Goatunheim
11 ans auparavant
Merveille. Une île qui porte bien son nom.
Le lieu rêvé pour ceux qui veulent voir du pays : avec ses forêts denses, ses lacs faramineux, ses collines, ses cascades époustouflantes, ses canyons hauts en couleurs, ses prairies tapies de fleurs par milliers, ses plaines enneigées, Merveille est bien l’un des lieux les plus uniques qui soient. C’est un lieu bien choisi pour s’évader, échapper au monde, se remettre en contact avec la nature… d’apparence seulement. Vous allez bientôt comprendre pourquoi.
Sur la petite baie de l’ouest, fatigué comme jamais, rampant tel un chien affamé, le ventre gargouillant, la langue sortie et pendante, Jo peinait à avancer dans le sable pourtant moindre. Le soleil semblait le faire rôtir, déjà, il sentait des odeurs de poisson cuit émaner de son propre corps. Fier d’être un homme-poisson, mais quand on est aussi poisseux, quel désavantage !
Il devait se rendre à Water Seven grâce à un Eternal Pos. Pour ce faire, il avait décidé de nager jusqu’à sa destination, chose qu’on lui avait fortement déconseillée au départ à cause de la dangerosité de Grand Line. Mais vous connaissez Jo et sa légendaire confiance en lui…
… cette surestime de lui-même l’avait mené ici à Merveille. Il avait été obligé d’accoster ici à cause d’un groupe de Rois des Mers anguilles qui ne semblaient pas vouloir le lâcher d’une semelle. Et le voilà maintenant avachi au soleil sur une plage de sable blanc, exténué par l’effort surhumain qu’il venait d’accomplir.
Aaaah… je crois que… je crois que c’est la dernière fois que je change d’île en nageant… j’ai failli y passer, t’y penses... en plus j’ai une de ces dalles…
Il trouva alors un rocher assez haut en plein milieu de son chemin. Il l’escalada, non sans peine, pour pouvoir savoir où il était exactement puisqu’évidemment, môssieur n’avait aucune idée d’où il pouvait être.
Du haut du rocher, il couvrit ses yeux avec sa paume pour éviter d’être ébloui par les rayons de soleil. L’anémone cherchait un quelconque signe de vie dans ce qu’il entourait, mais rien. Seulement une simple forêt de frênes et de sapins hauts qui semblait entourer de toute son envergure la baie. Il fut également surpris de ceci : à des dizaines et des dizaines de kilomètres, non loin d’un flanc montagneux et de hauts plateaux, une gigantesque colonne de pierre gisait et se mouvait jusqu’au ciel, par-dessus les nuages. Une véritable tour de Babel au naturel.
Cependant ça n’aidait pas beaucoup l’anémone qui, dans sa quête de renseignements et de recherche de nourriture, avait en plus son ventre qui gargouillait de plus en plus.
Mais enfin, alors qu’il tournait la tête vers la droite, il vit l’impensable…
Je rêve ou… une prairie ?! Avec de l’herbe ?!
Non il ne rêvait pas, et vous ne rêvez pas non plus. Vous avez tout intérêt à me croire lorsque je vous dis que Jo accourut vers la prairie qui se situait à gauche, au bout d’un sentier de la forêt. Effectivement, c’était une belle prairie, encadrée par une multitude de sapins hauts. Avec des brins d’herbe comme Jo les aimes : frais, longs et tout juste cueillis au soleil de midi. Je vous dis que vous ne rêvez pas ! Regardez par vous-même : c’est lui qui la mange, là ! Comme une véritable chèvre… ah ben tiens, en parlant de chèvres…
Alors qu’il se délectait de toute la saveur du pâturage tel une brebis affamée, un groupe de chèvres s’amenaient par ici. Une vingtaine ou une trentaine… enfin toujours est-il que Jo n’avait toujours pas remarqué qu’il avait de la visite.
Ces chèvres étaient particulièrement… bizarres. En effet, elles étaient toutes habillées comme des humains, se traînaient sur deux pattes et portaient toutes des lunettes de soleil.
L’une d’entre-elles, la plus grande, la plus baraquée, celle qui semblait être la chèvre en chef, s’approcha du petit incongru qui ne l’avait toujours pas remarqué.
Hêêêê toi… t’as pas vu quêêêê cêêêê pâturage est sous lêêgislation chêêvrone ?
Jo, la bouche pleine, avait fini par lever la tête vers le mastodonte cornu. Il n’avait pas compris comment il avait fait pour se retrouver encerclé par une bande de chèvres zinzins en une fraction de secondes.
Quel embarras ! Même si Jo n’avait pas vraiment peur, il se demandait comment il allait sortir de ce pétrin…
C’est alors qu’il vit, en dessous de la cime d’un sapin, une petite silhouette enfantine qui regardait la scène en retrait.