Welcome to

the Jungle

Il n'y a que peu de choses pouvant vous ruiner une journée aussi bien qu'un dérapage non-contrôlé et un atterrissage en force sur le coccyx. En même temps, même un abruti aurait pu deviner comment la descente d'une montagne à la paroi glissante et sans le moindre équipement d'escalade allait se terminer. Enfin, même si le choc contre l'épaisse pierre blanche avait été plus que violent pour le bassin du jeune homme, il avait au moins réussi à éviter toute blessure grave. Ses pieds s'étaient presque aussitôt enfoncés dans le sol, la terre imbibé d'eau était particulièrement ramollie, preuve que l'averse s'abattant sur l'île ne s'était pas arrêtée depuis plusieurs jours. Les gouttelettes perlaient sur chaque brin d'herbe, chaque feuille, chaque pierre. Celles-ci ne semblaient se rompre pour s'abattre au sol que lorsqu'elles frappaient le long manteau blanc de l'inventeur. La jungle et le climat tropical étaient magnifiques à regarder, c'était tout bonnement... Paisible. Une ambiance en apparence statique, presque autant que le désert dans lequel il avait passé son enfance. Seulement ici ce n'était pas le vent qui dominait en tant qu'élément, mais bien l'eau présente jusque dans ses chaussures. Dos au mur de plusieurs centaines de mètres de haut, l'épaisse forêt lui faisant face lui semblait organique, presque vivante. Il pouvait déjà entendre au loin les cris à peine perceptibles d'un singe, ou peut-être d'un oiseau inconnu difficile à dire.

Seul. Il était venu affronter l'un des endroits les plus sauvages de tout Grand Line sans le moindre accompagnement, un acte relevant presque du suicide. L’appellation de Little Garden attribué à ces lieux, semblait presque ironique au premier coup abord. On se serait cru dans le jardin d'Eden en fait. Enfin... Si celui-ci débordait de dangers en tout genre, tous parfaitement capable d'entraîner la mort d'un homme en une fraction de seconde. Pourtant, il était venu risquer sa vie dans un endroit pareil, sachant pertinemment les risques qu'il encourait. Alors pour qu'elle raison était-il venu malgré tout ? Qu'est-ce qui pouvait pousser quelqu'un à se jeter tête première dans un endroit pareil ? C'est devant ce questionnement que le hors-la-loi se remémorait sa conversation avec Mad sur Whiskey Peak...

«-La prochaine île de cette voie ?

-Ouais une sorte... De jungle épaisse. On est passé au-dessus en venant ici ça avait l'air d'un drôle d'endroit.

-Ah ouais, ça c'est Little Garden. De ce que j'ai entendu c'est une île préhistorique, c'est bourré de dinosaures et de drôles de plantes là-bas, pas le genre d'endroit où je voudrais prendre des vacances.

-Des dinosaures ? Tu sais rien d'autre ?

-Pas vraiment non, c'est pas exactement le genre d'endroit où se baladent les touristes en même temps. Pourquoi tu pense y aller ?

-Peut-être jeter un œil...»

Quelle idée lui avait traversé l'esprit à ce moment ? Déjà, le profit. Comme toujours il avait su voir le potentiel d'un endroit regorgeant de monstres préhistoriques et autres étrangetés. Qui sait ce dont il serait capable s'il arrivait à en capturer quelques-uns durant son séjour risqué. Mais pourtant ça n'expliquait pas entièrement sa décision ou même pourquoi il avait tenu à venir sans personne d'autre. Qu'est-ce qui motivait une telle action après tout ? Difficile à dire. Comme toujours l'homme ne savait pas entièrement pourquoi il choisissait de faire une chose plutôt qu'une autre. Toutefois, maintenant qu'il y était, maintenant que son défi se présentait sous ses yeux, il commençait à en avoir une bonne idée. À un moment, chaque homme doit affronter le danger s'il souhaite accomplir quelque chose... Si certains rencontres de telles situations dès leur plus jeune âge, d'autres demeurent,  par choix ou par le fruit des circonstances, simplement inaptes à rencontrer un tel scénario. Dans son cas, il ne faisait aucun doute qu'il faisait parti de la seconde catégorie. Lui qui avait pourtant vu le jour dans un environnement peu accueillant, c'était le cœur de sa personnalité, l'essence de sa façon d'être qui l'avait empêché de se retrouver face à ce genre d'événements. La prudence... C'est la prudence qui avait guidé toute sa jeunesse, évitant par le fait même toute situation jugée trop risquée pour en valoir la peine. Pourtant, il avait fait du progrès ça ne faisait aucun doute. S'il avait seulement débuté sa vie de criminel à la demande de son ami, il avait progressivement commencé à prendre des risques de son propre chef. Sa propre organisation... San Faldo... Shabaody. Lentement mais sûrement il avait réussi à changer ce qui le limitait le plus au fond de lui. Et c'était au fond parce qu'il se haïssait, parce qu'il se sentait comme un vrai incapable face à ces visages sur les avis de recherche placardant les murs de son voisinage. Parce que même son ami le plus proche avait entreprit un grand projet, se séparant par le fait même de l'inventeur. Ce jour-là il n'avait pas éprouvé de tristesse pour le départ du fauteur de trouble ça il l'avait déjà compris, non il avait éprouvé de la honte en fait. La honte de ne pas pouvoir faire autant, de ne pas avoir d'objectif, de simplement rester là à effectuer la même routine encore et encore. Pourtant, une vie réussie n'est pas forcément dicté par les grands projets et les grands hommes non ? Certains sont parfaitement contents de passer une vie agréable sans jamais faire parler d'eux. Et c'est là que Zeke bloquait en fait. Si une majeure partie de son être lui criait de toutes ses forces de ne pas s'attirer d'ennui, de faire preuve de prudence, de ne simplement pas s'en mêler ; une autre part de lui poussait tranquillement, comme une force impossible à arrêter elle grandissait, réclamant que sa voix soit entendu et qu'il laisse sa marque en ce monde. Le désir de ne pas être oublié au moins pour un temps, le désir de forcer la noblesse, les politiciens, les civils et les autres à se souvenir de lui. Un arbre poussait au milieu du désert, quelque chose exigeant un scénario que son environnement ne peut lui procurer, l'ambition se heurtait à l'apathie chez l'inventeur.

Et pourtant il était maintenant là, il s'était jeté dans une jungle voulant sa mort à tout prix pour prendre le dernier risque dont il pouvait avoir besoin pour véritablement changer. Il allait s'y heurter et soit périr soit ressortir changé. Après tout, face à un environnement hostile seul ceux qui s'adaptent peuvent survivre. C'est donc pour ça au final qu'il avait pris son dirigeable, s'était dirigé vers cette île avant d’atterrir sur une montagne ressemblant davantage à un crâne géant. Et maintenant qu'il en était descendu il était fin prêt à affronter cet endroit infernal. S'engageant dans la jungle boueuse, l'inventeur tentait tant bien que mal de se frayer un chemin à travers les hautes herbes et les nombreuses racines des arbres gigantesques. Le terrain difficilement navigable n'était malheureusement pas le seul facteur rendant les choses difficiles pour l'inventeur, en effet l'air excessivement humide avait rapidement entraîné une forte transpiration chez le hors-la-loi ainsi que des difficultés à respirer. Et pourtant, cela ne l’empêchait pas de rester concentré sur son environnement, de l'observer dans ses moindre détails, car il était certes à l’affût de tout danger potentiel, mais aussi intrigué par celui-ci. En quelques heures à peine il avait eu l'occasion de rencontrer de nombreux phénomènes sortant de l'ordinaire pour lui. Il était soudainement passé des gros insectes au dinosaure gigantesque surplombant une petite clairière à la recherche d'une proie. La bête cornu avait en quelques secondes réussie à faire réaliser à l'inventeur l'ampleur de la tâche qui l'attendait. Le mastodonte ressemblait à un véritable cuirassé sur patte avec le cuir épais de sa peau et ses membres immenses. Si le hors-la-loi devait s'attaquer à ce genre de trucs il ne faisait aucun doute qu'il ne devrait pas lésiner sur la puissance de feu.

Malheureusement pour lui ce fut plutôt le lézard géant qui le repéra le premier. Fonçant droit sur sa position gueule ouverte, l'inventeur n'eut qu'une fraction de seconde afin d'éviter de justesse l'épaisse mâchoire du monstre en sautant hors de son chemin. Avec une simple charge celui-ci avait réussi à écraser tous les arbres sur son passage et à arracher en un rien de temps tous les obstacles qu'il avait lui-même tant de difficultés à franchir. Son saut l'avait également laissé dans une sale position, dos au sol il avait atterrit assez violemment sur une grosse racine et n'aurait pas le temps de se relever avant que son attaquant ne charge de nouveau. Sortant de sa poche son vieux bazooka fraîchement réparé de ses dernières péripéties et déjà chargé, l'ingénieur n'hésita pas une seconde à tirer en direction de la bête dans l'espoir de toucher sa tête. Un coup pour rien puisque celui-ci, ayant repris son équilibre, bougeât soudainement pour charger de nouveau, évitant par le fait même le projectile. Pas le temps de recharger... Lâchant son lance-rocket, l'ingénieur eut tout juste le temps de balancer avec précision une bombe dans la gueule du prédateur avant que celle-ci ne s'abatte sur sa personne... Est-ce qu'il était mort ? Non il se sentait plutôt écrasé pour être exact. En effet, une sorte d'énorme coussin blanc l’aplatissait maintenant contre le sol. Apparemment la bombe de mousse qu'il avait balancé avait eu le temps de se déployer suffisamment vite pour remplir la gueule du gros lézard et stopper sa mâchoire. D'ailleurs il ne fut pas le seul à le remarquer puisque le mastodonte se redressa d'un coup comme pour lutter contre l'énorme boule moelleuse l’empêchant de dévorer sa proie. Voyant une opportunité de s'en débarrasser l'inventeur sortit finalement son pistolet pour tirer un coup dans chacune des pattes de l'animal. Certes les balles spéciales conçues pour des cibles humaines ne furent pas assez puissantes pour percer l'armure de la bête, mais le choc combiné aux flammes de ses balles incendiaires furent suffisant pour faire flancher l'équilibre déjà précaire de sa cible. C'est au moment où celui-ci tomba finalement, que Zeke pû se relever et l'achever d'un grand coup de gant explosif en pleine gorge. L'impact-dial combiné aux quatre petites explosions avaient suffient à percer la trachée de la bête, la tuant par le fait même. Ce n'était pas bon, visiblement capturer vivant un truc de ce calibre n'allait pas être une partie de plaisir. Enfin peut-être qu'avec un peu plus de préparation la prochaine fois...

À peine s'était-il retourné sur cette pensée qu'il avait été projeté violemment au sol. Sa jambe avait été saisie par une étrange liane et maintenant une saleté de fleur lui faisait de l’œil en... Claquant d'une espèce de mâchoire en son centre ? Non seulement cette île était bourrée de trucs louches, mais en plus il ne pouvait pas avoir une minute de repos ! Son revolver toujours en main il n'eut besoin que de deux balles pour liquider le végétal carnivore et le faire prendre feu. Un autre problème de réglé, mais n’empêche s'il continuait de se faire assaillir ainsi il allait avoir de la difficulté à s'en sortir. Comme si ça ne suffisait pas, ses maux de crâne le reprenaient. Vu la vie qui grouillait dans cette jungle il avait l'impression d'être constamment assaillit par les voix de centaines de créatures, probablement toutes aussi enclines que les deux dernières à essayer de le bouffer. Il avait besoin de sortir de la jungle, au moins le temps de trouver un lieu sécuritaire où bâtir un refuge. Après tout s'il devait passer plusieurs jours dans cet endroit il aurait certainement besoin de dormir à un moment donné...

Ce fut finalement seulement au bout de nombreuses heures de lutte et de problème d'orientation que le hors-la-loi atteignit enfin la plage, épuisé et mal en point. S'il commençait à s'habituer à combattre les monstres de cette île, il n'avait pas encore l'endurance d'un combattant pur et dur. Enfin, maintenant qu'il était finalement arrivé dans un environnement plus dégagé l'inventeur ne s'était pas fait prier pour s'écraser sur le sable fin et se reposer. Quelle idée aussi de venir dans un tel enfer vert aussi, ça ne faisait même pas une journée et il se sentait déjà complètement déboîté... La mer était jolie d'ici au moins... Le soleil la faisait étinceler au gré des vagues et tout semblait paisible au royaume des flots. En fait, ce coin était étonnamment tranquille en comparaison à ce qu'il venait de traverser. La préhistoire ne supportait pas le sable ou quoi ? Se roulant sur le dos cette pauvre loque s'était mise à regarder paisiblement la cime des palmiers pendant quelques secondes... Puis quelques minutes... Il ne savait même plus pourquoi il était là à force, il avait l'impression de glander dans son lit comme au bon vieux temps. Comme il était confortable ce lit... Il se demandait bien ce qu'il était advenu de sa chambre d'ailleurs, sa chère petite planque au fond d'une baraque tombant en ruine. Bon sang peut-être qu'un sans-abris avait emménagé dans son placard et utilisait maintenant ses vieux vêtements pleins de trous comme oreillers...

Enfin bref, cette réflexion ô combien pertinente avait finalement été coupé par une odeur. Une odeur particulièrement louche étant donné l'endroit où il se trouvait. Loin de la brise d'une plage, c'était plutôt de la viande grillé qui lui titillait les narines, pas exactement le genre de choses qu'on sent en pleine nature. Ça venait d'où exactement ? Avec le vent soufflant sur sa gauche probablement de là... Et le voilà qui se dirigeait maintenant dans cette direction tel un animal en quête de son prochain repas, plutôt triste comme vision. En même temps il s'y dirigeait plus par curiosité que par appétit, il avait beau en avoir marre des conserves ça ne voulait pas dire qu'il était désespéré non-plus. Il mit finalement une dizaine de minutes à trouver l'origine de cette effluve mal placé en arrivant à ce qui semblait être une petite crique, les rocheuses en moins. Drôle d'endroit, mais pour une raison ou une autre il n'avait guère été surpris d'y trouver une sorte de village portuaire. Comme quoi même dans les lieux les plus inhospitaliers on pouvait continuer de trouver du monde. Enfin il ne risquait pas d'y trouver grand chose d'utile, à première vue il ne s'agissait que de quelques huttes accompagnées de moins d'une dizaine de baraque en bois assemblées mollement par la populace. Probablement des chasseurs vu le nombre réduit de bateaux laissés sur la plage et si c'était le cas, il ne faisait aucun doute que ces types savaient se défendre. Après tout quel malade voudrait vivre sur une île bourré de dinosaures enragés et faire de la chasse son métier ? Dans le doute l'inventeur s'était approché nonchalamment des lieux, il n'avait peut-être rien à y faire, mais tant qu'à se balader dans un endroit où tout se ressemblait il pouvait bien faire l'effort de regarder de plus prêt ce qui sortait de l'ordinaire. Et puis s'il voulait trouver refuge entre ses petites escapades au cœur de la préhistoire, quoi de mieux qu'une tribu déjà bien implanté ? Enfin c'était en supposant qu'ils ne tenteraient pas de le scalper dès son arrivée, il était déjà suffisamment épuisé sans se rajouter un autre combat chiant sur la tas.

C'est en se rapprochant davantage qu'il remarqua l'énorme brasier au centre des lieux, au sommet duquel trônait ce qui, à première vue, ressemblait à un tricératops ayant eu le malheur de se faire embrocher sur une sorte de gros pieux. Ça confirmait déjà relativement bien sa théorie, en plus d'expliquer l'odeur qui commençait sérieusement à faire gronder son estomac. La population était calme, la pause de l'après-midi sans doute. Certains étaient allongés sur ce qui avait dû être la peau d'un tigre à dent de sabre à une époque, d'autres rafistolaient plutôt des armes faites d'os et de pierres. Étrangement, sa présence semblait passer inaperçue au milieu de tout ce beau monde. Au moins à l'aide des différents bribes de conversations qu'il percevait il avait pu en déduire que ces individus parlaient la même langue que lui, c'était déjà ça de gagné. Toutefois, quelque chose venait perturber ce tableau si détendu, un petit détail qui prenait inévitablement toute la place dans la scène pittoresque.

En effet, un trio d'abrutis semblaient trouver qu'il était marrant de s'engueuler en public alors que personne ne semblait d'humeur. Enfin pour être plus exact seul l'un d'entre eux semblait occuper le débat, les deux autres occupaient plutôt le statut de spectateurs impassibles. Au centre de la cacophonie se trouvait une grande asperge aux cheveux longs et à l'accoutrement... Plutôt similaire à celui de Zeke en fait... Cette grande gueule n'était pas du tout  à sa place dans ce décors tout comme sa voisine bien plus tranquille. Pour être exact les deux individus semblaient s'être échappés d'un labo de la section scientifique pour venir engueuler un chasseur à l'air exaspéré.

-Mais bon sang je vous avait dit de poser des pièges pour ATTRAPER ce bestiaux ! Qu'est-ce que vous avez pas compris dans des instructions aussi simples !? On est censé les étudier comment si vous vous efforcez à chaque fois de les trouer de partout avant de nous les ramener ?!

-Si cette pièce de viande vous conviens pas on va la manger avec plaisir vous savez...

-Mais bon sang vous le faites exprès c'est pas possible ! On les veux VIVANTS !

-Facile à dire, vous croyez que c'est si simple de capturer un truc pareil vivant ? Ça passe encore pour les plus petits, mais quand ils sont géants ça nous prendrais bien tout nos hommes pour réaliser un tel exploit... Bon et puis j'en ai marre de débattre avec vous, z'êtes chiants.

D'un air découragé, le guerrier s'était retiré dans le grand bâtiment devant lequel il se tenait, laissant par le fait même la grande gueule et sa partenaire en plan. La grande cabane trônant au centre du village était à première vue le lieu le plus imposant et probablement le plus important des environs. Au-dessus de sa porte d'entrée, comme un garde surveillant les environs, se trouvait une gravure bien définie de ce qui semblait être un lion. Probablement un genre de lieu communautaire, enfin vu les crânes de tricératops ornant les murs extérieurs il n'avait guère envie de s'y aventurer sans invitation. Non s'il devait parler à quelqu'un c'était sans aucun doute à ces deux autres types qu'il fallait s'adresser.

-Dites...

-Hm ? Hé ho c'est quoi cette histoire ? Le doc recrute pas !

-Heu... En effet... Ta gueule ? J'aimerais surtout comprendre ce que vous foutez ici.

-Ce serait plutôt à nous de vous poser cette question...

-Oh c'est qu'elle sait parler elle aussi ! Moi je me... balade. C'est à peu près tout.

-Hm... Nous on soigne les malades tout simplement.

-Et ça implique de capturer des bêtes sauvages ?

-Disons que c'est un échange de bons procédés. Ils nous rapportes ces trucs pour les étudier et on leur rend service en échange c'est tout.

-Alors quoi vous bossez pour le Gouvernement Mondial ?

-Quoi ? Non. Beurk. Si on voulait travailler pour une bande de coincés sans vision on... On ferait quoi Missie ?

-J'imagine qu'on travaillerait pour le gouvernement mondial ?...

-Ouais... Enfin je cherchait un truc un plus... Enfin bref ! On bosse seulement pour les gens qu'on respecte ! Des gens comme le doc ! Le plus grand cerveau que notre planète ai jamais connue !

-Meilleur que la Section Scientifique, vraiment ?

-Bah... J'en sais rien moi j'ai jamais été là-bas... Mais je suis persuadé que c'est le cas !

-On sent la conviction... Et il est où ce fameux génie ?

-T'es débile ou quoi ? Si on révélait son emplacement à n'importe qui on-

-Il est installé dans la montagne blanche à l'est pourquoi ?

-Mais merde ! Je t'ai déjà dis d'arrêter de l'ouvrir sans prévenir !

-Il demandait, je trouvais ça approprié...

-Vous pourriez au moins arrêter de discuter comme si j'étais un psychopathe sourd ? Si vous tenez tant que ça à ce que j'évite d'y aller je reste ici hein...

-Hein ? Non. Enfin oui. Enfin... Notre boss cours aucun risque mais... Il aime pas être dérangé. Pffff... Bon et puis fait ce que tu veux heu...

-Zeke.

-C'est nul comme nom. Enfin ouais vas-y si tu y tiens du moment que ça me retombe pas dessus, si jamais on te demande c'est miss grande gueule qui a parlé.

-Ouais enfin si ça vous dérange pas je vais déjà me reposer un peu. C'est pas que j'ai eu des dinosaures au cul tout l'avant-midi, mais je me sent pas encore prêt à y retourner.

Se diriger au sein de la jungle de Little Garden était déjà difficile de jour, le hors-la-loi ne pouvait qu'imaginer de quoi une telle expérience pouvait avoir l'air la nuit. Déjà qu'il ne pouvait absolument rien voir en regardant la bordure de la forêt, s'y trouver en plein cœur ne l'aurais guère aidé. C'est dans cette logique qu'il avait choisit de passer la soirée au village comme initialement anticipé. Après tout il était peut-être ici pour faire face à un défis, mais il connaissait encore ses limites. Bientôt peut-être qu'il arriverait à y pénétrer sans problème, mais pour le moment cette idée ne le ravissait guère c'était le moins qu'on puisse dire. Enfin au moins sa petite soirée en compagnie des chasseurs et des scientifiques s'était avéré éducative. Déjà il en avait appris un peu plus sur la culture de cette petite tribu et sur leur méthode de chasse. Bien que tout ça semblait un tantinet primitif il ne pouvait guère prétendre que ça n'avait pas d'intérêt. Les nombreuses informations sur la place qu'occupaient les moines au sein de cette petite communauté, mais surtout tous les détails sur la faune et la flore de l'île n'avait pas de prix. En effet, il n'avait apparemment pas croisé le tiers de tout ce que cette épaisse forêt avait à offrir et en prime il avait appris un détail plus qu'intéressant. Bien qu'il ne soit pas complètement sûr qu'il s'agisse de la vérité et pas d'une légende débile transmise de génération en génération au sein de ce petit groupe ; il existait apparemment une énorme bête se cachant sous l'eau dans les environs de Little Garden. Venant de types qui avaient pour habitude de chasser du dinosaure pour le petit déjeuner, ce genre d'adjectif n'était probablement pas à prendre à la légère non ? Enfin ça ne le concernait pas... Pas encore du moins, enfin tant que son moyen de transport pouvait se balader au-dessus de l'eau il pouvait encore s'en sortir, mais il ne faisait aucun doute qu'il allait garder cette info dans un coin de sa tête.

Il avait également appris ce que goûtait le tricératops pour le coup, plutôt sympa malgré la consistance assez solide de la viande. Enfin ce qu'il avait appris de plus important au final était venu de ces scientifiques en fin de compte. S'il avait maintenant une bien meilleure idée de où il devait se diriger pour trouver leur supérieur, il comprenait également mieux ce que ces hurluberlus faisaient ici. Enfin ça semblait plutôt confus même pour les deux assistants pour être honnête, mais de ce qu'il en avait compris le groupe semblait simplement se balader d'île en île à la recherche de différents phénomènes à étudier. Des scientifiques de base alors ? Probablement, à l'exception faite qu'ils ne semblaient être financés par personne en particulier. Enfin bref, après avoir fait ripaille et avoir bien discuté avec ce drôle de petit groupe ça avait été l'heure de dormir pour l'ingénieur. Heureusement on l'avait laissé emprunter l'espèce de perron du temple au moins le temps que le soleil se lève. Une nuit fraîche et pleine de bruits bizarres comme ils les aimaient, la chance. Enfin passons, ce ne fut finalement que le lendemain matin que le hors-la-loi repris la route vers l'endroit indiqué par le grand cyborg la veille.

-Donc ouais pour le coup je préfère te prévenir aucun de nous deux peut vraiment garantir ce qui va... «arriver» une fois que tu y sera...

-Ouais je suppose que ça me va, je suis pas vraiment venu ici pour une promenade de santé.

-Tu t’apprête à rencontrer un des plus grand cerveau de notre planète ! Fait au moins l'effort d'avoir l'air excité !

-Dis, y a un truc que je veux te demander depuis hier en fait.

-Ouais ?

-T'arrive à voir un truc au moins avec cette plaque de métal au milieux du visage ?

-Oh je vois, ça crois moi je vois tout...

Haussant les épaules suite à la réponse de l'autre scientifique, Zeke se mit finalement en route vers les montagnes du centre de l'île. Direction le labo de fortune d'un soit-disant génie... Enfin ça restait à voir. Déjà plus reposé, l'ingénieur avait réussi à se déplacer relativement vite vers le lieu visé. Coup de chance il n'avait pratiquement pas rencontré d'obstacle sur sa route, à croire que la forêt s'ouvrait pour le laisser passer aujourd'hui. Il avait déjà rencontré bon nombre de distraction depuis son arrivé, rien pour l'aider à atteindre son objectif principal en venant dans ce trou perdu, mais bon un ou deux détours pouvaient toujours valoir le coup au final. Il était de toute façon bien décidé à rester ici le temps qu'il faudrait...

-Nous y voilà, les fameuses grottes... C'était laquelle déjà ?

À peine était-il arrivé que le son d'un volcan explosant au loin avait retentit lui indiquant qu'il était déjà midi. En effet lors de sa petite discussion de la veille il avait également appris que le volcan qui n'avait de cesse de péter depuis son arrivée était également programmé à la seconde près pour relâcher un grondement à chaque heure. Pratique quand on avait pas de montre. Enfin bref, c'est sur ce détail qu'il pénétra finalement la formation rocheuse la plus large de la montagne blanche. Ironiquement il n'en était pas atterrit bien loin lors de son arrivée matinale la veille. Marchant depuis un bon cinq minutes dans ce trou n'en finissant plus, l'ingénieur se questionnait de plus en plus sur ce qu'il allait trouver au bout du tunnel. Enfin pas de doute il était sur la bonne voie, en effet à partir d'un moment celui qui s'était installé ici n'avait pas eu le choix d'installer des lanternes le long des murs afin d'avoir un minimum de lumière. L'autre signe lui indiquant qu'il approchait du but était cependant un brin plus inquiétant, tout spécialement alors qu'il baignait dans cette lumière orangé. En effet, le bruit distinct de ce qui semblait être une tronçonneuse se faisait maintenant entendre. De plus en plus fort... Chacun de ses pas ne faisait qu'amplifier le bruit résonnant avec violence dans le grand couloir naturel. Rien pour le mettre à l'aise niveau ambiance franchement, mais pire que le bruit d'un engin pareil, c'était l'arrêt soudain et inexpliqué de celui-ci qui l'avait vraiment mis sur ses gardes. Il n'était plus qu'à une dizaine de pas de la salle principale et pourtant il hésitait quelque peu à avancer davantage.

-Heu... Y a quelqu'un ? Question conne évidemment qui a quelqu'un...

Pas de réponse... Dans le doute l'ingénieur se décida au moins à avancer jusqu'à l'entrée de la salle pour y voir plus clair. Malheureusement ce qui s'y trouvait n'était pas exactement plus rassurant. Comme pour prolonger le tunnel jusqu'au centre de la pièce, deux longues tables blanches avaient été posés près des murs de chaque côté de l'ouverture. L'ennui c'était les objets empilés par dizaines sur celles-ci, si la table gauche ne supportait que quelques boîtes de carton, celle de droite était couverte de tellement de trucs louches que l'ingénieur ne savait même pas par où commencer. Des yeux de toutes tailles en bocal, une foutue horreur qui devait être une... lanterne faite à partir d'une tête ? Pas un crâne, une tête tranchée affichant une expression figée mêlant souffrance et désespoir, avec dans sa bouche grande ouverte l'ampoule d'une grosse lampe torche. Plus près de lui se trouvait ce qui était à première vue une simple fourmilière, enfin avant qu'il ne comprenne que celle-ci était en fait constitué d'un intestin de grande taille dans une boîte transparente. La lumière à l'arrière de celle-ci créait des ombres, laissant entrevoir les ombres de millier de petites bêtes grouillant et se baladant dans les tunnels organiques, passant par dessus nerfs et autres bosses se trouvant sur leur chemin. Au bout de la table se trouvait une étrange horloge dont l'aiguille ne semblait bouger qu'au signal du battement d'un cœur installé sous celle-ci. Ce fut seulement lorsque la seconde aiguille s'aligna avec le cinq qu'une silhouette sembla jaillir du bout de la table. D'abord floue, puis plus... Rouge. Devant lui se trouvait maintenant un homme qui aurait pu ressembler à un scientifique, le seul problème étant qu'il était couvert de sang jusqu'au nombril, à un point tel qu'il avait laissé des traces de pas derrière lui. Affichant un sourire presque accueillant, n'allant pas du tout avec son apparence actuelle, l'homme le fixait de ses iris absent, un trait qu'il semblait partager avec son premier assistant. L'ingénieur avait l'impression de se faire fixer jusqu'au fond de son âme, et comme pour rendre les choses encore plus étranges, le vieil homme se contentait de le fixer sans dire un mot, tenant bêtement un flan qu'il avait probablement dû se prendre en lâchant sa tronçonneuse.

-...

-...

-...

-Vous en voulez ?

L'inconnu avait tendu sa petite soucoupe dans sa direction, un geste bien étrange considérant la distance les séparant.

-Heu... Non merci ?

-Dommage... Hm... Dommage.

-...

-...

Plus le silence persistait, plus l'ingénieur portait son regard sur la tête-lanterne à côté de l'homme toujours impassible.

-Oh, si vous saviez... Le nombre de fois où j'ai dû lui dire qu'il n'avait rien d'une lumière !

-Je vois... L'un de vos assistants m'a pointé cet endroit et j'étais curieux de voir sur quoi vous travaillez... D'après ce que je peux voir ça doit être plutôt... Salissant. Enfin si je dérange je peux toujours repartir vous savez...

-Non non. J'adore la visite vous savez. Je me présente, docteur Sullivan !

-Oui ça on m'avait dit, enfin votre nom je veux dire. Moi c'est Zeke.

-Charmant nom. Alors vous vouliez voir ce sur quoi je travail c'est bien ça ? Suivez moi !

Toujours aussi enjoué et ensanglanté, le scientifique s'était presque immédiatement dirigé vers la salle de droite dont il était arrivé précédemment. Prenant soin de le suivre en évitant les traces qu'il laissait derrière lui, l'ingénieur eu le... «Plaisir» de voir la source de tout ce sang. En effet, un Stégosaure de taille relativement modeste se tenait sur ses quatre pattes en plein milieux de la grande pièce blanche, laissant s'écouler de son ventre tripes et liquide carmin. Une dissection dans les règles de l'art en somme, enfin si ce n'est le fait qu'elle ne s'exécutait pas sur une table d'opération et... Que d'une manière ou d'une autre la bête était étrangement maintenue en vie. Les yeux clignant encore, la queue bougeant lentement de droite à gauche ainsi que la cage thoracique de l'animal gonflant encore en était un assez bon indicateur. Toutefois, celui-ci semblait extrêmement calme malgré le fait que le contenu de son corps soit à moitié répandu sur le sol.

-N'est-ce pas là un spécimen magnifique ? Un système organique fonctionnant parfaitement ! Le cœur, les poumons, le cerveau, le système digestif, les glandes ! Vraiment j'adore étudier les êtres vivants, ils peuvent parfois atteindre un tel niveau de complexité...

-Et pourquoi ça... Vit encore ?

-Oh mais on ne peux vraiment comprendre le fonctionnement et les subtilité d'une machine qu'en la voyant en marche pas vrai ? Je ferait la même chose si je disséquait quelqu'un comme vous. En ce moment même, malgré le fait que vous soyez parfaitement immobile, votre intérieur grouille de vie, vos muscles pulses, votre système nerveux s'affole, vos organes gonflent ou se contractent et surtout... Vos neurones déversent une véritable tempête électrique dans votre boîte crânienne !

-Oui j'imagine que ça fait peut-être du... sens.

-Bien entendu. Et vous dites moi, dois-je présumer que vous pratiquez également la profession ?

-La science ? Bah... Ouais. Enfin pour être exact je fait surtout dans les explosifs et les gadgets donc je sais pas vraiment si ça compte...

-Oh, je sent que je vous aime déjà mon cher ! Dites-moi vous êtes pressé ? Je pourrais utiliser votre aide pour découper notre cher ami ici présent !

-Heuuu. Je fait pas vraiment dans les tripes et la dissection normalement, mais si vous avez besoin d'aide pourquoi pas je suppose.

-Oui parfait parfait ! Enfin pour être exact c'est une vivisection, mais ne vous en faite pas je vous guiderez à travers le... Processus !

La plupart des gens offrent du thé pour accueillir un invité dans sa demeure, mais découper un être vivant à coup de tronçonneuse pouvait être sympa aussi non ? Oui bon disons que ça en révélait pas mal sur le personnage. Après avoir siphonné son flan d'un coup, le vieil homme lui lança finalement un scalpel, chose peu recommandé habituellement, avant de finalement se mettre à lui-même taillader l'animal de nouveau.

Orientant son canon vers le den den mushi bourré de cicatrices et de marques d'expériences diverses, l'ingénieur tournait le cadrant le plus lentement possible afin de trouver la bonne fréquence. De son côté le doc s'efforçait de continuer à déblatérer un discours ayant ni queue ni tête depuis une autre pièce avec son second escargophone. Il y était presque, jetant un coup d’œil à la chauve-souris lui ayant inspiré cette expérience, il se disait que ça avait été tout un coup de chance que de découvrir ce détail. L'animal encore inconscient des suites de sa récente cybernétisation, et donc de la forte dose d'anesthésiant dans son corps, ne pouvait pas observer ou même entendre leur petite expérience. Enfin dans tous les cas il avait bien fait de nourrir ce truc chaque jour depuis qu'il l'avait retrouvé dans sa poche quelques mois auparavant. D'où la vermine volante à grande bouche avait pu venir ça il n'en était pas certain. Ça meilleure hypothèse était associé à cette révolutionnaire qu'il avait capturé à ce moment là, Halrock Zora. Enfin même s'il n'était pas certain de l'avoir vu se trimbaler un truc pareil, il ne faisait aucun doute que la chauve-souris était apparue à cette époque. L'ayant relâché dans le labo afin d'expérimenter sur celle-ci, il avait été étonné de remarquer un den den mushi tout prêt s'affoler suite au cri de l'animal volant. La théorie de base pour expliquer ce phénomène était que les ultrasons pouvaient affecter les den den mushi d'une manière ou d'une autre. D'ailleurs il ne semblait pas avoir tort pour le moment, vu les sons que libérait l'escargophone devant l'énorme canon à ultrason qu'il s'était improvisé, il semblait bien qu'il pouvait créer quelque chose d'utile avec une telle découverte. Il ne lui manquait que la bonne fréquence...

-C'est pour ça que ma dernière invent*BZZZT* le super flan Nov*BZZT* demeure définitivement ma meilleu*BZZZZZT*...

-Hm ? Doc ! Vous parlez toujours dans le combiné au moins ?

-Hein ? Évidemment je n'aurais pas arrêté au milieu du meilleur passage !

La voix provenant de la pièce voisine semblait confirmer ce qu'il pensait, le den den mushi ne prononçait plus un mot, il n'agitait même plus les lèvres. En fait, deux énormes «X» un peu comiques avaient pris la place de ses pupilles, le genre de truc qui vous signal que l'animal est hors-service pour le moment. Apparemment saturer les ondes avec des ultrasons fonctionnait parfaitement, non seulement la voix devenait brouillé, mais avec la bonne fréquence il était même apparemment impossible de passer un appel, une découverte intéressante à n'en pas douter. Il ne manquait plus qu'une petite adaptation et son plus récent projet serait prêt à être utilisé. Se dirigeant vers Sullivan pour lui faire part de ses résultats, l'ingénieur sortit un instant de sa torpeur, ou pour être plus exact de sa transe. Depuis combien de temps il était dans ce laboratoire sous-terrain ? Ce qui avait débuté par un simple après-midi à étudier un dinosaure s'était transformé en une longue série d'expériences et de recherches en compagnie de son nouveau mentor. En l'absence de nouveaux spécimens à découper, les deux scientifiques s'étaient davantage concentrés sur d'autres projets au final. Il traînait sous cette montagne depuis quoi, une semaine ? Peut-être deux ? Il avait perdu toute notion du temps comme d'habitude. C'est bête, il était venu s'endurcir et capturer de nouvelles armes, mais se retrouvait maintenant à acquérir de nouvelles connaissances et à créer des armes comme il l'avait toujours fait. Comme quoi il avait peut-être plus l'esprit scientifique que l'esprit guerrier au final. Comme si ça ne suffisait pas il n'avait même pas pu se reposer pendant ces petites vacances improvisés. En effet avec un fanatique du scalpel pareil dans les parages, l'ingénieur avait du mal à se laisser aller dans les bras de Morphée sans immédiatement avoir l'impression qu'il se réveillerait sur la table d'opération. Enfin au moins il en apprenait beaucoup, plus qu'à ses heures perdues en solitaire.

-AAAAAAAAHHH OUI ! OUI !!!!!!

Surpris par le cri provenant de la salle voisine, l'inventeur accéléra le pas afin de voir ce qui avait pu faire réagir le docteur de la sorte. Pénétrant en trombe dans la pièce de grande taille, il n'y trouva que son mentor affichant un sourire encore plus dément que d'habitude, écrasant un journal entre ses doigts comme s'il cherchait à étrangler une personne qui n'était pas là.

-Si un bout de papier vous emmerde tant que ça suffit de le brûler hein...

-Ah ! Tu tombe bien ! Mon cher c'est un moment fantastique ! Que dis-je ! Historique !

-Les deux adjectifs peuvent aller ensemble vous savez...

-Arias ! Arias est mort !

-Qui le mec de la révolution ? J'ai bien entendu son nom quelques fois avec la propagande sur mon île... Alors quoi il s'est fait buter qu'est-ce que ça fait ? Je croyais que vous étiez dans aucun camp ?

-Exactement ! Je suis dans le camp de l'humanité mon cher ! Et ça... ÇA ! C'est un grand moment pour tout être humain ! Le bouleversement engendré va traverser toute la mer mon cher !

-J'ai... Pas exactement de relation avec la révo doc.

-Ce n'est pas une question de relation, mais bien d'énergie mon cher ! De chaos pour être précis ! L'énergie motrice de cet univers complètement aléatoire ! Tout fait parti d'un cycle ! Test ! Qui domine le monde actuellement ?!

-Bah la dernière fois que j'ai regardé... Le gouvernement mondial.

-Exact ! Et avant le gouvernement mondial ?!

-Aucune... Idée ? Est-ce qu'il y a même déjà eu un pré-gouvernement ?

-Ne soit pas bête allons ! Le temps affecte toute entité à un moment où à un autre ! Avant le gouvernement mondial il y avait autre chose et avant cette chose il y avait encore autre chose c'est d'une évidence même non ?

-J'imagine que... Pfff ouais.

-Voilà ! Le temps érode tout mon cher ! À un moment ou a un autre tout seigneur, tout empire, toute idée subie le test du temps ! Rien n'est permanent c'est un fait. Cet ordre qui pèse sur notre monde, ces entité qui cherche à établir l'ordre. Si elles ne peuvent exister éternellement ça nous amène bien à une conclusion logique non ? Le chaos est plus fort que l'ordre au final !

-Donc ?

-C'est simple vraiment ! Le gouvernement s'écroulera un jour inévitablement. Ce jour-là... Le chaos prendra place dans le monde ENTIER ! C'est cette énergie qui fera avancer notre espèce ! Nous établissons une forme d'ordre, une contestation surgit inévitablement, on fabrique des armes plus sophistiqués pour s'entretuer, le vainqueur gagne le privilège d'imposer son ordre pour une courte période !

-Ouais... Étrangement j'ai l'impression que ça explique beaucoup de chose sur votre sens...Moral...

-Moral ? Laisse moi te demander mon cher, as-tu déjà pris la vie d'un autre être humain ?

-Heu... À vrai dire... Ouais à quelques reprises... Enfin ma vie était en jeu en général.

-On s'en moque ! Le contexte n'a pas la moindre importance dans ce cas-ci. D'ailleurs tu n'a pas à avoir honte je l'ai moi-même fait tu sais !

-Pourquoi je suis pas étonné ?

-Bref ! Qu'elles ont été les répercussions de tes actions ?

-Heu... Les proches de ces personnes sont tristes ou énervés ? J'en ai justement une qui veux ma peau en ce moment...

-Pour être plus exact la personne décédé perd son habileté à interagir avec le monde. En contre-partie les connaissances de cette personne morte prématurément reçoive un choc ! Si chaque personne est un point d'ancrage dans une gigantesque toile, détruire l'un de ces points affecte inévitablement tout le reste, le plus important le point, le plus important le choc ! Tu comprend l'importance de cet événement maintenant ?

-Ça va... Affecter beaucoup de monde en gros ?

-Ça va affecter absolument tout le monde ! La théorie du chaos ! Un effet papillon ! Si la mort de notre cher révolutionnaire incite une personne à agir différemment, il est possible que cette personne croise ton chemin, il est également possible que cette personne te tue ! Bien entendu l'inverse est également tout à fait possible. Et c'est avec une accumulation de ce genre d'événements que la toile finit invariablement par se briser pour être reconstruite... Encore et encore...

-Donc quoi ? En suivant votre logique si je me lève demain matin je vais affecter un truc, mais ultimement tout va «exploser» et repartir à neuf... C'est tout bête ouais, mais en gros vous dites juste que l'issue de tout ce qu'on fait ce sera un énorme boxon au final. C'est ça qui vous fait lever le matin ? Plutôt déprimant si vous voulez mon avis.

-Déprimant ? Au contraire c'est fascinant ! Cette toile je la vois s'agiter sous mes yeux chaque jour.  C'est mon sujet d'étude favoris ! Je suis un scientifique après tout, ma seule vocation au final n'est-elle pas de regarder l'état des choses ? D'observer le monde et son évolution ? C'est ce que je fais ! Toutefois, afin d'étudier ce phénomène je ne peux évidemment pas me contenter de le regarder inactif... Statique. Tu te souviens quand on a découpé ce stégosaure ? Quand je lui plantais des aiguilles en plein dans le cerveau pour voir quelle section activerait quoi ?

-Ouais c'était... Charmant.

-Voilà ! Pour bien comprendre un phénomène et en apprécier toute sa subtilité il est nécessaire de le... Tripatouiller un tantinet afin de voir ce qui se produira par la suite ! Et ça je dois admettre que c'est mon passe-temps favoris... Donner une pichenette dans la toile au moyen d'une arme chimique offerte à des bandits ? Éliminer un petit lien à première vue sans importance pour voir comment celui-ci affectera le reste... Mais par-dessus tout, mon passe-temps favori reste de tisser de nouveaux liens solides, de voir comment un individu modelé par mes soins peut venir affecter la structure de ce monde... Alors... Qu'est-ce que tu en dis ?

-J'en dis que vous avez des passe-temps sérieusement louches bien qu'intéressants ?

-Mais non petit ! C'était une proposition... Vois-tu après avoir avancé quelque peu certaines de mes recherches j'ai comme qui dirait quelques expériences en tête... Malheureusement je manque de sujets... Ou pour être plus exact je manque de sujets intéressants ! Alors qu'est-ce que tu en pense ? Tu me laisserais te charcuter un peu le corps ? J’admets vouloir t'ouvrir le crâne depuis que tu a mis les pieds dans mon labo !

-Oh génial, je l'avais vu venir. Non-merci j'ai déjà vu ce que ça donne quand quelqu'un vous passe entre les doigts, j'apprécie déjà de bosser avec vous, mais devenir un cobaye n'a rien de très intéressant.

-Quelle mauvaise foi ! Comparer mes vivisection à mon travail d'artiste ! Quand j'offre un cadeau de ce type je ne fais pas le travail à moitié mon cher ! J'ai bien fait un bon travail pour mes propres yeux non ? Mon assistant aussi est passé sous mon bistouri et il va très bien non ?

-Ouais et il a une énorme plaque de fer au milieu de la gueule maintenant... En plus j'ai un doute sur sa santé mentale.

-Si tu avais vu l'état de ses yeux avant que je m'occupe de lui tu penserais différemment ! D'ailleurs tu ne semble pas comprendre que je t'offre bien plus que de te charcuter simplement pour mon bon plaisir... Non je t'offre des possibilités ! Quelque chose qui fera pencher la balance en ta faveur face  aux grands de ce monde ! C'est bien toi qui disait que quelqu'un voulait ta peau non ?

-Exact et je suis un peu inquiet que vous me scalpiez avant elle.

Débile, c'était complètement débile comme offre définitivement. Le mec avait beau être un génie, il était plutôt évident qu'il avait un grain. Mais l'autre blondinet s'en était bien sortit vivant non ? Mais... Et s'il l'avait envoyé ici justement pour se faire découper pas son boss tiens ? Non pas moyen qu'il prenne le risque, surtout avec personne autour pour surveiller les actions de ce grand malade. Et pourtant... Ouais «et merde» plutôt... Parce que ouais il était curieux. C'est ça que ça fait une quête de puissance non ? Ça fait faire de grosses conneries. Mais bon il était venu dans cette jungle pour relever un défis, un truc qu'il aurait les couilles d'affronter. Certes à la base il imaginait une bande de reptiles assoiffés de sang, mais un vieux fou avec un beau kit de torture à proximité c'était peut-être pire au fond. Bon il n'avait plus qu'à jeter sa vie par la fenêtre... Facile non ? En plus, il parait que survivre à la mort ça rend fort...

-Bon je me déteste énormément pour dire ça, mais... Vous avez la permission de me charcuter. Essayez au moins de me réserver un bocal propre pour mes organes...

-Fantastique ! Pas d'inquiétude pour toi j'ai prévu une série de boîte pour une jolie exposition ! Je rigole bien entendu... Enfin je vais peut-être garder deux trois morceaux en trop... Oh et pour le paiement pas d'inquiétude, contente toi d'avoir du «plaisir» une fois dehors, je me ferais une joie de suivre ta progression !

Généralement quand on prépare une opération d'envergure il faut environ quelques heures afin de rassembler le matériel, plus s'il s'agit de quelque chose de vraiment particulier. Le fait que le doc Sullivan avait tout préparé en moins de dix minutes lui avait permis de comprendre une chose, cet enfoiré ne mentait pas en disant qu'il voulait le découper depuis son arrivée ici. Tout était déjà prêt, une immense cuve de produit verdâtre ainsi qu'une superbe plate-forme de fer pour le suspendre au-dessus de celle-ci. Rien de très classique comme table d'opération. En prime vu les sept étages d'outils traînants à côté de son charmant petit cercueil improvisé, il ne faisait aucun doute qu'il allait en avoir pour son argent. Pour le coup il n'avait pas non-plus pensé au fait qu'il devait se foutre en sous-vêtements pour l'opération, mais bon au point où il en était... Après avoir finalement pris place sur la table suspendue au plafond et s'être fait enfoncer un joli tube dans le bras il eu ce qui serait indéniablement la dernière conversation de sa piètre vie.

-Vous savez, ça me rassurerait d'au moins savoir ce que vous allez me faire...

-Mais ça ruinerais la surprise voyons ! Bon aller, j'ai toujours pas trouvé de nom au projet numéro deux, mais je surnomme la première amélioration «Projet skeleton # 142» ! Sympa hein ?

-Ouais je supp- Minute pourquoi 142 ?!

-Oh ça réfère juste au nombre d'essais précédent...

-Hein ?! Vous vous foutez de ma gueule ? J'ai changé d'id-

-Oh non ! Trop tard j'ai déjà envoyé l’anesthésiant... ~

-Quoi ?! Alors dé... Dé...Ffffffffffu...

…

Il n'y a que peu de chose pouvant vous ruiner une journée aussi bien que se réveiller avec l'impression de s'être fait écraser par un train. Premier détail noté par l'ingénieur était qu'il était tout bonnement incapable de tourner la tête. Enfin pour être exact il pouvait à peine bouger son corps tout entier. Second détail, au vu du «frottement» il était à poil sous ses couvertures. Ouvrant finalement les yeux il découvrit une petite pièce inconnue, un mince filet de lumière du couché de soleil filtrant à travers un trou dans le mur d'en face. Lentement mais sûrement il avait commencé à agiter les orteils, puis les doigts, le tout lui faisant un mal de chien à chaque mouvement. À croire que ses os s'émiettaient lentement... Toujours incapable de bouger la tête, l'ingénieur se décida finalement à se redresser d'un coup dans le lit inconnu, causant par le fait même d'autres douleurs en plus de faire tomber le drap recouvrant son torse. Il se sentait vieux, ou plus exactement il avait l'impression d'avoir dormis 200 ans pour seulement se réveiller maintenant. Toutefois, cette sensation n'était qu'un détail comparé à ce qu'il venait de découvrir. En effet comme il le craignait il s'était fait salement charcuter, les cicatrices couvrant maintenant tout son corps donnaient plutôt l'impression qu'on l'avait recousu après qu'il ai explosé. Son corps était devenu un foutu puzzle qu'on avait rassembler merde ! Si les cicatrices ne le dérangeaient pas en soit, l'idée de ce qu'on avait pu lui faire durant son sommeil lui envoyait des frissons dans le dos.

-Oh tu as mis le temps décidément.

-Et vous vous êtes fais plaisir à ce que je vois.

-Oh plus que tu crois...

Après avoir jeté un bref coup d’œil, ou plutôt de viseur, en direction d'un miroir non-loin dans la petite chambre, le doc retourna son attention sur l'ingénieur comme s'il préférait cacher ce à quoi il pensait. Un gros manque de discrétion bien entendu et ça n'aidait nullement cette inquiétude qu'il ressentait depuis son réveil. Se précipitant vers la glace malgré son corps encore endolori, l'ingénieur réalisa immédiatement que quelque chose clochait. Déjà la silhouette qu'il percevait avec sa vision encore floue était particulièrement déformé au niveau du visage. Puis... Bordel une vis gigantesque lui traversait le crâne ! Le choc était tel qu'il hésitait entre devenir fou de rage, fou ordinaire ou fou sans plomb... Et merde voilà que son cerveau déconnait. C'était cette merde qui le faisait penser comme ça hein ? Non là il était juste parano, après tout il y a bien une différence entre être cinglé et juste con.

-Non... Non... Vous vous foutez de ma gueule là hein ?

-Avant de juger le produit teste le déjà ! Tourne la clé !

-Quoi pour que ça me rentre davantage dans le crâne ?!

-Roh allons c'est déjà passé de l'autre côté comme tu peux le voir, et c'est pas véritablement une vis, je te l'ai dis je ne fait jamais de conneries quand il s'agit de créer un produit.

Posant sa main sur la grosse pièce en fer trempé, l'inventeur se décida finalement à la tourner après un moment d'hésitation pour finalement... Rien. Enfin pour être exact rien de concret ne s'était produit si ce n'est un son dans ses oreilles similaire à celui d'une machine dont on couperais l'alimentation. Pourtant, il avait immédiatement compris ce qui se produisait, sans vraiment en comprendre le fonctionnement certes, mais il avait clairement remarqué le changement, en particulier lorsqu'il tourna finalement la tête vers son mentor. Le... Temps que ça prenait... Le moindre de ses mouvements semblaient interminables, même fermer ce truc en tournant la clé dans l'autre sens lui avait pris une éternité.

-Bordel...

-Alors toujours des doutes sur mes compétences ?

-C'était... Particulier...

-T'en fait pas tu t'habituera au fait que la moindre de tes actions prend des heures en l'activant, peut-être même pourra-tu en tirer parti...

-Et c'était vraiment nécessaire la vis énorme en plein milieu de la tête ?! Je sent que je vais m'accrocher à tout les cadres de portes que je rencontre...

-Hé si tu veux le travail d'un génie il faut aussi accepter sa signature petit ! Et puis la vis est très importante dans tout ce truc je... Suppose. J'étais un peu en transe en faisant les plans pour être tout à fait honnête. Enfin bref ! Avec ça ton cerveau fonctionnera... Disons un peu plus vite que la normale. Enfin évite de le maintenir en marche trop longtemps, tu pourrais rencontrer des effets secondaires disons... Indésirables.

-Heu... Et les autres cicatrices ? Vous m'avez pas enfoncé de truite au milieu des tripes j'espère ?

-Non non, j'ai seulement renforcé ton squelette. Non seulement tu frappera plus dur si jamais tu t'abaisse à cet art barbare qu'est le combat, mais ça devrait aussi t'éviter quelques fractures...

Soupirant un grand coup, la sensation de s'être complètement fait avoir laissait peu à peu place au soulagement... Peut-être même à la satisfaction. Ces petits plus avaient du potentiel à n'en pas douter et si quelqu'un pouvait en tirer profit c'était bien lui.

-Et sinon... Qu'est-ce qui est arrivé à mes cheveux ?

-Heu... Ça j'hésite en fait. C'est soit parce que je t'ai scalpé pendant ton sommeil ou c'est le shampoing que je t'ai fait pour pour retirer tout le sang !

-Vous m'avez fait un shamp... Oh et puis on s'en fout. Je pourrais récupérer mes vêtements maintenant ? C'est pas que je suis à poil devant vous depuis tout à l'heure mais...

-Hm ? Ah dans le placard à ta gauche. Je voulais nettoyer le tout après le travail que nous avons fait dernièrement, mais étrangement j'ai eu bien plus de succès à cybernétiser des gens qu'à trouver un détachant efficace pour les traces de sang sur le blanc... Étrange...

-Quoi vous avez tout rapiécé mon vieux manteau ? Merde j'y tenais à ce truc... Hm ? C'est quoi ce truc ?

-Mes vieilles lunettes ! Tout scientifique de ce nom à besoin d'une bonne paire de lunette ! C'est ce qui fait le pédigrée mon cher ! Sans ça tu sera toujours considéré comme un véritable abruti !

-Alors quoi vous êtes designer maintenant ? Enfin je veux bien les garder en souvenir, même si je doute qu'elles me fassent.

-Tu changera les verres, c'est mieux que de te faire éventrer intellectuellement par le prochain type en blouse blanche que tu croisera !

Après avoir tout enfilé, l'ingénieur se regarda finalement une dernière fois dans la glace avant de quitter la petite chambre.

-Bon bah... Je suis prêt faut croire...

-Splendide ! Maintenant sort vite d'ici et offre moi un divertissement de qualité ! Enfin dans le cas contraire je suppose que je pourrais te traquer pour te démonter et trouver un meilleur candidat... Hum...

-Vous êtes pas très doué pour les adieux dites donc...

Une dizaine de minutes plus tard l'ingénieur était dehors sous la pluie, sa nouvelle chauve-souris cyborg en poche ainsi que ses plans pour son prochain gadget. Activant une dernière fois la vis avant de quitter les lieux, l'inventeur admira le spectacle se déroulant ses yeux. L'averse tombant comme des cordes formaient maintenant un rideau immobile devant ses yeux. C'est devant cette vision qu'il réalisa que le petit discours de son mentor n'était peut-être pas si débile après tout. Ces gouttes tombant au hasard du vent et des nuages, le chaos dominait vraiment ce monde non ? Mais le hasard obéit pourtant à des règles, trop de facteurs à analyser pour suivre la trajectoire d'une seule gouttelette certes, mais avec ce nouveau pouvoir il pouvait juste en suivre une avec précision et... l'exploser d'une pichenette.

-Je vois... On va bien s'amuser je crois...

Finit les vacances, back to work et cette fois le jeu allait vraiment devenir intéressant.