L’adolescente se réveilla d’un long sommeil. Seule dans une sorte de cage, elle ne réalisa pas de suite ce qu’il se passait autour d’elle. Le roulis présent sur un navire lui fit tout de même percevoir qu’elle n’était pas sur la terre ferme. Se levant plutôt difficilement, elle constata également qu’elle ne pouvait pas bouger beaucoup dans la mesure où ses bras et ses mains étaient bloqués dans son dos.

- Hummm… qu’est ce que ?!

Une mini crise de panique prit alors la jeune fille. Depuis très longtemps, elle n’avait pas repris sa forme originelle et avait toujours profité de son pouvoir de maudite pour se balader où elle le voulait. Elle avait rarement été attachée de la sorte même si ça devait déjà lui être arrivé une ou deux fois. Elle parvint tout de même à se reprendre suffisamment vite pour tenter de comprendre ce qui lui arrivait. De toute évidence, une réponse logique lui vint en tête : il s’agissait d’un jeu très connu de toute évidence. Le « capture the flag » s’était transformé en « capture the Malicia », c’était évident.

Seulement voilà… il y avait un problème : elle n’était pas Malicia ! Son équipe allait forcément perdre ! Il fallait à tout prix qu’elle prévienne quelqu’un sur le navire !

- S’il vous plait ! Je peux pas bouger en plus, c’est sur qu’on va perdre !!
- Mais tu vas la fermer ta gu…

Soudain, la porte de la cale s’ouvrit dans un geste brusque et coupa la parole à l’autre détenu. Un homme plutôt gras s’approcha de la cage de l’homme râleur dans un premier temps avant de cogner d’un terrible coup de pied. Il approcha sa tête suffisamment prêt pour qu’il puisse entendre mais parla suffisamment fort pour que tous les détenus puissent entendre également.

- Laisse la dame tranquille. Tu ne vaux rien toi… alors que elle… c’est notre pièce maitresse ! On en tirera bien plus que vous tous réunis.
- On va jouer au tir à l’arc ? C’est la deuxième épreuve ? Ou alors c’est du tir à la corde ? Y aura pas de cactus hein ?

Décidément, la petite Ginny était incapable de comprendre dans quelle situation elle se trouvait. Le geôlier se massa les tempes avant de soupirer devant la crédulité de la jeune femme. Il pesta à son tour pour devant cette jeune fille et expliqua avec véhémence qu’il ne voulait plus rien entendre.

Ginny mima une serrure sur ses lèvres et jeta la clé.

- Ok ! Roi du silence alors ?

Un facepalm général des prisonniers suivit instinctivement avant que le silence ne revienne. Ça bougeait en surface : le bateau s’était arrêté, la vente aux esclaves avait été annoncée, il ne restait qu’à préparer la soirée et la fête. Le plus beau lot allait sans doute rapporter gros aux hommes du navire… après tout… un changeforme ! Que peut-on ne pas faire avec ?

Que c’était merveilleux ! De toutes part, des personnes étaient arrivées pour faire un cordon de sécurité pour le débarquement des plus beaux lots. Ginny, enfermée dans sa cage, fut débarquée assez facilement : elle ne criait pas et ne cherchait pas à mordre ou à retrouver sa liberté. Tout au contraire, l’adolescente avait des étoiles plein les yeux. Tandis que deux gros gaillards transportaient sa cage vers le plus gros bâtiment, elle posa mille et une questions.

- C’est la queu leuleu ? Pourquoi ils sont contents les gens ? Pourquoi ils ont des papiers dans la main ? Pourquoi il n’y a pas de cactus ?

Certes, sa capacité à parler à outrance n’était pas des plus puissantes mais elle permettait de mettre tout le monde sur le carreau si elle ne s’arrêtait pas. Encore plus violents que les hakis de l’observation en éveil, les discours et monologues des Gratz avaient le don de procurer des sensations inoubliables à ceux qui les subissaient.

Les deux gardes commencèrent par ailleurs à grincer des dents en entendant la jeune adolescente qui refusait de la fermer.

Totalement surexcitée à l’idée de participer à une grande fête, Ginny exulta en voyant au loin un cactus.

- LA BAS !!

Bien que saoulés par le débit de paroles de la petite, le duo de hors-la-loi lâcha la caisse dans un bruit sans nom pour sortir leurs armes à feu et pointer en direction de l’endroit qu’avait pointé la jeune fille. Sous tension, les deux avaient été chargé de la surveillance de la petite et, bien qu’elle était particulièrement chiante, elle restait néanmoins une ressource particulièrement précieuse pour l’organisation et son patron.

La tension passée, le chemin de la petite continua sans anicroche. Installée dans une réserve sous la salle des ventes, elle se retrouva en cage avec une gamelle tel un animal. Pire encore, à côté d’elle se trouvait un macaque qui avait la faculté de savoir compter et en face d’un autre jeune homme à qui il manquait un bras et qui s’était renfermé dans le mutisme. De toute façon, dans le noir, il était assez difficile de voir quoi que ce soit. Ginny en avait même profité pour chanter allégrement avant de s’endormir paisiblement à même le sol de sa cage. La vente des esclaves aurait lieu le lendemain soir. Il ne restait que peu de temps d’un tant soit peu de liberté pour la jeune Gratz.

Le réveil fut un peu plus dur pour la jeune fille, elle avait faim et le singe criait à côté d’elle. Avec une moue plus tristounette qu’à l’accoutumée, Ginny regarda en direction de l’animal avant de soupirer.

- Tu n’aimes pas la nourriture qu’on te donne ?

N’attendant pas vraiment de réponse, la jeune fille soupira une nouvelle fois pour prendre sa gamelle et la donner au singe. Un peu différent, le plat serait peut être plus au gout de l’animal. Quelques secondes de silence se firent alors qu’un ventre vide gargouillait dans la pièce. Avec un sourire assez dur, Ginny semblait affamée malgré sa bonne action du jour.

Allez, bientôt… elle serait esclave définitivement.

Plusieurs hommes entraient et ressortaient de la pièce où était Ginny. Seules quelques minutes passèrent entre chaque action du groupe d’individu. Ces derniers semblaient prendre une cage avant de ressortir. Ginny ne s’en souciait pas vraiment : la pauvre petite était pliée sur elle même dans la douleur, la faim la tiraillait plus que de raison. Regardant l’animal à ses côtés, chaque fois qu’on lui apportait à manger, Ginny préférait lui donner. D’une gentillesse bien trop grande, la jeune adolescente en profitait même pour lui adresser son plus beau sourire. Pas sûr que dans le noir, quelque chose puisse encore être perceptible mais dans le doute, Ginny ne souhaitait que le bonheur de l’animal.

Une heure plus tard, c’est la cage voisine qui s’envola dans les bras des hommes tandis qu’une voix s’élevait finalement du macaque qui semblait partir.

- Vous n’avez pas le droit, bande de raclure, j’vous démonterai bandes de sales crevures de…

De nombreux noms d’oiseaux sortirent de la bouche du Zoan sous le regard émerveillé de l’adolescente. En temps normal, elle en aurait même ri aux éclats… aujourd’hui, elle avait simplement trop faim. Ginny était-elle sur le point d’être brisée ? Le macaque s’était servi d’elle pour obtenir double ration. Ce dernier avait bien vite compris dans quel merdier ils se trouvaient tous, profiter ainsi d’une telle personne ne lui faisait de toute évidence absolument pas peur et il ne semblait pas avoir le moindre regret.

- Prenez-la elle à ma place ! Allez quoi !
- Ferme-là !
- T’en fais pas ! c’est la prochaine !

Ginny ne comprit pas de quoi il retournait. Elle était la prochaine ? Elle aussi allait faire un tour de manège ?

En réalité, la vente d’esclaves avait déjà commencé, les quelques premiers lots étaient partis et la salle dans laquelle se trouvait la jeune fille était devenue bien vide en peu de temps. Ginny fit une moue que personne ne put voir : exprimant de la tristesse, la jeune fille aurait simplement voulu être avec quelqu’un. Elle ne pouvait plus parler à personne…

Heureusemeent pour elle, les hommes revinrent et c’est toute contente que Ginny leur fit un début de conversation.

- Vous savez ! J’ai connu un singe qui était super gentil ici, il parlait pas beaucoup mais il aimait bien manger et ça…

BANG.

L’un des hommes explosa une matraque sur la main de la petite Ginny pour lui faire comprendre de la fermer. Hurlant de douleur, les doigts rouges et en sang, la petite fille ne dit plus un mot avant d’arriver sur l’estrade.

- Pour notre dernier lot… et je sais beaucoup sont venus pour elle, je vous propose un changeforme ! Ne soyez pas timides sur les enchères !

Aveuglée, Ginny ne comprenait pas vraiment où elle se trouvait. Dans quelques minutes, elle n’aurait de toute façon plus besoin de s’en soucier…

- Maman ?

Ginny avait occulté tout ce qui avait pu se passer de la scène. Après tout, elle ne comprenait pas ce qui se passait autour d’elle et avait bien trop mal pour s’en occuper. Elle chercha à souffler sur son « bobo » comme lui avait appris le grand-père. Voyant que ça n’avait pas fonctionné, une larme coula le long de sa joue et elle tendit le bras vers l’objet de sa souffrance. Cherchant à taper la matraque qui lui avait infligé une telle douleur alors que l’homme se trouvait à plusieurs mètres d’elle. De la même manière, Ginny avait toujours été une grande fille mais quand « le bisou magique » ou « le souffle magique » ne fonctionnaient plus, il ne restait plus qu’à taper le méchant.

Une fois, la petite s’était fait particulièrement mal en se cognant l’orteil contre un meuble de la salle à manger. Nils était intervenu pour frapper le méchant meuble et dire « qu’il serait toujours là pour elle »… aujourd’hui, tout semblait bien différent.

Reprenant ses esprits, elle observa une dame s’approcher près d’elle. Elle pleurait, la pauvre ! Ginny, pas dans son état normal, commença à éprouver une certaine tristesse envers cette personne, sans savoir qu’il s’agissait là de sa nouvelle maitresse. Sa main guérit miraculeusement alors qu’elle touchait le visage de sa nouvelle mère, enregistrant par la même occasion son apparence sans que cette dernière ne puisse le réaliser. Sans doute lui serait-elle utile un jour…

Cependant, étant enfermée dans sa cage, la jeune fille appris bien ite sa nouvelle condition. Jouer au révolutionnaire semblait être plus compliqué que prévu mais ses nouveaux compagnons de jeux étaient sans doute dans la même équipe ! Après tout, on venait de la sauver des griffes de la matraque tueuse de mains non ?

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Il faudrait plusieurs jours à la petite Ginny pour s’en remettre et faire ses marques. Visiblement, ses ravisseurs avaient commencé à percer les secrets de la jeune jeune femme mais peu avaient compris quelle apparence était réelle. Ginny utilisait souvent l’apparence d’une jeune fille d’une vingtaine d’année mais n’hésitait pas à modifier son corps pour diverses expériences.

Cherchant à manipuler les gardes, ces derniers avaient convenu d’un mot de passe inconnu de la jeune adolescente pour être sûr de la repérer et ainsi lui octroyer un peu plus de liberté. Ginny avait le droit de se déplacer sur le navire et autour… en revanche, elle n’avait le droit de rien faire d’autre.

- Mais comment je fais pour retrouver mon cactus et mon papy moi du coup ?

Sa seule question restait éternellement sans réponse. Il ne restait plus qu’à espérer que tout irait bien pour la changeforme… peut être que Nils Gratz viendrait la chercher après tout…