Pousser quelqu'un à une profonde réflexion n'est pas une chose aisée, surtout quand il s'agit d'une personne à l'intellect certain. Nathaniel lui, le faisait sans même en avoir conscience. Tantôt il divulguait quelques bribes de son passé, tantôt il laissait échapper une pensée personne. Emmenant son interlocuteur vers un flot de pensées incontrôlables. Beaucoup de choses était inconsciente chez le pirate excentrique, mais de ce côté-là, rien n'avait changé depuis Hell's Water. D'ailleurs, il ne se rend même pas compte des choses qu'il pourrait accomplir s'il s'en donnait les moyens. Dominer le monde avec un couteau à beurre et une spatule en bois par exemple. C'était bien là le genre de pensée qui pouvait traverser l'esprit de ce garçon. Sourire à tout et n'importe quoi, c'est un effort qui demande une implication constante. Difficile au début, c'est devenu un réflexe avec le temps. Maintenant, il a toujours le mot pour rire et prend soin d'animer ses conversations. Sans jamais imaginer que face à lui, quelqu'un comme Akis puisse venir à réfléchir sur sa propre situation. Génie ou idiot ? Voilà la question qui a toujours tourmenté ceux qui ont appris à connaitre Nathaniel. Difficile de dire finalement, si c'est conscient ou non. Lui demander, compliquerait d'autant plus la situation. En conclusion : mieux vaut ne rien demander à ce jeune pirate. D'autant plus quand il s'est laissé aller sur la boisson et d'ailleurs, il s'assura que le reporter ait terminé son verre, pour remettre ça. Certainement la dernière pour aujourd'hui, compte tenu du temps qu'ils avaient passés à discuter. Comme on dit, le temps passe vite quand on s'amuse. La discussion avait commencé sur un débat, pour virer au personnel, avant d'échouer sur les femmes. Tout revient toujours à la gent féminine. Finalement, ne serait-ce pas elle qui contrôle les hommes plutôt que l'inverse ? Une question qui ferait frissonner plus d'un marin. Sur les mers, c'est pourtant bien connu que les hommes sont des plus machistes – même si grâce à des femmes de pouvoirs les mers se portent bien mieux. Un fait qui ne manqua pas d'inspirer la réponse de Nathaniel.
— Mon ami, un jour, les femmes domineront le monde, révèle-t-il en levant son verre tout juste déposé sur la table, tu crois peut-être que tu as le pouvoir sur elle, mais ce n'est qu'un leurre, pour nous endormir et garder le contrôle dans l'ombre, un rôle qui leur va si bien.
Impossible de dire si Nate est sérieux après avoir ricané à ses propres paroles. L'alcool a surement raison de sa raison, mais il a toujours pensé que les femmes jouaient un rôle majeur. Bien plus que celui des hommes. Cela vient certainement du milieu où il a grandi, mais quand il voyait les femmes autour de lui arracher le moindre secret en échange de faveurs. Il comprit très tôt que l'homme était bien faible face à elles. D'ailleurs, le jeune pirate se permit une remarque – très certainement poussée par l'alcool.
— Tu veux savoir ce que je pense ? Tu ferais bien de retourner auprès de ta dulcinée, avant que l'un des ces bellâtres de la Marine tente sa chance auprès d'elle… en route, allons-y ! Maintenant ! Il faut sauver la demoiselle des griffes de ces infâmes soldats !
Remonté, Nathaniel se lève un peu trop vite et s'emmêle les pieds. Une chance qu'il se rattrape à son siège, retrouvant sa place avec un ridicule déconcertant. Retrouvant inévitablement son calme après cette péripétie, il prend une nouvelle gorgée. Puis remet cet élan d'héroïsme au lendemain. — Plutôt demain, tu veux bien ? Là, je crois que je vais me rappeler aux bons souvenirs de Hell's Water et finir ivre sur cette table… sans mon vomi pour seule compagnie j'espère, murmure-t-il à lui-même.
La soirée risque d'être écourtée vu son état et pas sûr qu'Akis réussissent à tirer quelque chose de bon chez Nate maintenant. L'alcool délit les langues, mais il est peu probable qu'il trouve réponse à ses questions maintenant. Le jeune pirate a présumé de ses forces, tant sur l'alcool, que sur la fatigue. Voilà des semaines qu'il enchaîne les voyages. La vie de pirate, c'est loin d'être de tout repos. Surtout pour un pirate excentrique, à qui il arrive toujours quelque chose – même quand il débarque dans une ville pour un verre de vin.
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Mar 17 Juil - 15:08
« Nan mais ça va, c'est juste un verre... »
Itelzbulger, le vin qui vous veut du bien !
La conversation se mourrait, inexorablement, dans l'ivresse entêtante et les vapeurs rances de leur sueur. La fatigue et le voyage commençaient à avoir raison de ces deux fameux fêtards qui, obnubilés par leur discussion, n'avaient vu ni les minutes ni les gorgées s'enchaîner promptement. L'alcool s'en revenait d'autant plus fiévreusement et brusquement, pareil à la ruée d'un étalon guerrier indomptable, et percutait leurs crânes à tout rompre. Incessamment sous peu, Akis ne pouvait l'ignorer, il finirait par sombrer : il se sentait néanmoins encore et toujours le courage de repousser les frontières du raisonnable, imbibant encore davantage son être de cette liqueur chaude qui n'avait eu de cesse de maintenir l'euphorie des deux hommes à son plus haut niveau depuis que l'atmosphère s'était entre eux grandement apaisée. Le journaliste ne voyait plus, en face de lui, une menace potentielle qu'il était susceptible d'amadouer afin d'en tirer un profit colossal, le tout en usant des secrets qu'elle était susceptible de prémunir des sots et des inconséquents, non... Il voyait simplement un pirate certes un peu déroutant, surprenant, mais néanmoins tout-à-fait fréquentable. Sans doute Nathaniel avait-il, par le passé, pu commettre des exactions peu glorieuses ou assister à des scènes peu ragoûtantes. Il n'était probablement ni une figure de sainteté, ni le parfait samaritain qui, en tout temps et en tout lieu, donnait jusqu'à sa propre personne pour subvenir aux besoins d'autrui lorsque ceux-ci ne parvenaient pas à les assouvir par eux-mêmes... Il n'en était pas moins d'agréable compagnie, doué d'un don de narration que nul n'aurait pu nier et susceptible de livrer anecdotes croustillantes sur pensées vastes et philosophiques sans réellement jamais briller par son orgueil ou son égoïsme. Par ailleurs, le Tokushi lui-même n'était pas exempt de tout reproche : son habitude tenace à papillonner, lors même que son cœur était a priori déjà pris, cela avait tout d'une conduite pécheresse et condamnable, moralement parlant... En fin de compte, leurs deux individualités étaient singulières, et équilibrées : ils n'étaient certainement pas les personnes les plus dignes de reconnaissance ou d'admiration que ce monde ait jamais porté, mais ils n'en étaient pas délétères pour autant. Ils n'étaient ni des nuisibles, ni de glorieux héros qui pouvaient tout mettre en oeuvre afin de se pavaner la tête haute... Ils étaient simplement deux pauvres types qui tâchaient tant bien que mal de tracer leur route tout en essayant, bien sûr, d'y puiser une certaine joie de vivre.
Dans ces moments-là, le rédacteur du Global Seken Information ne pouvait pas s'empêcher de songer que le Décret Decima n'était finalement pas une si bonne chose. Il comprenait bien sûr la conduite jusqu'au-boutiste du Gouvernement Mondial qui préférait marginaliser les criminels de toute sorte de toute teneur afin d'éviter que leurs idées décrépites n'en viennent à corrompre les esprits de personnes innocentes mais influençables... Mais de braves types de l'acabit de Nathaniel ne méritaient pas franchement d'être jetés dans le même panier nauséabond que les tueurs en série, les violeurs et les pilleurs de la pire engeance. Savoir qu'il aurait lui-même pu être poursuivi pour la simple discussion naïve qu'ils avaient entretenu si un agent du Gouvernement l'avait par hasard estimé judicieux lui offrit un frisson de frayeur, qu'il étouffa bien vite en se souvenant qu'il était à l'heure actuelle en terrain révolutionnaire et que son métier, fort heureusement, lui permettait ce type d'écarts de conduite tant qu'il pouvait motiver sa présence sur l'île par un article quelconque, et tant, bien sûr, qu'il ne commettait aucun véritable impair ni aucun délit.
« Pffr, je lui souhaite bon courage. Je sais pas si les femmes domineront le monde, mais la mienne dominera Enies Lobby, tu peux en être certain... »
Akis n'avait prêté aucune attention aux cabrioles éméchées de son interlocuteur, se focalisant plutôt sur les souvenirs qu'il avait de sa chère et tendre, non sans oublier de s'offrir une rasade généreuse supplémentaire de l'alcool que Nathaniel lui avait si gracieusement offert. Aaah, Saka... On pouvait lui reprocher tout un tas de choses, sans nul doute : son impulsivité, déjà, son autoritarisme, ensuite... mais certainement pas un présumé libertinage. Elle était sans nul doute la femme la plus exclusive que le journaliste ait jamais pu côtoyer... Et c'était tant mieux, puisque c'était pour lui qu'elle se réservait toute entière. Sauf que parfois, ses réactions viscérales pouvaient s'avérer... Incommodantes. Cela faisait partie de son charme, toutefois : son fort caractère contribuait à la rendre d'autant plus marquante que son visage adorable et sa corpulence relativement frêle ne laissaient pas imaginer un tempérament aussi habituellement explosif. Fort heureusement, sur Enies Lobby, les œillades lubriques et voyeuristes étaient rares : les malotrus qui glissaient quelques injures ou quelques compliments à visée lascive aux jeunes dames également. Les Cipher Pol, qui conservaient l'absolue autorité sur l'île, n'étaient pas vraiment du genre à lésiner sur la traque de la petite délinquance... C'était un bastion de paix et de sérénité. Fort compréhensible puisque la majorité des habitants étaient liés aux forces de l'ordre, de près ou de loin. Il était toutefois arrivé qu'en voyage, les deux tourtereaux aient à croiser le chemin d'un marin graveleux qui offrait à Saka des sous-entendus patauds quant à la nuit sportive qu'il aurait pu lui faire passer... Il s'en mordait généralement les doigts, mais pas à cause du Tokushi, qui préférait faire profil bas et jouer la carte de la diplomatie lorsque les choses menaçaient de dégénérer. C'était bien la demoiselle qui, furibonde comme jamais, lui offrait effectivement un spectacle qu'il ne risquait pas d'oublier... Mais qui demeurait finalement nettement moins plaisant qu'il n'aurait pu l'imaginer.
« Elle a déjà failli en castrer un, je crois... Elle lui a filé un de ces coups de pieds... Son cri a été entendu jusque dans les quartiers voisins. Pauvre bougre. »
Ouep. Là-dessus, l'écrivain ne cultivait pas le moindre doute ni la moindre crainte : Saka lui était fidèle, et le resterait probablement... Tant qu'il ne la décevait pas ou qu'elle ne décidait pas de passer à autre chose, à tout le moins. Était-ce réellement un risque ? Il l'ignorait déjà lorsqu'il était sobre, alors ivre comme actuellement, il n'espérait guère être traversé d'une épiphanie... Tant pis. Il allait devoir se contenter de ces doutes, ce soir : malgré l'enthousiasme naissant de Nathaniel, il était hautement improbable qu'ils parviennent à rallier Enies Lobby en un seul jour ! Et puis, il avait tout de même un article à écrire, s'il ne voulait pas rentrer bredouille... Hors de question de laisser son amante assurer le loyer entier ce mois-ci ! Et pour cela, il allait devoir tout faire pour recouvrer une forme olympique au plus vite... Ce qui signifiait qu'il n'allait pas pouvoir prendre d'autre cuite avant un bon bout de temps. Avant la fin de son voyage, a minima. Non sans avidité, il acheva donc le verre que son collègue de beuverie lui avait rempli et le retourna, signalant de ce fait sa volonté d'en terminer ainsi. Il lutta contre un haut-le-coeur puis, maladroitement et d'un pas clairement peu assuré, entreprit de se lever. Il avait envie de commander quelque chose à manger, mais aussi et surtout de s'assurer qu'il restait une chambre vierge, ici bas, à honorer au plus vite... Son corps tout entier réclamait éperdument un repos régénérateur, et ce dans les délais les plus brefs. Seul de la bonne boustifaille pouvait lui permettre de rester relativement dynamique pendant plusieurs minutes, il commençait à s'en rendre compte...
« Je vais aller voir au comptoir avant de... M'évanouir. Pour bouffer. Tu restes sur Micqueot encore longtemps ? Je devrais en avoir pour quelques jours, moi... »
Il n'osait espérer que lui et Nathaniel deviennent finalement les meilleurs amis du monde, mais l'idée de le côtoyer encore un peu avant le grand départ avait forcément de quoi le séduire. Il était de bonne compagnie et puis, un brin de discussion n'était jamais de refus, avec ou sans picrate pour l'arroser jusqu'à plus soif... Si le pirate semblait réceptif à cette invitation, ils pourraient à titre d'exemple ambitionner de se retrouver le lendemain à la même heure et à la même table, même si le Tokushi risquait fort de lever le pied au niveau des consommations alcoolisés. Il n'allait pas jeter son souhait de tempérance aux oubliettes de si tôt, après tout...
L'alcool et les paroles avaient coulées à flots, mais sans surprise, c'est du journaliste qui retrouva la raison. Ivre et incapable de se lever, Nathaniel était prêt à remettre ça jusqu'à s'évanouir sur cette table. Pourquoi pas ? Après tout, c'était loin d'être la première fois et surement pas la dernière. La fin était proche pour lui, qui le comprit aisément quand seulement la moitié des mots venaient jusqu'à ses oreilles. Heureusement, il avait encore quelques restes qui n'avaient pas été ravagés par le raisin. Réussissant par miracle, à reconstituer ce puzzle. Il ignorait tout de cet homme, si ce n'est son nom, Akis. Au fil des verres, plus qu'au fil de la discussion, il en a appris un peu plus sur ce reporter. Le plus intéressant, reste néanmoins cette ultime révélation. Sans conteste la plus croustillante, puisqu'elle laissait entrevoir le tempérament explosif de la femme qui était parvenue à ravir le cœur de ce dragueur invétéré. Le pirate excentrique appréciait déjà cette inconnue, puisque sur ce point, elle était semblable à sa mère – du moins ce que laissait présager les rumeurs. Explosive ça, Moïra l'était et elle l'avait prouvé au meilleur des moments. Néanmoins, Nate ne se souvient pas qu'elle ait manqué de castrer un homme et cette femme à de quoi faire de l'ombre à l'une des légendes de la piraterie – bien que poussiéreuse après tant d'années. Une ultime rasade pour finir ce qui reste de son vin chaud, comme pour rendre hommage à ces femmes de caractère. Nul besoin de paroles en pareil instant, ce geste symbolique est bien plus parlant. Tandis que l'auberge commençait à tourner pour Nathaniel, il vit Akis se lever. Pour manger ? Voilà une excellente idée, ne serait-ce que pour éponger l'alcool. Sauf que le jeune pirate n'était pas certain de pouvoir avaler quoi que ce soit de plus. Pourtant, il n'était pas le dernier pour manger ou plus exactement, se goinfrer. Parfois privé de repas, c'est très souvent qu'il ne mangeait pas à sa faim. Autant dire que maintenant, il se rattrape et plutôt bien.
— Ne le dis à personne, mais je suis un pirate, alors je reste ici autant que je veux, murmure Nathaniel avant de ricaner, va pour quelques jours ! Et si on fêtait ça avec un dernier petit godet ? Ensuite promis, filet… non sifflet !
Galvanisé par la perspective de remettre ça, Nathaniel se leva et cette fois, tomba sur le sol sans pouvoir se rattraper. Allongé sur le dos au milieu de la crasse, il avait les yeux sur un plafond qui tournait. Le vin semblait prêt à ressortir, mais heureusement, ce n'était qu'une fausse alerte : ce qui se traduisit par un rôt plutôt bruyant. Tout juste ce qu'il faut pour lui ouvrir l'appétit – ce qui est soit est assez… bizarre ou dégueu ou les deux.
— Tu sais quoi ? Demain, on va y aller doucement sur l'alcool… je ne sais pas toi, mais moi, je crois que j'ai eu ma dose de vin pour l'année !
Hilare toujours allongé sur le sol, Nate se roula sur le côté pour se relever. Titubant de plus belle, il parvint miraculeusement jusqu'au comptoir pour s'accrocher aussi fermement qu'il le put. Le voilà maintenant face au tenancier, visiblement peu enjoué de voir deux poivrots dans son établissement. Sauf que dès lors que ça parle d'un repas et d'une chambre, il retrouve le sourire. L'argent, c'est l'argent, il guérit tous les maux.
— Mon brave, c'est comme ça qu'on cause sur Enies Lobby, non ? Dit le jeune pirate qui s'éclaircit la gorge avant de reprendre, mon brave, j'aimerais festoyer avant de gagner ma chambrée pour la nuit… apporté moi donc de quoi me sustenter, de la viande par exemple et une petite chopine de rhum pour faire glisser le tout je vous prie !
Bien meilleur narrateur qu'acteur, Nathaniel surjouait la scène avec des mimiques digne d'une comédie burlesque de seconde zone. C'était suffisant pour le faire rire, sans imaginer une seconde, pouvoir froisser son camarade du jour. Disons que c'est de bonne guerre, Akis n'y a pas été de main morte avec les clichés sur les pirates. Nate ne fait que lui rendre la politesse, surjouant pour ne pas s'attirer les foudres de ce journaliste qui était de si bonne compagnie. Jamais il ne pensait trouver pareil individu en posant les pieds sur cette île. Persuadé que le vin, ce produit souvent de paire avec le luxe, attirait la bourgeoisie plutôt que le commun des mortels. Une rencontre due au hasard, mais qui semblait offrir quelques opportunités. Amitié, alliance ou peut-être même complots visant à dominer le monde à coup de beuveries et de fêtes mémorables. Enivré et visiblement fatigué, le pirate excentrique ne comptait pas faire de vieux os. Le repas terminé, il irait dans les bras de Morphée. Bercé par les effluves d'alcool qui lui rappelleront surement Hell's Water. Un lieu qu'il compte bien présenter à Akis, si un jour il a l'occasion d'y retourner – et si leur complicité devant un verre poursuit dans cette voie.
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Sam 21 Juil - 18:43
« Nan mais ça va, c'est juste un verre... »
Itelzbulger, le vin qui vous veut du bien !
Ils parvinrent tant bien que mal jusqu'au comptoir, et plutôt mal que bien pour Nathaniel qui semblait, non content d'avoir forcé la dose d'alcool, précipité drastiquement son ingestion de sorte qu'il en souffrait dorénavant des effets secondaires néfastes. Son sens de l'équilibre avait été brutalement happé par les breuvages qui s'étaient succédés et Akis commença à songer qu'il valait mieux, de son côté également, joué de prudence et conserver des appuis aussi stables que possible. Ils avaient quasiment bu autant l'un que l'autre et le journaliste, s'il avait l'habitude de s'offrir quelques rasades alcoolisées lorsque l'occasion se présentait, n'était pas forcément un monstre en terme de tolérance et de résistance à ces décoctions sournoises. Allait-il finir par s'effondrer raidement ? Peut-être que le liquide ingéré en viendrait finalement à l'aviner plus tardivement que son collègue puissamment atteint... Peut-être, également, qu'il avait entretenu son estomac dans un bien meilleur état. Après tout, l'envoyé spécial du Global Seken Information, en tant que civil, disposait généralement du luxe des voyages organisés durant lesquels on lui assurait le couvert. Même lorsqu'il avait à se rendre sur une isolée, à l'instar de Micqueot, ses supérieurs garantissaient bien sûr l'assouvissement de ses besoins les plus élémentaires ou lui permettaient d'user de cagnottes directement prévues à cet effet. Nathaniel, en tant que pirate, devait en revanche songer de lui-même aux réserves qu'il était tenu d'entretenir afin d'assurer sa survie sur les mers houleuses qu'il avait à traverser clandestinement... Le Tokushi imaginait donc que son pauvre interlocuteur ne mangeait probablement pas aussi souvent que lui, et à tout le moins pas aussi richement ni aussi copieusement. Voilà qui, également, pouvait expliquer l'écart de leurs conduites respectives... Restait que le forban n'en avait pas froid aux yeux pour autant : et pour cause, il atteignait tout juste le comptoir qu'il réclamait une nouvelle boisson afin d'accompagner son repas, non sans tâcher de se moquer allégrement des mœurs présumés d'Enies Lobby. Sa naïveté et sa méconnaissance firent ricaner le civil qui commanda promptement à son tour, demandant simplement un repas copieux et conséquent afin de remplir son estomac, avant d'accorder à son interlocuteur la rétorque qu'il méritait pour cette taquinerie extravertie.
« Nan, c'est une île militaire, les gens parlent... Comme toi et moi. Y a pas de bourges, à Enies Lobby... Des riches, oui, mais pas des bourges. Désolé de briser tes fantasmes... »
Il gloussa à son tour puis, d'un air absent, déposa son regard sur le pirate roux qui se tenait à ses côtés. Ce dernier aurait-il effectivement pu évoluer dignement et sereinement dans un environnement tel que celui d'Enies Lobby ? Il était en tout cas assez évident qu'il n'aurait pas pu s'y épanouir, compte tenu du sort qui était réservé aux criminels, sans distinction quant à leurs rêves, ambitions et allégeances diverses et variées... Cela étant, au début de leurs échanges, Nathaniel avait prouvé qu'il était capable, malgré une absence flagrante de sobriété et des habitudes pugnaces à la flagornerie bon enfant, d'éconduire une discussion banale dans de bonnes conditions sans se montrer ni outrancièrement grossier, ni particulièrement incommodant. Et Enies Lobby, précisément, n'était pas Mariejoa : on pouvait tout-à-fait y demeurer en n'étant ni plus ni moins qu'un quidam quelconque, tant qu'on savait y tenir sa langue dans sa poche, à l'instar des nombreux militaires qui y séjournaient quotidiennement. Nul besoin de veiller constamment aux mots que l'on formulait, à aseptiser sa pensée ou à prendre des pincettes pour ne froisser personne : tant qu'il n'y avait pas d'agression ou d'hostilité manifeste et belliqueuse, les discussions demeuraient tranquilles et tout-à-fait banales, finalement. Y compris, parfois, dans des cadres plus professionnels, comme au journal pour le compte duquel Akis avait été envoyé jusqu'ici, d'ailleurs...
« Je suis bien d'accord, pour demain, ouais... Et bien dormir, cette nuit, aussi. Y a jamais rien de plus confortable qu'un vrai lit douillet... »
Il était parfaitement capable de s'assoupir en haute mer, y compris lorsque le vent mugissait, lorsque les cordages claquaient furieusement et lorsque les vagues vrombissantes secouaient les navires avec une impétuosité croissante... Mais de là à y trouver un repos absolu, profond et tout-à-fait rassérénant, c'était tout de même autre chose. Les tangages incessants, il n'en finissait plus de les trouver hautement désagréable à mesure que sa présence sur un navire s'éternisait pour une raison quelconque. Et puis, le manque de place à bord des cargos marchands qu'il empruntait parfois le conduisait bien souvent à s'allonger entre deux caisses ou sur un hamac étendu dans les cales inférieures... Entre l'humidité, le bruit et les vibrations qui le secouaient sans arrêt, il avait toutes les raisons du monde de préférer un lit fermement ancré sur ses appuis et stabilisé entre les murs bien chauds d'une auberge hospitalière. Nul besoin d'une propreté éclatante, d'un luxe somptueux ou d'une couche à baldaquin d'une taille insolente : il lui suffisait parfois d'un matelas mou et d'une couverture poussiéreuse pour s'endormir instantanément et se précipiter jusqu'au royaume des soupirs. Cette pensée suffit d'ailleurs pour déformer son visage d'un désir spontané d'y faire un tour : malheureusement, leurs assiettes arrivaient tout juste, tant et si bien qu'il se fit violence afin de réprimer cette fatigue qui s'accumulait encore quelques minutes durant. Il n'en bailla pas moins fermement puis, d'un air pâteux et incertain, lorgna l'assiette qu'on lui attribuait en songeant qu'il n'avait j'avais goûté à ce plat, qui semblait typique, mais que cela lui conviendrait sans nul doute. Il n'avait pas les moyens de faire la fine bouche, et ce ragoût avait l'air d'être un plat des plus raffinés, compte tenu de la faim qui lui dévorait les entrailles et l'enjoignait d'ores et déjà à engloutir ce qu'on venait tout juste de lui servir...
Son avidité requinquée, donc, le poussa à attraper sa cuillère et à la plonger intrépidement dans ce plat carné afin d'en engloutir une bouchée titanesque dans la foulée, appréciant sans plus tarder la sensation de cette matière consistante qui s'en allait rejoindre la mare d'alcool que son estomac peinait à évacuer dignement. Il réitéra bientôt ce geste rageur avec un appétit redoublé puis, finalement, entre deux mastications forcenées, adressa à Nathaniel une autre question un peu naïve dans le seul but de prolonger quelque peu la discussion qu'ils avaient déjà faite constructive et didactique.
« Au fait, t'as de quoi payer ? Si non, te gêne pas, hein. C'est ma boîte qui paye, pour moi, donc je peux bien glisser un repas de plus dans la note, ils n'y verront que du feu... »
Et puis de toute façon, le Global Seken Information était un journal puissant financièrement parlant, qui n'était pas vraiment à un repas près. Tant que les dépenses des journalistes n'étaient pas excessives, les patrons les prenaient en charge sans renâcler... Même s'il arrivait, parfois, que des notes jugées non impératives soient finalement ponctionnées sur le salaire de l'intéressé. Restait qu'on ne l'avait jamais réellement emmerdé à ce sujet, en tout cas pas pour de la nourriture : il avait choisi une auberge bon marché, et c'était déjà un bon point, là où la majorité de ses collègues enchaînaient les tablées les plus prestigieuses sans la moindre décence...
La soirée semblait loin d’être terminée pour les deux complices de beuveries. D’ailleurs, Akis se laissait lui aussi aller à quelques taquineries bien choisies. Pour le plus grand plaisir de Nathaniel, persuadé qu’il n’était pas pour rien dans le comportement du journaliste. Imaginant même qu’il avait réussie à le dérider quelque peu. Il n’est pas le premier à surpasser les craintes vis-à-vis des pirates ou de Nate. Bon nombre avant lui se sont laissés emporté par l’enthousiasme de ce garçon. Déjà sur Hell’s Water, il était connu pour sa joie de vivre et son entrain constant. Toujours le mot pour rire, il avait le don pour animer les soirées glaciales de cette maudite ville. Pourtant, tout le monde savait à quel point la vie n’avait pas été facile pour lui – même parmi ses ennemis. Finalement, qu’on le déteste ou qu’on l’aime, le pirate excentrique fait toujours sensation. Repas servi, Nathaniel lorgna avec envie sur sa chope de rhum. Précieux nectar qu’il préférait de loin à ce breuvage fruité qui avait eu raison de lui. Il aurait certainement pu aisément ingurgiter deux fois plus de boissons, si ça avait été du rhum. La faim l’emporte sur tout le reste et c’est avec envie qu’il se jette sur son assiette. Bien sûr, en tant que cuisinier, il ne peut s’empêcher d’avoir un regard critique sur ce qu’il mange. La sauce par exemple, manque d’épices. Quant à la viande, elle est légèrement trop cuite. Néanmoins, cela ne l’empêche pas de trouver le repas très bon. Atteignant déjà la moitié de son assiette quand, Akis, l’interpelle. Terminant sa bouchée aussi rapidement qu’il le peut, le jeune pirate donne de léger coup sur son thorax pour faire glisser tout ça. Saisissant ensuite sa chope, pour une rasade bienvenue.
— Quel pirate refuserait qu’on lui paie un repas ? S’amuse Nate qui affiche un large sourire, t’en fais pas, je ne roule pas sur l’or, mais je peux m’offrir ce repas et j’y tiens, je m’en voudrais de profiter de la bonté d’un… ami.
Si Nathaniel hésita, c’est bien sûr par ce qu’il ne savait pas comment Akis allait accueillir la nouvelle, mais surtout, parce qu’il était tenté de placer une petite blague. Préférant retrouver son sérieux, grâce à ce copieux repas qui avait au moins le mérite d’éponger l’alcool. Le pirate excentrique retrouve brièvement sa sobriété – rapidement assommée par quelques rasades de rhum. Il se plait à dire que ce sont ses années de diète à manger un quignon de pain par jour, qui lui ont valus un métabolisme aussi efficace. Assiette terminée en un temps records, Nate boucle ce repas avec le fond de rhum qu’il lui reste. La taverne tourne un peu moins autour de lui et il est un peu plus calme, mais les restes sont tenaces. Bien que la fatigue ait finalement pris le dessus sur l’alcool. Fouillant au fond de sa poche, il en sortie assez de Berrys pour payer son repas – avec un petit supplément.
— Pour la gêne l’ami, lança Nathaniel avec un sourire amical à l’attention du tavernier, Akis, tu es de bonne compagnie je l’admets, mais je vais profiter de ce moment de répit pour aller me coucher, mais avant ça…
Affichant un sérieux glacial et effrayant, le pirate excentrique saisit une lame qu’il plante sur le comptoir avec force. Fixant longuement le journaliste. Jouant son rôle aussi bien qu’il le peut malgré l’alcool qui lui fait encore tourner la tête. Nate joue les pirates sanguinaires : un rôle qui est loin de lui aller.
— Faisons un pacte de sang pour sceller notre amitié et ensuite, pillions la ville, une réplique qui ne manque de faire hurler de rire le jeune pirate qui ne tarde pas à s’expliquer, merci Akis, tu es un chic type tu sais ? À toi tout seul, tu as redoré le blason de ces maudites mouettes et quand je serais le pirate le plus célèbre des mers, je t’accorderais une interview exclusive !
À sa façon, Nathaniel essaie de remercier le journaliste de ne pas voir que le pirate sanguinaire chez lui. Bien sûr, il lui suffirait de quelques anecdotes sanglantes pour faire fuir le rouquin et encore, rien n’est sûr. Positif, malgré l’alcool et la fatigue qui lui font piquer du nez, il préfère s’arrêter là et se retirer sur cette réplique. Habitué à dormir sur des cordages, comme sur le paille, le pirate excentrique est bien content de trouver un lit pour cette nuit. La journée, riche en émotions, a surtout été noyée dans l’alcool. Au profit d’une rencontre bercée par le hasard et qui, contre toutes-attentes, révèle une entente étonnante.
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Mar 24 Juil - 11:09
« Nan mais ça va, c'est juste un verre... »
Itelzbulger, le vin qui vous veut du bien !
Sa générosité et sa bonté, quoique remerciées, furent évincées poliment par le pirate qui refusa qu'Akis lui paye ses consommations. Cela contribuait à lui offrir une dimension plus humaniste, envers et contre l'aspect bourru et revêche dont il s'était sporadiquement couvert. En fin de compte, il était plus un jeune gars paumé qu'un réel pirate, et il n'obéissait en aucun cas à tous les clichés qu'on véhiculait au sujet de ces criminels sans foi ni loi. Quel genre de pillard égocentrique, après tout, aurait refusé un cadeau aussi gracieux, spontané et désintéressé ? Respectueux vis-à-vis de la pudeur de son interlocuteur, l'écrivain en herbe fit en sorte de ne pas insister davantage et reporta sa pleine attention sur sa propre assiette, qu'il entreprit de vider promptement. Ce repas traînait en longueur malgré son appétit apparent et assumé, et pour cause : son estomac déjà blindé par les liquides ingurgités ne cessait de manifester son mécontentement face à l'affluence massive de viandes et de sauces généreuses et grasses au possible. Conscient toutefois qu'avaler quelque chose de consistant était le seul moyen qu'il avait à sa disposition pour éviter de passer l'une des pires nuits de son existence sempiternellement jonchée de péripéties en tout genre, le journaliste se fit violence et persista jusqu'à n'en plus vouloir. Il délesta alors quelques piécettes de sa propre bourse à son tour, puis reporta son attention sur Nathaniel qui, de son côté, avait également terminé de vider son auge. Là-dessus, le forban se permit quelques palabres supplémentaires, dans un premier temps de bien mauvais augure : encore étourdi par l'alcool et défait par la fatigue accumulée, le Tokushi fut naïvement berné par la proposition soudaine de son homologue roux mais il n'eut pas le temps de s'angoisser réellement que son camarade se fendit d'un rire sincère et bruyant, comme si son ivresse ne lui permettait plus d'assumer ses facéties de bout en bout. Soulagé, de plus belle, le rédacteur du Global Seken Information amena sur ses lèvres un sourire enthousiaste et radieux puis, tout en demandant une chambre au tenancier de l'auberge, entreprit de répondre au don chaleureux de son interlocuteur et aux quelques compliments que ce dernier avait pu lui glisser.
« Journaliste et marine, tu fais un amalgame dangereux. J'espère que tu n'essayeras jamais de donner une interview à un colonel... Enfin, merci. C'était plaisant de discuter un brin avec toi. Et évite de proférer des promesses avec cette légèreté, j'ai une excellente mémoire ! »
Une note d'humour pour finaliser leurs échanges suffisait amplement et, tandis que le tavernier lui tendait la clé de sa propre chambre, Akis s'éclipsa poliment, non sans accorder un ultime signe de la tête à son compagnon d'infortune. Il s'en remonta jusqu'à la chambre qu'on venait de lui attribuait, suivant docilement les indications du patron, trop empressé à l'idée d'enfin jouir d'un repos salvateur et bienvenu, et parvint bientôt à la porte qu'il ouvrit sans plus tarder. Il s'engouffra dans la pièce et, sans même prendre la peine de jeter le moindre regard au mobilier, s'élança à pieds joints sur le lit, encore vêtu, le ventre plein et la tête vide. Il avait senti son énergie se disperser malicieusement tandis qu'il grimpait les marches avidement et, dorénavant, la douce chaleur des draps qui se trouvaient sous sa face le conviait plus royalement que jamais à se laisser porter sereinement jusqu'aux bras de Morphée. Si c'était là son souhait le plus ardent, ses pensées divaguèrent néanmoins, espiègles, durant quelques secondes qui se conglomérèrent bientôt en minutes. Cette soirée avait eu un quelque chose d'unique et d'insolite, malgré sa teneur, a priori, relativement usuelle. Nathaniel n'était clairement pas le genre de profils typique que le journaliste côtoyait quotidiennement... Il était étonnant, et ce sous plus d'un aspect !
Non sans un grognement rauque et sonore, le journaliste entreprit alors de se rapprocher des coussins sur lesquels il vint écraser son faciès tout en se plaçant sur le flanc. Cette soirée l'avait remuée, et ce à plus d'un titre : désormais, c'était le visage de Saka qui venait hanter ses pensées. Que faisait-elle, à cet instant précis ? Difficile de l'imaginer... Le forban, de son côté, avait semblé enjoindre l'envoyé spécial à se montrer plus attentif vis-à-vis des besoins et des envies de sa conjointe. Ce dernier ne savait, avec le recul, qu'en penser précisément. D'une certaine manière, il comprenait bien la pertinence des propos du pirate : c'était stupide de renoncer à ce qui avait, par le passé, pu forger son bonheur, ou à tout le moins y contribuer. Certes, sa compagne n'était pas parfaite et certes, son propre métier l'amenait à sillonner les mers plus que fréquemment, la délaissant et se précipitant dans la plus amère des solitudes de manière quasiment constante... Mais le Tokushi avait accepté ce travail en toute connaissance de cause, et son devoir nomade n'était pas du fait que sa chère et tendre. De surcroît, toutes les pimbêches qu'il croisait et qu'il tâchait de courtiser lors de ses innombrables voyages n'arrivaient pas à la cheville de son amante, et il le savait pertinemment. Pourquoi, dès lors, ne pouvait-il pas s'empêcher de céder à ses pulsions malignes et libidineuses ? Il eut un nouveau soupir et se mit à songer que l'alcool avait finalement eu raison de sa perversion. Si tel était le cas, elle resurgirait au petit matin, au même moment qu'un mal de crâne qu'il pouvait d'ores et déjà pressentir... Puis Akis ne pouvait pas s'empêcher de penser que cette escale sur Micqueot, quoi qu'agréable et distrayante pour l'heure, ne le changerait jamais réellement jusque dans ses fondations. Il était incorrigible : c'était probablement un petit peu ce qui contribuait à son charme, et à le construire en tant qu'individualité... Finalement, ses songes moururent lorsque son souffle s'apaisa. Ses paupières closes ne s'ouvrirent plus jusqu'au petit matin et il s'offrit gracieusement le repos régénérateur dont il avait amplement besoin. Quelque chose lui disait qu'il avait grand besoin de recouvrer ses forces, et que cette première expérience insolite et amusante ne serait ni la seule, ni la plus orageuse qu'il aurait à affronter...