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Jeu 8 Juin - 12:18
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Debout devant son plan de cuisine, le brun se tenait immobile et silencieux, les deux mains posées contre la surface plane et lisse. Ses yeux fatigués observaient, placée devant lui, une pile d'assiettes encore sales qu'il venait tout juste de récupérer suite à un énième repas des Dokugan bien moins festif que d'habitude. Les récents évènements de l'Archipel de Boyn pesaient lourdement sur le moral des différents pirates. L'annonce d'une guerre avec Centes Decima, la découverte de son réseau tentaculaire allant jusque dans les chasseurs de prime payés par le Gouvernement Mondial, ainsi que les combats ardus qu'ils avaient du traverser pour sortir de l'archipel en vie... tout cela ne faisait pas bon ménage. Mais pour sa part, le cuistancier avait une toute autre blessure morale à guérir : celle de quelques assiettes brisées. Par ses propres mains.
Personne n'avait jamais compris cet attrait qu'il avait pour la vaisselle, la porcelaine et les ustensiles de cuisine. Personne n'arrivait à imaginer qu'il connaisse l'emplacement de chaque objet dans sa cuisine par cœur, que le son d'un éclat de faïence puisse lui parvenir au travers de plusieurs parois, qu'il fut capable de se jeter corps et âme dans un assaut pour protéger de sa carrure un frêle verre prêt à se briser au moindre choc. Vu de l'extérieur, ça avait tout simplement l'air d'une obsession comme un autre, d'un trouble du comportement comme certains pouvaient en développer. Aussi, le fait qu'il dut briser de la porcelaine pour vaincre ce foutu Amedeo, qui produisait des assiettes à n'en plus finir, pouvait sembler peu arrangeant pour lui mais bien surmontable. Une simple crise et hop, tout repartait du bon pied.
Sauf que ce n'était pas le cas. Les questionnements qui se soulevaient en son for intérieur était bien plus profonds que ce qu'il n'y paraissait. Le mal qui accablait son esprit, bien plus carnassier qu'une simple culpabilité.
Autour de lui, rien ne bougeait. Ces derniers temps, il était si morne et austère que les autres membres de l'équipage le laissaient volontiers seul, ayant tout à fait compris qu'il ne parviendrait pas à revenir à un état enjoué dans l'immédiat. Chacun ayant ses propres doutes à affronter, cela ne faisait finalement pas tant de mal au groupe, bien que la solidarité habituelle des Borgnes ne fut pas au beau fixe : pourtant, ils continuaient de se serrer les coudes à leur façon. Pour sa part, l'isolement était une punition autant qu'une nécessité. Il avait besoin de se poser et de réfléchir à tous les évènements qui s'étaient produit, se produisaient et allaient se produire pour l'équipage. Tout comme il devait faire le point sur lui même.
D'une main tremblante, il approcha l'amas de vaisselle salie qui se situait devant lui, sans pour autant oser le toucher. Il y avait comme un blocage, comme une honte. Il ne se sentait pas digne de nettoyer ces courbes symétriques et agréables, de récurer la crasse laissée par les aliments afin de restaurer la blancheur éclatante de ces petits bijoux. Dès qu'il y pensait, c'étaient celles qu'il avait brisées dans son combat précédent qui revenaient en tête. Son impuissance à les sauver, une à une. Le fait qu'il avait été incapable de les garder intactes était pour lui très lourd à porter : à défaut d'être un véritable crime au sens commun, cela pointait sa faiblesse. Il s'entraînait sans relâche pour devenir plus fort, pour protéger les siens et pour ne plus jamais être impuissant face à quiconque. Et pourtant... à chaque pas qu'il faisait, Grand Line n'hésitait pas à enserrer ses talons dans sa terrible vérité, telles une créature invisible aux membres visqueux et écrasants.
Il était faible. Encore bien trop faible.
- Putain...
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Ven 16 Juin - 14:38
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Il se revoyait encore, de nombreuses années plus tôt, observer avec sa discrétion timide sa mère en train de cuisiner. Fait insolite, elle s'affairait systématiquement à nettoyer la vaisselle avant et après chaque repas. Lorsqu'il n'était qu'un gamin, il avait du mal à comprendre le principe du premier lavage. À dire vrai, sa curiosité l'avait même poussé à poser la question à sa mère, au détour d'un énième repas, alors même que son père était reparti travailler aux champs. "Dis, Maman, pourquoi tu nettoies la vaisselle avant de manger ?" semblait en soit être une question tout à fait valable et anodine. Pourtant, elle avait été à l'origine de toute une psychologie chez le brun, qui avait en ce temps une appétence déjà assez prononcée pour l'art culinaire, appétence qui n'en ressortirait que grandie.
- Tu vois, Heziel, cuisiner, ce n'est pas seulement préparer un plat, suivre une recette, agencer des ingrédients. Cuisiner, c'est beaucoup plus que ça.
Cette réponse l'avait laissé perplexe. C'était normal, après tout : le bambin qu'il était alors n'avait pas encore consommé son dixième printemps et il était loin de voir une valeur morale et sentimentale dans un acte apparemment aussi simple que celui de préparer à manger. Pour lui, il s'agissait surtout de faire de bonnes choses, qui avaient bon goût. Mais au final, sa génitrice l'avait rapidement ramené sur un terrain d'entente commune : un terrain que son coeur d'enfant pouvait appréhender avec beaucoup plus de facilité que celui, plus mûr et plus raisonné, d'un adulte.
- Qu'est-ce qui compte pour toi, quand tu cuisines ?
- Ben... que ça soit bon, maman.
- Oui, mais pourquoi est-ce que tu veux que ce soit bon ?
- ... pour que les gens soient contents.
Après quelques secondes de réflexion, la réponse lui était venue tout naturellement et sa mère avait souri chaleureusement. Bertha Coffe était fière de ses deux enfants, chacun pour des raisons différentes, mais était surprise de découvrir jour après jour de nouvelles raisons d'accentuer cette fierté maternelle. Au final, les valeurs du second des Dokugan remontaient à loin, très loin dans sa jeunesse.
- C'est exact. Cuisiner, c'est avant tout faire sourire, mon petit. Et c'est pour ça que je nettoie la vaisselle avant et après chaque repas : pour qu'elle soit au meilleur de sa forme et de sa beauté, car un bon repas ne s'arrête pas à ce qu'il y a dans l'assiette : chaque détail compte ! Et si tu veux rendre les gens autour de toi heureux, tu dois penser aux détails.
Revenant à lui, il retira sa main et s'appuya avec lassitude sur son plan de cuisine, regardant ses pieds, silencieux. Ces souvenirs étaient lointains, mais ils constituaient sa personne de façon plus solide que la plupart des briques apposées par la vie sur son existence. La leçon humble et simple qu'avait pu lui transmettre sa mère, ce jour là, dépassait de loin le cadre de la cuisine : c'était un leitmotiv qui le suivrait durant le reste de ses jours. Heziel le savait, il avait en son coeur bien assez de place pour chérir une multitude de personnes, sans les filtrer à cause de leurs origines, du camp auquel elles pouvaient s'identifier ou de ce genre de stupidités. Il avait dédié sa vie entière, jusque là, à s'occuper de ceux qui étaient proches de lui car il vivait au travers de ceux qu'il adorait. Sans les Dokugan, il ne serait plus qu'une coquille vide et dénuée de but, un ersatz pitoyable de ce qu'il aurait autrefois été, une copie pâle et sans saveur d'un homme pourtant plein de vie. Il avait toujours voulu faire le bonheur de sa famille, alors même qu'il n'était qu'un enfant. Puis, il avait pris très au sérieux la protection de sa petite soeur, alors même que rien ne l'obligeait moralement à tenir ce rôle de gardien. Maintenant, il traitait l'équipage du Borgne comme une famille à part entière, dans laquelle chaque individu pouvait compter sur son soutien indéfectible.
Au travers de ces éclats de porcelaine, c'était ce statut autour duquel s'était agencée sa vie qui se fissurait. Cette identité de gardien et de protecteur qui s'écornait, se striait de malfaçons, de défauts béants qui constituaient les portes d'entrée aux doutes les plus insidieux.
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Lun 19 Juin - 10:54
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Il pensait pourtant avoir fait le tour de la question. Il y réfléchissait tellement que son esprit avait failli s'en intoxiquer. Ces pensées sombres et amères s'étaient agglomérées en un noyau sordide qui lui ponctionnait la pensée sans gêne, qui hantait ses rêves et qui altérait son jugement sur lui même. Pourtant, suite à la discussion sincère et à cœurs ouverts qu'il avait pu avoir avec Nakata, il pensait avoir allégé sa conscience, s'être débarrassé de ce fardeau ou tout du moins d'une bonne partie de celui-ci. Force était de constater que c'était faux : il avait certes des éléments de réponse, des billes avec lesquelles jouer pour agencer ses pensées et effectuer une remise en question plus efficace. Mais les mâchoires cuisantes de sa propre incapacité à être ce bouclier qu'il avait voulu être toute sa vie ne lâchaient pas pour autant prise. Il se sentait, envers et contre tout, actuellement inapte à endosser la responsabilité qui lui incombait et à mener à bien cette mission auto-imposée.
Paradoxalement, il ne donnait jamais autant de sa personne que lorsqu'il devait défendre ceux qu'il chérissait. Il n'était jamais aussi hargneux, aussi flamboyant et aussi convaincu de la légitimité de ses actes que lorsqu'il se portait à l'encontre des menaces qui pesaient sur ses camarades ou sur les innocents qu'il prenait parfois sous sa protection. Le pugiliste n'était jamais aussi terrible et impitoyable que lorsqu'il devait se battre pour une cause qu'il croyait juste, une cause que lui même jugeait en accord avec ses principes. Cette cause, elle se présentait clairement à lui aujourd'hui. L'équipage du Borgne, malgré son caractère d'électron libre, s'était présenté comme un opposant non négligeable auprès du régime monarchique de Centes Décima. Les forbans, sans doute les plus imprévisibles d'ailleurs, qui traversaient actuellement Grand Line pour la première fois n'avaient pas reculé devant la puissance sans doute écrasante d'un groupe, d'une faction entière disposant de moyens dans le monde entier. Ces pirates qui forgeaient à leur insu l'avenir et qui avaient commencé à battre le fer de leur destinée dans la fournaise d'un combat qui s'annonçait. Danger, risques, douleur. Mais liberté. La liberté était la clé.
Alors pourquoi était-il désormais là, à se lamenter dans sa propre cuisine, devant ces assiettes qu'il se trouvait infoutu de nettoyer ? Pourquoi ses épaules lui semblaient-elles si lourdes, pourquoi les douleurs fantomatiques d'anciens combats revenaient le malmener ? Alors même qu'il était convaincu de la nécessité d'abattre cet ennemi, de briser la poigne glaciale d'un règne qui n'avait rien d'une fantaisie, de combattre et de vaincre ses lieutenants de la façon la plus totale... pourquoi tremblait-il ? Pourquoi l'excitation d'un combat de cet envergure, d'un défi d'une telle ampleur, avait-elle laissé la place à ces insidieuses et insupportables rétrospectives qui ne lui laissaient pas de répit ? Il se revoyait pourtant encore, fringant et prêt à tout, alors même que le Valentine D. venait d'ouvertement déclarer la guerre au Monarque en le menaçant au passage. Il était alors plus désireux d'en découdre qu'inquiet de le faire. Les choses s'étaient inversés, peut-être car le momentum mental était retombé et qu'il se trouvait désormais en proie à un calme angoissant.
Ceux qui étaient plus faibles que lui, ceux qui avaient besoin de protection, eux avaient ce droit. Ils avaient le droit de trembler, car ils n'avaient pas toujours d'autre choix : prendre la voie des armes et s'élever pour défendre une idéologie étaient deux choses qui étaient différentes mais parfois liées. Trouver la mort en défendant une idée était une possibilité à ne jamais exclure et tous n'étaient pas prêts à en payer le prix. N'était-ce pas simplement compréhensible ? Les idées étaient peut-être à l'épreuve des balles, mais pas les corps de ceux qui les portaient. Pour sa part, le cuisinier se maudissait une énième fois pour sa faiblesse : il avait pourtant les moyens de se défendre. D'un point de vue objectif, il était devenu un guerrier aguerri, certes pas le plus puissant qui fut, mais il restait fiable. Il avait eu son lot d'aventure, affronté des ennemis coriaces et fait preuve de pugnacité dans l'adversité. En d'autres termes, il ne considérait pas avoir le droit de se morfondre. Pas après tout ce chemin parcouru.
La réponse sempiternelle tombait encore : deviens plus fort, Heziel. Surpasse toi, Heziel. Il n'était pas satisfait de cette unique porte de sortie, mais il prenait conscience que la vie n'était pas toujours une question de réflexion, de portée psychologique ou d'acceptation de faits. Non. En tant que simple être humain, il ne disposait pas de ce droit : il ne pouvait pas penser un monde qui lui paraitrait meilleur en espérant le voir se réaliser. Il ne pouvait pas chercher des solutions dans les méandres de son esprit pendant que dehors, les mêmes faits se produisaient en boucle. Il devait agir. Agir, oui. C'était dur à avaler, encore plus dur à comprendre, malgré la simplicité apparente de ce simple mot. Peu à peu, et à son insu, le Coffe découvrait qu'il n'avait fait qu'effleurer la portée des quelques mots qu'il avait adressé au Shichibukai avant leur affrontement. Il ne devait pas devenir plus fort suite à un quelconque cheminement de pensée. Il ne devait pas devenir plus fort pour défendre son mode de vie ou celui de ses camarades. En fait, il ne devait même pas chercher tout ces liens : il devait devenir plus fort parce qu'il le fallait. Faire ce qu'il y avait à faire, sans se fustiger ainsi. Point final.
Ainsi, malgré la morosité qui flétrissait son être, il soupira longuement, tenta de faire le vide dans sa tête... puis il empoigna une première assiette.
- Allez.
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Mar 20 Juin - 16:15
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- Quelques jours plus tard, sur une île inhabitée de la voie 3 -
L'entrainement avec le forgeron avait été extrêmement rafraichissant. Non content de permettre au brun de s'aérer l'esprit, il lui avait permis de développer une nouvelle technique qu'il trouvait tout bonnement superbe. Après avoir ramené l'enclume ardente auprès du groupe qui bivouaquait, le Coffe avait passé quelques instants avec ses camarades avant de leur fausser compagnie : s'échauffer ainsi avec le détenteur du Kachi Kachi no Mi l'avait monté sur ressors et il voulait désormais dépenser ce trop plein d'énergie qui avait été induit par l'affrontement. Il avait donc laissé ses amis avec un sourire, observant avec une entière gratitude les sourires revenir sur les visages, les blagues fuser dans les airs, les coups de tatane finir dans le crâne du capitaine et les aventures du nain captiver l'attention de tous. Décidément... c'était à croire que cette petite compagnie était indestructible. Que cela fut vrai ou non, le brun préférait de toute manière le croire : après tout, les forbans de l'équipage du Borgne avaient enduré de nombreux combats depuis la création officielle de ce groupe et il fallait rendre le crédit là où il est était dû. Malgré les aléas d'une vie bien remplie, entre aventures joyeuses et épreuves difficiles, ils étaient toujours debout. Cet élément, à lui seul, suffisait à remettre d'aplomb le cuistancier. La route était encore longue et ils auraient sans doute de nouveau sacrifices à effectuer, mais rien n'était impossible pour de fieffés pirates aussi fringants qu'eux... ou aussi tarés. Les deux se valaient, même si l'instinct du second penchait pour la deuxième option.
En s'éloignant du reste de l'équipe, le Coffe avait profité d'un moment de clarté et de calme pour s'abandonner à ses sensations et cesser de réfléchir. Il avait d'ailleurs toujours envié la capacité de Kain à le faire volontairement. C'était impressionnant et perturbant à la fois : un peu comme si son corps continuait de fonctionner, tout en ayant pleinement conscience de ne pas avoir de cerveau aux commandes... sauf que sans cerveau au commande, le corps n'était supposément pas capable d'être conscient de quoi que ce fut... en d'autres termes, une possession par un esprit supérieur aurait encore été plus plausible, mais si les esprits existaient et qu'ils frappaient bien les mortels en les privant de leurs corps, celui qui s'était introduit dans celui de Kain n'avait décidément pas du avoir une existence facile au préalable. Toujours était-il que se couper de ses réflexions lui fit le plus grand bien : il devait arrêter de voir les tenants et les aboutissants des choses, de manière systématique. Ça le travaillait beaucoup trop et il n'avait pas de place dans son cerveau pour ce genre de calculs, plus actuellement. Ce qui comptait désormais, c'était de capitaliser sur la rencontre de Boyn afin d'en ressortir grandi : en d'autres termes, une séance d'entraînement s'imposait et il lui semblait qu'il avait toute l'après midi devant lui pour ce faire. De plus, il avait une petite idée de ce qu'il allait pouvoir développer avec le plus d'efficacité... même si un maintien global de ses capacités s'avérait nécessaire, en plus d'un petit passage sur cette nouvelle méthode martiale qu'il avait tout simplement appelée "frappe-vent".
Laissant le chant de petits oiseaux le guider, humant tranquillement l'odeur de la forêt clairsemée qui entourait la grande plaine dans laquelle le bras de fer avec l'artisan forgeron avait pris lieu un peu plus tôt, le Coffe se déplaçait entre les arbres impassibles avec une certaine légèreté et une indéniable souplesse. Sans réellement s'en rendre compte, il se mettait déjà à l'entrainement en effectuant des mouvements qui n'étaient pas forcément nécessaires, mais qui lui permettaient de gagner en vitesse et en distance alors même qu'une marche plus lente aurait ultimement conduit au même résultat. Rapidement, il se retrouva au dessus du sol plutôt qu'à le fouler, sautant d'arbres en arbres jusqu'à trouver un point qui lui semblait adéquat pour se poser : un petit cours d'eau qui traversait une zone un peu plus rocailleuse, dans laquelle une végétation plus éparse mais bien présente survivait malgré tout. Sans doute à cause de la source d'hydratation à proximité. Bientôt torse nu, le Coffe commença par un échauffement musculaire assez classique : nuque, épaules, coudes, poignets, colonne vertébrale, bassin, genoux, chevilles... il ne laissa rien au hasard. Ces sensations, il se les réappropriait à chaque fois, comme si il redécouvrait le fonctionnement de son propre organisme à chaque nouvelle session d'entrainement qu'il s'imposait. C'était une façon pour lui de rester humble et à l'écoute de ce que son corps avait à lui dire : si il restait à l'affut de la moindre faiblesse, mais également de la moindre amélioration, il était plus à même de se connaitre au maximum. Contrairement à certains artistes des arts martiaux qui finissaient par se reposer sur leurs lauriers, l'originaire de Mormoilnoeud effectuait toujours les gestes de base, malgré une force qui n'était plus à démontrer. C'était en adoptant le point de vue d'un débutant qu'il se construisait une identité d'expert sûre et fiable.
- Roasting... rare.
Une suite de coups de poings rapide qui firent paresseusement déplacer l'air au niveau des impacts invisibles fut lancée. Vive, incisive, mesurée. Une technique basique de son panel, rien de bien incroyable en réalité. Il l'utilisait déjà alors même qu'il n'était qu'un débutant dans le monde du combat à mains nues. Désormais, il pouvait fendre du titane sans la moindre difficulté. En témoignaient les quelques roches qu'il eut tôt fait de réduire méthodiquement à l'état de poussière, avec une aisance renouvelée. Dire qu'autrefois, il pouvait à peine briser du bois ! Il enchaîna sur d'autres techniques de son crû, entraînant vigoureusement son corps sans rien laisser au hasard. Sous un soleil qui semblait de plus en plus fort, le Coffe sentit les premières gouttes de sueur couler le long de ses tempes, sur son front, dans son dos. Ses cheveux s'humidifièrent alors que sa respiration s'adaptait à un rythme cardiaque grimpant. Il avait revisité un à un ses mouvements fétiches et force était de constater qu'il les maitrisait encore mieux qu'autrefois : naturellement, les dangers de Grand Line l'avaient reforgé pour servir un intérêt de survie évident. Fort de cette analyse, sourire aux lèvres, il entreprit de pratiquer cette nouvelle technique de vent qu'il avait découverte un peu plus tôt : au départ, cela s'avéra assez laborieux. Le ratio entre la force dépensée et le résultat obtenu n'était clairement pas satisfaisant. Au fur et à mesure des minutes, cependant, il commença à mieux maitriser sa propre dépense en énergie. Il avait été capable d'adoucir l'atterrissage du Stronghold un peu plus tôt, l'aidant à éviter des dégâts inutiles à l'issue de leur petite jouxte. Cette idée en tête, il s'était calqué sur les efforts qu'il avait alors fourni, au feeling, avant de tester diverses façons de produire du vent. Après une bonne heure d'expérimentation, ses résultats étaient on ne peut plus probants : énergie dépensée, mouvement utilisé, contrôle nécessaire pour effectuer tel ou tel mouvement à l'aide du vent... il lui restait encore à apprendre, mais il était capable de définir bien plus facilement le périmètre de ses propres possibilités.
- Bon, maintenant...
Il leva un bras rendu brillant par la sueur qui perlait de sa peau claire avant de l'observer avec insistance. Sa respiration se fit plus longue, plus calme. La lumière qui se réfléchissait sur les gouttes salines qui s'évacuaient de ses pores permit rapidement de constater qu'il était devenu immobile. Il ferma les yeux, se concentra, comme il l'avait fait de nombreuses fois auparavant. Il savait que c'était à sa portée, il se l'était déjà prouvé par le passé et il le ferait à nouveau aujourd'hui. Cette fois, cependant, le défi était de taille... il ne s'agissait pas de l'utiliser localement, sur une zone restreinte. Mais bien de l'étendre à tout son corps. Sa voix s'éleva, déterminée, alors qu'il entreprenait un combat avec son propre mental qui s'étirerait sur tout le reste de la journée.
- Busō-shoku : Kōka.
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Mer 21 Juin - 16:42
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- Encore !
Se retournant vivement, le cuistancier donna un coup dans les airs tout en canalisant son haki de l'armement. Son pied frappa le vide, puis vint se recouvrir d'une plaque noirâtre un peu plus tard. C'était trop lent, bien trop lent ! Si il devait l'invoquer en pleine panique, alors il serait totalement incapable de se défendre ! Il ne pouvait accepter cet état des faits. Il devait apprendre à plier ce pouvoir à sa volonté de façon encore plus poussée. Certes, il était d'ores et déjà capable de manipuler son haki de telle sorte que les utilisateurs de fruit du démon soient privés de toute défense concernant un corps différent de la normale. Certes, il avait appris à condenser son haki, tel un liquide dilué dont on augmente sporadiquement la concentration, afin de développer une surcouche sombre capable de largement augmenter ses capacités offensives et défensives tout à la fois. Objectivement, il possédait déjà une bonne maitrise de cette capacité et savait l'utiliser lorsque c'était nécessaire. Mais ce n'était pas suffisant : pas à ses yeux. Il devait exiger plus de sa personne, car les adversaires qui l'attendaient ne lui donneraient pas la moindre chance ! Soufflant un coup, il adopta une posture de respiration afin de faire à nouveau le vide dans sa tête, laissant ses bras décrire un geste reposant et maitrisé pendant que le son singulier de son souffle emplissait ses oreilles. Il ferma les yeux, puis les rouvrit à nouveau de façon vindicatif. Il pivota sur lui même et asséna un coup du tranchant de la main vers une roche qui reposait à ses pieds.
- Encore !
La plaque noirâtre commença à se condenser alors que sa peau touchait la pierre. Insuffisant ! Sa main droite s'enfonça sans difficulté dans la matière solide, la coupant en deux et pulvérisant les deux parties désolidarisées. Tandis que quelques rocailles de taille négligeable retombaient encore au sol et dans l'eau du petit ruisseau adjacent, Heziel plissa les yeux et se redressa. Il y avait du mieux, mais ce n'était pas encore le résultat attendu ! Son Kōka prenait bien trop de temps à se manifester à ses yeux. Il existait des dizaines de dizaines de styles de combat de par le monde. Certains guerriers se battaient avec leurs esprits. D'autres employaient des forces élémentaires terribles pour porter un coup à leurs ennemis. Certains possédaient des capacités surprenantes, qu'ils avaient appris à détourner de leur usage originel pour en faire de terribles outils d'affrontement. D'autres, comme lui, utilisaient leurs poings et leurs pieds pour se battre. Ce qu'il fallait comprendre ici, c'est également que la pluralité de ces styles de combat impliquait la pluralité des affrontements qui en découlaient : deux adversaires usant de psychisme ne menaient pas un duel comme deux pugilistes répondant avec leurs muscles. Pour sa part, il savait tout à fait comment un combat de martialiste se déroulait : à haut rythme, demandant une concentration de tous les instants et où la moindre erreur, la moindre faille pouvait se changer en motif de défaite. Dans cette configuration, il était hors de question que son inaptitude à invoquer assez rapidement son haki de l'armement lui soit préjudiciable : cela revenait à laisser la porte ouverte à son adversaire et à attendre d'être saigné comme un veau. Hors de question.
- Encore !
Un coup de coude rapide, à hauteur de menton. Une nouvelle fois, pas assez rapide.
- Encore !
Un coup de genou circulaire qui l'amena à se réceptionner sur un pied.
- Encore !
Une détente de la jambe. Encore et toujours, il avait l'impression d'être en retard. Il continua cet entrainement pendant plusieurs heures, suant à grosses gouttes sous un soleil qui lui semblait de moins en moins clément. L'utilisation intensive du Haki était également épuisante. Si il lui laissait le temps de se régénérer, il sentait clairement que son organisme avait du mal à supporter une activité aussi intense. De plus, il commençait à avoir faim. Après tout, il s'était tout d'abord entraîné avec Tony, puis il était parti dans la cambrousse pour une petite séance en solo... qui durait depuis déjà plusieurs heures. Plusieurs heures à frapper, générer du haki, recommencer. Plusieurs longues et harassantes heures passées à reproduire les mêmes mouvement en ne s'accordant pas la moindre marge d'erreur. Peu à peu, la vélocité d'apparition de son haki de l'armement s'améliora, jusqu'à ce qu'il parvienne quasiment à utiliser cette facette de son fluide de manière quasi-instantanée. Ses coups s'enchainaient, faisant voleter les herbes paresseuses, laissant des ridules onduler sur la surface claire de l'eau douce, emmenant les feuilles des arbres dans une sarabande sans fin. Se retournant pour la énième fois, son instinct lui hurla de se donner à fond, d'y mettre le paquet. Il sentait l'accomplissement lui tendre la main et comptait bien la saisir. Aussi, dans un mouvement qui transpirait la détermination, il asséna un coup de poing dans le vide.
- ENCORE !
Il le vit alors. Pendant que ses phalanges serrées et closes se déplaçaient vers l'avant, pendant que ses muscles se tendaient afin de créer le mouvement offensif, sa peau se transforma. L'armure sombre vint la recouvrir à une vitesse dépassant tout ce qu'il avait pu produire jusque là, courant le long de son bras pour venir l'engoncer dans une protection à la fois souple et plus solide que la majorité des armures. Il s'arrêta, stupéfait. Non pas parce qu'il avait finalement atteint son objectif : c'était, en soi, une bonne raison d'être surpris. Mais ce n'était pas la cause de son visage pantois. En réalité, c'était son propre haki qui l'avait surpris. Dans son élan plein de volonté, dans lequel il avait canalisé toute une myriade de raisons de se dépasser, une envie tenace de réussir et un souhait simple de briser ses limites, il avait totalement surpassé ses propres attentes. La plaque, habituellement présente jusqu'à son coude... dépassait désormais son épaule. Il la sentit vaciller alors que sa concentration se relâchait, disparaitre petit à petit. Serrant les dents, il reporta son attention sur la tâche qui l'attendait : tirer profit de cette découverte. L'armure se stabilisa et il resta ainsi, à observer son bras.
- Ça alors...
Reprenant une allure plus décontractée, sans pour autant relâcher la présence de son Haki, le Coffe eut spontanément une idée : si il était capable de le faire sur ce bras, alors il devait pouvoir reproduire ce résultat sur son voisin. Bizarrement, cela s'avéra assez aisé : comme si avoir accédé à une telle amplitude une première fois l'avait débloqué, l'avait libéré d'une certaine contrainte. Bientôt, ce furent ses deux bras qui furent engoncés dans la plaque noirâtre de fluide de l'armement, du bout des doigts aux omoplates. S'immobilisant, observant ses mains qui reflétaient la lumière du soleil dans une teinte oscillant entre noir pur et violet très foncé, il laissa la sueur perler sur son corps mis à l'épreuve pendant que son esprit travaillait à plein régime. Il était capable de recouvrir des portions de son corps bien plus importantes qu'il ne le pouvait autrefois... il sentit son haki se condenser avec bien plus de facilité qu'auparavant et ce, sur plusieurs localisations. Il avait réussi à protéger deux parties distinctes de son corps en une seule fois. Pourquoi ne pas envisager de faire de même avec une troisième partie ? Son esprit se focalisa. Il banda sa volonté dans une même direction, dans un seul but : recouvrir son abdomen de la même protection. C'est là que les choses se corsèrent : alors qu'il se confrontait à une difficulté croissante pour recouvrir ses abdominaux tout en maintenant la protection de ses bras, cette dernière commença à s'émietter. Lorsque son bas ventre fut recouvert, la défense de son bras droit n'en fut plus réduite qu'à une plaque dépassant avec peine son poignet.
- Allez... !
Un souffle plus tard, c'était reparti. Répétant le processus, il se heurta au même incident. C'était comme si certaines partie de son corps lui opposaient une farouche résistance lorsqu'il tentait d'étendre le fluide. Les tâches, irrégulières, finissaient par former une armure qui l'était tout autant. Sans parler de l'effort de concentration requis pour maintenir plus de quelques secondes différentes plaques en place. Finalement, il se retrouva à genoux en l'espace d'une dizaine de minutes, haletant comme il avait rarement pu le faire, la sueur de son front perlant dans l'eau claire du ruissellement dans lequel il observait son reflet. Si proche... il le sentait, il pouvait faire plus ! Mais alors pourquoi ? Il lui était impossible de forcer son haki à s'étendre, comme si son corps lui même lui refusait le passage. Si même son propre organisme commençait à lui refuser de progresser, alors Grand Line ne ferait qu'une bouchée de lui... maudites furent ces limites ! Les coudes tremblants, il toussa quelques instants avant de cligner plusieurs fois des yeux. Le prix physique de cet exercice était impressionnant... pendant un instant, il envia ce cours d'eau. Il envia l'eau qui circulait librement, sans chaîne. Il observa l'un des fragments rocheux qu'il avait envoyé là par mégarde être contourné savamment, ne perturbant pas le flux.
C'est alors qu'il réalisa.
Il s'y prenait mal, depuis le début. Il voulait forcer son corps à se recouvrir uniformément de Haki, d'une façon logique. Il forçait le fluide à se diriger dans un certain sens et se heurtait à ses propres barrières, sans obtenir de résultat. Il devait au contraire le laisser se répandre de façon naturelle, emprunter son propre chemin. Il devait le considérer comme une force à part entière dont il pouvait faire l'usage et non pas un outil à sa disposition. Soufflant lourdement, il se redressa sur ses genoux, puis se releva avec difficulté. l'entrainement n'était pas terminé. Il réitéra l'opération, cette fois en relâchant volontairement sa concentration vis à vis de la façon dont pouvait s'épanouir son Haki. L'exercice, d'abord déstabilisant, se révéla bien plus efficace : non content de ne pas perdre les plaques déjà générées, il parvint rapidement à en créer d'autres en diverses points de son corps ! La partie supérieure de son corps fut entièrement recouverte de Haki alors que le soleil était déjà bien descendu dans le ciel. Cette clairière qui l'avait vu s'entraîner toute l'après midi était bercée par un vent apaisant et une lueur scintillante. Courbaturé, épuisé, le Coffe persévéra néanmoins jusqu'à ce que ses pieds soient également englobés dans l'armement. Alors que la lune commençait à se lever, il s'écroula finalement sur ses genoux et se laissa aller dans l'herbe éparse, faisant fi de la sensation peu agréable des petits cailloux s'enfonçant dans sa peau. La respiration courte, il observa les nuages et le ciel avant de lâcher un grand sourire, puis un rire qui se transforma en véritable éclat alors que son cœur se gonflait d'une nouvelle conviction.