, porté par de nombreuses voix basses et masculines, enveloppait agréablement Emeryn. En fermant les yeux, elle se laisse presque bercer par le bourdonnement. Assise sur un tabouret haut, nonchalamment accoudée au bar, elle se tient les jambes croisées, comme à son habitude. Du bout des ongles, elle tambourine sur le bois qui brille, poli par des années et des années de frottement du chiffon du barman. La lumière tamisée baigne la pièce dans une atmosphère chaude, bien à l'opposée des vent mordants de l'extérieur. Elle pourrait rester ainsi pendant des heures. Elle n'a pas besoin de parler aux autres, il lui suffit seulement de les sentir autour d'elle pour se sentir bien. Surtout, elle préfère parfois que certains d'entre eux gardent leurs distances...
Quand on parle du loup, il vient toujours... Elle ouvre les yeux, adresse un clin d'oeil au barman et tend simplement les doigts, l'index et le majeur. Ça signifie qu'elle reprendrait bien une deuxième bière. Elle ne parle pas mais il l'a très bien comprise. Il sourit, essuie un verre avec un torchon à carreaux rouges et blancs, puis s'empare d'une chope, qu'il remplit d'un mouvement agile, forgé par l'habitude. Il fait glisser le récipient sur le comptoir, et elle le réceptionne du bout des doigts. Elle n'est pas bavarde, mais elle est polie.
« Merci. »
Son visage se fend d'un étrange sourire, mi amusé mi narquois. C'est d'elle-même qu'elle se moque. Dans un univers de bourrin, et malgré son sale caractère, elle reste une petite fille. C'est comme ça qu'elle voit les choses. Elle trempe le bout de son auriculaire dans la mousse de la boisson avant de le porter à sa bouche. C'est à ce moment qu'un type la bouscule maladroitement.
Elle tourne vers lui un regard qui se fait tout de suite dur. Qu'est-ce qu'il lui arrive, à celui-là? Il commence à lui parler, mais tout ce qu'il dit résonne dans l'esprit d'Emeryn comme un bourdonnement d'abeille. Ce n'est que du bruit.
Elle cligne des yeux. Elle n'écoute pas ce qu'il dit, mais elle observe. Sa façon de se tenir lui indique qu'il... Est-ce qu'il la drague? S'il n'y avait pas autant de monde, elle aurait soupiré bien lourdement. Arf... Est-ce qu'ils sont vraiment tous comme ça. Dès qu'on morceaux de viande potable se présente, ils sont attirés comme des mouches.
Elle frappe du poing sur le comptoir, fait sauter les chopines.
« Hé, mec. Arrête tout de suite tes conneries. Je suis pas intéressée. »
Mais le type est coriace. Celui-là, elle va avoir du mal à s'en débarrasser. Certains ne comprennent pas vraiment quand on leur dit non. Il insiste lourdement, lui fait des propositions scabreuses. Elle hésite entre lui hurler dessous ou lui mettre son point dans la figure. Seulement ce soir, elle n'a pas envie de se battre. Heureusement, elle a une excuse qui devrait le remettre à sa place.
« T'a pas comprit ce que je t'ai dit? Est-ce que je suis pas assez claire? Je ne suis pas intéressée. C'est trop subtile pour toi peut-être? Je ne suis pas intéressée par les hommes, si tu voit ce que je veux dire... »
Bien sûr, c'est du flan. Mais elle sait que c'est le genre de chose qui devrait le clouer sur place. Au moins elle sera tranquille. Pas question qu'il lui gâche la soirée.
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Race : Humain
| Jeu 16 Jan - 18:53 Ce n'est pas ma faute, c'est la sienne ! La femme à laquelle s’était adressé mon sujet avait du mordant, elle ne semblait pas apprécier de se faire aborder avec insistance par un gars – qui plus est qu’elle ne semblait pas connaître pas et qui n’avait aucune manière. Je trouvais d’ailleurs qu’il s’en tirait comme un manche, bégayait des propos incohérents et répétait trois fois le même mot si il n’avançait et ne reculait pas son siège trois fois d’affilée à la place. C’était vraiment un cas intéressant, mais je n’étais pas médecin et mes observations n’avaient aucune visée curative – sinon, j’aurais cherché un moyen de traiter ses symptômes au lieu de les commenter de manière désobligeante. Détournant le regard, j’observai le barman et lui commandai un jus de fruit sans alcool. Il m’apporta ma collation à la pomme et je la bus d’une traite, attirant sur moi les moqueries d’une bande de gonzesses qui firent monter le rouge sur mes joues.
Ce n’était pas la première fois qu’on se moquait de moi pour ma basse consommation d’alcool. Pas que je le tenais mal, je ne le tenais pas du tout. Ça dépendait des fois. Au bout d’un verre, j’avais déjà l’impression de me prendre pour un observateur, d’imiter le monde de l’espionnage en relevant les moindres faits et gestes que faisant l’homme atteint de tocs. Qu’avait-il en tête en abordant une jeune fille ? Mon regard était aiguisé tandis que mes oreilles trainaient vers sa conversation à mesure que je me rapprochais. La charmante demoiselle avec lui était plus qu’importunée, et si elle semblait se retenir de le frapper, sa langue était plus aiguisée qu’une épée. Il s’énervait de ne pas être compris et commençait doucement à sortir un canif de sa poche. Il fit maladivement le geste trois fois, le reposant et allant le chercher pour finalement le planter sur la table. Toute l’attention de la salle était à présent tournée vers nous.
L’homme au milieu de celle-ci ne semblait pas y porter intérêt. Les personnes les plus peureuses sortirent rapidement du lieu mais la plupart, des curieux qui n’interviendraient pas, se mirent à observer en essayant de se faire discret. Le silence trahissait cette tentative de discrétion.
« - Tu déranges la dame, lui lançai-je sans le regarder, n’ayant d’yeux que pour la femme à qui je jetai un sourire plein de confiance – même si au fond, je n’avais aucune idée de ce que j’étais en train de faire. »
Quelques secondes plus tôt, avant d’aborder le coin du comptoir où ils se trouvaient, j’avais entendu la jeune femme dire qu’elle n’était pas intéressée par les hommes, ce qui me laissait penser deux choses : Soit elle avait une forte attirance pour la gente féminine – ce que je comprenais et respectais totalement (Nous étions tous les deux dans le même cas) – ou alors il s’agissait d’une menteuse exceptionnelle qui utilisait cette excuse pour éloigner son Don Juan. Le pauvre malheureux ne supportant pas la séparation anticipée avait décidé de sortir son canif pour menacer sa proie et l’envoyer voir le médecin le plus proche ! Ou alors pour la faire céder à ses avances sous la pression.
Tout à coup, un petit sourire naquit sur mes lèvres. Mon regard saoul se porta sur l’homme et je me demandai avec un esprit tordu s’il apprécierait de prendre un bain sur les rives de cette île gelée. Ici, une cheminée réchauffait l’ambiance en plus de la chaleur humaine autour de nous. Dehors, seule l’atmosphère sauvage, peut-être polluée, régnait en maîtresse absolue sur les hommes.
Lorsque le charmeur sans charme se tourna vers moi, après ma réplique si bien placée, il fit semblant de ne pas me voir et retourna à sa drague. Vexé, je pris le canif et, faisant mine de le lancer derrière moi, le fis disparaître – et atterrir dans l’eau un kilomètre plus loin. Le sujet commença alors à s’abaisser vers le sol et à chercher son précieux objet. C’était méchant de ma part, mais je ne pouvais pas m’en empêcher. J’avais peut-être l’alcool un petit peu mauvais, un tantinet… susceptible.
« - Excusez son comportement, dis-je avec une voix grave fortement prononcée – exagérée. Il n’a pas de manière, puis-je vous tenir compagnie sans arrière-pensées ? »
Oh, des arrière-pensées, j’en avais des tonnes ! Aucune qui puisse, cependant, m'amener à de telles extrémités qu’utiliser un canif ou contraindre une demoiselle qui ne semblait pas pouvoir être contrainte. | | | | |
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| Jeu 6 Mar - 19:35 Le pardon. En regardant couler l'eau sur le bord de l'île, j'essayais vainement de me rappeler quelle avait été la suite de ma soirée. Impossible de dire si on ne m'avait pas tout simplement jeté du bar quand j'avais commencé à dégobiller dans la salle ou si c'était à cause de la bagarre que l'homme aux tocs et moi avions eu à propos d'une demoiselle que je n'avais pas revu après. Quel dommage, ça aurait été tellement sympa de passer une bonne soirée avec elle. Je me passai de l'eau gelée sur le visage pour effacer mes vilaines pensées et fixai suite à cela, durant quelques secondes, mon reflet brisé. C'était si calme... Si apaisant... Je soupirai. Bien sûr ce genre de situation avait son charme mais ce n'était pas quelque chose que j'appréciais. Miu m'aurait disputé s'il m'avait vu dans cet état, heureusement il devait dormir péniblement. Tout à coup, je sentis une main se poser sur mon épaule. C'était l'homme de tout à l'heure, celui qui avait sorti un canif. Je le sus sans me retourner car il la posa trois fois sur moi avant de la remettre dans poche. Ses yeux dirigés vers le sol semblaient craintifs, fuyants. J'avais une vague idée de ce qu'il voulait me dire, bien que je ne sois pas enclin à le lui valider.
Il se mit alors à genoux sur le sol gelée et commença à implorer mon pardon en expliquant qu'il avait fait ça en désespoir de cause, ses problèmes de santé l'ayant tenus éloignés des filles pendant de longues années. J'avais encore envie de soupirer, ce n'était pas moi qui devait obtenir ses excuses, c'était cette pauvre jeune femme qui avait dû confesser en public qu'elle n'était pas intéressée par les hommes. Ma gorge était sèche mais lui répondre était quand même la moindre des choses alors je dis d'une voix rauque :
« - Ne demande pas mon pardon, tu ne l'auras pas. Avoir subi des choses horribles ne te donne pas le droit d'être une horrible personne, surtout envers une femme qui n'a rien fait. »
C'était sujet à débat mais il valait mieux que je m'en tienne là. Il me regarda, abasourdi, comme si je venais de lui donner un coup de poing dans la figure. Puis il partit. Une vraie fusée ce mec, pourtant rien de bien comparable aux personnes que j'avais l'habitude de rencontrer en voyageant. Des vivaces, j'en avais rencontré des tonnes. C'était des battants. Lui ne l'était peut-être pas autant. Je ne savais pas de toutes les manières comment réagir. J'aimais bien le contact humain, mais quand il s'agissait de dire ce que je pensais, même si je le disais souvent de manière confuse, je ne prenais pas de gants. Il m'arrivait des fois de ne pas juger utile d'en faire part, de garder pour moi quelques secrets ou de jouer avec. Sans plus.
Après quelques secondes à regarder mon reflet disparaître dans l'eau à cause des nuages qui venaient couvrir la lune, je me mis en direction de l'auberge dans laquelle je logeais. J'y retrouvai Miu, endormi comme un petit ange sur l'un des deux coussins du lit double. Je pris juste la peine d'enlever mes chaussures et mes chaussettes, de me rincer la bouche et de me brosser les dents pour ensuite me glisser, mon tee-shirt et mon pantalon à terre, au bord du lit. | | | | |
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