La grande montagne de Red Line avait donc finalement été traversée par notre hors-la-loi accompagné d’un pirate dont il s’était servi pour la navigation. L’objectif désormais était d’atteindre l’île de Gaimon, un endroit réputé pour ses animaux étranges pouvant aisément susciter l’intérêt de certaines personnes. Pour le coup, ce n’était pas vraiment le cas de Ja’far qui préférait quant à lui récupérer cette île pour assouvir son désir de conquête : étendre le territoire de la Ligue des Assassins afin de pouvoir agir sur différents fronts plus facilement et plus rapidement. C’est pourquoi l’île de Gaimon n’allait pas être la seule en ligne de mire. Oh que non…

Et alors que le navire s’approchait de plus en plus de sa destination, l’Al-Ta’ir put remarquer la présence d’un second bâtiment maritime, un qu’il connaissait bien. Souriant quelque peu, il était dès à présent certain d’avoir retrouvé la trace de ses compagnons. Presque pressé d’arriver, notre héros fit signe au navigateur d’accélérer la cadence sous peine de se prendre une sacré dérouillée. Toujours aussi effrayé, le forban s’exécuta sans broncher, faisant littéralement de son mieux pour satisfaire les désirs de son tortionnaire. Et finalement, c’est après une dizaine voire une vingtaine de minutes que le navire put accoster quelque part, sur un « port » improvisé. Il était bien arrivé, après ces dures épreuves aussi bien mentales que physiques, Ja’far allait pouvoir reprendre sa vie normale. Mais avant de s’engouffrer dans la végétation de l’île, il y avait quand même une dernière chose qu’il lui restait à faire. Lançant un rapide regard en direction du navigateur, il s’approcha de quelques pas en relevant légèrement son bras comme s’il voulait lui serrer la main en guise de remerciement. Malheureusement pour lui, ce n’était pas le but. Loin de là. Dès qu’il fut à sa hauteur, l’Al-Ta’ir attrapa le crâne de son otage du jour et exécuta un mouvement brusque de façon à lui briser la nuque sans plus de cérémonie.

Le corps sans vie du pirate fut ensuite jeté à la mer comme un vulgaire déchet. Ce « problème » résolu, Ra’s al Ghul put enfin descendre du navire pour poser le pied sur l’île. Rapidement, il sentit deux présences qui lui était familière, il s’agissait de ses soeurs à n’en pas douter. Arborant un nouveau sourire – bien que très léger – Ja’far se mit en route en direction de celles-ci afin de pouvoir rejoindre les personnes en question au plus vite.

Le navire pirate sur lequel se trouvait le Leader de la Ligue des Assassins venait tout juste de débarquer sur l’île de Gaimon, le célèbre territoire des créatures hybrides étranges. Le forban qui avait servi de navigateur jusque-là était passé par-dessus bord, raide mort, et Ja’far s’apprêtait donc à descendre du pont pour s’aventurer dans la forêt où il avait pu sentir la présence de ses sœurs. Mais soudain, un petit volatile fit son apparition. D’après sa trajectoire, il semblait venir d’un peu plus haut, au-dessus de la forêt. Celui-ci fonça droit sur le hors-la-loi mais ralentit à quelques mètres de lui pour venir se poser sur le navire. Etait-ce une sorte de système d’alerte ? Non, impossible, pas sur une île exclusivement peuplée d’animaux. Regardant donc l’oiseau du coin de l’œil, l’Al-Ta’ir fut particulièrement surpris de voir un Den Den Mushi apparaître sur son corps comme par magie. L’œuvre d’un Fruit du démon ? Il ne voyait que cette option. S’approchant donc légèrement, il attrapa le volatile par les pattes pour ne pas qu’il puisse s’échapper – au cas où- et décrocha le combiné.

Alors qu’il prononça ses mots, il se mit en marche en prenant la direction d’où provenait la créature volante pour comprendre un peu mieux ce qui se passait sur cette île. Il fallait donc traverser toute la forêt en remontant, autant dire qu’il serait éventuellement possible de se perdre ou encore de changer de direction sans trop faire attention, en esquivant les divers végétaux se trouvant sur le chemin. Mais à sa grande surprise, une voix aigüe et féminine retentit non loin de lui, à peut-être quelques dizaines de mètres.

La jeune demoiselle se mit à courir en sa direction en remuant les bras dans toutes les directions et en pleurant toutes les larmes de son corps. Jasmine, quant à elle, la suivit, un peu moins enthousiaste mais c’était son caractère. Les voilà, les fameuses retrouvailles ! Heureux, Ja’far serra Shéhérazade dans ses bras tandis qu’il se trouvait toujours sur écoute via l’escargophone décroché. Arborant un sourire de satisfaction en regardant sa sœur, il prit la parole en désignant l’animal qu’il tenait entre ses doigts.

Les trois frères et sœurs de la famille étaient désormais réunis, à nouveau, prêts à atteindre leurs objectifs communs. Il allait donc falloir conquérir cette île, puis faire de même pour le reste d’East Blue. De cette façon, la Ligue des Assassins disposerait d’une bonne base de territoires qui pourrait par la suite s’étendre encore davantage sur Grand Line puis sur le Nouveau Monde. L’Organisation se devait d’être mondialement connue. Quoi qu’il en soit, les hors-la-loi s’étaient déjà précipités pour entrer dans la forêt verdoyante pour retrouver le maudit qui cherchait à communiquer avec eux. En arrivant, Shéhérazade et Jasmine avaient décidé de se faire accompagner par un vieil homme, un des membres de l’Organisation, mais pas vraiment réputé pour ses capacités martiales. S’il était là, c’était surtout pour son aptitude à communiquer avec les espèces animales. Sur une île comme celle-ci, cela pouvait être rudement utile.

Dans tous les cas, l’inconnu maudit, après un long silence de sa part, prit enfin la parole. Sans même avoir à se concentrer sur sa voix, il n’était guère difficile de comprendre qu’il était effrayé. Les bêtes étaient-elles vraiment si agressives que ça, en ces lieux ? Peut-être, mais même si c’était réellement le cas, c’était loin de faire peur à l’Al-Ta’ir, il avait déjà connu bien pire. Peu après, un loup se mit à hurler, comme s’il s’apprêtait à attaquer, faisant à nouveau frissonner le maudit à l’autre bout du fil. Cela fit d’ailleurs doucement rigoler Ja’far qui, pour le coup, avait tendance à considérer cet énergumène comme une chochotte. Mais bon, son fruit du démon pouvait être utile dans certaines circonstances, il y avait donc probablement quelque chose à faire avec lui… D’une certaine façon. Il était maintenant temps d’accélérer le pas. Faisant signe à ses sœurs et au vieil homme de le suivre, le hors-la-loi se mit à courir du mieux qu’il le pouvait en direction de la zone qu’il avait préalablement décidé d’atteindre. Toutefois, sur le chemin, il n’eut d’autre choix que de se mesurer à une meute de loups-béliers qui se réunit au fur et à mesure qu’il avançait, offrant donc de nouveaux adversaires.

Et finalement, au bout d’une petite dizaine de minutes à parcourir toute cette végétation, la Ligue parvint à son objectif. Le maudit était là, perché sur un pilier, tremblant de peur. Lui lançant un regard vif, Ja’far fut cependant interrompu par l’arrivée dynamique d’un second individu sortant tout droit d’on ne sait où. Celui-ci, dans un élan de colère, percuta violemment son bâton sur le crâne du hors-la-loi qui ne l’avait pas vu arriver.


Bartholomé, Gardien de la forêt

Regardant le vieillard en se frottant la tête tout en grimaçant, l’Al-Ta’ir répondit nonchalamment.

Qui était donc ce vieil homme sorti de nulle part et semblant apparemment si proche de ces créatures hybrides ? Etant donnée son apparence, il était difficile d’imaginer qu’il ait pu venir sur cette île seulement de façon temporaire, pour voir un nouvel environnement. Non, cela semblait être bien plus que ça. Son accoutrement, sa saleté, tout faisait penser à une sorte de naufragé en quelque sorte. Ja’far le regardait de fond en comble, cherchant à comprendre ce qu’il faisait réellement là et pourquoi il avait risqué sa propre vie en sortant de ces buissons pour le frapper. S’il était tombé sur quelqu’un de pire, sa vie aurait très bien pu s’arrêter dès son apparition. Mais l’Al-Ta’ir n’était pas comme ça. Sans pitié, oui, mais avec les traîtres de ce monde. Quoi qu’il en soit, très énervé, le vieil homme ne tarda pas plus longtemps avant de reprendre ses cris de hargne.

Cette voix… Elle semblait familière au vieillard de la Ligue qui, à priori, avait un peu de retard. Monter cette pente avec ses muscles fatigués n’était guère chose facile. Ainsi, lorsqu’il arriva enfin au même niveau que l’Al-Ta’ir et ses sœurs, il n’en crut pas ses yeux. Essayant tant bien que mal de se les frotter, d’alterner entre ouverture et fermeture, il en vint finalement à croire qu’il ne s’agissait pas d’une hallucination. Oui, c’était bel et bien lui.

En faisant cette découverte, le Gardien s’était calmé en l’espace d’une seconde. A vrai dire, il en avait même presque oublié la présence des hors-la-loi qui étaient censé lui faire face. C’était quand même fort comme coïncidence, mine de rien ! Finalement, ramener cet homme avait réellement été une idée brillante. Et grâce à lui, la conquête de cette île serait sans doute plus aisée, en espérant qu’un certain climat de confiance règne entre eux. En tout cas, Ja’far ne faisait même plus vraiment attention à la personne qu’il était venu rejoindre à la base, si bien qu’en levant la tête il s’aperçut bien vite que celle-ci s’était échappée de son pilier. Mais bien heureusement, le jeune homme à la chevelure blanche ne s’était pas enfui bien loin. Se tournant en sa direction, l’Al-Ta’ir se mit à marcher calmement jusqu’à atteindre sa position. De toute façon, il n’avait aucun moyen de s’échapper, Ja’far finirait de toute façon par le rattraper d’une façon ou d’une autre, alors autant économiser son énergie. Lui lançant presque un regard noir, il prononça quelques mots en l’attrapant par le col.

Alors que l’Al-Ta’ir s’était avancé en direction du jeune maudit pendant que les deux vieux amis discutaient de leur bons moments passés, il fut étonné de voir sa réaction. En effet, celui-ci tomba tout simplement dans les pommes dès qu’il fut attrapé par le col. Drôle de réaction pour un homme, bien que lui avait l’air plus froussard qu’autre chose. Mais… L’intégration et la formation de la Ligue serait peut-être en mesure de le changer psychologiquement, d’en faire un véritable Assassin. Encore faudrait-il qu’il survive jusque-là et qu’il ne parvienne pas à s’échapper. Quoi qu’il en soit, voyant comment les choses se passaient, Ja’far soupira et relâcha l’albinos d’un seul coup, le laissant donc retomber bruyamment sur le sol. Il fit ensuite signe à ses sœurs de s’occuper de lui de façon à ce qu’il soit incapable de partir même après son réveil. Shéhérazade n’aurait qu’à l’affaiblir en appliquant son savon sur tout son corps pendant que Jasmine le ligoterait avec ses fils.

De son côté, Bartholomé redevint sérieux lorsqu’il vit son chef revenir vers lui. Il expliqua tout simplement à son ami que l’Organisation était venue sur ces terres pour s’en emparer de façon pacifique, sans pour autant vraiment en changer l’environnement. C’était bel et bien l’intention de l’Al-Ta’ir qui comptait seulement rallier cette île au territoire de la Ligue pour pouvoir augmenter sa présence sur le globe. Les animaux seraient alors toujours en liberté, comme si rien n’avait changé, et le Gardien garderait sa place d’une certaine façon. Lui et Bartholomé seraient chargés de garder un œil sur l’île et de la protéger en cas d’attaque. Mais bien évidemment, ils ne seraient pas seuls. Plusieurs Assassins resteraient eux aussi en ces lieux.

Toutes ces paroles furent difficiles à entendre pour le Gardien qui à première vue ne pouvait imaginer une telle idée. Cependant, il avait confiance en son ami de toujours, et cela pesait clairement dans la balance. Par conséquent, même s’il prit quelques instants pour réfléchir à cette « proposition » qui n’en était pas vraiment une, le vieil homme accepta à condition que les animaux soient vraiment bien traités et non pas considérés comme des phénomènes de foire. Ravi d’entendre cette réponse, Ja’far s’approcha de lui et lui serra la main en guise d’accord.

Exécutant un léger mouvement de la tête pour acquiescer, le hors-la-loi salua les deux hommes âgés et se retourna pour prendre la direction du navire en compagnie de ses sœurs. Plusieurs Assassins allaient devoir en descendre pour rester ici et faire leur devoir.