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Erwin
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Dim 5 Oct - 17:11
Marché aux Vins [1]

Cela faisait très peu de temps que Mike avait conquis Micqueot… Ou moins qu’il avait été désigné comme protecteur de ces lieux. C’était naturellement que j’étais venu l’aider dans cette tâche, et que nous avions pris nos quartiers dans la mairie à moitié démolie par une technique de sa création. Notre chance se trouvait principalement dans le fait que la pièce qui avait été détruite n’avait pas affecté le reste de la structure et que plusieurs pièces reconverties en chambre nous servaient à présent avec efficacité. J’avais décidé de partager celle de Hope, pour économiser de la place. Hope c’était un peu comme un frère, une personne que j’avais rencontré il y a peu de temps mais avec qui j’avais vécu des moments si forts que nos liens s’étaient consolidés. C’était un ancien marine, un défenseur de la loi qui n’était pas réellement considéré comme hors-la-loi jusqu’à présent grâce à quelques magouilles de son père.

Le matin même, je m’étais entraîné dans la forêt. De multiples explosions avaient retenti sur toute l’ile : on m’avait expressément fait savoir que ça n’allait pas être possible et que si mes entrainements n’étaient pas plus calmes, il allait falloir que je trouve un autre endroit. J’avais accepté, de toutes les manières je n’étais pas en manque de destinations.

Pour une fois j’avais décidé d’utiliser mon après-midi à aider le village. Certes, il fallait faire quelques travaux mais Hope avait décidé que ce serait son domaine de prédilection. Le seul problème était sûrement son incapacité à utiliser des outils de chantier sans se blesser, raison pour laquelle je lui en avais interdit l’usage de certains.

« - Bonjour, Monsieur Dog, me dit un vieil homme assis à côté de quelques caisses de vin. Alors, c’est vous que Jennifer m’a envoyé ? »

C’est vrai que le village était censé avoir comme chef la jeune et gentille Jennifer, une combattante à la lance. Enfin, je ne l’avais jamais vu se battre et ne l’avais rencontré que très récemment, alors je ne pouvais pas trop m’étendre sur ce personnage. Souriant, j’acquiesçai d’un signe de la tête avant d’engager une conversation sur l’état du stock de vin, en grande partie taxé et dilapidé par l’ancien propriétaire de l’île. Bien sûr, il n’y était pas allé de main morte, et les récoltes étaient de plus en plus pauvres à cause de l’usure de la terre.

« - On va mettre le champ en jachère, réduire les récoltes de saison cette année pour qu’elles soient meilleures l’année prochaine. Il faudra travailler la terre, et je demanderai à une amie botaniste de nous aider à optimiser le rendement… J’aimerais aussi avoir une liste de vos principaux clients, si ça ne vous dérange pas. »

Il acquiesça, mais demanda tout de même ce que j’allais en faire. Les idées que j’avais évoquées, il les avait certainement eues par lui-même. Si ce n’était pas le cas, il n’aurait pas pu produire pendant des dizaines d’année l’un des meilleurs vins du monde. Pourtant, la rareté des bouteilles ces derniers temps mettait en péril son établissement. Il avait demandé l’aide de la ‘mairie’, celle-ci n’allait pas se faire prier pour augmenter ses bénéfices et les exportations qui rendaient cet endroit si célèbre aux yeux du monde. Et malgré tout… Des personnes mal intentionnées pourraient vouloir s’en prendre à ce commerce pour en faire leur unique bénéfice. Un très gros bénéfice si mes yeux n’hallucinaient pas devant les recettes de l’an dernier qui n’avait pourtant pas été une très bonne année…
Erwin
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Kokuro Elina
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Mar 7 Oct - 21:40
Marché aux vins.
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L’Itelzbulger Stein. Une robe pourpre exquise pour l’œil. Un bouquet très fruité et, pourtant, légèrement boisé. Une attaque franche, sans rendre le nectar trop œnolique, supplantée par une touche particulière, longue en bouche et délicieuse. C’était un vin exceptionnel, ni plus ni moins. Rien à voir avec les autres jus de raisins fermentés qu’on lui avait précédemment servis. Et Elina comptait bien mettre la main dessus. Elle voyait d’ici les reliefs de l’île Micqueot, unique territoire capable de produire ce célèbre breuvage. Selon ses informations, un seul homme connaissait le secret pour produire pareil délice. Le navire transportait bon nombre de particuliers amateurs de vins, mais également des hommes d’affaires, des restaurateurs ou de simples touristes avides de savoir. Son emploi du temps chargé ne lui avait permis de se libérer qu’en ce jour, pour estimer les possibilités commerciales avec le vigneron. Elle s’aventurait seule vers cette ile, ayant déjà envoyé ses associés sur Yakoutie Island, pour une mission de repérage. Afin de se maintenir à flot, elle devait gérer énormément d’affaires simultanément. Elle soupira et, pour se remonter le moral, reprit une gorgée d’Itelzbulger Stein.

« L’homme est malin. », réfléchit la jeune femme en dégustant son vin. « Il connait la qualité de son produit et a certainement fait don de quelques bouteilles à cette navette chargée de potentiels acheteurs. Ainsi, il attire le client dans ses filets et leur vend à prix d’or des caisses entières sans aucune difficulté. »

Elina trouvait la démarche intéressante mais, au vue de la réputation du vin, un peu superflue. À moins que les finances du vigneron ne soient pas au beau fixe... Cela, tout du moins, serait à son avantage. Mais la concurrence serait sans doute rude. Pour avoir passé plusieurs jours en leur compagnie sur ce navire, Elina avait reconnu un ou deux fins négociateurs. Ce verre offert, comme une éloge élevée à la qualité de ce cru, allait sans doute les pousser à défendre bec et ongles leurs intérêts. Néanmoins, pour l’instant, elle n’allait certes pas se plaindre de pouvoir déguster un verre de ce fameux nectar, le tout sans débourser le moindre Berry ! Le capitaine la tira de ses pensées en annonçant leur arrivée très prochaine. Elle finit son verre sans se presser, le confia une fois vide à un serveur, puis rejoignit sa cabine pour prendre son sac de voyage. Elle n’avait emporté que le strict minimum, ne comptant de toute façon pas s’éterniser sur l’île. Des affaires de rechanges, une robe de soirée et, bien sûr, de quoi acheter des bouteilles, voire même conclure un accord à plus long terme.

En effet, l’araignée avait des vues, non seulement sur ce vin, mais également sur plusieurs autres iles de North Blue. Après toutes ces années passées à parcourir cette mer pour amasser des fonds et estimer quels territoires étaient les plus prometteurs, elle en venait enfin à passer à l’action. Pour l’heure, elle se devait d’approvisionner ses futurs établissements de luxe avec des produits de qualité ! Échouer à nouer des liens forts avec le fameux vigneron ou, à défaut, le maitre de l’île n’était absolument pas au programme. Le navire accosta sans encombre dans le port de la ville et Elina descendit au milieu des badauds. Sans plus attendre, la jeune femme se dirigea d’un pas souple vers la première ruelle qu’elle aperçut. Avant de rendre une petite visite à la pseudo-figure d’autorité actuelle de l’île, elle comptait rencontrer le célèbre caviste et discuter avec lui. Avec un peu de chance, elle arriverait à couper l’herbe sous le pied des autres voyageurs. Ceux-ci parlaient de d’abord trouver une auberge, ou de visiter la ville... Amateurs. En affaire, les informations et la rapidité à s’adapter étaient primordiales ! Peu importait de développer de superbes arguments si on arrivait après la bataille ! Elle espérait bien profiter de leur manque de jugeote pour finaliser un accord rapide, voire récupérer quelques informations précieuses sur le tyran local.

Ainsi, ce fut en cette belle après-midi qu’Elina se promena sur cette nouvelle île. Sa robe de soie noire, fendue sur le coté droit, voleta légèrement sous la caresse d’une brise soudaine. Elle rajusta son manteau de fourrure gris, avant d’attraper froid. North Blue possédait certes de multiples îles intéressantes, mais le climat hivernal avait quelque peu rebuté l’araignée, aux prémices de son voyage. Après cinq années, elle y était bien plus habituée, mais ne se refusait pas le luxe de se payer des vêtements chauds et doux. Elle avançait sans bruit dans les rues pavées de la ville, les pieds chaussés d’une paire de ballerines noires. Encore heureux, son fruit du démon lui permettait de tisser un film de soie, presque translucide, afin d’entourer ses jambes nues. Le stratagème lui permettait de garder les membres à l’abri du vent, malgré ses vêtements ouverts.

Tout à coup, elle repéra l’enseigne du caviste et décida d’entrer dans son établissement. À peine la porte franchie, deux hommes qui discutaient apparurent dans son champ de vision. L’un d’eux, assez vieux, portait un tablier et était assis à côté de caisses de vins. L’autre, plus jeune et coiffé d’un bonnet de laine noire, tenait à la main une liasse de feuilles qu’il parcourait. Elle repéra bien vite diverses vitrines mettant en valeur des bouteilles, un comptoir et, tout au fond de la salle, un escalier qui s’enfonçait dans le sol. Une clochette signalant son arrivée fit lever les yeux du doyen dans sa direction. Il se mit instantanément sur ses pieds et vint rejoindre Elina, un grand sourire aux lèvres :


- Bienvenue, chère madame ! Que puis-je pour vous ?
- Bien le bonjour. À vrai dire, je suis venue pour deux raisons. La première est, bien entendu, d’acheter quelques caisses de votre merveilleux vin. La seconde, serait de vous aider.


Elina adressa à l’homme un sourire chaleureux. Bien entendu, les rumeurs du tyran de Miqueot qui s’était approprié l’ile lui étaient parvenues. Elle s’était renseignée au mieux, durant ses périples, et avait rassemblé quelques informations. Son usage intempestif des réserves viticoles de l’île par exemple, ou encore son comportement violent ne lui étaient pas inconnus. Aussi, elle comptait bien gagner la confiance du commerçant en le débarrassant du malotru. Voilà une promesse qu’elle savait les autres négociants, avec qui elle avait voyagés, incapables de tenir ! Tandis que, pour elle, cela devait relever du possible. Surtout si l’homme en face d’elle pouvait la renseigner un tant soi peu sur ce « Capitaine Morivo Kovol ». Devant le regard intrigué de son vis-à-vis, elle reprit d’un ton aimable :


- J’ai cru comprendre qu’un pirate avait réclamé l’île pour sienne. De plus, il se serait permis de mettre la prestigieuse maison de l’Itelzbulger Stein dans une situation difficile. Auriez-vous besoin d’une main secourable ?


L’araignée était presque certaine que l’homme se laisserait tenter. Une fois ainsi appâté, elle pourrait tenter de tirer profit de la situation et obtenir des prix plus abordables. Il n’y avait pas de petits profits, comme l’adage le disait.






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Mer 8 Oct - 19:14
Marché aux Vins [2]

Une jeune femme était arrivée à nos côtés, m’ignorant à peu près tandis que son attention semblait captivée par la négociation qu’elle tentait de mener à bien. Je finis d’éplucher les recettes pour observer que la taxe de transport en partance de Micqueot avait été exponentielle récemment. Mes sourcils se froncèrent. D’année en année, les taxes avaient augmenté au point de représenter une part presque plus importante dans le prix que le produit, ce qui n’avait pas empêché beaucoup de monde de se procurer cette boisson. Après avoir entendu la phrase de la jeune négociatrice, je décidai d’intervenir. Il valait mieux mettre les choses au clair rapidement pour éviter que cela ne dégénère et qu’elle n’aille attaquer la mairie.

« - Je me présente, lançai-je pour attirer son attention tandis que l’homme affichait un sourire satisfait. Erwin Dog. J’aide les nouveaux dirigeants de l’île à prendre soin de celle-ci, précisai-je en soupirant. Le capitaine Morivo Kovol et ses sous-fifres ont été arrêtés, de fait ils ont été livrés à la Marine il y a deux jours de cela. »

Je souris tout en posant les comptes sur le comptoir, laissant visible les chiffres des bénéfices sur les dix dernières années pour donner une idée à la personne en face de moi à qui elle avait affaire, en dépit des apparences. Toussotant, je me tournai ensuite vers le marchand de vin et tira un papier de ma poche, griffonnant quelques mots dans une écriture très lisible puis y appliquant un tampon. Après le lui avoir donné, j’ajoutai en me frottant l’arrière du crâne :

« - Vous êtes exonérés de toutes taxes, comme vous utilisez vos propres navires, il va de soi que plus rien ne vous sera demandé dans ce sens-là. Pour formaliser un peu tout ça, vous devrez juste aller faire signer ce papier à la mairie… »

Ce n’était pas réellement une surprise pour la personne en face de moi qui se contenta d’acquiescer et de ranger la recommandation dans sa poche. Il se détourna rapidement de moi après avoir finalement lâché un remerciement, même si je savais que c’était plutôt des paroles que je devais transmettre à Mike. Tout en prenant un nouveau papier pour noter que le travail était accompli, je me tournai vers la jeune femme et lui dis d’une voix amicale :

« - J’imagine que vous voulez faire un accord financier avec Monsieur Van Kant. Si vous souhaitez que je vous laisse… »

L’homme acquiesça d’un signe de la tête en m’indiquant d’attendre dehors. Je lui souris et me dirigeai vers l’extérieur, fermant la porte derrière moi tandis que des hommes d’affaires se promenaient tranquillement dans les rues sans faire attention à la bicoque qui habitait le plus puissant personnage financier de l’île. Le Rubis du Renard, un magasin qu’allait ouvrir Mike, lui ferait certainement de la concurrence mais le domaine était différent j’imaginais plutôt une alliance commune à long terme et peut-être quelques soirées de galas pour accompagner le tout. J’évitai cependant de me projeter et réfléchis un instant aux autres personnes qu’il allait falloir aller voir aujourd’hui ou dans les jours à venir… Mais mon entraînement devait passer en priorité, et je me rendais bien compte que mon après-midi de libre était exceptionnel. Cid devait déjà choisir le lieu le plus adapté, ou il m’obligerait à le choisir le soir même, pour continuer l’apprentissage de la maîtrise de mon « Haki de l’Observation » comme ils le nommaient, Blanche et lui.

« - Il y a une bagarre sur la place ! Hurla une jeune femme affolée, comme si c’était déjà le retour des ennuis à Micqueot. »

Soupirant, je décidai d’aller y jeter un coup d’œil. Et effectivement, une bataille à deux camps se déroulait entre deux clans : les Pro-Itelzbulger Stein et ceux qui insistaient sur le prix trop élevé auquel il était vendu. Apparemment, les choses n’allaient pas aller en se calmant, et si je n’étais pas habitué à gérer ce genre d’atmosphère, le patron de la boutique n’allait pas tarder à arriver, alerté par une femme qui semblait s’être dirigé chez lui.
Erwin
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Kokuro Elina
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Dim 12 Oct - 1:04
Marché aux vins.
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Si l’araignée fut sincèrement surprise par l’information, elle n’en laissa rien paraitre. Au contraire, elle adressa un sourire affable aux deux hommes. L’arrestation du capitaine pirate allait compliquer ses tractations, mais elle ne souhaitait pas le dévoiler. Elle allait féliciter le plus jeune pour cette bonne action, lorsqu’il laissa « par inadvertance » les recettes de la boutique à portée de vue d’Elina. Ainsi donc, elle l’avait mal jugée. Elle se garda bien d’y jeter le moindre coup d’œil, ne voulant pas sembler plus avide que nécessaire. De plus, elle en connaissait déjà la teneur par approximation, et le résultat avoisinait des chiffres astronomiques. Néanmoins, la manœuvre la surprit de la part de cet Erwin Dog. Essaierait-il de la piéger, afin de permettre au négociant de juger de ses réelles intentions ? Ou n’était-ce là qu’un sursaut d’égo, comme pour montrer que lui aussi avait droit à une certaine considération ?

Sous son bonnet de laine noire s’éparpillaient dans le plus grand désordre une tignasse rousse indisciplinée. Ses yeux marron étincelèrent avec malice lorsqu’ils croisèrent ceux d’Elina. Elle lui rendit son sourire, mais n’en continua pas moins son inspection silencieuse, tandis qu’il tirait un papier de ses vêtements. Il ne ressemblait guère à un marine, ni même à un chasseur de primes. Ces derniers, pour en avoir croisé certains, n’avaient en général que peu d’attrait pour l’administration d’iles et de commerces. Les primes et le combat restaient leurs principales sources de revenus. Il ne demeurait donc plus que deux solutions : un civil dont l’ami aurait sauvé l’île en bon samaritain, ou une engeance de son acabit. Elle savait ne pas devoir se fier à l’aspect bon enfant, presque niais, de ce porteur de mauvaise nouvelles. Après tout, n’était-elle pas experte dans le domaine de tromper autrui, elle aussi ?

« Le voilà qui accorde une exonération de taxe à notre cher caviste. », réalisa l’araignée en suivant ses faits et gestes sans réellement le montrer. « Ou il est doué dans l’art de la dissimulation, ou bien il souhaite tout bonnement aider le vieil homme... Ce qui signifierait que, comme je l’avais soupçonné, les finances de l’Itelzbulger Stein ne se portent guère au mieux. »

Soudain, Erwin se tourna vers Elina et lui lança d’une voix amicale :


- J’imagine que vous voulez faire un accord financier avec Monsieur Van Kant. Si vous souhaitez que je vous laisse…


L’araignée n’eut pas le temps de réagir, le vigneron avait déjà congédié le jeune homme. Une fois de nouveau seule avec « Monsieur Van Kant », Elina reprit la conversation là où elle avait été interrompue. Cette fois, elle ne pourrait jouer sur les deux tableaux, elle en était convaincue. Si un pirate était aisément corruptible, elle soupçonnait Erwin de ne pas gouter de ce pain là. Détourner des cargaisons de ce fameux vin allait sans doute lui demander de débourser plus qu’elle ne l’aurait voulu. À moins qu’elle ne réussisse à amadouer le vieil homme et à faire taire la concurrence...


- Il semble être aux petits soins avec vous, déclara Elina. Se pourrait-il que les rumeurs aient porté un brin de vérité ? Ce capitaine pirate devait être un rustre sans nom.
- Oh vous savez, les pirates je m’y suis habitué depuis le temps. Je ne sais pas si vous connaissez l’histoire de l’ile, mais ce sont des forbans qui ont créé l’ile de Micqueot !
- J’avais entendu cette histoire, mais je n’aurais jamais cru qu’elle puisse être véridique, avoua la jeune femme.
- Haha ! Comme la plupart des gens j’imagine. Il faut dire que les chroniques d’un pirate créant le meilleur vin du monde, ça en surprend plus d’un !

« Vieux coquin. », s’amusa Elina en pensée. « Toutes les occasions sont bonnes pour vanter ton produit, j’imagine. Tu ne te laisseras donc pas faire... »

- Vous appartenez à la famille de ce fameux pirate ? rebondit-elle.
- Ça remonte à tellement longtemps que, maintenant, plus personne n’y prête guère attention. Mais c’est mon ancêtre, oui. Le secret de notre vin se transmet de génération en génération ! Il n’y a que sur cette île et dans cette cave que vous trouverez de l’Itelzbulger Stein !
- Je n’en doute pas. Néanmoins, avez-vous encore des caisses à me vendre, après le rapt constant de cet odieux personnage ?
- Oh il m’en reste encore, oui. Mais les temps ont été durs, vous savez. Et avec les taxes, mes prix vont devoir augmenter...

« Nous y voilà donc. C’est sur cette pente-là que tu comptes m’emmener. », compris la femme d’affaires.

- Je ne doute pas que ce pirate ait abusé de sa position. Malgré tout, n’essaieriez-vous pas de me prendre pour plus sotte que je ne suis ? Ce jeune homme nommé Erwin ne vous a-t-il pas exempté de ces fameuses « taxes » à l’instant ?
- Seulement les taxes de transport, étant donné que je dispose de mes propres coursiers. Mais vous n’êtes pas sans savoir que le gouvernement ponctionne une part non négligeable des recettes des honnêtes commerçants...


Elina sourit distraitement. L’homme était presque autant aux abois que ce à quoi elle s’était attendu. Il lui opposait certains arguments à la limite de la mauvaise foi. Les taxes du gouvernement n’avaient que très peu augmenté, elle le savait très bien ! Mais, surtout, la situation particulière de l’île la rendait totalement inaccessibles aux agences gouvernementales ! Et elle était presque convaincue que le vieil homme se doutait qu’elle détenait ce genre d’information. Tentait-il de la rouler dans la farine d’une manière aussi grossière ? Ou bien prévoyait-il de rebondir sur un éventuel démenti pour lui asséner la suite de sa plaidoirie larmoyante ? La jeune femme préféra utiliser un autre chemin.


- Ils vous taxent en effet, pour assurer votre sécurité et organiser des patrouilles dans North Blue, ou d’autres prétextes fallacieux. Oui, je suis parfaitement au courant. Néanmoins, force est de constater que si vous remplissez votre part du contrat, eux n’en font pas de même. N’est-ce pas malhonnête de leur part ? Un accord se doit d’être respecté et avantageux pour les deux partis. Sinon, il vaut mieux s’en passer.


Le vieil homme la regarda d’un air curieux. Sans doute s’était-il attendu à ce que la jeune femme relève le mensonge éhonté. Au lieu de quoi, elle avait préféré en jouer pour l’attirer un peu plus sur son terrain. L’araignée devait forcément, à un moment ou un autre, explorer cette possibilité. Un commerce illégal, dans sa position, pouvait se révéler très bénéfique comme catastrophique, si le maitre actuel de l’île en entendait parler. Elina commençait à s’en douter, Erwin et ses amis n’étaient sans doute pas des hors-la-loi. Nonobstant ce fait, se voir priver d’une partie des revenus du château Itelzbulger Stein ne leur plairait sans doute pas. L’homme était loin d’être stupide et avait certainement compris le message. Il s’en défendait bien, mais Elina avait saisi que ses affaires, même si elles avaient pâti des exactions du pirate, ne sombreraient pas pour autant. Néanmoins, s’il désirait garder son niveau de vie actuel et échapper quelque peu aux prétendus « voleurs du gouvernement », elle lui offrait une porte de sortie. Celle du commerce s’ouvrit soudain avec fracas. Une femme blonde aux joues rosies entra en trombe et lança d’une voix éreintée :


- Monsieur Van Kant ! Il... Il y’a une bagarre ! Sur la Grand-Place !


Le caviste coupa court aux négociations et s’excusa auprès d’Elina. La jeune femme nota qu’il ne l’avait pas chassée de manière virulente. Aussi, elle espérait que sa proposition tacite se fraierait un chemin dans l’esprit du négociant. Elle sortit de la boutique et laissa le vieil homme accompagner la femme jusqu’à cette fameuse échauffourée. L’araignée décida de les suivre en marchant à vive allure. Une rixe était toujours l’excuse préférée du peuple pour s’attrouper, dans l’espoir de contempler son lot de violence. Les touristes avec qui elle avait voyagés feraient peut être parti des charognards attendant avec avidité que la situation ne s’envenime. Cette curiosité malsaine était étrangère à Elina, mais repérer des éventuels rivaux et les suivre discrètement relevait bien plus de ses occupations.






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Ven 17 Oct - 21:11
Marché aux Vins [3]

« - Arrête d’essayer de me faire croire que c’est la faute du gouvernement si les choses tournent mal, Marco. On est totalement hors de la juridiction de celui-ci, ils ne peuvent ni nous taxer, ni nous protéger !
- Même sans cela, nos principaux clients légaux et nos principaux transits se déroulent par Seppen Town, on paye à ce moment-là, et je te jure que c’est pas jolie-jolie !
- Oh, t’y crois toi à ces conneries ? Le vin n’a pas à être aussi cher, c’est un héritage de l’île…
- De la famille Van Kant ! Alors si tu veux encore me faire croire que tu as ton mot à dire… »

La bagarre ne semblait pas se calmer, mais mon regard s’était fait plus évasif à mesure que les arguments s’enchaînaient sur un ton de plus en plus désagréable. Ce n’était pas mon affaire. Mike, ou même son amie, pouvaient intervenir à tout moment pour arrêter ce conflit. Pourtant, les voix de plus en plus fortes s’arrêtèrent à l’apparition propice du dirigeant de l’affaire viticole de l’île. Je lui souris, sourire qu’il me rendit avant de se tourner violement vers les chahuteurs. Ils auraient passé un mauvais quart d’heure si une troupe de négociateurs ne s’était pas approché de lui à une vitesse hallucinante. Me tournant vivement vers eux, je n’eus besoin que de deux pas pour arriver en travers de leur route, alors que l’un d’entre eux tentait déjà de me pousser pour atteindre le vieil homme et lui parler affaire.

Je ne l’entendais pas de cette oreille. La femme que j’avais laissé avec lui était venue, et il semblait plutôt satisfait, du moins sur ses traits, de l’entretien qu’il avait eu avec celle-ci. Sûrement avait-il besoin d’y réfléchir. En tout cas, j’allais lui donner le temps qu’il fallait pour cela.

« - Vous feriez mieux de reculer avant que je ne m’énerve, lançai-je, presque avec impertinence tandis que mon automatique leur montrait le bout de son canon à ma ceinture. »

La plupart se contenta de cet avertissement pour disparaître dans la foule, mais certains semblaient vouloir contourner le problème en se glissant sur le côté. Je n’eus pas besoin de faire preuve de violence. Toussotant, je touchai l’épaule à celui qui était le plus avancé, lui souriant d’un de ces sourires forcés et disant qu’il valait mieux ne pas tenter sa chance. Pas maintenant en tout cas, j’étais sûr qu’une telle intimidation n’allait pas les pousser à abandonner définitivement. Et si c’était le cas, ils n’auraient que ce qu’ils méritaient : Rien. Sinon, ils pourraient conclure d’autres accords que celui sur lequel il semblait être en train de réfléchir.

« - T’es qui, toi ? Beugla l’un des deux principaux opposants, sûrement celui qui avait été désigné comme ‘Marco’.
- Du calme, c’est un ami du nouveau protecteur de l’île…
- On s’en sortait très bien sans lui ! S’exclama l’un des hommes dans la foule, s’avançant pour dévoiler un corps musclé et couvert de cicatrices. Protecteur de l’île ? On n’en a absolument pas besoin !
- Beaucoup ne pensent pas comme toi, le coupai-je en levant le plat de la main vers lui. Que puis-je faire pour te prouver que nous sommes de bonne foi ?
- Si vous vous prétendez être les protecteurs de l’île, alors affronte-nous, moi et mes potes ! Reprit Marco tandis que la rage semblait monter en lui, galvanisée par les paroles de l'autre homme. Tu gagnes ? On la fermera. Mais si tu perds, cette île sera sous notre contrôle… »

Je soupirai, je n’avais pas envie de me battre, mais les personnes autour de moi semblaient trouver cela passionnant et s’étaient mises à pétiller du regard. Regardant le chef de la boutique, je le vis s’asseoir en invitant la jeune femme avec qui il parlait dans la boutique à prendre place à ses côtés, sûrement pour discuter de quelque chose que je n’entendrais pas. La place s’était libérée, de nombreuses personnes semblaient s’être éloignées à une distance suffisante pour ne pas être atteinte par une potentielle attaque.

Prenant mon automatique, je déposai celui-ci à terre sous le regard de mes sept opposants, tous des hommes d’une certaine carrure. Bien sûr, j’étais un tireur. J’aurais dû les abattre d’une balle, mais les blesser n’aurait fait qu’envenimer la situation. Nous n’étions pas là pour attaquer la population… Mais à ce que j’en savais, la plupart était hors-la-loi, il faudrait donc calmer leurs ardeurs. Le premier s’avança, tranquillement, alors que les autres commencèrent à rire à pleines dents, pour ce qu’il restait de leurs chicots en tout cas.

« - Venez tous à la fois, qu’on en finisse vite, dis-je simplement en soupirant. »

Ils ne semblèrent pas me prendre au sérieux. Le premier continua donc sa route, commençant à courir. Ses mouvements étaient prévisibles, pas besoin de Haki pour les percevoir. A sept contre un, j’aurais sûrement eu besoin de ma capacité à prédire les mouvements, mais là… Faisant mine de me prendre le coup, j’accompagnai justement le mouvement avec une précision affolante. Esquive réussite, et lorsqu’il le remarqua, mon adversaire perdit son sourire instantanément. Avant que je n’ai eu le temps de lui demander s’il abandonnait, il lança un deuxième assaut. Cette fois-ci, je ne me gênai pas pour l’interrompre avec une main, utilisant ma capacité à me téléporter pour encaisser le mouvement au moment où il m’atteignait, stoppant la force de ses muscles.

« - Maintenant, tu abandonnes ? »

Son regard se pétrifia quand il comprit que j’étais sérieux, et ce fut ce moment-là que choisirent ses camarades pour m’attaquer de tous les côtés. Mes réflexes étaient presque à la limite des réflexes surhumains, et mon corps tout entier s’était bien amélioré avec les entraînements. Les laissant se percuter entre eux, j’avais sauté dans les airs, faisant une figure travaillée avant d’atterrir sur mes pieds, un mètre et demi plus loin.

Apparemment, cela n’avait pas suffi au dénommé Marco, puisqu’il se saisit de mon automatique et le pointa vers moi. Il y avait civils autour de nous, et grâce à mon Haki je savais qu’il allait attaquer. Au lieu d’esquiver, et de risquer de voir blesser l’un de mes concitoyens, je me téléportai juste devant l’homme, releva son bras pour que le tir aille se perdre dans les airs et saisit mon arme avant de la tourner vers lui, tout cela en moins d’une seconde et demi.

« - Ne t’avises pas de risquer de blesser un de nos concitoyens… »

Alors que le groupe recula devant cette brève mais efficace démonstration de force, je rangeai l’automatique dans mon holster et entendis les applaudissements faibles et étonnés de quelques personnes. Je soupirai alors, me tournant cette fois-ci vers le vendeur de vin qui venait de se lever pour se diriger vers moi. Son regard n’était ni admiratif, ni reconnaissant. Il semblait avoir vu quelque chose qui l’intéressait… Ou alors peut-être que cela venait de sa discussion avec la demoiselle, que personne n’avait sûrement pu écouter à cause du constant bruit de la foule.
Erwin
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Elina avançait à vive allure à côté du vigneron. Celui-ci avait pris un air préoccupé à l’annonce d’une rixe non loin de son échoppe. Sans doute cela devait être monnaie courante, car la surprise n’avait pas été au menu du jour, de toute évidence. Ainsi donc, l’hégémonie de l’Itelzbulger Stein faisait des envieux ? Rien d’étonnant à cela, mais assurément la nouvelle sonnait doucement à l’oreille de l’araignée. Là où la jalousie se développait, l’envie et la colère n’étaient jamais trop longues à se montrer, elles-aussi. Et quoi de plus simple à manipuler qu’un homme dévoré par sa concupiscence, au point de manquer de lucidité ? Elle devait garder cette solution dans sa manche, si jamais les choses tournaient mal pour ses affaires. Ses réflexions furent interrompues par des cris et des échanges imagés de noms d’oiseaux. Néanmoins, l’altercation se calma d’elle-même à la vue du vieil homme. La jeune femme reconnut immédiatement des négociateurs qu’elle avait croisés sur la navette. Ces derniers semblaient vouloir s’approcher du viticulteur pour une raison évidente mais, contre toute attente, Erwin les en empêcha.

« Voilà qui est intéressant. », songea Elina. « Pourquoi diable voudrait-il empêcher une entreprise locale d’acquérir le plus de contrats possible ? À moins que cela n’ait un rapport avec le sourire qu’il a échangé avec monsieur Van Kant, à notre arrivée ? »

C’est alors que le jeune homme coiffé d’un bonnet de laine fut violemment interpellé par un des opposants à l’Itelzbulger Stein. Au cours de cet échange mouvementé, Elina confirma qu’Erwin était lié au nouveau « protecteur de l’île » et, détail intéressant, que cette nouvelle ne ravissait pas la totalité de la population. Rien d’étonnant à cela si l’on connaissait la proportion de bandits et autres hors-la-loi sur ces terres. Devant l’imminence d’un combat, la foule s’éclaircit bien vite, tandis que monsieur Van Kant invitait la jeune femme à s’asseoir à l’écart, sur une caisse, afin de discuter affaire. La situation devenait très enrichissante. Elina allait pouvoir juger du niveau de cet ami du « protecteur » et, dans le même temps, coiffer sur le poteau ses éventuels rivaux. Un fait surprit néanmoins l’araignée : Erwin délaissait volontairement son arme à feu au sol ? Il ne manquait pas d’audace !


- Concernant notre affaire... reprit le vieil homme. Quelles garanties et preuves de bonne foi me proposez-vous, pour un éventuel accord sur le long terme ?
- Je pourrais vous vendre monts et merveilles, mais je préfère rester honnête, lui répondit Elina à voix basse. Mon entreprise est en pleine expansion et j’ai besoin d’alliés fidèles et d’accords durables. Mes revenus vont croissant et, par conséquent, je peux vous assurer l’achat d’une partie de vos produits tous les mois.
- L’argent n’a pas l’air de vous manquer, madame. Ce n’est pas de cela dont je parlais. Outre les taxes du gouvernement mondial, ou bien les attaques de convois, vous venez d’avoir un aperçu des difficultés auxquelles je peux être confronté sur l’ile. La réussite n’attire pas que des amis ! Aussi, je ne suis pas à l’abri de...
- Ne vous inquiétez pas pour eux, l’interrompit l’araignée. Je ne doute pas que votre nouveau protecteur sache parfaitement assurer votre sécurité.


En effet, à peine le combat avait-il commencé qu’Elina comprit le geste du jeune garçon : il était d’un tout autre niveau que les rats d’égouts qu’il affrontait. Même elle peinait à suivre ses mouvements... non. À vrai dire, elle en était incapable ! L’idée même de s’opposer à cet Erwin et ses amis s’évanouit instantanément : elle périrait sans aucun doute si elle l’affrontait. Il lui fallait plutôt l’amadouer si possible, ou se contenter d’une entente cordiale. Elle reprit la discussion avec le vieil homme, apparemment pas tout à fait convaincu :


- De plus, la discorde semble venir du peu de réussite de leurs exploitations, comparées à la votre. Je me trompe ?
- Tout à fait, s’enorgueillit le viticulteur.
- Le problème se réglera donc de lui-même si je leur propose une offre alléchante, n’est-ce pas ?
- Et bien... Je suppose, oui.
- Voilà qui est parfait ! s’exclama Elina.


Elle se leva lentement, avant de se tourner une nouvelle fois vers monsieur Van Kant :


- J’irai régler la question avec eux sous peu, avant de revenir vers vous afin de finaliser les détails plus « pratiques » de notre accord. Je doute qu’ils reviennent vous ennuyer et, si tel était le cas, ce jeune homme se ferait une joie de les rappeler à l’ordre, déclara-t-elle en pointant du doigt Erwin.


Le vigneron semblait ravi, mais la femme d’affaire n’en avait pas tout à fait terminé avec lui :


- Une dernière chose, monsieur Van Kant. Plusieurs autres négociants sont présents sur l’île, à la recherche d’un accord avec vous. Si jamais ils tentaient de me doubler, ou de vous faire oublier votre parole de quelque manière que ce soit... Je tiens à ce que vous sachiez que ce genre de procédé m’insupporte. Si tel était le cas, nous n’aurions pas à parler de ce genre d’incident à Erwin, ni même au « protecteur de l’île ». Revenez plutôt me voir... mes offres sont toujours les meilleures.
- Voilà qui est clair comme de l’eau de roche ! ricana le vieil homme, sans doute amusé devant l’assurance de la jeune femme. Mais, j’y pense, je ne connais toujours pas votre nom ?
- Oh ! Quelle étourdie je fais ! s’excusa faussement l’araignée. Vous pouvez m’appeler Elina. Je compte loger à l’auberge la plus proche de votre établissement, vous pourrez m’y contacter si le besoin s’en fait sentir.


Elle lui sourit aimablement avant de reprendre la parole :


- Au revoir, monsieur Van Kant, lui dit-elle tandis qu’Erwin désarmait le quidam ayant osé s’emparer de son arme tel le lâche qu’il était.
- Au plaisir de faire affaire avec vous ! s’exclama le vieil homme, avant de se diriger vers le jeune homme roux.


Elina sourit distraitement. Oui, c’était réellement un plaisir. Néanmoins, tant qu’elle ne tenait pas un accord écrit et signé par le vieil homme, elle devait rester sur ses gardes. L’option d’un commerce sous cape n’avait pas eu l’air de tenter plus que cela, puisqu’il avait de nouveau fait mention des prétendues taxes du gouvernement mondial. Elle allait devoir débattre du prix plus tard avec lui, mais l’accord serait tout ce qu’il y a de plus officiel, semblait-il. Cela ne la dérangeait en rien, elle disposait des moyens de réaliser ses projets. Non. Sa principale préoccupation restait la future réaction des investisseurs rivaux. Lorsqu’ils apprendraient que, non seulement les caves de l’Itelzbulger Stein étaient trop peu remplies pour qu’ils puissent tous profiter d’accords commerciaux, mais qu’ils avaient été doublés par une femme... Cela ne leur plairait guère. Après tout, les hommes de ce milieu restaient profondément sexistes. Qu’une femme réussisse là où ils échouaient leur échauffait invariablement le sang. Il ne lui restait plus qu’à attendre. Attendre qu’ils tentent de lui mettre des bâtons dans les roues. Bâtons qu’elle s’empresserait de briser.






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Mer 22 Oct - 19:16
Marché aux Vins [4]

« - Il y a sûrement des mercenaires qu’on peut engager pour faire ‘disparaître’ cette fille, vous ne pensez pas ?
- Sur Micqueot ? T’es fou ! Après la dérouillée que se sont pris les gars sur la place publique…
- Je ne dis pas d’engager un gros bras qui foncera dans le tas de la demoiselle… Mais quelqu’un de plus discret, de plus délicat.
- Ah, peut-être… Il va falloir y mettre le prix, mais il y a quelqu’un qui pourrait correspondre… Il s’appelle Varyan, c’est une sorte de reclus qui habite un peu en amont du village, sur la côte, dans une grotte de l’île. On dit qu’il prenait des contrats assez peu légaux dans le temps, mais qu’il est à la retraite à présent… Enfin, officiellement.
- Ça vaut toujours le coup d’essayer. Je veux ce contrat, et je l’aurai… »


La foule avait commencé à se disperser. Le spectacle était fini, le rideau tombé et les curieux retournaient à leurs occupations initiales. A présent, je pouvais clairement observer Monsieur Van Kant qui me lançait un sourire distant mais confiant, avant de se diriger vers moi et de me résumer ce qu’il avait conclu avec la jeune femme, sans jamais la nommer. Après son départ, je commençai à réfléchir calmement à la suite des opérations.

Il fallait bien sûr que je rende d’autres visites avant de m’occuper d’affaires plus trépidantes que celles auxquelles je m’adonnais cet après-midi. Pourtant, rien ne pressait. La plupart des artisans avaient beaucoup d’ouvrages en cours, et avec ces histoires de charpenterie qui occupaient les esprits de nos concitoyens, j’allais pouvoir reporter certains rendez-vous. Ce qui me laissait un peu de temps pour m’occuper de la future partenaire commerciale de Monsieur Kant, cette femme qui ne faisait pas réellement femme d’affaire.

Me dirigeant vers elle, je lui souris sans détour, l’indiquant clairement comme interlocutrice. Je tirai légèrement mon bonnet en arrière avant de m’adresser à elle, un léger vent froid venant caresser mes joues à ce moment-là et faisant virevolter les mèches rousses qui dépassaient.

« - On dirait que vous vous en êtes superbement bien sortie, Mademoiselle, lui dis-je en lui tendant la main. Je ne crois pas avoir eu l’honneur de connaître votre nom, pouvez-vous vous présenter s’il-vous-plaît ? »

Je n’essayais pas vraiment de lui laisser le choix. La démonstration de force n’avait pas été orchestrée mais elle tombait à point nommé. En effet, avec ces différents flux de visiteurs sur l’île, elle permettait à Mike d’asseoir plus encore son autorité : S’il n’était pas au pouvoir de la politique et de l’administration de l’île, la ‘milice’ improvisée que nous représentions était bien plus importante et impliquée que l’ancien pouvoir en place. D’une certaine manière, c’était notre devoir de nous représenter comme tel.

Après avoir laissé le temps à la jeune femme de répondre, je fronçai les sourcils pour repérer sa voix et la mémoriser, me permettant ainsi de ne pas la lâcher si quelque chose venait à mal tourner. Le Haki de l’Observation était vraiment un atout incroyable, il m’avait fallu un certain temps pour comprendre comment il fonctionnait, mais le début de sa maîtrise s’était révélé plus facile que ce que j’aurais pu croire grâce aux précieux conseils de mes amis. Je sentais encore quelques fois toutes les voix se déverser en moi en un flux discontinu et incontrôlé, mais fermer mon esprit était à présent tout à fait possible. Cela demandait un effort constant, malgré tout comme la téléportation j’étais sûr que je pourrais en faire un réflexe.

« - Nous pouvons marcher un peu ? Je pense que je peux vous renseigner sur les différents endroits où loger et, en vue de votre accord commercial avec Monsieur Van Kant, intervenir en votre faveur pour que les frais de logement soient à ma charge. Par ailleurs, si vous avez un problème avec d’autres commerciaux qui sont venus sur l’île pour y trouver leur compte, n’hésitez pas à me contacter, n’essayez pas de régler les choses par vous-même… »

Je sortis un papier de ma poche et le lui tendis sans me presser.

« - Voici mon numéro, je suis joignable de jour comme de nuit tant qu’il s’agit de votre sécurité de l’île ou de celle de l’île… »

Je n’avais bien sûr pas envie de pousser plus loin les relations avec cette jeune femme. Des amis, j’en avais déjà assez. A présent, ce qui comptait c’était de trouver un équilibre pour cette île, refuge de hors-la-loi en tout genre. Les accords commerciaux étaient à la fois une manière de faire prospérer Micqueot, de l’ouvrir au monde et d’occuper ses habitants en créant d’honnêtes travails. Mon sourire sincère représentait avec tout cela le fond de ma pensée : Tant qu’elle la jouait franc jeu, je le garderais sur mes lèvres et n’irais pas dans une direction opposée à la sienne. Si elle acceptait mon numéro, je rajouterais certainement un hochement de tête pour lui faire comprendre qu’elle pouvait avoir confiance en moi.

« - Par ailleurs, vous devez aussi comprendre que Mike Tay a accepté d’héberger toute personne sur son île à condition qu’elle ne fasse pas de grabuge… Cela implique que nous n’avons pas d’alliance directe avec le Gouvernement, et que nous ne cherchons pas à faire actuellement de cette île un de ses territoires. Nous n’aidons pas les hors-la-loi, au même titre, nous ne les bannissons pas. Il faut parfois avoir les yeux fermés pour mieux voir, ajoutai-je avec une pique d’absurde à l’énonciation de ma dernière phrase. »
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Sans grande surprise, le dénommé Erwin vint à sa rencontre après sa brève discussion avec le maître vigneron. Se découvrant le chef à moitié, il la félicita tout d’abord, avant de lui demanda sans détour de se présenter. Le jeune homme était direct. Peut être un peu trop au goût de l’araignée, mais elle comprenait la manœuvre. Aussi, elle répondit sans hésiter :


- Vous pouvez m’appeler Elina. Je pense que nous serons amenés à nous revoir, si les négociations avec monsieur Van Kant se déroulent sur la même lancée.


En jeune homme bien élevé, Erwin lui proposa de l’aider à se loger au cours d’une petite marche. Néanmoins, le sujet dévia très rapidement sur les potentiels ennuis de la jeune femme, à la suite de son coup d’éclat. L’araignée lui adressa un sourire de remerciement devant cette précaution. Sans doute accordait-il toute sa confiance au vigneron pour choisir ses partenaires et, en parfaite réaction, leur accordait sa protection. Pourtant, Elina sentait que ce jeune homme se défiait légèrement de sa personne. Comment aurait-elle pu lui en vouloir ? Ses intérêts sur cette île avaient beau être purement pécuniaires, ses méthodes pourraient troubler l’ordre public qu’ils venaient de ramener, ses amis et lui. Cependant, que le sang soit versé ou non ne dépendait pas d’elle, mais de ces fameux commerciaux rivaux.


- Voici mon numéro, je suis joignable de jour comme de nuit tant qu’il s’agit de votre sécurité de l’île ou de celle de l’île…

« Une information bien utile. », songea l’araignée en acceptant son offre.

Le jeune homme, après un hochement de tête, continua à l’accompagner tout en lui expliquant la nouvelle politique de l’île. Bien qu’elle ait déjà compris tout ce qu’il lui racontait, elle feignit de lui porter une oreille attentive, alors qu’elle remarquait du coin de l’œil la mine déconfite de plusieurs hommes d’affaires croisés sur le bateau. Ces derniers lui jetèrent un regard courroucé, avant de s’en aller en maugréant entre eux. L’araignée reporta toute son attention sur Erwin, au moment où il commença à parler de hors-la-loi. La pique lui donna envie de grimacer, mais elle s’en retint sans mal.


- Les bandits et les escrocs ne me font pas peur, Erwin. La réussite en affaires attire toute sorte de jalousie, en particulier lorsque l’on est une femme. J’ai donc malheureusement croisé plusieurs mécréants, voire même des assassins. Même si je sais me défendre, je fais plutôt confiance à mon garde du corps discret. Vous n’avez sans doute pas dû le remarquer, tant il est efficace. Je comprends votre inquiétude et vous assure qu’il ne versera le sang que s’il y est contraint pour me protéger. Dans la mesure du possible, j’essayerai de vous tenir au courant au plus vite, si un incident fâcheux venait à se produire.


L’araignée étudia sans le montrer la réaction du jeune homme. Bien sûr, ce mensonge n’avait d’autre but que d’estimer les renseignements dont il disposait réellement, ou l’étendue de ses soupçons. Il pouvait certes nourrir quelques doutes sur sa personne, au nom d’une prudence développée au fil de ses aventures, ou d’un fait qui aurait trahi l’araignée... Mais ce dernier cas lui semblait moins probable. Dans tous les cas, elle préférait en avoir le cœur net avant la nuit tombée. Ils arrivèrent soudain aux abords d’une auberge, non loin de la cave de monsieur Van Kant. Elina se sépara alors du jeune homme et lui adressa quelques mots d’encouragement, afin d’apaiser sa méfiance ou ses inquiétudes. Elle pénétra ensuite dans le bâtiment. Le hall d’entrée, spacieux et bien meublé, était richement éclairé par plusieurs lustres et lampadaires. Elle s’avança le long de l’allée centrale, sur un parquet en bois sombre. Ses pas résonnaient à peine, une habitude qu’elle avait prise depuis plusieurs années. Elle arriva enfin à l’accueil et sourit à la femme brune aux yeux bleus qui lui souhaita bienvenue.


- J’ai une réservation au nom d’Elina, déclara-t-elle en espérant que Shiro et Seika aient bien effectué leur mission.
- Laissez-moi chercher dans le registre, madame... Hmmm... Oui, vous avez une chambre au premier étage, face à la rue.
- Très bien. Auriez-vous un Den Den Mushi à me prêter, le temps du séjour ?
- Toutes les chambres en sont équipées, madame.
- Je vois que vous êtes prévoyants, parfait en ce cas.


L’araignée récupéra ses clés et se dirigea vers les escaliers. Elle grimpa sans se presser les marches et chercha son numéro de chambre. Une fois arrivée à bon bord, elle referma la porte à double tour, avant d’étudier les lieux. La jeune femme posa son sac sur le lit simple, en face de la porte, et compta quatre pas jusqu’à la fenêtre. Elle ouvrit cette dernière et se rendit compte qu’elle se trouvait juste en face de la fameuse échoppe de vins. Une armoire avait été posée à l’opposé de la fenêtre, juste à côté de l’entrée, tandis qu’une porte s’ouvrait sur sa gauche. Elle l’ouvrit pour découvrit une salle de bain propre et banale, recouverte de carrelage et munie d’une petite fenêtre. Retournant à la fenêtre, elle jugea, à la position du soleil, que l’après-midi touchait à sa fin. Elle referma les rideaux avant d’allumer la lumière. Une fois certaine que personne ne pouvait l’observer, elle se transforma en hybride et commença à tisser quelques fils. Ce procédé était nécessaire dans la situation présente, alors que les commerciaux n’en resteraient certainement pas là. Elle doutait qu’ils aient le cran de venir la menacer eux-mêmes, ni même qu’ils puissent trouver un assassin sur cette île... mais écarter trop précipitamment ces possibilités ne lui ressemblait guère. Aussi, elle accrocha un fil à la poignée de la porte et le tira jusqu’à son lit. Elle en posa un autre sur le mécanisme d’ouverture de la fenêtre, sans se faire voir depuis la rue, et un autre sur la porte de la salle de bain. Après tout, elle n’était qu’au premier étage !

« Voilà une bonne chose de faite. », se congratula-t-elle en se transformant en humaine.

Ce petit signal d’alarme lui avait déjà sauvé la vie plus d’une fois. Tout comme une toile d’araignée, les fils transmettaient les vibrations sur toute leur longueur et, même endormie, ces simples petites pulsations suffisaient à la réveiller. Si ces cafards avaient engagé un assassin, ou étaient assez idiots pour penser pouvoir la menacer eux-mêmes, elle leur souhaitait bien du courage. Ses préparatifs terminés, elle posa sur la table basse, à côté d’un escargophone, le papier sur lequel Erwin avait noté son numéro. Peut être en aurait-elle besoin, mais elle en doutait pour le moment. Enfin, malgré l’heure, elle ôta ses chaussures et son manteau avant de s’allonger. La nuit risquait d’être longue, et elle devait être prête à toutes les éventualités...






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Jeu 30 Oct - 19:24
Marché aux Vins [5]

« - Je vois, il n’y a donc pas de raisons de s’inquiéter, souris-je en scannant les environs pour m’assurer qu’il n’y avait pas de personne cachée autour de nous sans pour autant supposer que la jeune femme était une menteuse. »

Toutes ces voix, je les connaissais. Il n’y avait pas une personne sur cette île que mon Haki n’ait scannée. Deux solutions pouvaient sortir de cela, soit elle était en train de me mentir, pour une raison qui ne m’intéressait pas particulièrement, soit elle parlait d’une personne capable de cacher sa voix, ce qui était surprenant mais pas impossible. En y réfléchissant, cela me triturerait l’esprit plus qu’autre chose, et j’avais d’autres sujets à penser. Tant qu’elle était bien protégée, c’était l’essentiel.

Lui adressant un sourire et un signe de la main, tout en prenant soin de répondre à ses encouragements par quelque formule de politesse, je me mis en route pour retrouver Hope et prendre un peu de bon temps avec lui. Je souris en voyant l’ancien marine s’affairer, débardeur sur le torse et marteau dans la main, à la reconstruction de l’île. Il transpirait au point que sa peau luisait au soleil, et que ses muscles saillants semblaient plus fins, plus maigres. C’était une drôle de chose que les effets de relief causés par la lumière.

« - Erwin ! Lança-t-il en descendant de l’échelle sur laquelle il travaillait. Qu’est-ce que tu fais là ? T’avais pas du boulot ?
- J’ai… retardé l’inévitable, les habitants de l’île ont pour la plupart autre chose à faire pour le moment. Dis-moi, j’ai mon après-midi, ça te dit qu’on aille trainer sur l’ile ? »

Le sourire qui fendit son visage m’indiqua sa réponse, et à mon tour je me mis à sourire comme un niais, comme un enfant à qui on vient d’accorder un cadeau. Nous partîmes en direction de la forêt, un endroit calme et à l’abri de tous, nous dirigeant pourtant vers la côte de sorte à ce que nous puissions rapidement atteindre la plage. Les arbres m’enivraient d’une douce odeur, supplantée par moment par les effluves de sueur de Hope lorsque le vent ne permettait pas une diffusion idéale. Je ne fis pas de remarque, et lui ne tenta pas de se justifier, son regard toujours sur l’horizon tandis que nous parlions de sujets divers et variés, principalement des avancées et de la rencontre que je venais de faire. Il me demanda si j’avais vu Mike aujourd’hui, je secouai la tête négativement. Cid en revanche voulait m’entrainer, ça m’embêtait ce qui le fit sourire. Il me nargua quelques minutes sur ma taille tandis que je piquais une crise de nerfs enfantine avant d’arriver sur l’étendue de sable blanc et froid. Enlevant mes chaussures, je sentis les grains de sable entre mes doigts de pieds. C’était agréable.

Quelques minutes s’écoulèrent dans un silence total. Hope regardait le soleil déclinant, tandis que je tournais en rond. Je finis par m’asseoir sur l’un des rochers et il finit par soupirer longuement. Nous avions autre chose à faire que de lambiner sur la plage. Peut-être que nous devrions chercher des fonds pour réparer le village. Mike y avait sûrement déjà pensé, et à nous deux nous pourrions trouver une solution.

« - Comment va Katia ? »

C’était dur. Depuis la mort de Len, elle insistait pour aller lui rendre visite presque tous les jours. Ses nuits étaient chargées de cauchemar, et il arrivait régulièrement qu’elle vienne me trouver pour dormir à mes côtés. Ses yeux auraient dû être chargés de cernes, mais je ne doutais pas que son Zoan ait eu un quelconque effet sur cela. Parfois, elle pensait à se blesser assez pour déclencher le sommeil obligatoire à la récupération des capacités de son Zoan, mais elle renonçait rapidement. Ce n’était qu’une enfant. Regardant l’horizon, je mis fin à la discussion tacitement. Hope s’installa alors, pieds nus lui aussi, assis sur le sable fin.

La nuit était tombée. Varyan regardait l’auberge avec un certain dégoût, et sa jambe de bois vint claquer sur le plancher de bois lorsqu’il entra à l’intérieur. La gérante le regarda un instant et blêmit, lui ne fit pas attention à elle. Un microbe. Sa cible, c’était cette femme… Rares étaient les personnes qu’on lui demandait de tuer depuis sa retraite. Pour que ces commerciaux osent la ramener, elle devait avoir fait quelque chose de sacrément grave. Ou alors c’était juste une innocente de plus. Ah, il s’en foutait ! Au prix où sa tête était, il pensait pouvoir profiter du reste de sa retraire sans broncher.

Montant les escaliers, il ne fit pas moins de bruits. Au contraire, il aimait insister sur le son qu’il faisait avant d’arriver auprès de ses victimes. Il faudrait se débarrasser de la gérante après, elle l’avait vu. Il y pensa un instant et haussa les épaules : dommages collatéraux, ça arrivait. En arrivant auprès de la porte, il n’hésita pas un instant. Sa jambe de bois vint rencontrer la porte qui fut envoyée immédiatement contre le mur, et dirigeant sa mitraillette vers le lit, celle qui pendouillait le long de sa taille, il tira immédiatement dans sa direction, ne faisant pas attention à la toile de l’araignée.
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Un bruit étrange tira l’araignée de son répit. Elle avait toujours bénéficié d’un sommeil léger, ce qui lui était particulièrement utile, en considérant la vie qu’elle menait. Le son se répéta, démultiplié par le silence de mort qui régnait la nuit dans cet hôtel. Ce n’est qu’à la troisième occurrence qu’elle l’identifia : le son du bois qui rencontre son pareil. La cadence régulière et l’intensité du son qui augmentait peu à peu lui firent comprendre que quelque chose, ou quelqu’un, s’approchait d’elle. Si ses rivaux lui avaient envoyé un assassin incapable de rester discret, il devait vraiment la sous-estimer, ou bien n’avoir rien trouvé de mieux... Laissant là ces préoccupations, Elina se transforma en Nephila et grimpa prestement au mur, puis au plafond. Elle avait presque rejoint la porte, ainsi perchée en hauteur, lorsque les bruits cessèrent un court instant, juste devant sa chambre. La porte d’entrée vola contre le mur la seconde suivante.

« Un amateur, ou un « confrère » trop sûr de lui pour estimer correctement la situation... Déprimant. », songea l’araignée.

La suite de l’affaire lui donna raison, lorsque l’homme inconnu dirigea son arme à feu vers le lit et tira sans se préoccuper de rien. Ils avaient donc bel et bien embauché un meurtrier. Mais, si c’était tout ce qu’ils pouvaient tenter à son encontre, sa victoire était inéluctable. Enfin, elle n’allait pas s’en morfondre, bien au contraire ! Le pseudo-tueur cessa le feu et s’avança de quelques pas vers le lit, laissant claquer sa jambe de bois contre le parquet. Elina en profita pour se tasser dans un coin sombre. Sous cette forme minuscule, dans la pénombre ambiante, et ajouté à la récente exposition à la lumière des yeux de l’homme imprudent, l’araignée se savait à l’abri. Elle le laissa donc fulminer devant le lit vide. L’unijambiste effectua gauchement un tour complet sur lui-même, l’arme à feu levée et prête à faire feu de nouveau. Néanmoins, comme elle l’avait escompté, il ne la découvrit pas. Après tout, si elle avait vu juste, il devait rechercher une femme sans défense étendue dans son lit... Une araignée dissimulée dans les ombres ne correspondait certainement pas à la description fournie par ses employeurs.

Peu à peu, Elina décela, après la surprise, de l’appréhension sur le visage de son « invité ». Il fouilla chaque recoin de la pièce, souleva le lit d’un coup de pied, ouvrit l’armoire avec le canon de son arme d’une main tremblante... Lorsqu’il crut entendre un bruit, il se retourna et se mit en joue. Il jura lorsqu’il constata que ce n’était que le vent. L’assassin calamiteux devait avoir la trentaine et, clairement, manquait d’entrainement. Il vérifia la fenêtre et tomba sur la toile qu’il regarda d’un air désinvolte, pensant sûrement que le ménage laissait à désirer. Il se dirigea vers la salle de bain et enfonça la porte du pied, prêt à tirer. Il jura de nouveau en ne trouvant personne. Pendant tout ce temps, l’araignée l’étudia. Son handicap l’obligeait à se balancer du côté de son amputation à chaque pas, laissant un nombre d’ouvertures incalculable. La supériorité dont il se croyait investie le rendait imprudent, face à une femme qu’il estimait avoir fui. Il laissa retomber son fusil et retourna de sa démarche chaloupée vers la porte. C’est à ce moment précis qu’Elina entra en action, toujours transformée en arachnide.

L’estropié venait de passer la porte lorsqu’elle se laissa tomber au sol, laissant volontairement un son mat s’élever lors de sa réception. Le bruit le fit sursauter, et il se retourna en toute hâte, le canon levé. Trop tard, elle s’était réfugiée dans l’ombre de la porte, et son opposant ne pensa même pas à regarder par terre. De ses yeux clairs, qui venaient à nouveau de voir la lumière, il balaya la chambre d’un regard anxieux et peu efficace pour percer la pénombre. Il pénétra tout de même à nouveau dans la salle. La jeune femme sourit devant cette faute grave. Elle le laissa se retourner en maugréant, probablement pour retourner dans le couloir. En une fraction de seconde, elle se transforma en hybride et lui plaça sa griffe gauche contre la gorge, tandis qu'elle maintenait son visage de sa main droite tranchante. L’homme stoppa net, juste dans l’encadrement de la porte, et déglutit péniblement. Il tenta de tourner la tête, mais une simple pression l’en dissuada. Un filet de liquide vermeil perla, là où sa griffe avait entaillé la chair. De nouveau, l’unijambiste eut quelque difficulté pour avaler sa salive, mais sembla tout acquis pour la discussion à venir :


- Un mouvement suspect, je coupe. Un mot de travers, je coupe. Un cri, je coupe. Tu réponds à mes questions, fais ce que je t’ordonne, et tout se passera bien. Nous comprenons-nous, monsieur l’assassin ?
- Oui.
- Excellent. Les commanditaires sont-ils ces charmants hommes d’affaires, arrivés sur l’ile dans la journée ?
- Oui.
- As-tu déjà été payé ?
- Non. Un acompte, seulement.
- Je vois... Un contre-contrat t’intéresserait-il ?


Pour la première fois, l’homme ne répondit pas tout de suite. Il avala de nouveau sa salive, avant de reprendre la parole d’une voix où filtraient sa curiosité, mais aussi un brin d’amusement :


- Vous voulez que je tue mes patrons ?
- C’est moi qui pose les questions, trancha Elina en appuyant un peu plus de sa son ongle acéré.


L’homme éloigna doucement son cou et, devant cette nouvelle menace, l’araignée le sentit plus coopératif.


- Le protecteur de l’île a mis en garde ma patronne, pour ce qui était des activités illégales. De plus, si elle souhaitait leur mort, je m’en chargerais moi-même. Non, ce que j’attends de toi est bien plus complexe : je veux que tu te fasses prendre, en essayant de tuer ma patronne en public.
- Que... quoi ? s’exclama-t-il, avant de se contenir de nouveau.
- Elle désire ardemment obtenir l’exclusivité des contrats avec monsieur Van Kant, continua Elina en laissant passer cet écart. Cela ne sera qu’un léger coup de pouce, afin de discréditer tes anciens patrons. Ce qu’ils t’ont promis, elle t’en donnera le double si tu remplis ton rôle correctement.


L’araignée laissa le message bien imprégner l’esprit de l’assassin, et elle le sentit se détendre peu à peu. Elle continua son marchandage, sans pour autant éloigner d’un millimètre son doigt coupant de la gorge de l’homme :


- Le plan est on ne peut plus simple. Ils ont tenté d’éliminer mon employeuse d’une façon honteuse, avec pour simple motivation leur frustration devant leur incompétence. Elle désire seulement laisser éclater leur vraie nature au grand jour, rien de plus. Pour ce faire, tu vas tenter, demain, de la tuer à l’arme blanche devant au moins un témoin. Tu veilleras à ce que ce soit crédible, mais ne t’en fais pas : tu n’auras pas une chance sur mille de la toucher.
- Si peu, s’amusa l’assassin.
- Surveille tes propos, lui intima-t-elle d’une nouvelle pression. Ma question est donc cruciale. Préfères-tu mourir maintenant, ou tenter ta chance demain ? Tu as cinq secondes pour te décider.






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Marché aux Vins [6]


Cinq secondes. Que pouvait-on faire en cinq secondes ? Resserrer un boulon ? Prendre une décision ? Espérer ? Cinq secondes, c’était tout ce qu’il fallait pour sauver une vie ou tuer un homme. A petit feu, cela prendrait bien sûr plus longtemps, mais dans l’état actuel des choses, c’était un luxe que l’assassin ne pouvait pas s’offrir. Katia en était consciente, elle ne regardait pas cette scène sous sa forme féline du toit opposé pour s’amuser, elle comptait elle aussi dans son esprit sur l’abdication de l’homme, sur son acceptation du marché qu’il pourrait conclure pour intervenir. En s’approchant près de la fenêtre, elle avait entendu grâce à son ouïe surhumaine des choses qu’elle n’aurait pu entendre autrement. Alors, d’un bond gracieux, elle atterrit dans la pièce, ayant brisé une vitre au passage. Erwin prendrait en charge les dégâts, tant qu’elle sauvait une vie, elle n’en demandait pas plus.

Miaulant à en réveiller les morts, elle s’assit devant le criminel incrédule et se gratta l’oreille. La surprise lui avait fait perdre ses moyens, et il avait perdu le fil de ses pensées. Son regard passa du chat à la fenêtre, ne comprenant pas pourquoi les éclats de verre n’avaient pas blessé l’animal. Celui-ci ne s’avança pas plus, se léchant les babines à plusieurs reprises. Alors l’homme reprit conscience de ce qui l’entourait, et tout en sentant la lame lui déchirer la peau, il dit d’une voix effrayée :

« - Oui, j’en suis, j’en suis ! »

La féline soupira alors d’un de ces soupirs bien humains, faible et enfantin. Elle reprit forme humaine, se saisissant des draps à proximité sans aucune gêne pour en faire une robe improvisée. Son regard indiscret se posa sur le duo en face d’elle tandis qu’elle s’asseyait sur le pied de lit. C’était dur, mais elle n’y prêta pas attention. Un bâillement indiscret s’échappa de sa bouche et elle commença à parler d’une voix rêveuse et distraite :

« - Cette nuit, j’ai fait un cauchemar, comme d’habitude. Pour me changer les idées, je suis allé marcher un peu et c’est là que j’ai entendu ces indiscrets coups de feu qui ont réveillés tout le voisinage. Mon frère doit être en route, s’il n’est pas déjà là. A mon avis, votre plan pour obtenir le monopole du commerce est bien pensé, il ne couvre cependant pas le facteur humain… »

Elle s’arrêta un instant comme pensive et un sourire lui échappa. Puis elle reprit naturellement :

« - Je vous donne un conseil : Passez par de voies plus sûres que celles du chantage et de la mise en scène… Ou vous y réfléchirez à deux fois la prochaine fois avant de fouler cette île de votre pied. »

La jeune fille de dix ans avait fini de parler. Sa dernière phrase s’était adressé aux deux locuteurs, mais elle n’avait pas jugé nécessaire de le relever. Elle pensa un instant qu’elle en avait trop fait, pourtant lorsqu’elle regarda le criminel, ses yeux naïfs ne se teintèrent pas de cette corruption que les adultes pouvaient porter en eux : Punir, se venger, c’était des actes auxquels elle n’avait pas encore goûté, des actes qu’elle réservait pour les assassins de son ami…

Au moment où ces paroles lui échappèrent, elle s’étala sur le lit et reprit sa forme féline. Comme si de rien n’était, elle se dirigea vers la fenêtre pour partir. Aux alentours, suite au passage furtif d’Erwin, les habitants avaient commencé à rendormir tranquillement. Demain serait peut-être jour de mise en scène, du moins c’était une possibilité… Ah, le facteur humain.


Je me dirigeais d’un pas pressé vers l’auberge où la demoiselle Elina avait élu domicile. Apparemment, des coups de feu y avaient été entendus. C’était plus que probable que rapidement des commerciaux tenteraient de l’éliminer, pourtant je ne voulais pas croire qu’elle s’était laissé abattre aussi facilement. De toutes les manières, si son protecteur était bien réel, c’était son assassin qui devait reposer six pieds sous terres. Arrivant à l’auberge, je ne pris pas le soin de demander où la jeune femme logeait et me contentai d’utiliser mon Haki pour la retrouver. Je sentis la voix de Katia s’éloigner sans comprendre ce qu’elle faisait réellement ici, et décidai de me diriger directement là où se trouvait Elina et son agresseur.

« - Est-ce que vous allez bien ? M’inquiétai-je en arrivant dans la chambre. »
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Le pauvre hère, devant la menace de voir sa gorge tranchée, se décida rapidement à répondre par l’affirmative. Elina n’eut pourtant pas le temps de savourer ce sentiment si particulier, celui qu’elle ressentait lorsque les rouages de ses machinations s’emboitaient à la perfection. Le félin à qui elle n’avait accordé qu’un coup d’œil, malgré tout le fracas causé, se transforma soudain en une jeune fille complètement nue ! Elle allait devoir se rappeler que d’autres personnes étaient maudites par un fruit Zoan si elle voulait continuer à vivre... Prise d’un élan de pudeur, la fillette camoufla sa féminité sous les draps en une robe improvisée et, après un bâillement digne d’un chat, leur parla d’une voix ensommeillée. En quelques mots, elle leur expliqua qu’elle avait surpris leur conversation et qu’elle leur conseillait de stopper « leur plan ». Ainsi donc elle les pensait complices, alors que l’homme entre ses griffes avait tenté de l’assassiner quelques minutes auparavant ! Soudain, Elina comprit que cette jeune fille était la sœur d’Erwin, et saisit l’urgence de la situation.

« Voilà qui complique les choses ! Sale petite peste... Il fallait que tu laisses trainer tes oreilles ! Mais je peux encore tourner les choses à mon avantage. », réfléchit à toute vitesse l’araignée.

La gêneuse se transforma à nouveau et chat et s’éclipsa, comme si elle estimait ne plus rien avoir à faire ici... Un mauvais pressentiment envahit la jeune femme, tandis qu’une goutte de sueur glacée lui longeait l’échine. Malgré son air nonchalant la fillette, car elle n’était pas bien âgée, avait témoigné d’une réflexion poussée. Elle ne se serait pas contentée d’un simple avertissement, si jamais elle n’avait pas été certaine que la situation n’allait pas lui échapper. Il ne restait guère de possibilités : elle les pensait incapables de mener leur projet à bien, ou un autre gêneur arrivait. Un son dans les escaliers lui fit comprendre que la seconde éventualité serait la bonne. Instantanément, elle souffla dans l’oreille de sa proie « ne bouge pas », se transforma en Nephila et s’éloigna de l’assassin. Elina se réfugia dans l’armoire, laissée entrouverte par l’homme lors de sa fouille, et alors seulement reprit forme humaine. L’homme qu’elle menaçait la seconde d’avant devait la penser toujours derrière lui, car il demanda dans un murmure :


- Qu’est ce qu’on fait, maintenant ?


Une autre voix lui répondit, quelques instants plus tard, lorsqu’une silhouette familière s’avança au sein de la pièce :


- Est-ce que vous allez bien ?

« Erwin ! », s’exclama la jeune femme en son for intérieur. « Il ne pouvait pas mieux tomber ! »

L’assassin dût le reconnaitre, car il ne tenta même pas de combattre, ni même de s’enfuir. Il leva les bras en signe de reddition, et l’araignée y trouva l’occasion parfaite pour se montrer. Elle poussa doucement la porte grinçante de l’armoire, et en sortit en prenant un air faussement apeuré. L’estropié se retourna et écarquilla les yeux, avant de s’écrier :


- Impossible ! Je suis sûr d’avoir fouillé cette armoire.
- Pas assez, apparemment, lâcha Elina, feignant de retrouver un peu de confiance depuis l’arrivée du protecteur de l’île. Vous tombez à pic, Erwin, mon garde du corps était à court d’idées pour le garder en vie sans bouger...
- Où... où est il ? l’interrompit l’homme, totalement déboussolé.
- Vous ne l’avez pas vu en entrant la première fois, alors je doute que vous le voyez cette fois-ci, répondit-elle calmement. Il n’est pas très doué pour laisser ceux qui me menacent en vie, j’en ai peur... Mais je lui avais demandé de tenir compte au maximum des lois de l’île : éviter toute effusion de sang.


Après un court instant Elina reprit la parole, en fixant droit dans les yeux l’assassin :


- Mais je gage que tous les hommes d’affaires de cette île n’ont pas daigné faire preuve d’autant de scrupules. Cet assassin a été payé, de son propre aveu, par des rivaux pour me tuer.


Elle leva un bras gracieux pour montrer le mur, au dessus de sa couche, avant de reprendre :


- Voyez les impacts de balles au dessus de mon lit, et son arme pendant à sa ceinture. J’ai été chanceuse d’entendre son arrivée, mais à vrai dire il ne la cachait pas vraiment... déclara-t-elle en pointant sa jambe de bois.


Enfin, elle sourit timidement à Erwin, comme si elle était toujours sous le choc, avant de lui confier :


- Et, pour répondre à votre question, je vais bien. Merci à vous. Même si j’aurais préféré me passer d’une n’ième tentative d’assassinat.


Soudain, une évidence frappa l’araignée, et elle ne put s’empêcher de demander au jeune homme :


- Mais comment avez-vous su que j’étais agressée ? Je n’ai pas eu le temps de vous appeler !






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Dim 16 Nov - 12:34
Marché aux Vins [7]

Mon Haki déconnait-il ? J’étais sûr d’avoir entendu la voix d’Elina à côté de cet homme avant de monter les escaliers, et maintenant… Fronçant les sourcils, je me concentrai sur l’homme en face de moi puis sur la jeune fille, écoutant ce qu’ils avaient à dire. Si la jeune femme était une excellente metteuse en scène, son acteur principal laissait à désirer. Je souris seulement quand je compris que l’homme n’avait pas vu le garde du corps en question, et que cela devait inclure certains secrets que la future partenaire économique du Itelzbulger Stein voulait garder. Cependant, la vérité m’obligeait à prendre des mesures drastiques dans ce genre de cas, même si le tuer n’était clairement pas une option. Il allait falloir chasser les commerciaux un peu virulents mais déjà les repérer… Il me faudrait juste le témoignage de cet assassin retraité en échange de l’effacement de cette tentative d’assassinat. Bien sûr, tout devrait se passer en interne.

Constatant l’impact des balles, je les mis en relation avec l’arme à la taille de l’homme. Le calibre correspondait, à vue de nez j’avais même déjà ma petite idée sur le type mais il valait mieux que je vois cela ultérieurement. Les balles n’avaient pas transpercé le sol et s’étaient fichés sous le lit : peu importe ce qu’il y avait en dessous, personne n’avait été blessé. J’eus mon premier soupir de soulagement avec de saisir l’arme de l’homme sans lui demander de se lever.

« - Je ne doute pas que cette nuit ne doit pas être de tout repos… Un de mes hommes va se poster près de l’auberge au cas où, vous pouvez dormir tranquille. »

J’ordonnai cette fois-ci sèchement à l’assassin de se lever tandis qu’Elina posait une question pertinente. Bien sûr, c’était l’alerte générale, les coups de fils des habitants aux alentours et la détresse de l’aubergiste qui m’avaient mené ici. Pourtant, c’était difficile de justifier la vitesse avec laquelle je me déplaçais, mais ce point-là n’avait pas besoin d’être pris dans son entièreté.

« - On a reçu des appels, je me suis juste dépêché de venir ici. »

J’étais arrivé trop tard pour participer à l’action, mais ça ne m’empêchait pas de devoir appliquer la loi de cette île. Expliquant la suite des opérations à Elina, je parlai d’une voix posée.

« - Cet homme va être mis en détention, et on va identifier les commerciaux qui vous veulent du mal. Ils partiront avec le bateau civil demain matin vers onze heures. Après ça, vous obtiendrez les papiers officiels permettant de sceller l’accord. Un numéro sera gardé à la Mairie pour vous contacter en cas d’urgence si vous l’acceptez bien sûr. Mais nous aurons tout le temps d’en discuter demain. »

Sortant de la chambre avec l’assassin j’indiquai à l’aubergiste d’aller changer Mademoiselle Elina de chambre. Elle n’allait pas dormir dans un lit criblé de balles tout de même. Puis, après cette délicate mais intéressée attention, je pris mon escargophone pour appeler Hope qui décrocha immédiatement et lui indiqua de faire une garde pour le reste de la nuit auprès de l’auberge dont je lui indiquai la position. Il valait mieux rester prudent. Puis, après être sorti de l’auberge et m’en être éloigné, je me téléportai avec le prisonnier dans la mairie et l’attachai dans une salle presque vide, où seules une chaise et une table avaient été laissées.

Le soleil ne se lèverait que dans une demi-douzaine d’heures, ce qui laissait encore le temps de l’interroger et de lui faire cracher le morceau. Soupirant, je fermai la porte tandis que Katia se faufilait dans la maison en forme féline, discrètement, pour rejoindre sa chambre.
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Mar 18 Nov - 0:00
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Erwin fut bref mais efficace. Il sembla comparer la taille des impacts avec le calibre de l’arme de l’homme. Le résultat ne fut guère en la faveur de ce dernier ! L’assassin se laissa faire lorsque le jeune homme roux lui saisit son arme. Il ne broncha pas non plus lorsqu’il expliqua à Elina qu’un de ses hommes allait monter la garde pour le reste de la nuit. Une charmante attention, mais l’araignée avait déjà ce qu’elle voulait ! Le protecteur de l’île l’avait crue et, sans doute, comptait arrêter ses rivaux. Par contre, il fut beaucoup plus évasif sur la manière dont il avait été alerté, ce qui mit la puce à l’oreille de la jeune femme. Elle ne releva pourtant pas, car elle était loin de révéler toutes ses cartes, elle aussi.

« Après tout, du moment que je repars de cette île avec un accord commercial solide, j’estimerais ne pas avoir été lésée. », se dit Elina.

Erwin l’interrompit dans ses pensées pour confirmer ce qu’elle avait soupçonné : ses ennemis avaient du souci à se faire. Il était bien tard pour parler des détails administratifs de son affaire avec le vigneron, mais l’araignée accueillit tout de même les précisions avec un hochement de tête et un petit mot de remerciement. Les deux hommes sortirent et, fort heureusement, Elina fut conduite dans une autre chambre grâce à l’intervention d’Erwin. Elle l’en remercia à nouveau et attendit que ses bruits de pas disparaissent pour, malgré tout, tisser de nouvelles toiles sur la poignée de sa porte et sur sa fenêtre. Elle ne comptait pas gâcher la « chance » d’avoir été prise pour cible cette nuit en se lançant dans une escapade nocturne. Mieux qu’une centaine de discours subtils pour discréditer ces goujats, leur stupide tentative d’assassinat lui avait, au contraire, facilité le travail ! Pourtant, il lui restait un dernier détail à régler, le lendemain. Elle profita de la nuit noire pour nettoyer son ancienne chambre de ses fils arachnéens, puis retourna dans sa nouvelle couche pour y dormir, néanmoins sur le qui-vive.

La nuit se déroula sans encombre et, au petit matin, Elina débarrassa la chambre de ses toiles avant de sortir. Elle se dirigea d’un pas ferme vers la grande place où Erwin avait, la veille, défait toute une troupe d’opposants à l’Itelzbulger Stein. Elle repéra la rue par laquelle ils s’étaient évaporés et la suivit, les sens aux aguets. Elle finit par se retrouver devant un simulacre de cave à vin, dont elle espérait qu’il serait plus fameux que la devanture du bâtiment. Une façade de briques rouges, pourvue de deux fenêtres aux volets fermés et d’une enseigne en piteux état. Elle franchit le pas de la porte en jetant à peine un regard au nom de l’échoppe. Devant elle s’étala une salle assez propre, où s’alignaient divers tonneaux sur sa droite. Un grand comptoir lui faisait face et, sur sa gauche, un simple mur muni d’une porte était décoré de quelques tableaux poussiéreux représentant d’illustres inconnus. L’ambiance tamisée, à cause des volets fermés et d’un simple luminaire au plafond, lui convenait parfaitement. Elle reconnut en l’homme en face d’elle la brute qu’Erwin avait dissuadée de tirer une balle au milieu de la foule. Grand, musclé et aux cheveux blonds ébouriffés, le malotru la dévisageait de ses yeux noirs, tel le porc qu’il semblait être.

Ainsi donc ce serait lui son interlocuteur ? Pour ce que cela changeait... Elle s’approcha d’un pas mesuré, le laissant la regarder sous toutes les coutures de son œil lubrique. Elle se retint de lui retourner une moue de dégout devant cette attitude irrespectueuse, et lui adressa la parole d’une voix claire :


- Bien le bonjour, cher négociant. Je viens vous proposer un marché intéressant.
- Héhé... Je vous écoute m’dame, lui répondit-il avec un sourire aux dents jaunies.
- J’ai récemment passé un arrangement avec le maître de l’Itelzbulger Stein, et j’aimerais vous en proposer un dérivé.


Au nom du fameux millésime, elle vit son interlocuteur se renfrogner. Elle continua tout de même sur sa lancée :


- Ma proposition est fort simple : je vous achète tous les mois une certaine partie de vos récoltes, à vous et à vos amis. En échange, vous n’interférez pas avec la production de monsieur Van Kant.
- Z’avez pas bien compris comment on fonctionne, je crois, m’dame, commença-t-il avant de se faire couper.
- Oh que si. Vous êtes des brutes sans cervelles qui, par un quelconque hasard, avez appris le processus de vinification, ce avec un succès incertain. Soyez déjà reconnaissants que je vous propose pareil échange.
- Restez polie, m’dame, j’aimerais pas faire de mal à une cliente aussi bien roulée.


Elina lui adressa un sourire froid. Aussi vil et prévisible qu’elle l’avait escompté. Sans grande surprise, la petite frappe appela ses acolytes de la veille qui entrèrent depuis la porte latérale. À sept contre une, Elina ne pouvait pas se targuer de s’en sortir avec autant de facilité qu’Erwin... Mais elle savait dissuader les gros bras de l’ennuyer, et effrayer les esprits faibles avec une remarquable efficacité.


- Si j’me souviens bien, y’a des messieurs qui paieraient cher pour ta carcasse, beauté, lui lança un des hommes.
- Ouais, haha ! s’esclaffa un petit chauve. On en a rien à foutre de ton argent, poupée. Que ce soit toi ou les autres, on s’en tape, du pognon reste du pognon.
- Autant faire d’une pierre deux coups ! enchaina un autre. On te livre et on leur vend notre vin après !
- Peut être même une pierre trois coups... ricana un autre en lorgnant sur le corps de la jeune femme.


L’araignée retira son manteau de fourrure et le laissa tomber au sol. Elle était habillée avec sa robe de soie noire qui moulait ses formes de gymnastes. Des sifflements grossiers s’élevèrent, tandis qu’Elina s’avançait en souriant vers l’homme qui l’avait accueillie. Ce dernier sortit de derrière son comptoir, un sourire mauvais aux lèvres. Ou tout du moins essaya-t-il. Avant qu’il ne comprenne quoi que ce soit, l’araignée s’était transformée en hybride et était passée derrière lui. Elle tenait à présent son visage et son cou entre ses griffes et, déjà, quelques gouttes de sang perlaient depuis sa gorge. Ses camarades, bien malgré eux, eurent un mouvement de recul devant l’aspect beaucoup moins engageant de cette forme-ci. La Zoan s’esclaffa froidement en approchant sa bouche de l’oreille de sa proie :


- Et bien ? Je croyais que j’étais « bien roulée » ? À moins que je n’aie mal entendu ?
- Putain mais c’est quoi ce monstre ?! s’écria un des bandits.
- Allons ! Vous allez me fâcher à me jeter pareille insulte au visage. Et vous savez ce que l’on dit sur les femmes en colère ? Il n’existe rien de pire...


Tout en parlant, Elina avait légèrement enfoncé son pouce tranchant dans la nuque de sa victime, qui se crispa et hurla presque :


- Les mecs ! Vos gueules !


Devant ce regain d’attention, l’araignée relâcha quelque peu sa prise et lécha délicatement son pouce taché de liquide grenat. Elle n’appréciait pas du tout le gout du sang, mais cette mise en scène était nécessaire devant des esprits aussi simplets. Elle les regarda de ses iris rutilants et, de sa voix grinçante sous cette forme, reprit la parole sereinement :


- Voilà ce qui va se passer. Je vais lâcher votre ami. Il va tenter de m’attaquer et je lui trancherai la gorge avant qu’il n’ait le temps de se retourner. Vous allez vouloir le venger, naturellement. Ainsi, alors que je serai en train de vous étriper, le protecteur de l’île, Erwin, arrivera. Je ne sais pas exactement comment il procédera, mais c’est une certitude : il viendra. Même s’il mettra un certain temps à me reconnaitre, je suis persuadée qu’il y parviendra malgré tout. Ce sera la fin de mon accord commercial sur cette ile et je ne peux pas me le permettre. Me comprenez-vous, messieurs ?
- Faites pas les cons, les mecs... les supplia le pseudo-commerçant entre ses pattes.
- Comme votre ami vous le suggère, rangez vos armes que vous venez de sortir. Je ne suis certes pas aussi forte qu’Erwin, mais je suis bien moins gentille, contrairement à ce que vous avez l’air de penser. Néanmoins, je vous laisse une seconde chance de sortir par cette pièce sur vos deux pieds. Il vous suffit juste de faire le bon choix.


Comme un silence de mort lui répondait, tandis que les hommes rengainaient leurs armes, Elina reprit posément :


- Je vais lâcher votre ami, et vous allez tous m’écouter. Je vous achète, tous les mois, un quart de votre production, à vous tous. En échange, vous restez loin des affaires de l’Itelzbulger Stein et vous ne parlerez jamais de ce qui vient de se produire à qui que ce soit. Si par malheur j’apprends que l’un d’entre vous a fait des vagues, il n’aura aucune mer où se cacher, aucun rempart derrière lequel s’abriter. Je le traquerai, et je le mettrai en pièces... Nous sommes-nous bien compris, messieurs ?
- Tu penses pouvoir t’en sortir après nous avoir menacés ?
- T’es complètement conne, ma pauvre ! On va te...
- Vos gueules, bande de crétins ! leur intima son prisonnier.


Elle avait apparemment attaqué le chef d’instinct, car les autres quidams l’écoutèrent et se turent.


- Z’avez pas peur, pour venir nous menacer chez nous ! lui dit-il sans bouger.
- Je tiens à nuancer. Je suis venue vous offrir un contrat, vous m’avez menacée en retour.
- C’est pas faux, m’dame... dut admettre le patron. Et votre proposition... c’est du solide ?
- Votre production m’importe moins que la tranquillité de monsieur Van Kant. Néanmoins, j’honorerai ma part du marché, si vous tenez la votre.


Toujours menacé par les griffes de la femme-araignée, l’homme semblait réfléchir à toute allure, devant ses associés aux regards hésitants. Finalement, il se décida :


- Vu ce qu’il s’est passé hier, j’ai pas trop envie de tenter le coup et d’essayer de me battre. Après tout, si vous nous achetez vraiment un quart de nos vins, ça me va !
- Voilà qui est mieux. Messieurs, votre réponse ? demanda-t-elle en se tournant vers les autres canailles.


Comme aucun ne montra d’envie particulièrement belliqueuse, Elina finit par relâcher sa proie et regagner son manteau. Elle garda sa forme hybride jusqu’à s’être rhabillée puis, ainsi vêtue, alla rapidement signer un accord avec les maitres des lieux. L’affaire conclue, elle plia sa copie du contrat et la rangea dans une poche de son manteau avant de partir sous forme humaine. Avant de sortir, elle se retourna et lança en guise d’avertissement :


- Et n’oubliez pas, je respecterai ma part du contrat tant que vous ferez de même. Ne cherchez pas à jouer au plus fin avec moi. Vous vous en mordriez les doigts.


Sans un mot de plus, elle rejoignit la rue et s’éloigna sans même leur jeter un regard de plus. Elle avait un accord bien plus important à finaliser, bien que celui-ci assurerait en partie la sérénité de son fournisseur en vins d’exceptions. Ou tout du moins l’espérait-t-elle, pour le bien de ses affaires et de ces fripouilles qui osaient se nommer vignerons...






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Ven 21 Nov - 17:26
Marché aux Vins [8]

« - Bonjour, Monsieur Von Kant ! »

La voix mélodieuse de Katia résonnait dans la petite pièce à l’odeur de renfermé. J’avais dû annuler ma session d’entraînement pour m’occuper des gamins, bien que j’ai couru une heure et demi vers six heure. Cid disait que ma condition physique n’était pas à lésiner, et il savait de quoi il parlait : lorsqu’il était torse nu, il en imposait vraiment. Ses muscles saillants auraient donné envie à plus d’un jeune homme, et à mon âge avoir un repère comme lui était à la fois motivant et déstabilisant. L’assassin avait fini par parler dans la nuit, mais m’avait occupé une bonne partie de celle-ci. Après un coup d’escargophone de Hope, j’avais pu constater qu’Elina était sortie de l’auberge, il m’avait demandé s’il devait la suive. Ce n’était pas la peine, avec les noms que nous avions il valait mieux procéder à l’arrestation des commanditaires.

Ceux-ci nous avaient accueillis à moitié nus, entourés de prostitués encore allongées dans les draps, leurs corps marqués par les bleus que leur travail leur obligeait parfois à supporter… Cet aspect-là de Micqueot, ou de toute autre île, ne me réjouissait pas. Certaines le faisaient sûrement par choix mais la plupart n’avaient que cette solution pour se nourrir. C’était pour cette raison que nous devions étendre les commerces de l’île, de manière à donner du travail aux habitants les plus défavorisés… Réintégrer les âmes perdues, une grande entreprise. A peine s’étaient-ils rhabillés que Cid et Hope les avaient escortés vers le port d’où partiraient, deux heures plus tard, le bateau. Nous ne tenterions pas de les punir plus que le temps qu’ils avaient gâché à monter cette tentative de meurtre : Pourtant leur présence demeurerait à jamais inacceptable sur l’île des rouquins.

« - Oh, mais si ce n’est pas Katia ! »

Ma sœur était venue peu de temps après, jetant un regard à la fois curieux et discret aux jeunes femmes qui avaient commencé à se rhabiller. Je ne pouvais rien pour elle si ce n’était leur offrir un dédommagement, venant droit des poches des hommes véreux. Elles avaient accepté et étaient parties sans demander leur reste. Attitude compréhensible quand on connaissait les antécédents de certaines, avait commenté Katia dont le nez était ces temps-ci fourré dans des plans pour de nouvelles armes. Exceptionnellement, elle voulait m’accompagner. Passer un peu de temps entre frère et sœur, me donner des conseils, ce genre de choses. Elle avait discrètement placé une proposition pour assister à la signature du contrat d’Elina et de Monsieur Van Kant. C’était donc vers la boutique que nous nous étions dirigés.

« - Vous avez l’air de bonne humeur, lançai-je tout en baillant, ne m’étant pas encore remis de ma nuit blanche. »

Il acquiesça d’un signe de la tête avant de retourner derrière son comptoir et de sortir un contrat tout prêt à être signé. Un acte parfaitement en ordre que je lis avec beaucoup d’attention. Les taux seraient peut-être à réviser, mais il était sûr qu’Elina allait gagner beaucoup d’influence en signant ce contrat. Elle pourrait presque devenir une associée assez importante pour que Monsieur Van Kant lui demande son avis sur certaines questions déterminantes quant à l’avenir de la société. Cultiver ce qui lui permettait de faire son vin ailleurs pourrait être une stratégie intéressante, mais il se refusait à quitter son foyer. Il avait mis trop de temps à l’acquérir pour partir maintenant. Avec une associée en revanche les possibilités devenaient exponentielles.

« - Il ne manque plus que la principale intéressée, commenta Katia sur un ton malicieux, n’ayant pourtant pas réellement l’habitude de soulever des évidences. »
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Dim 23 Nov - 11:22
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L’araignée parcourait les rues en direction de son hôtel. Elle s’était levée de bonne heure pour avoir le temps de conclure son « arrangement » avec les opposants à l’Itelzbulger Stein et tout s’était déroulé selon ses plans. Elle tenait cependant à prendre toutes ses précautions, aussi préféra-t-elle rentrer dans sa chambre afin de prendre une douche et de se changer. Après tout, elle n’avait pas oublié la menace à peine déguisée de la petite sœur d’Erwin, proférée la veille. Cette Zoan pourrait poser problème, notamment si elle sentait une odeur de sang émaner d’elle. Avec son odorat de chat, la chose ne serait pas impossible. Arrivée dans sa chambre elle prit grand soin, dans une douche plus rapide qu’à l’accoutumée, de se savonner tout le corps et les cheveux, ainsi que de bien laver ses ongles. Une fois rassérénée, elle se sécha puis attrapa une autre tenue, sa robe de soie noire ayant pu retenir quelques onces d’odeur de sang. De plus, elle s’était déjà présentée avec cette mise chez monsieur Van Kant. Rien de plus rédhibitoire qu’une femme sans garde robe, n’est ce pas ? Elle opta donc pour des vêtements plus chauds en fourrure comportant un pantalon, des bottines et une veste aux couleurs d’étain, ainsi qu’un manteau au gris plus sombre qu’elle avait apporté pour l’occasion. Une fois apprêtée, elle laissa ses bagages à la réception et se dirigea vers la cave du fameux vigneron.

Les rues de Micqueot commençaient à se remplir, alors que l’heure du rendez-vous approchait. Elle pensait même être légèrement en retard. Mais cela ne la gênait guère, il fallait savoir se laisser désirer. Elle arriva rapidement sur place, son hôtel n’étant qu’à quelques pas de l’établissement. Elina s’annonça en toquant à la porte puis entra, un sourire aux lèvres. Son regard balaya l’assemblée rapidement, et son sourire s’élargit quelque peu. Son instinct ne l’avait pas trompée, la petite peste était présente. Son frère et le maître vigneron l’attendaient également. L’araignée les salua tous chaleureusement :


- Bien le bonjour messieurs, mademoiselle. Je vous prie de m’excuser pour mon retard, je suis passée régler le problème de vos opposants, monsieur Van Kant.
- Vous êtes femme de parole, ma chère. Ils n’ont pas été trop disconvenants ?


Tout en s’avançant vers le comptoir où reposaient des papiers, sans doute le contrat, Elina adressa un regard malicieux à son futur associé :


- Ce sont des rustres, comme vous le savez. Mais des rustres cupides. Ils se sont tout de suite assagis lorsque je leur ai faite la bonne proposition. J’ai leur promesse qu’ils ne vous ennuieront plus.


Ce faisant, elle expliqua son contrat au vieil homme, sans pour autant le lui montrer. Après tout, il était possible que les feuilles elles-aussi se soient teintées d’une fragrance de sang. Elina l’avait donc laissé dans sa valise, à l’accueil. Plus que du vigneron, c’était d’Erwin et de sa sœur dont elle se défiait. L’un était bien trop puissant pour qu’elle s’en fasse un ennemi, l’autre avait réussi à tromper sa garde un instant et faillit la placer dans une position critique. Elle espérait bien montrer patte blanche en agissant de la sorte. Après tout, depuis son arrivée sur cette île, elle ne pensait pas avoir franchi une seule fois la ligne édictée par Erwin. Mis à part peut être la veille, avec l’assassin... Aussi, pendant que leur hôte débouchait une bouteille pour fêter leur accord à venir, la jeune femme s’enquit auprès du protecteur de l’île :


- L’assassin a-t-il été coopérant, Erwin ? Avez-vous réussi à placer derrière les verrous ces odieux personnages ? Pour tout vous dire, j’aimerais pouvoir repartir de cette île sans être attaquée.


Monsieur Van Kant revint avec un verre et un stylo pour Elina. Cette dernière les accepta de grand cœur et, tout en écoutant la réponse du jeune homme, se mit à parcourir les termes du contrat. Le vieil homme avait sans doute été un peu pingre, les taux seraient à revoir à la baisse dans un futur proche. À moins que ce ne soit Erwin qui ait cherché à faire monter les prix d’achat ? Pour l’instant elle ne jouissait pas d’une fortune assez confortable pour assurer tous les mois des commandes aussi onéreuses... Mais, avec l’ile Yakoutie en main, elle pourrait certainement renflouer ses caisses et tenir le rythme. Les premiers mois seraient difficiles, mais le retour sur investissement serait colossal selon ses estimations ! Les termes et conditions de leur arrangement lui étaient assez profitables. Elle se doutait qu’elle pourrait entrer dans les bonnes grâces du vigneron au fil des mois et, peut être, obtenir plus qu’un simple arrangement commercial. Mais, pour l’heure, cela lui suffisait amplement ! Elle leva les yeux vers l’assemblée et déclara d’une voix claire :


- Tout me semble parfaitement en ordre. Si personne n’émet d’objection, ou d’amendement de dernière minute, je suis prête à signer sur le champ.

« Nul ne pourra dire que j’ai acquis une partie de l’Itelzbulger Stein par malice. Quoi que...», s’amusa l’araignée en pensée.






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« - Elle est en retard. »

La voix de Katia trancha. Elle regardait l’horloge avec une certaine impatience, le pied cognant en rythme avec le tic-tac de l’aiguille contre le comptoir en bois. Il n’y avait pas foule ce matin, la majorité de la recette des vins de Monsieur Van Kant venait de toutes les manières de ses commandes mensuelles. Je comprenais bien pourquoi Katia n’aimait pas attendre, mais le commerçant avait le sourire alors je lui fis juste signe d’attendre. Quelques minutes après, la demoiselle entrait dans le bâtiment. Je lui souris sans artifice et m’écartai pour laisser l’accord se faire. Après un moment d’hésitation, ma sœur décida d’en faire de même. Son regard était concentré sur la demoiselle. Elle renifla un instant l’atmosphère mais la poussière ambiante la fit éternuer. Je lui tapotai la tête alors qu’elle se passait un doigt sous le nez. Apparemment, elle ne trouvait pas ce qu’elle était venue chercher. Cette jeune femme devait l’intriguer pour une quelconque raison, mais je ne savais pas de quoi il s’agissait. Fronçant les sourcils, je fis quand même mine de m’intéresser au contrat qui était en train de se signer. Une fois cela fait, Elina me posa une question à laquelle Katia s’empressa de répondre d’une voix suave, presque mielleuse ou moqueuse :

« - Nous les avons expulsés de l’île, malheureusement nos dispositifs de prisons sont assez limités ici, pour le moment. »

Je me levai à mon tour et raillai les propos de ma sœur en me mettant à côté d’elle, la dépassant quand même en taille mais pas énormément par rapport à certains hommes :

« - Tu t’appelles Erwin, maintenant ? Quoiqu’il en soit, ce qu’elle dit est vrai, nous les avons expulsés de l’île, sans retour possible. Leur bateau partait pour Seppen Town, j’espère que ça ne vous dérange pas. »

De toutes les manières, le mal était fait. A cette heure-là, ils devaient avoir quitté l’île si tout s’était passé comme prévu. Il ne restait plus qu’à ce que les papiers d’Elina soient signés et nous mettrions un terme à cet échange. Alors qu’elle demandait si quelqu’un avait une objection, je secouai la tête négativement et regardai Katia qui haussa les épaules, à présent indifférente à la situation. Elle semblait avoir les idées clairement fixées sur quelque chose. Pendant quelques secondes, je me mis à vouloir observer la signature, mais mon escargophone sonna brusquement, interrompant l’instant précieux de la clôture du contrat. Le « Berep, berep, berep » résonnait, gênant, et je me détournai de la salle pour le prendre comme si ça allait protéger l’appel des oreilles indiscrètes.

« - Salut, Erwin, c’est Malia. J’aimerais te voir au plus vite, j’ai une nouvelle piste d’un de mes contacts sur West Blue, tu peux être là dans une heure ? Ca concerne Aria, la copine de Mike, je crois que j’ai une piste. »

J’acquiesçai un long moment d’un signe de la tête avant de dire que je serais là. Regardant Elina, je lui adressai un sourire. Katia quitta la pièce sans lui adresser un Au Revoir mais j’étais encore poli, tout du moins j’étais certain de l’être.

« - Bien, j’espère que nous aurons l’occasion de nous revoir. Au besoin, vous avez mon numéro. Restez autant de temps qu’il vous plaira sur l’île ! »

Je partis après avoir fait un signe de la main à Monsieur Van Kant. Katia m’attendait dehors, comme pressée, me conseillant de demander à Mike de les accompagner. Je refusai, me disant que si ça n’aboutissait pas, ce serait encore une fois un espoir vain, un espoir perdu.
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Elina arqua un sourcil, au moment où la petite peste s’avança pour prendre la parole. Elle s’attendait à ce qu’elle tente quelque chose, mais elle dû se rendre à l’évidence : elle avait peut être surestimée la gamine. Loin de lui tendre un piège quelconque, ou de rapporter la discussion qu’elle avait surprise avec l’assassin l’a veille, sa réaction fut presque puérile. Elle s’appliqua pour l’irriter et la provoquer d’une voix d’où dégoulinait son mépris.

« Fanfaronne tant que tu le peux, petite chipie... Ton frère ne sera pas toujours là pour te protéger si tu te moques ainsi de tout le monde. », grinça l’araignée intérieurement.

Néanmoins elle n’en laissa rien paraitre et se contenta de sourire aimablement à la demoiselle. La réaction d’Erwin lui arracha presque un rire de nez, lorsqu’il lui rabattit son caquet d’un ton un brin taquin. Il confirma l’expulsion de ses concurrents vers Seppen Town. Elle avait déjà entendu parler de cette île et, si elle se souvenait bien des rumeurs, seule une boisson chocolatée particulièrement réussie valait le détour. Aussi, elle ne voyait pas d’inconvénient à sa décision, bien au contraire ! Alors qu’elle posait l’ultime question, presque rhétorique à ce stade des tractations, un escargophone s’activa et bien rapidement Erwin attrapa le combiné. Le sursaut de prudence que l’appel avait provoqué chez Elina se calma bien vite car, de toute évidence, celui-ci ne concernait guère son arrangement. Elle ne comprit guère la teneur de la discussion, cela étant, mais elle s’en souciait comme d’une guigne pour le moment. Erwin sourit soudain à l’araignée, avant de s’éclipser. Sur un ultime au revoir, il en profita pour proposer son aide à Elina en cas de besoin, tandis que sa sœur s’était déjà faufilée dehors sans la moindre politesse. La jeune femme eut tout juste le temps d’acquiescer de la tête, que le protecteur de l’île avait quitté la boutique. Il ne restait donc plus que monsieur Van Kant et elle-même.

La signature se déroula sans autre incident, et l’accord fut scellé avec un verre d’Itelzbulger Stein, pour la plus grande joie de la femme d’affaire. Elle resta quelques instants avec le vigneron, afin de finaliser les modalités de l’accord et la date de première livraison. Le vieil homme lui laissa son numéro de Den Den Mushi et proposa de fréquents échanges, ce à quoi la jeune femme accéda sans retenue. Elle lui promit de l’appeler lorsqu’elle serait prête à recevoir la première cargaison, soit dans un mois selon ses estimations. Elina finit par s’excuser, car elle ne devait pas rater la navette du soir. Elle devait se rendre sur Yakoutie Island sans tarder, Shiro et Seika l’y attendaient, tout comme ses grands projets concernant cette île polaire. Sa copie du contrat en main, elle retourna à son hôtel et sans plus attendre attrapa ses bagages avant de se diriger vers le port.

Le bateau était bien amarré et le capitaine l’invita à monter, après avoir contrôlé son billet. Elle grimpa dans le fameux navire et se dirigea vers sa cabine avant de s’y enfermer. Le Den Den Mushi dont était pourvu la pièce la regarda de ses yeux globuleux. Il sembla un brin effrayé à la vue de son air de prédateur ravi, mais changea bien vite d’attitude lorsque la jeune femme lui sourit. Le gastéropode rougit légèrement et ne résista pas lorsqu’Elina décrocha son combiné pour appeler ses associés. La sonnerie caractéristique retentit quelques instants, avant que la voix familière de Seika ne résonne.


- C’est moi, déclara sobrement Elina. Où en êtes-vous sur Yakoutie ?
- Nous avons réservé deux chambres dans l’auberge comme convenu, et Shiro a commencé à sympathiser avec les clients. Je crois qu’il a déjà vidé un tonneau de bière. De mon côté, je laisse trainer mes oreilles, mais je pense déjà avoir trouvé quelques petites choses intéressantes...
- Excellent. Tu m’en parleras plus en détail à mon arrivée.
- Je suppose que l’accord a été signé avec succès ? demanda pour la forme la jeune fille.
- Il m’a fallu improviser, car vos informations n’étaient plus d’actualité. J’ai dû composer avec un civil du nom d’Erwin Dog, et un autre prénommé Mike que je n’ai pas croisé. Apparemment ils avaient défait le fameux pirate qui régnait sur l’île.
- Pourtant, Marivo Kovol était toujours à la tête de l’île quand nous sommes passés, se défendit Seika.
- Peu importe, trancha Elina en douceur. L’accord est passé, nous aurons l’Itelzbulger Stein.
- Une bonne nouvelle ! J’ai hâte que tu arrives, Shiro est intenable et recommence à boire... J’ai peur qu’il casse quelque chose ou ne nous fasse une mauvaise réputation.


Elina sourit devant la candeur de sa protégée. Elle la rassura rapidement puis, après s’être assuré que tout se déroulait comme prévu, lui recommanda de veiller au grain pour le moment et raccrocha. Elle avait passé une nuit agitée et comptait bien se reposer pendant le trajet. L’araignée tissa néanmoins sa toile dans sa cabine, en l’inlassable travailleuse de soie qu’elle était. Elle comptait bien révolutionner North Blue, tel un ouragan venu briser les codes du gouvernement mondial et des pirates sur cette mer peu accueillante, mais au potentiel prometteur. Et pour ce faire Yakoutie Island, l’œil du cyclone, tomberait bientôt sous sa domination.






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