Partie Logan

Keel, Pacifista Numero et contre-amirale Sagacia.

Si le Pacifista fut jamais décontenancé par l'action de son camarade d'infortune, il eut au moins l'intelligence de n'en rien montrer : il demeura parfaitement stoïque tandis que Logan l'entraînait dans les fourrées, prenant tout de même garder à le seconder tant bien que mal dans ses intentions. Effectivement, Keel était nettement plus lourd qu'il n'y paraissait : sa carrure moyenne et son comportement quasiment humain avaient tendance à faire oublier le fait qu'il était composé majoritairement d'aciers en tout genre, et que cela faisait de lui un bloc de métaux pour le moins compact... Toujours est-il que les deux compères furent rapidement calfeutrés dans un tapis de feuilles et de branchages, dont l'imperméabilité s'avéra vivement salvatrice : effectivement, si le regard de la contre-amirale balaya l'endroit où ils s'étaient autrefois trouvés, elle n'y accorda aucune espèce d'intérêt et décida ainsi de continuer son chemin dans la direction qu'on lui avait pointé du doigt, le tout en survolant la forêt à quelques dizaines de mètres de hauteur. Son manque de discrétion risquait fatalement de la trahir auprès des autres gouvernementaux présents sur l'île, s'ils se donnaient la peine de lever les yeux, mais elle risquait fort également de remarquer la présence de mouvements brutaux ou de manifestations trop visuelles... Restait donc à espérer, du point de vue du Numero, que leurs comparses sauraient faire preuve de retenue et de calme dans ce moment compliqué, sans quoi un nouvel adversaire risquait fatalement de leur tomber dessus tôt ou tard. Après quelques secondes de patience supplémentaires, afin de s'assurer qu'ils n'allaient pas se faire remarquer bêtement en manquant de bon sens et en pêchant d'audace, le tas de ferraille en vint finalement à se redresser et à quitter le buisson dans lequel il avait été plongé un peu plus tôt. Le groupe Decima et criminel avait repris la marche, et ils étaient désormais trop loin pour que le duo ne parvienne à entendre leur conversation. Il leur était éventuellement possible de les rattraper sans trop de mal, en considérant le rythme de croisière peu soutenu des hors-la-loi, mais cela les pousserait fatalement à se remettre en danger tôt ou tard...

Cependant, avant même que Keel n'ait l'occasion de conseiller Logan quant à la marche à suivre, un puissant choc eut lieu. Un simili tremblement de terre vint secouer les arbres proches, arrachant quelques piaillements angoissés aux animaux présents dans le coin. S'il était difficile, aussi bien pour le marine que pour le robot, de savoir ce qui était à l'origine d'un telle mouvement, il était clair que cela venait plus ou moins du côté du port de fortune qu'ils avaient quitté auparavant, celui-là même où le navire Decima avait jeté l'ancre... Ils avaient toujours l'opportunité d'y retourner promptement pour vérifier ce qui s'y était déroulé, mais il s'agirait là d'une décision pour le moins téméraire !

Partie Taito - Caligula

Da-Xia.

Si elle avait incontestablement compris le fait que la situation était clairement épineuse et qu'il lui fallait d'une manière ou d'une autre prendre la poudre d'escampette pour en informer ses collègues et supérieurs, Da-Xia se heurta bien promptement à un obstacle attendu et prévisible : ses trois adversaires se mirent soudain en mouvement, bien déterminés à l'idée de l'en empêcher. C'était de bonne guerre, et elle ne pouvait pas vraiment leur en vouloir... Toutefois, même si le coup enduré un peu plus tôt n'avait certainement pas eu l'effet escompté, elle sentait sa tête lui tourner légèrement, et ne débordait clairement pas d'énergie. Il lui fallait donc jouer la carte de la sécurité, essayer de suivre leurs mouvements au maximum et s'en prendre violemment à celui qu'elle jugerait être le plus faible. Une fois cela fait, elle n'aurait qu'à profiter du chaos pour se précipiter vers le Quartier Générale... Une fois sortie de la forêt, elle retrouverait un net avantage en la présence de ses subordonnés. Toutefois, si cette ébauche de plan lui convenait à merveille, la demoiselle n'eut jamais véritablement l'occasion de le mettre en oeuvre : les trois ennemis passèrent vivement à l'attaque, et avec une synchronisation qui laissait sous-entendre leur complémentarité. Ils travaillaient ensemble, en équipe, et étaient venus s'infiltrer sur Olandaina en groupe... Elle en était désormais parfaitement certaine. Mais si la jeune fille comme le reptile ne parvinrent pas à s'échapper de son champ de vision, l'autre type, en revanche, vint s'y soustraire sans la moindre difficulté. Aussi la gamine ne fut-elle pas en mesure de l'empêcher de se saisir de sa jambe pour l'attirer jusqu'à lui... Et en voyant les deux autres tenter de compléter l'action pour la mettre hors-service d'un coup d'un seul, la zoan comprit avec amertume qu'il ne lui restait plus qu'une seule échappatoire.

Elle perdit le contrôle, volontairement. Sa taille se mit à croître de façon vertigineuse, pour atteindre quelques bons dix mètres de haut. Ses yeux s'emplirent d'une lueur débile, mais bestiale, tandis que sa chaire se musclait de part et d'autre de son corps autrefois frêle et agile. Désormais pataude et solide, Da-Xia revêtait sa forme éveillée, celle que peu de zoans possédaient en tant que carte maîtresse... Et, grâce à cet atout inopiné, elle en vint à endurer les trois assauts simultanée sans trop de casse, avec en tout cas moins de dégâts qu'elle n'aurait dû en subir sous forme hybride. Instinctivement, ses deux poings désormais gigantesques vinrent tenter d'aplatir Taito et Violet au sol tandis que son pied menaçait de cueillir Caligula de front d'un instant à l'autre. Massive, la zoan l'était, désormais... Mais elle avait également perdu en vitesse, c'était un fait incontestable.

Partie Ghetis - Kanäe

Ranger Krom

-Ben... C'est surtout mon nom, en fait...

Le pauvre homme resté perché sur son ponéglyphe avait soudain paru très mal-à-l'aise, et avait gratifié son interlocutrice d'un sourire mal assuré. Ce n'était pas la première fois qu'on réalisait une telle confusion à son propos, surtout que le cadre environnemental y contribuait cette fois-ci pas mal, mais cela restait tout de même très peu fréquent... Et assez déplaisant, dans le fond. C'est vrai quoi, certains types s'appelaient Parfait, et personne ne se trompait, là ! Après un haussement d'épaule las, il laissa la demoiselle s'en retourner à son ouvrage, le tout en scrutant les bois qui s'offraient à lui, droit devant. Les deux gars qu'il avait envoyé un peu plus tôt étaient des billes, mais ils ne tarderaient pas à débusquer Gregor, si toutefois ils ne se trompaient pas de chemin : les lieux étaient traîtres, bien plus que la faune elle-même. Tout se ressemblait : chaque arbre, chaque fougère, chaque... D'un coup d'un seul, les paupières de Krom s'écarquillèrent tandis qu'il sentit une douleur assommante courir le long de sa jambe. Quelque chose venait de lui percuter le genou, et pas qu'à moitié. Un instant plus tard, une silhouette fugace bondissait de la forêt pour fonce à sa rencontre. Instinctivement, il décida d'épargner à sa jambe des douleurs supplémentaires et se courba promptement en arrière, prenant appui sur le ponéglyphes grâce à ses mains et se repoussant au loin, le tout d'un geste aussi svelte et gracieux que sournois et rapide. Cela, toutefois, ne s'avéra guère suffisant : le type, quel qu'il fut, fut en mesure de le rattraper en plein dans les cieux pour tenter de lui fournir un nouvel assaut des plus secs. N'écoutant que sa réactivité hors pair, le pauvre hors-la-loi poussé à la défensive décida alors de brandir des bras devant son crâne, lesquels se couvrir de haki de l'armement. Une protection utile, mais relativement désuète face à la force déployée par son ennemi, qui le projeta droit vers le sol dans une explosion de gravats, de végétaux et de roches. Le nuage de poussière qui en naquit ne servit qu'à mieux camoufler l'effusion de sang qui vint gagner ses lèvres... Krom n'avait pas compris grand chose à la situation, et se trouvait déjà dans une position bien piteuse.

Il n'était toutefois pas le criminel présent, et Kanaë, qui s'attendait à l'utilisation de son fruit du démon par son comparse, sembla être aussi prise de court que les brigands eux-mêmes. Si le joueur de carte attrapa son fusil pour se ruer dans la direction de Krom afin de lui prêter main forte, le dresseur et ses chiens semblèrent autrement plus rusés. Le premier dégaina effectivement son fleuret et fonça vers la scientifique, en comprenant qu'elle était un danger potentiel : tant que la situation n'était pas éclaircie, il allait faire tout son possible pour l'immobiliser... Et si l'un de ses deux chiens sembla manquer de courage, se mettant effectivement à courir en direction des fourrées, le second se mit à le suivre, puis à lui passer devant en se transformant brutalement : d'un simple chien normal, il devint un loup gigantesque, au pelage clair comme la neige, haut de six mètres et presque aussi trapu qu'un ours. Le zoan mythique de l'amarok lui fournissait une puissance formidable, et si elle ne bougeait pas rapidement, la présumée scientifique allait en faire les frais : il s'apprêtait à lui décocher un coup de patte pour le moins virulent.

Partie Taito - Caligula

Da-Xia.

La gigantesque bestiole qu'était devenue Da-Xia témoignait tout aussi bien d'un aveu de faiblesse que de sa part, poussée qu'elle avait été à ses derniers retranchements, qu'à un symbole et à un message fort destiné aux gouvernementaux qu'elle affrontait : ils étaient présents sur une île appartenant à une force qui les dépassait de très loin, et ils ne pouvaient s'y attirer que des ennuis incommensurables. Malheureusement, toute résistante et féroce que la demoiselle était devenue, elle manquait désormais cruellement de rapidité, a fortiori pour tenir tête à des opposants tels que les deux autres maudits du zoan... Ainsi, lorsque Caligula décida de lui faire perdre l'équilibre, il y parvint sans la moindre difficulté, d'autant plus que l'épéiste du groupe avait contribué à désintéresser le monstre de sa première cible momentanément en l'harcelant d'assauts mineurs. Le gargantuesque animal s'effondra donc lourdement en arrière, aplatissant au passage un arbre ou deux en les déracinant sans plus de cérémonies. Le tremblement sourd qui naquit de sa chute ne sembla toutefois pas lui faire perdre le nord : le zoan éveillé anticipa la menace que représentait le titanoboa, et lui envoya directement ses deux bras, menaçant de le fracasser sèchement s'il prenait le parti de persister le mouvement entamé, et l'empêchant donc de mener sa seconde offensive à bien. Pourtant, Caligula n'eut guère besoin de persister : à nouveau, Da-Xia, qui avait manifestement renoncé à son intellect en se transformant ainsi, minimisa grandement la menace qu'incarnait Taito et fut contrainte à le laisser s'approcher jusqu'à elle. Les balles partirent donc sans rencontrer de résistance, et la maudite perdit immédiatement connaissance, plongée dans un état critique. Elle n'était pas encore morte, mais nul doute que cela ne tarderait guère si elle n'était pas rapidement prise en charge par des médecins compétents : les projectiles du marine avaient causé de graves lésions, malgré la taille incroyable de la bête, et menaçait donc de lui faucher la vie d'un instant à l'autre si rien n'était fait.

Partie Logan

Olozetta Honji et Keel.

Logan avait donc décidé de rebrousser chemin, en compagnie du Pacifista, et put donc faire face à l'aberrant spectacle que lui adressait l'horizon : une deuxième île semblait s'être dressée là, juste à côté d'Olandaina, à une centaine de mètres des côtes au maximum. Des courbes rocailleuses s'érigeaient effectivement hors de l'eau, en d'invraisemblables pointes là où seules l'écume et les vagues s'étaient trouvées, des heures auparavant. Si Keel ne semblait parvenir à aucune conclusion logique face à un tel spectacle qui dépassait tout simplement l'entendement, il allait sans dire que cette apparition extraordinaire avait fort à faire avec les multiples présences qui se frayaient désormais un chemin à travers les eaux, à bord d'une barque massive. Une douzaine de personnes s'y trouvaient effectivement, parmi lesquelles Honji Olozetta, en tête du petit cortège. Un chapeau dans la main droite et un sourire affable sur les lèvres, l'homme adressa un bref signe de la tête aux Decimas présents sur le navire de Centes, qui le regardaient d'un air tout bonnement hébété. Ce que Logan pourrait en comprendre était évident : les gardiens du navire ne comprenaient pas plus ce qui venait d'arriver que le robot à ses côtés. Pourtant, en persistant dans son analyse visuelle, le pacifista en vint à réaliser quelque chose : il fit un pas supplémentaire en avant, puis souffla à son accompagnateur quelques mots qui, étonnamment, semblèrent abasourdis malgré le fait que la créature d'acier n'était aucunement capable de ressentir de telles émotions :

-Il s'agit d'une tortue australe, la plus imposante sous-race de cette espèce. Elle vit dans le Nouveau Monde, et on n'y trouve qu'une poignée d'individus. Ils mesurent jusqu'à plusieurs kilomètres de long.

Cela expliquait un certain nombre de choses, y compris le grondement sourd : la tortue avait dû se poser sur les fonds marins, à quelques encablures de là, et arracher en conséquence une plainte puissante à Olandaina, soudain malmenée par une présence aussi massive. Cela pouvait également expliquer l'incompréhension des gardiens Decimas, qui semblaient parfaitement incapables de retrouver contenance... Et cela éclaircissait sans aucun doute le mystère de l'identité de l'homme au chapeau, qui ne pouvait, à ce stade, être personne d'autre qu'Honji Olozetta. Celui-ci, d'ailleurs, venait tout juste de poser pied à terre : il se mit à marcher en direction du Quartier Général d'un pas vif et décidé, immédiatement suivi par sa cohorte d'alliés, illustres inconnus aux yeux de Keel, prouvant non seulement qu'il connaissait les lieux mais également qu'il avait fort à y faire.

Partie Ghetis - Kanäe

Ranger Krom

Si Krom avait su se défendre avec plus ou moins d'efficacité à l'assaut entrepris par Ghetis à son encontre, ce ne fut pas nécessairement le cas de tous les criminels pris pour cibles : le chien fut abattu sans la moindre difficulté par le contre-amiral, et le joueur de cartes s'effondra également sans opposer plus de résistance aux marines envoyés sur place. Ne restaient donc plus que deux combattants intacts, et un déjà blessé. Le dresseur vit son compagnon animal se frayer un chemin jusqu'à la demoiselle, sans toutefois parvenir à l'abattre : il comprit à ce moment précis qu'il allait être pris pour cible, étant un adversaire plus simple à abattre que le gigantesque quadrupède se trouvant à ses côtés. Cette lucidité et sa réactivité lui permirent d'opposer à la lame de la jeune femme son avant-bras gauche, qui fut ainsi transpercé d'un coup sec. Après un râle d'agonie, le pauvre homme fit de son mieux pour se défendre des assauts répétés de son adversaire, sans pour autant y parvenir véritablement... Le chien maudit, toutefois, n'allait pas abandonner pour si peu : il pivota prestement et fondit sur Kanaë, menaçant de la percuter d'un coup d'un seul, d'un moment à l'autre. Et, sans Ghetis, cela aurait d'ailleurs probablement eut lieu : la bête, vive et véloce, aurait frappé la demoiselle dans le dos sans la moindre hésitation si le poing du gradé ne l'en avait pas empêché. La projection dont elle fut victime et le choc sourd qui l'opposa au ponéglyphe ne laissa que peu de possibilités la concernant. L'Amarok, s'il n'avait pas perdu connaissance, en fut donc réduit à grogner et à glapir férocement, pour tenter de tenir ses assaillants à distance. Ses mâchoires allaient bien probablement croquer ceux qui seraient assez fous pour s'en approcher, mais pour l'heure, la bête ne semblait plus en mesure de poursuivre l'affrontement...

Ranger, de son côté, avait eu le temps de se redresser grâce à la diversion imposée par ses différents comparses. Il eut toutefois l'immense privilège de les voir tomber un à un, y compris le chien parti chercher des renforts un instant auparavant. Son genou endolori et sa vision trouble lui firent comprendre qu'il n'avait aucun moyen, seul, de venir à bout du contre-amiral et de la demoiselle : il lui fallait de l'aide, mais il n'allait probablement pas avoir la chance d'en obtenir dans les moments à venir. Brutalement, il ôta donc son écharpe et dégaina vivement sa rapière. Son coup d'estoc parti, menaçant la jeune femme : il projetait dans sa direction une espèce de lame d'air, dans le but de la transpercer à distance. Autant livrer bataille...

Si personne n'avait entravé les agissements sombres de Taito et de sa sœur tandis que Caligula remontait en direction du ponéglyphe, ils eurent en revanche tout loisir de se rendre compte de l'état d'ébullition dans lequel entrait le quartier général. La venue imminente des envoyés Decimas semblait exciter les criminels locaux et, en observant précieusement à travers les branchages, ils purent facilement observer les mouvements des troupes, autrefois entraînées par Da-Xia, qui libéraient le passage sans pour autant disparaître. Visiblement, les chefs de la Triade souhaitaient livrer aux yeux des Decimas un spectacle net et propre, censé démontré l'efficacité de leurs troupes ainsi que leur professionnalisme à toute épreuve. De surcroît, de nombreuses têtes d'affiches, qu'ils purent assimiler comme étant l'équivalents de lieutenants, au même titre que la lapine vaincue un peu plus tôt, se mirent à émerger des fenêtres pour beugler des ordres à leurs subordonnés. Si la majorité d'entre eux ne leur étaient guère décerné, leur intimant notamment de nouvelles positions et de libérer le passage, quelques uns s'enquirent toutefois de l'endroit où se trouvait la jeune artiste martiale, encore et toujours portée disparue. Dans tous les cas, nul ne semblait pour l'heure s'approcher de la forêt, et c'était heureux : la situation n'allait toutefois probablement pas durer ainsi. De l'autre côté, au niveau du ponéglyphe, la résistance farouche opposée par les troupes de la Triade s'avéra également de courte durée : l'Amarok déjà sévèrement blessé fut mis hors d'état de nuire, et si Ranger parvint à s'échapper temporairement, il fut vivement rattraper par son opposant. Il s'effondra également à terre, mort.
Au final, les cadavres furent également maquillés à cet endroit : ne demeuraient à l'écart plus que Gregor et les deux envoyés, placés quelque part, en forêt.

Russian Fichter et Jonichiko Androkarias.

-Cela change tout... Monsieur Thalassa doit être informé de cela. L'avez-vous mis au courant ?
-Dès que l'information a été communiquée, Jonichiko. Gardez l’œil ouvert, on ne sait jamais...

Russian raccrocha, son faciès reprenant une expression moins solennelle et moins dur. Du haut de sa très longue carrière, il avait d'innombrables fois été au cœur d'intrigues complexes et de situations stressantes au possible, mais cette mission-là avait quelque chose d'inédit. Le risque d'échouer était grand, et il en était réduit à assurer les arrières de véritables marines, ses successeurs en fin de compte, là où il avait autrefois presque toujours été en première ligne. Organiser une porte de sortie ne convenait qu'à moitié de ses compétences, mais comme Shang le lui avait ordonné, il s'y était plié docilement, et sans sourciller. Restait à savoir si le choix avait été judicieux... Lentement, l'ancien vice-amiral secoua la tête, revenant à l'instant présent en considérant qu'après ces événements, il mériterait bien une petite retraite, durant un an ou deux. Il n'avait plus vu ses petits enfants depuis si longtemps qu'il avait du mal à se souvenir de leurs voix... Il conserva un Den Den Mushi non loin de lui et remonta jusqu'aux commandes du sous-marin, où les innombrables capteurs avaient cessé d'émettre d'inquiétantes sonorités. La gigantesque chose qui s'était frayée un chemin derrière eux un peu plus tôt ne s'était plus faite remarquer depuis, et la thèse d'un animal gargantuesque n'était guère à exclure. Cela étant, si cette chose était liée à la présence des criminels sur l'île, alors l'opération risquait fort d'être encore plus ardue qu'imaginer : une faction recelant d'une telle bête possédait nécessairement une puissance extraordinaire...

Le groupe de marines avait rapidement tiré des conclusions, bonnes ou erronées, et souhaitait désormais réagir en accord avec leurs convictions. L'idée proposée n'était pas sotte, et sans doute aurait-elle pu leur permettre, par défaut, de leurs sauver la peau s'ils s'étaient bel et bien trouvé dans le bourbier qu'ils suspectaient... Malheureusement pour eux, la situation était toute autre : la forêt, l'île toute entière même appartenait à d'autres mains, des mains qui ne leur voulaient pas que du bien, et si leur mission d'infiltration c'était dans un premier temps bien déroulée, quelques petites erreurs disséminées çà et là risquaient fort d'avoir avertis les criminels et leurs alliés d'infortune de leur présence et de leur objectif. Trois silhouettes avançaient ainsi vivement et prestement à travers les branchages. Leurs voix, qui seraient bientôt à la portée du haki de Ghetis, lui apporteraient quelques informations complémentaires : l'identité de l'un d'entre eux lui était connu. Les deux autres, massifs et aux bras larges, manquaient quant à eux singulièrement de discrétion... Mais l'heure n'était plus à la furtivité, de toute manière. Ainsi progressèrent-ils jusqu'au groupe de soldats, le plus svelte en tête, et émergèrent de la forêt frontalement, face à eux. Sans plus attendre, Shang prit la parole d'un ton amusé en lorgnant Ghetis, transformé pour l'occasion en vulgaire bête de somme :

-La prochaine fois que j'ai besoin d'aide pour un déménagement, je penserai à vous appeler, contre-amiral. Et Caligula, ça n'est pas le moment de promener votre chien. Laissez-le ici, je suis sûr qu'il retrouvera le chemin tout seul.

Thalassa Shang.

-Trêves de plaisanteries. Laissez ça à ces deux messieurs. Keel, aide-les.

Les deux vieillards qui l'encadraient avaient probablement la soixantaine passée, mais le temps n'avait manifestement rien ôté à leurs capacités motrices : leurs muscles larges et leurs statures hautes en faisaient deux colosses indomptables. Ils vinrent se placer de part et d'autre du ponéglyphe et, sans la moindre difficultés, l'ôtèrent du dos de Ghetis. Le pacifista vint stabiliser leur accroche tandis que Shang jetait un regard précautionneux aux alentours, manifestement soulagé. Il prit la parole avec précipitation, jugeant apparemment qu'il ne valait mieux pas traîner en longueur, et pointa la direction du sous-marin.

-Pas de navire criminels en vue. J'en ai fait venir un. La base de Rusukaina est en train de se vider, le sous-marin est sûrement reparti également... On prend le ponéglyphe et on se casse. Et on passe par la forêt. Violet, utilisez votre sabre pour créer un passage. Logan, vous passez en tête également, avec votre arme. Caligula, vous restez avec eux, et vous les couvrez quoi qu'il arrive. Taito, Kanäe, vous vous placez de chaque côté du ponéglyphe et vous protégez les porteurs. Quoi qu'il arrive, vous les protégez. Compris ?

Le visage du Thalassa brillait d'impétuosité, mais également de franchise et de dureté : il ne supporterait aucune désobéissance pour les quelques minutes à venir, car l'enjeu était bien trop grand pour souffrir de quelques contestations que ce fut. Il se doutait que les deux Nowaki auraient préféré évoluer côte à côte dans un environnement aussi hostile, mais ils allaient devoir s'y faire : les pistolets de Taito le rendait bien trop efficace en soutien et en protecteur, tandis que Caligula serait parfait pour intercepter des ennemis en pleine forêt dense, grâce à son corps-à-corps imprévisible et brutal. Là-dessus, le chef de l'expédition se tourna à nouveau en direction de l'Archer et enchaîna vivement :

-L'essentiel des troupes ennemies nous rattrapera par derrière : nous allons laisser un sillon large en pleine forêt, et ils seraient bien stupides de ne pas l'utiliser pour nous rattraper. On reste derrière, vous et moi, Ghetis. Si Ao Kiji se pointe, vous me la laissez, vous ne tentez rien. J'ai aussi mes astuces. En route, maintenant !

Il se doutait que son arrivée imprévue et que ses prises de paroles sourdes et soudaines amèneraient chez les soldats un lot d'interrogations considérables, mais ils n'avaient pour l'instant pas le temps de discuter paisiblement. Les deux vieillards et le Numero se mirent ainsi en route, avec une démarche sûre et relativement rapide. Bien entendu, ils auraient été plus vite en laissant l'Archer le porter, mais c'était un luxe qu'ils ne pouvaient pas se réserver : son fruit du démon pouvait assurer la réussite de cette mission, et son haki de l'observation était également un atout majeur à abattre dans le cas d'une situation désespérée. Certes, cela signifierait, dans un cas comme dans l'autre, plus ou moins son arrêt de mort... Mais toutes les hypothèses étaient à traiter, dans de telles circonstances. De surcroît, Shang lui-même n'était pas assez sot pour espérer s'en sortir sans difficultés : il refuserait catégoriquement de laisser l'un des marines derrière seul. Tout en avançant, le jeune homme en vint finalement à prendre la parole pour fournir au reste du groupe quelques menus renseignements :

-Nous avons intercepté quelques appels des criminels. J'étais déjà en route avec le navire, que j'ai appelé dès que nous avons appris pour le ponéglyphe... Sagacia a trouvé et ramené le corps de Gregor, mais ils ont compris. A cause des dégâts causés par Da-Xia, entre autres. Je n'ai pas le temps de m'attarder sur les détails, mais les hors-la-loi savent que les Decimas n'avaient aucun intérêt à les attaquer en fourbe. Enfin, ce n'est pas le seul problème... Toujours est-il qu'avec tout ça, leur alliance va perdre en importance. Comment Centes pourrait faire confiance à des types incapables de sécuriser leurs propres îles ? Enlever le ponéglyphe sera une belle conclusion. Ils ne deviendront pas ennemis, mais s'en voudront certainement, et cela les empêchera de créer une alliance totale. En bref, ça n'est pas une réussite absolue, mais ça n'est certainement pas un échec...

Soudainement, Shang se tut : son haki de l'observation venait de percevoir du mouvement, et il serra plus fermement sa lance dans ses mains en continuant à avancer. Ils allaient bientôt passer à l'action, et il fallait à tout prix les empêcher d'atteindre leur objectif : le ponéglyphe devait être protégé. Avant même qu'il n'ait le temps de beugler le moindre ordre, les ennemis, comme un seul homme, se mirent en action, et c'est eux qui se mirent à crier.

Eseren et Saphilia.

-J'm'occupe du petit chef !
-Dans ce cas, je m'occupe de la gamine...

Eseren sortit des fourrées, sur la droite du convoi, et se mit à bondir en direction de Shang sans la moindre forme de courtoisie. Son poing se couvrit d'une plaque de haki de l'armement et il le projeta en direction du gouvernemental qui, d'un mouvement preste et agile, l'évita sans la moindre difficulté, signe évident d'une utilisation du haki de l'observation. Le poing du hors-la-loi rencontra le sol et une large crevasse s'y ouvrit, mais le criminel n'eut pas le temps de renchérir : la jambe du Thalassa venait à son tour de se noircir, et il percuta son adversaire en plein dos. Le coup, loin d'être mortel, eut au moins l'intérêt de propulser son assaillant à une vitesse folle : le pauvre homme catapulté aurait besoin de quelques bonnes secondes avant de revenir à la charge. Aussi le chef de l'expédition se permit-il de hurler :

-Repoussez-les ! Contentez-vous de les repousser ! Ils ont l'avantage ici mais sur la plage, nous pourrons les affronter plus facilement ! Avancez, ne vous arrêtez pas !

Saphilia, quant à elle, avait donc décidé de foncer sur Kanäe après être sorti des bois. Le but était évidemment d'atteindre les porteurs du ponéglyphe aussi rapidement que possible en supprimant leur escorte, et elle avait l'air déterminé à l'idée d'y parvenir. Alors qu'elle était encore à quelques pas de la zoan, son épée se couvrit d'un arc électrique qui fondit en direction de la demoiselle. Problème : si elle esquivait ça, l'un des deux porteurs risquait potentiellement de le subir de plein fouet.

Menliena et Sidonie.

-Eseren, t'es qu'un putain d'idiot !

La femme-cornue avait observé le vol plané de son confrère sans bouger le petit doigt et comprenait dorénavant que Shang était une cible trop audacieuse pour eux, dans ces circonstances. Tant que l'escorte du chevalier Decima ne se joignait pas à eux, ils allaient avoir du mal à le défaire, même à plusieurs contre un... Restait donc à s'occuper du reste de la petite bande en attendant. L'idée de Saphilia était parfaite, et la possibilité de déséquilibrer les porteurs pouvait grandement leur profiter : il fallait donc surtout empêcher les autres de mener son objectif à bien. C'est pour cela que la gigantesque criminelle au crâne orné de cornes monumentales jeta son dévolu sur l'autre gars qui assurait l'arrière garde : Ghetis Archer. Elle se laissa tomber d'une branche non loin de lui et se plia lentement en deux. Une fois le buste pratiquement à l'horizontal, elle fit brutalement grandir ses cornes, menaçant d'empaler le contre-amiral si celui-là ne réagissait pas à temps. Un peu plus loin, une forme angoissante ricanait, planquée dans un buisson. Sidonie n'était pas du genre franche et spontanée : elle n'aimait pas du tout l'idée de se retrouver au cœur d'un conflit qu'elle ne maîtrisait pas. Son truc à elle, c'était plutôt les coups en douce... Elle tira deux fioles de ses vêtements amples et les laissa soudainement. La première irait s'exploser sur le haut du ponéglyphe, et la seconde aux pieds de Taito...

Sifilian et Aritmea.

-Tu vas laisser ces putains d'arbre en paix, toi ?!
-Ça t'est aussi adressé.

L'approche de Sifilian et d'Aritmea était bien moins frontale et directe que celle de leurs alliés, mais pas moins réfléchie. S'ils arrivaient à abattre Violet et Logan, ils pouvaient empêcher le groupe d'écarter le chemin aux porteurs des ponéglyphes, qui risquaient ainsi d'avoir plus de mal à progresser... Et cela permettrait donc à d'éventuels alliés à eux de rappliquer en temps et en heure, pour rajouter leur grain de sel à l'affaire. Sifilian était resté en retrait, dans les arbres, et profita donc d'une brève ouverture pour tirer en direction des jambes de la demoiselle. Deux balles, soudaines et vives, qui risquaient fort de couper court aux gesticulations de la belle... Aritmea, elle, avait tiré une massue grande comme un bras et fondit droit vers Logan, dans le but de l'assommer d'un violent coup au niveau du crâne. Sans son possesseur, l'arme zoan serait perturbée, assurément...