Konan Harishigawa "Le Destructeur" & Cristal Suiga
Maître de Himitsu Shima & Présentatrice de la Salle de Combat
Les gradins étaient plongés dans la pénombre, s’étendant sur presque cinq-cents mètres de l’est au nord, du nord à l’ouest du ring dans des dimensions qui semblaient astronomiques. Quelques loges étaient situées en hauteur et offraient une vue imprenable, tenues par des systèmes de traction qui permettait de les faire bouger dans la salle, de sorte à les approcher ou à les éloigner, petite création personnelle de Konan durant l’année qui venait de s’écouler. Elles étaient réservées à une élite qui pouvait se permettre de les louer bien sûr, mais la salle de combat de Himitsu Shima était loin de manquer de spectateurs.

Les lieux étaient noyés dans une pénombre constante, à l’exception de la scène de spectacle entourée de cordes censées empêcher les combattants de sortir du ring. Avant de trouver le bon alliage pour celles-ci, il avait cependant fallu de longues années de tests. Combien de combats avaient fini dans le public ? Combien de boxeurs, pugilistes avaient été coupable de la mort d’une trentaine de personnes en simultanée ? C’était ce frisson qui rendait ce lieu si spécial. Pour éviter ce type d’accidents, le gérant de la salle de combat avait décidé d’engager plusieurs experts en Haki de l’Armement qui venaient recouvrir les cordes quand un combattant trop expérimenté envoyait l’une de ses victimes contre les cordes. Ainsi, même si elles pliaient, elles n’avaient pas cédé depuis huit mois.

Jusqu’à ce soir-là. Le poing du Harashigawa s’était enfoncé dans la cage thoracique de son adversaire. Celui-ci s’était mordu les joues en sentant son corps se faire expulser à une vitesse faramineuse. Les cordes du ring cédèrent, suffisant à peine à réduire l’impact qui eut lieu quelques secondes plus tard dans la foule où une noble qui n’avait pas eu les moyens de se payer la cabine perdit l’usage de ses jambes suite à l’impact.

Le public hurla de joie, alors que la présentatrice s’élançait en direction du champion, lui prenant le bras pour le lever en l’air :

- Nous avons un vainqueur ! Ce soir, le maître absolu de la Pègre a encore une fois prouvé sa valeur ! Un tonnerre d’applaudissements pour Konan !

Le mafieux observa la salle dont les hurlements demandaient encore plus de sang. Son poing recouvert de Haki était enfin prêt à passer au stade suivant. Il s’était entrainé d’arrache-pied pour développer ses ressources, dans le seul et unique but de tuer celui qui s’était proclamé et imposé comme son ennemi juré ces dernières années : Ren Tao. Le simple fait de le savoir en vie le faisait rager. Il avait encore perdu du terrain ces dernières semaines, suite à une action étrange des Shadow Ghosts qui avaient pris la plupart de ses commerces sur Shabaody, Pucci et Water Seven, sans qu’il ne puisse intervenir. Il sentait que leur progression était trop rapide, et que cela cachait quelque chose, alors il avait décidé de redoubler d’efforts.

Spoiler:

Descendant de sa loge en ouvrant la fenêtre, la silhouette élégante de Niria s’écrasa sur le milieu du ring. Certains crurent qu’il s’agissait du prochain challenger et se mirent à la huer pour son apparition non annoncée, mais ils furent rapidement calmés lorsqu’un ongle vint se planter juste à côté de leur carotide. Des frissons parcoururent l’assemblée. Cette femme était arrivée sur Himitsu Shima quelques mois auparavant, et avait investi la villa d’une ancienne membre de la Pègre après l’avoir tuée. Elle avait depuis fait profil bas, mais semblait ce soir s’ennuyer :

- Mon cher, j’ai l’impression que tous les soirs se ressemblent.
- Dégage, je ne t’ai rien demandé. Et arrête de chourrer les loges des invités.

A peine eut-il fini de parler que le corps d’un noble tomba dans la foule, suivi de sa tête. Tous reconnurent le fameux Prijet Volodi, l’une des têtes de file du Constantinisme de Grand Line. Riant simplement face à cette remarque vaine, elle fit frissonner la présentatrice quand elle se tourna vers celle-ci.

- Nous… nous allons à présent pouvoir accueillir un nouveau groupe ! Merci à vous pour votre entrée en scène fantastique, Dame Niria !
- Ohoh, vous savez m’amadouer, dirait la femme en se sentant valorisée par le titre offert ici.

La présentatrice annonça les nouveaux challengers alors que l’Exterminatrice des Révoltes quittait la scène en compagnie de Konan, vers le sud où les loges se trouvaient derrière un grand écran qui rediffusait le combat en direct.

A l’extérieur de la salle de combat dont la position était tenue secrète aux non-initiés, des dizaines de gardes semblaient raser les environs d’un regard concentré. Une troupe de catcheurs et combattants en tout genre s’approchait d’eux, prévus pour la seconde partie de soirée comme on prévoyait des artistes qui entraient en scène. Ils n’étaient qu’un échantillon de ceux qui s’affrontaient sur le ring, car là encore de nombreux esclaves et combattants endettés se trouvaient dans les sous-sols de la salle sans fenêtres. Face à l’entrée, l’actuel patron discutait avec celui qui lui laissait la direction, le temps d’une mission éclair : Wirgo Waku Esposito, aussi connu sous « L’Organisateur Clandestin », recherché pour 127.000.000 de Berrys pour avoir organisé des combats au sein même de Marijoa… un homme avec une vision du spectacle beaucoup plus développée que son homologue, Benthésicymé, « Le Doigt d’Honneur de Konan », un homme-poisson qui avait commencé en tant que combattant avant même d’être promu et que Rébéna avait certainement rencontré par le passé quand il partageait encore le ring avec elle.


Wirgo Waku Esposito "L'Organisateur Clandestin" & Benthésicymé "Le Doigt d'Honneur de Konan"
Organisateurs de la Salle de Combat

Wirgo Waku Esposito "L'Organisateur Clandestin" & Benthésicymé "Le Doigt d'Honneur de Konan"
Organisateurs de la Salle de Combat
L’arrivée de Rébéna fut observée par une petite constellation de personnes dont les bouches formèrent un O. La réputation de la Té Ra n’était plus à faire en matière de combat, mais pour les personnes qui avaient longtemps fréquenté la salle de combat de Himitsu Shima, il n’y avait aucun doute quant à l’importance que revêtait une telle apparition. Dans une ambiance délétère comme celle-ci, il était certain que le maître de l’île serait informé au plus vite de son arrivée, si ce n’était pas déjà le cas quand elle avait traversée l’île sans prendre la moindre précaution. L’Alpha Predator était sans doute l’une des personnes qu’on n’aimait pas avoir sur son territoire…

Mais pour les deux organisateurs en place, il n’y avait aucun doute quant à l’opportunité que cela représentait. L’homme-poisson faillit cracher par terre avant de jurer en voyant l’ancienne combattante qui était restée invaincue un long moment. S’il y avait bien un tyran du ring ici, c’était elle et non Konan qui ne réalisait que des passages épisodiques dans les locaux, préférant animer et récolter les gains des paris. Un sourire amusé sur les lèvres, Wirgo fut cependant le premier à s’approcher de la rousse dont la présence n’avait aucun secret :

- Quel plaisir de vous voir, Madame Té Ra !
- Quel déplaisir… Cela faisait longtemps, grognerait simplement l’homme-poisson en croisant les bras.

Son corps se souvenait encore de leurs altercations. S’il avait progressé, il se savait encore loin du niveau qu’elle avait à l’époque où elle avait quitté la Salle de Combat. Et il ne doutait pas que contrairement à lui qui avait quitté le Nouveau Monde, elle n’était pas allée en s’assagissant. Un regard curieux se posa cependant sur la nouvelle venue tandis que certains semblaient réaliser des paris clandestins, ceux qui ne seraient pas déclarés à Konan, sur la possibilité de voir la Nebula participer aux combats de la soirée.

- Qu’est-ce que tu fais ici ? Demanderait Benthésicymé avec prudence.

Avant qu’elle n’ait le temps de répondre, la jeune femme serait interrompue par la voix de Wirgo qui semblait plus excitée que jamais :

- Pourquoi parler de cela ici ? Nous devrions nous rendre dans une de nos loges, un combat va bientôt avoir lieu. Vous verrez, nous avons agrandi et modernisé l’intérieur. Cela vous permettra de prendre la température des lieux, si vous voulez. Et nous pourrons discuter. Oh, évitez de sauter sur le ring en cassant les vitres : elles s’ouvrent, préciserait-il.

La proposition était lancée. Si la cheffe de la Ligue Egéenne de Milon acceptait de suivre ses interlocuteurs, ceux-ci lui offriraient un passe-droit tout choisi vers l’intérieur de la salle de combat. C’était peut-être trop facile pour la Té Ra, mais il y avait des batailles qui ne se menaient pas avec les poings. En arrivant à l’intérieur, elle pourrait constater que de nouveaux couloirs avaient été creusés pour réaliser des files d’attentes plus étendues, et certains passages permettaient d’accéder aux diverses loges, dont l’une était condamnée.

Les loges étaient tirées par un bras mécanique qui permettait de les contrôler grâce à une console à l’intérieur. Un ingénieur suivait d’habitude les clients, mais Wirgo était tout à fait capable de manipuler l’engin et ne se priva pas de le faire. Il les ferait donc monter, si tant est que la Té Ra avait accepter de venir jusqu’ici, pour observer un ring à cet instant occupé par des acrobates.

Wirgo Waku Esposito "L'Organisateur Clandestin" & Benthésicymé "Le Doigt d'Honneur de Konan"
Organisateurs de la Salle de Combat
La loge était composée de plusieurs canapés. De l’extérieur, impossible de distinguer ce qu’il se passait à l’intérieur. Un escaméra connecté était relié à un écran, diffusant sans discontinu ce qui se déroulait sur la scène. Le panorama offert par les vitres était cependant aussi suffisant pour voir de loin les combats, et en approchant sa cabine il était possible de n’être qu’à une vingtaine de mètres des affrontements. Si Konan avait commandé ce petit bijou de mécanique, c’était l’un des ingénieurs de la Galley-La qui l’avait produit. Certes, il ne le criait pas sur les toits mais il pouvait en être fier.

Observant avec un air serein la scène, avant de répondre à la question de Rebena, il décida d’assister au début du combat.


Cristal Suiga
Présentatrice de la Salle de Combat

- A ma droite, le champion en titre de l’arène avec sept victoires consécutives ! Le maître du ring, j’ai nommé Jonathan Cienna !

La présentatrice avait une sorte de micro qui, relié à un système de haut-parleurs, faisait résonner sa voix dans toute la pièce. Son écho offrait à la salle la présentation de combattants qu’ils suivaient avec énormément de ferveur. Pour la plupart, l’apparition de ce pugiliste représentait l’apogée de la soirée, au-delà de la présence de Konan. En effet, si le Harishigawa faisait l’honneur d’une présence de temps à autres, ce n’était jamais dans des matchs officiels. Le second combattant fut annoncé quelques instants plus tard :

- A ma gauche, la terreur du ring, l’un des challengers venus tout droit du Nouveau Monde, Marcus Enrique !

Le tonnerre d’applaudissements qui suivit fut clairement le signe que cet homme était apprécié. Dans la salle, les paris allaient bon train et semblaient devenir de plus en plus présents. Alors que la foule était en délire suite à l’annonce du second combat, tous deux se mirent torse nu en entrant sur scène. Jonathan leva son poing recouvert de gants dont les fils avaient été incrustés d’un alliage spécial. De son côté, Marcus semblait posséder des gants rouges un peu plus épais.


Jonathan Cienna & Marcus Enrique
Champion Actuel de la Salle de Combat & Challenger
Dans la loge, Wirgo observait avec attention les réactions de Rebena alors que Benthésicymé répondait avec un ton plus modéré suite aux menaces réalisées plus tôt. Même s’il ne voulait pas trop le faire savoir, il était clairement l’un des hommes les plus capables de Konan :

- Deux des gars dont tu parles sont morts… Marco et Grant, il me semble. Un est mort à cause d’une maladie, peu après ton départ, et l’autre a été tué à Banaro alors qu’il obéissait aux ordres de Napoléon. Y’en a un qui est parti sur le Nouveau Monde, je ne sais plus son prénom, et le dernier combat toujours dans l’arène. Pas ce soir, sûrement demain.

Il réfléchit ensuite au cas de Charlotte et de Nipsée, imaginant que la rousse parlait de ces deux-là :

- Les deux filles avec qui tu combattais combattent toujours dans l’arène, mais y’en a une qui est devenue une esclave après plusieurs défaites d’affilés.

Après avoir fait le tour de ces informations, ce serait Wirgo qui reprendrait la parole :

- Les séances de combat à mort sont vendues plus chères qu’autrefois alors elles sont plus rares. Quant au combattant le plus fort du coin, il ne vous arrive sûrement pas à la cheville si j’en crois les dernières rumeurs, mais je dirais que c’est Jonathan Cienna. Konan n’est pas officiellement un combattant de la salle de combat de nos jours, après tout.

Il montra d’un geste du doigt l’homme en question sur le ring.

- Avant que vous ne sautiez affirmer votre supériorité, j’aimerais vous proposer quelque chose, si vous êtes prête à l’entendre. Libre à vous de refuser, mais si je peux vous échanger ce service contre ce que j’ai en tête, et contre rémunération bien sûr, il n’y aucun doute que nous y trouverons tous les deux notre compte. Qu’en dîtes-vous ? Voulez-vous bien m’écouter ?

Il n’avançait pas les termes du contrat immédiatement, montrant qu’il laissait à Rebena la possibilité d’exprimer une demande de son côté. C’était une manière ingénieuse de cibler les attentes de la navarque, quelque chose auquel Benthésicymé n’aurait sûrement pas pensé. Ainsi en ayant un aperçu de ce qui se déroulait ici, la Nebula était en position de choisir ses termes… Même si l’Organisateur Clandestin avait de toute évidence lui aussi les siens en tête.

Wirgo Waku Esposito "L'Organisateur Clandestin" & Benthésicymé "Le Doigt d'Honneur de Konan"
Organisateurs de la Salle de Combat
Le combat en bas avait commencé. Les deux combattants semblaient utiliser le premier round pour se jauger, sans utiliser leurs particularités. En effet si certains étaient convaincus que les pugilistes agissaient sans réfléchir, la pirate comprendrait sûrement qu’ils avançaient dans une bataille à un rythme bien choisi. C’était presque une chorégraphie, cependant l’issue de leurs échanges n’était pas connue d’avance… Du moins pas ce soir-là. Ainsi quand Wirgo observerait Rebena de plus près, il ne pourrait que constater la puissance qui se dégageait d’elle. Pas le genre de personnes avec qui il avait envie d’avoir des problèmes, même s’il était au final capable de les gérer en dehors de la violence qui allait avec.

- Je n’ai pas l’intention de vous entourlouper, et je me suis mal exprimé. C’est moi qui vous paierai, si vous acceptez, pas l’inverse. Pour votre collaboratrice, nous pouvons inclure cette donnée dans l’équation… J’ai plus de contacts sur le Nouveau Monde qu’ici, mais j’imagine que cela vous arrangera puisque vous êtes implantée là-bas.

Il connaissait la Ligue, après tout il avait déjà eu affaire à certains de ses membres dans le passé. C’était anecdotique, il commençait dans le métier et il lui fallait un moyen de transport. Tir Na Crann lui avait ouvert les bras à ce moment-là. Quand il y repensait, il y avait d’autres membres de la Pègre qui y étaient passés sans se faire trop voir, avant d’être connus. Akropolis avait cependant attiré plus de monde dans ce sens-là.

- Je vais donc être transparent avec vous. Je mettrai mon réseau à votre disposition pour retrouver les anciens membres de la Salle de Combat, et pour mettre votre collaboratrice en relations avec des personnes qui souhaiteraient réaliser des emprunts. En échange, je souhaite que vous réalisiez un… show, dira-t-on.

Il ne souriait pas, car il souhaitait montrer la gravité de ce qu’il allait demander.

- Notre champion en titre va sûrement remporter sa huitième victoire ce soir. Demain nous organisons un événement de combats à morts durant lequel il ne sera pas présent. J’aimerais que vous y preniez part : ce sera votre grand retour sur scène. Vous débarquerez de cette même loge qui sera rapprochée un peu plus qu’ici, grâce à une extension du bras mécanique.

Il passerait les détails de la pyrotechnique prévus lors de son entrée en scène, mais il avait prévu de réaliser un spectacle digne de ce nom. Quelque chose dont des générations de combattants n’avaient pas encore entendu parler. Il avait après tout assisté à une rediffusion de ce qui s’était déroulé à Akropolis quelques mois plus tôt, et cela lui avait donné envie de réaliser quelque chose de similaire. C’était son idée de mettre des numéros d’acrobatie.

Reprenant ses propos, il sortirait un papier sur lequel se trouvait une liste de noms parmi lesquels une liste de combattants esclaves :

- Après avoir gagné, vous serez annoncée comme challenger contre le champion actuel de la salle. Avec votre démonstration de force, vous aurez largement gagné les paris en anticipation. Les sommes investies seront sûrement du 100 pour vous contre 1 pour votre adversaire. Nous gonflerons les rumeurs de votre victoire sur le Vice-Amiral Thalassa pour aider cela.

Il expira alors :

- En échange de ces trente combattants qui vous rejoindront à l’issue de ce combat, des éléments dont nous avons parlés et de votre paie, je vous demande de perdre le combat. Vous pourrez simplement déclarer forfait, tant que Jonathan Cienna tient encore debout à la fin du combat, conscient, les paris seront acceptés. Bien sûr, cela suppose que vous ne pariez pas sur votre propre victoire, c’est la seule clause pour que nous empochions l’argent.

Benthésicymé avait ouvert la bouche sans savoir quoi dire, voyant que l’homme d’affaire à côté de lui était déterminé à conclure un deal à plusieurs centaines de millions de berrys, dans le but sûrement d’entrer dans les bonnes grâces de Konan. C’était improbable, mais si Rebena acceptait ce deal… Alors elle obtiendrait non seulement ce qu’elle cherchait, mais plus encore, au prix de ne pas récupérer son titre de championne de la salle de combat une dernière fois.

Wirgo Waku Esposito "L'Organisateur Clandestin" & Benthésicymé "Le Doigt d'Honneur de Konan"
Organisateurs de la Salle de Combat
Wirgo observait son interlocutrice, peut-être sa future partenaire d’affaire, réfléchir. Il semblait lui-même avoir ses propres objectifs en tête. Ils étaient affichés, mais la Té Ra se douterait sûrement qu’il en avait d’autres qu’il ne souhaitait pas mettre en avant. Etaient-ils liés à la présence de son homologue dans la même loge ? En tout cas, l’Organisateur Clandestin avait un don pour ces choses-là, et il avait choisi ses mots de manière à être sûr d’atteindre son objectif. Il ne proposait pas à un étalon de se transformer en poney, pas plus qu’il ne prenait la jeune femme pour un âne. Il savait qu’elle valait un gros pactole, et avait des plans de secours si elle refusait.

Comprenant l’intérêt de ne pas obtenir les gains de ce type d’activités, surtout d’un point de vue public, il ne fut pas offusqué par son manque d’engouement pour les gains. Il observa encore quelques instants la jeune femme en la laissant poursuivre, ayant simplement acquiescé avec une réflexion posée sur la suite.

Regardant en bas, Benthésicymé fronça les sourcils quand son regard passa dans l’assistance qui semblait s’enjailler de ce combat. Il vit Jonathan commencer à passer aux choses sérieuses alors que le deuxième round commençait. Une bourrasque fonça en direction de Marcus qui lui opposa un hasshoken digne de son niveau. Alors qu’il avait l’impression d’être discret derrière sa vitre teintée, il croisa le regard de Konan qui observait la loge depuis la foule, avant de disparaître dans celle-ci. L’homme-poisson déglutit.

- Nous ferons dans ces termes, conclut Wirgo. S’ils nous arrangent tous les deux, je ne vois aucun problème à nous en accaparer. C’est même plutôt intelligent, vu votre passé dans la salle de combat… Je ferai tout de même un rappel de votre ancien titre à l’issue de votre combat à mort.

Il n’allait pas beaucoup dormir d’ici au prochain combat, mais le jeu en valait la chandelle. S’il pouvait œuvrer pour cette mise en scène, les liens entre Konan et Jonathan se renforceraient. De plus il allait pouvoir profiter de la situation pour mettre en avant ses relations dans l’underground. Certes Rébéna aurait pu simplement défoncer la porte de la salle de combat et prendre ce qu’elle considérait être son dû, mais l’événement du lendemain promettait d’être exceptionnel.

- Konan voudra te voir après le combat de demain, grogna Benthésycimé. Ça m’arrangera si tu refuses, hein.

Il croisait les bras. De toute évidence il avait compris un seul coup d’œil à son patron ce qu’il désirait.

- On ne l’a pas informé de ta venue mais t’as dû être spottée dans les rues alors il doit se douter… Enfin voilà quoi, j’imagine que ça a quelque chose à voir avec ton organisation. Si tu veux le voir avant, on peut sûrement s’arranger.

Si la Té Ra le voulait, elle pourrait assister à la suite du combat et à la défaite de Marcus qui finirait tant bien que mal par être expulsé du ring. Il s’agissait d’un bon combat pour des combattants de leurs niveaux, et la foule semblait très satisfaite du match. De toute évidence il faudrait faire mieux le lendemain et offrir à ces spectateurs en délire une expérience dont ils se souviendraient toute leur vie.

Dans le cas où la jeune femme ne voudrait pas voir Konan de suite, elle serait conduite dans un hôtel de très bon standing, dans la suite la plus chère, aux frais de la salle de combat. Elle pourrait s’y relaxer si elle le désirait, ou profiter de quelques moments d’entrainement, à discuter avec quelques combattants de petit standing qui trainaient dans les couloirs après leurs combats de la soirée. Les esclaves et les moins bons n’avaient malheureusement pour eux pas la possibilité de sortir des geôles ou des dortoirs de la salle.

Sinon elle serait emmenée directement dans le bâtiment central de l’île où Konan la recevrait.

Harihigawa Konan "Le Destructeur" & Wirgo Waku Esposito "L'Organisateur Clandestin"
Maître de la Salle de Combat & Organisateur de la Salle de Combat
Là où la Ligue semblait faire le choix de faire ruisseler la richesse qu’elle produisait, l’exemple de Himitsu Shima était aux antipodes de cela. La crasse était déployée sur la ville qui ressemblait plus à un taudis qu’autre chose, à l’exception de la seule instance de pouvoir qu’était le palais de Konan et de ses sbires. Le lieu était plongé dans une forme de débauche et de plaisir constant qui ne manquait pas de rappeler les moyens faramineux mis en place pour le créer. En fervent utilisateur d’esclaves, le traité récent avait contrecarrer une partie de son buiseness en place, continuant de le fragiliser à tout point. Il ne pouvait se reposer que sur la vente d’armes et la contrebande à présent, deux domaines au sommet desquels il régnait encore malgré le partage difficile réalisé avec le Tao.

Haïssant au plus haut point qu’on lui rappelle sa faiblesse, il avait perdu avec le temps quelques conseillers. La décadence annoncée d’un être humain était une chose passionnante à observer, surtout d’en bas. Les rues n’étaient pourtant pas envahies de mutins en puissance : tous craignaient le sanguinaire leader de ces lieux, trônant au centre de son palais d’or. Les quelques extensions réalisées ces dernières années étaient là pour montrer la puissance de Konan. Lorsqu’il accueillerait Rébéna Té Ra, ce serait dans une pièce plus neutre cependant. Il restait un homme d’affaires avant tout.

Accompagnée de Wirgo, ce dernier observait le Harishigawa dont le regard semblait porté une forme de colère sourde à son égard. Il avait agi sans consulter le gérant des lieux après tout, mais si tout se goupillait comme il le souhaitait alors il n’aurait pas à s’en plaindre. Il devait récupérer ce qu’il avait perdu après tout. Et c’était plus une simple formalité pour celui qui arrachait ses ressources au peuple et prenait en otage les âmes de ses sous-fifres. Un exemple de ce que la Pègre avait de plus violent, en somme.

- Bienvenu dans mon palais, Navarque de la Ligue Egéenne de Milon, Championne de l’Amphithéâtrion, Tenante en titre de Championne de la Salle de combat durant une longue période, The Alpha Male, Alpha Predator… Rébéna Té Ra.

Il avait de toute évidence réavisé ses antisèches. Ce côté théâtral semblait l’amuser, rappelant malgré son importance dans le milieu qu’il venait à peine de passer la trentaine. Il était jeune, un peu plus que la femme en face de lui. Son regard s’était plongé vers la rousse dont il n’attendait pourtant pas des salutations aussi distinguées. Wirgo retint un soupir, ayant accepté de réaliser sa mission grassement payée en connaissance de cause. Il connaissait cet homme longtemps auparavant, après tout.

Laissant la jeune femme s’installer en face de lui à la table des négociations, une table massive, ronde, sur laquelle étaient disposées quelques victuailles, des boissons chaudes qui venaient d’être installées par de petites mains invisibles qui tentaient de convenir aux exigences de Konan.

- Votre séjour est-il agréable pour l’instant ? Wirgo ne vous a pas trop embêté ?

Il ne semblait pas connaitre le contenu de la conversation entre l’Organisateur Clandestin et la rousse, Benthécysimé ayant dû partir immédiatement après sa rencontre pour accomplir la mission sur laquelle il avait été mandaté.

Harihigawa Konan "Le Destructeur" & Wirgo Waku Esposito "L'Organisateur Clandestin"
Maître de la Salle de Combat & Organisateur de la Salle de Combat
LLes provocations avaient tendance à énerver le Harishigawa, mais être mis pied au mur l’obligeait à agir avec plus de sagesse qu’auparavant. Il ne pouvait pas se permettre d’être impulsif dans cette situation : il avait besoin de Rebena pour récupérer ce qu’il avait perdu face à Ren Tao. Ainsi s’il voulait récupérer les droits sur l’obsidienne, il se devait de la jouer plus fine qu’à son habitude. Affichant un rictus contrôlé, il se tourna vers Wirgo qui salua et se retira de la pièce. La question des parents de la rousse ne l’intéressait pas, et il ne savait pas pourquoi les hommes s’intéressaient à leur propre parenté. Lui en tout cas avait dépassé ce stade.

- J’ai pas l’habitude d’être remercié pour ça, mais je prends les remerciements. On n’est pas tous faits pour travailler dans la Pègre.

Ce n’était pas un compliment.

- Himitsu Shima ou une autre île, qu’importe. Ce n’est pas la raison de mon succès dans le monde underground.

Il ne supposait pas qu’il aurait gagné le contrôle de l’île contre Rebena, après tout il n’avait pas en tête l’étendu de ses compétences. Son arrogance avait appris ses limites en voyant les siennes lors de ses divers entrainements ces derniers mois. Il voulait vaincre le Tao, mais est-ce qu’il en était seulement capable ? En tout cas, il était mieux préparé aujourd’hui qu’il ne l’était il y a un an. Cela lui avait coûté de fiers combattants et des lieutenants sur le chemin, mais il pouvait compter sur un regain de force dans l’histoire.

- J’ai une proposition à vous faire. Vous voulez mettre le Vieux à mal à ce qu’il se raconte dans le milieu. Et pour le coup, j’ai besoin de quelque chose qu’il a… J’veux parler du minerai d’obsidienne. J’avais les droits exclusifs de distribution jusqu’à présent. Aujourd’hui ce n’est plus le cas. J’aimerais les retrouver, du moins sur Paradise. Voilà ce que je veux vous proposer. En échange des droits exclusifs de distribution sur Paradise d’environ 5% de votre production, je vous propose de vous octroyer mes services. Une fois que vous aurez obtenu Obsidia, j’entends. Je ne compte me mêler de votre guerre contre Hadès, pas plus que je ne veux que vous vous mêliez de la mienne avec l’autre dégénéré. Je prépare l’avenir.

Il souriait, il voulait proposer un contrat avec la Ligue. Il savait qu’elle était intégrée sur le Nouveau Monde, raison pour laquelle il proposait qu’une part faible du marché se déroule sur Paradise. Il ajouterait les conditions suivantes pour tenter d’appâter un peu plus la Ligue :

- Une fois que j’aurai écrasé Ren et vous Hadès, je me passerai des services de la Galley-La et promouvrai les services de la Ligue en matière de navires chez les hors-la-lois et les pirates de Grand Line. De cette manière, en faisant affaire, nous obtiendrons tous deux un rayonnement supplémentaire.

Il savait que la diffusion de l’obsidienne valait bien ce contrat, et plus encore. Cependant le maître de la Pègre d’Himitsu Shima avait en tête un plus grand dessein. Il voulait reconquérir le territoire perdu et s’opposer une fois que cette histoire serait terminée à l’homme de l’ombre qui avait fait tomber la Triade : celui qu’il connaissait sous le nom de Mister J. Attendant la réponse de la Te Ra, il savait qu’un potentiel refus était à prévoir. Cela permettrait de la catégoriser en alliée ou en ennemie pour la suite, même s’il ne pouvait pas se permettre de déclencher une guerre contre elle à cet instant et devrait se contenter de ce qu’elle avait à lui dire.

Harihigawa Konan "Le Destructeur"
Maître de la Salle de Combat
Si certains n’avaient pas les épaules d’être un Empereur, d’autres n’en avaient pas la volonté. En décidant d’asseoir son autorité sur seulement quelques milieux comme celui de l’esclavagisme, Konan grimpait progressivement dans la Pègre et aurait continué son ascension sans les deux facteurs qu’avaient été l’évasion d’Impel Down et l’apparition d’un rival dégourdi. Il n’avait plus les mêmes objectifs mais à 32 ans, il avait encore l’occasion de se remettre en selle pour revenir sur le devant de la scène. Son objectif était donc de perdre le moins pied possible, ainsi quand la Té Ra fut partie il alla dans la salle où se trouvaient deux autres de ses alliés.


Melric Gousail "Le Goulu" & "Le Moniteur"
Chargés de la défense et de la surveillance de Himitsu Shima
Le premier était primé à 339.550.000 berrys, et était chargé de la protection de l’île. Homme-chacal natif du Royaume de Saba, il avait d’abord été vendu en tant qu’esclave par le clan Ookami avant de rejoindre Konan dix ans auparavant. Il était connu comme étant l’une des figures montantes de la criminalité, mais son absolue loyauté pour le Harishigawa le rendait inabordable. Loin de profiter des mêmes péchés que son leader il était, dans une autre mesure, plus modéré. De tous les conseillers qui restaient aux côtés du chef de la Pègre locale, il formait avec Benthécysimé, Napoléon et Mitenryu le quatuor de forme prêt à rester aux côtés de leur maître, du moins en était-il persuadé.

A la droite de Melric « Le Goulu » se trouvait celui qu’on surnommait sobrement « Le Moniteur ». Humain malgré une apparence grisâtre, il était primé à 150.000.000 berrys pour quelques méfaits et son alliance avec Konan. Loin d’être parmi le cœur de cible de son allié, il surveillait l’île constamment avec un système d’escaméras cachés un peu partout à la vue de tous. Il n’y avait sur Himitsu Shima aucune intimité. Incapable de dormir du fait d’une insomnie chronique, il vivait au crochet de paquets de chips et de barres caloriques que lui apportaient ses alliés.

- Surveille que notre invitée ne fasse rien de trop… voyant, ordonna Konan au Moniteur.
- Oui, maître, dirait-il en s’inclinant.

Il laisserait sa tête retomber en arrière, baillant d’une bouche large au sourire carnassier.

En sortant du palais, Rebena aurait le droit de se faire escorter par Wirgo après avoir passé son appel loin des oreilles indiscrètes, et serait laissée lorsqu’elle le demanderait. Elle pourrait apercevoir Napoléon assis sur une caisse en train de boire une quantité déraisonnable d’alcool. Primé à seulement 150 berrys, il n’était qu’une mascotte aux yeux du Gouvernement Mondial, et le serait sûrement aussi à ceux de Rebena qui ne connaitrait peut-être même pas sa prime. En revanche, il était entouré par tout un tas de primés qui avaient récemment émergés, allant de 30.000.000 à 176.400.000 berrys. Certains avaient peut-être commencé dans la piraterie.


Niria "L'Exterminatrice des Révoltes" & Wirgo Waku Esposito "L'Organisateur Clandestin"
Habitante de Himitsu Shima & Organisateur de la salle de combat.
Enfin, après s’être reposée, elle pourrait revenir au niveau de la salle de combat le lendemain en fin d’après-midi. Elle pourrait être escortée ou se pointer à sa guise comme elle l’entendait. Elle serait invitée une nouvelle fois à rejoindre la loge et pourrait constater que le bras mécanique avait reçu une amélioration. Wirgo l’attendait, et dans la même loge se trouvaient Konan et Niria, le premier les bras croisés et la seconde baillant à s’en décrocher la mâchoire.

- C’est elle, la challenger sur laquelle il faut miser un peu d’argent ?

Wirgo affichait un air neutre, mais de toute évidence il n’avait pas parlé de son marché avec la Té Ra à Niria et Konan. Libre à elle de le faire en s’installant et en attendant le début des hostilités. Dans les tribunes des milliers de personnes s’étaient installées, parmi lesquelles quelques primés, ou quelques personnalités politiques de l’underground. Dans les loges devaient se trouver des personnes particulièrement riches, peut-être des gouvernementaux qui appréciaient les spectacles… Qui sait, des dragons célestes ? En tout cas, les sept loges étaient toutes occupées ce soir-là.

Et le clou du spectacle avait tout le temps pour parler avec les personnes présentes ici si elle le désirait.

Niria "L'Exterminatrice des Révoltes" & Wirgo Waku Esposito "L'Organisateur Clandestin"
Habitante de Himitsu Shima & Organisateur de la salle de combat.
L’Exterminatrice de Révoltes observait sans intérêt la personne près d’elle. Le Harishigawa se contenta d’opiner de la tête pour confirmer qu’il s’agissait bien de la primée qui s’était opposée aux révolutionnaires. Quand celle-ci fut interpellée elle ne put que sourire d’un air amusé, comme si toute cette situation n’était qu’une de ces sorties du dimanche qu’on réalisait par habitude. Sortir de la monotonie avait quelque chose d’intéressant.

- J’habite ici.

Elle répondit sans vraiment élaborer. En revanche la seconde question lui fit perdre son sourire, et elle croisa les bras sous les regards étonnés de Konan et de Wirgo. De toute évidence la Té Ra avait touché un point sensible. La criminelle était plus ou moins la seule à savoir de quoi il en retournait, mais elle ne semblait pas vouloir parler de l’Empire Nirien. Comme pour lui offrir le répit qu’elle demandait, Cristal Suiga, la présentatrice en contrebas, annonça le premier round du spectacle. Le ring s’était enfoncé dans le sol, telle une fosse, et les spectateurs pouvaient observer les combattants entrer sans être particulièrement présentés.


Cristal Suiga
Présentatrice de la Salle de Combat

- Le combat à venir est un combat à mort ! Un battle royal comme on les aime ! Abandonner est une option, en échange de quoi les personnes qui abandonnent cette manche seront exhibées… Mais nous ne garantissons la survie de personne !

Le public cria de plaisir. Effectivement un certain nombre d’agneaux allaient être sacrifié sur l’autel de l’amusement. Les paris étaient ouverts non seulement sur ceux qui survivaient mais aussi sur ceux qui obtiendraient le plus de morts. Au milieu de la scène qui remontait une fois que tous avaient pu monter sur le ring, même ceux qui enchainés tremblaient comme une feuille, Rebena reconnaitrait un visage familier. Le sourire démoniaque, des yeux rouges qui reflétaient le sang qu’elle avait sur les mains, des cheveux blonds bien entretenus : Charlotte était là, rayonnante.

- N’oubliez pas que la fenêtre s’ouvre, fit Wirgo en s’enfonçant dans son siège tandis qu’il affichait un second visage, celui de Nipsée.

Celle-ci avait la chevelure sauvage et le regard émeraude. Elle semblait sale et mal nourrie, comme beaucoup d’esclaves. Il s’agissait très clairement d’une d’entre eux. Beaucoup pourraient dire qu’elle était au bord de la mort, et peut-être que la Té Ra allait l’y précipiter. Assis, elle était pourtant déjà en train de préparer un mauvais coup. Son corps dégageait une fumée étrange.

Lorsqu’elle tomberait vers la scène, de nombreux effets de lumière viendraient accueillir l’arrivée de la pugiliste. Tout était fait pour laisser son identité inconnue jusqu’au dernier moment. La foule attendait avec impatience l’arrivée de la combattante, et l’annonce du départ. Pendant quelques instants, le bruit ambiant masquait suffisamment la scène pour que Rebena s’adresse à Charlotte sans que personne d’autre n’entende.


Charlotte & Nipsée
Amies d'enfance de Rebena, Traitresses en puissance.

Charlotte & Nipsée
Amies d'enfance de Rebena, Traitresses en puissance.
Un murmure inquiet parcourut l’assistance avant qu’on n’identifie sur les grands écrans qui rediffusaient la scène la combattante du Nouveau Monde. Rares étaient ceux qui pouvaient se targuer de venir des mers les plus dangereuses du globe, et pourtant elle était là, regard de braise, posture impeccable, menaçant de sa stature les deux femmes qui l’avaient autrefois trahie. Pendant un instant, ce fut l’incompréhension qui s’écrivit sur les traits de Charlotte. Elle ne reconnaissait pas la sœur avec laquelle elle avait grandi : preuve en était encore une fois que les sentiments qu’elle avait pour la rousse n’avaient été qu’un fragment dans sa vie… Ou était-ce parce qu’elle ne pensait plus à celle-ci depuis longtemps ?

Quand la voix de Rebena s’éleva et s’adressa à elle, la blonde frémit. Nipsée avait de toute évidence déjà compris qui c’était puisqu’elle reculait vers les bords du ring. Les masses s’étaient agglutinées autour de la Te Ra : un cri s’éleva alors de la brune qui fut la première à réagir.

- Laissez-moi sortir ! Ordonna-t-elle. C’est pas un combat, c’est un massacre. J’abandonne, je capitule, pitié !
- Le combat n’a pas encore commencé, constaterait simplement Cristal en soupirant dans son micro. Une nouvelle arrivante sur le ring ! Déclara-t-elle avec engouement. Et pas des moindres ! Venue directement du Nouveau Monde, l’ancienne championne en titre de la salle de combat, celle qui fut un temps l’Ange de la Mort de la Fosse aux Damnés, la Maitresse Absolue du Ring, j’ai nommé REBENA TE RA !

Les foules frémirent alors que les combattants sentaient leur dernière heure arrivée. Nipsée tentait de creuser les cordes, ses doigts ensanglantés. Elle pleurait à chaudes larmes. L’écran principal s’alluma alors et diffusa un message : « Pendant les deux premières minutes, tout abandon est interdit. ». Deux minutes, c’était là la pénitence offerte par l’organisateur du tournoi. Il avait prévu cette réaction, alors il donnait ce cadeau à la navarque. Il sacrifiait des pions pour obtenir bien plus encore.

Charlotte était estomaquée, au point que son corps tout entier s’était figé. Le combat n’avait pas encore commencé. Elle serra les poings et afficha un air farouche, un sourire narquois :

- Tu m’en veux encore pour ça ? Tu n’as jamais été capable de contrôler les autres. Tu n’es qu’une gamine égocentrique. Tu sais quoi ? Si tu avais eu l’âme d’un leader comme je l’ai eue, tu n’aurais jamais été trahie. C’est de ta faute, si tu as été trahie, pas celle des autres.

Elle poussait la réflexion plus loin. Cristal observa la scène en haussant un sourcil. La musique continuait de jouer en arrière-plan, alors que le combat aurait déjà dû commencer. Elle soupira, observant la loge et faisant signe de couper le son, mais celui-ci continua quelques instants.

- T’as jamais été capable, et tu le seras jamais. Alors abandonne, veux-tu. Je ne t’ai pas trahie à l’époque. Pour te trahir, il aurait fallu que je te sois fidèle à l’origine. Tu sais quoi ? Ça n’a jamais été le cas. T’as été la seule à considérer qu’on était des sœurs.

La musique s’arrêta. Les combattants frémirent. Cristal sourit avec un air triomphant, et prit le pistolet chargé d’un feu de détresse qui annonçait le début du combat. La fumée rouge s’éleva dans les airs, et explosa au-dessus du ring, alors qu’un tonnerre d’applaudissements venait s’élancer. Charlotte profita de ses paroles désobligeantes pour s’élancer envers la Te Ra, accumulant de l’eau autour de son poing grâce à la transpiration et la condensation dans l’air, et l’envoyant en direction de celle qu’elle n’avait jamais considérée comme sa sœur.

Charlotte & Nipsée
Amies d'enfance de Rebena, Traitresses en puissance.
Il existait plusieurs expressions pour qualifier la terreur qu’on pouvait lire dans les yeux de quelqu’un dont le destin était scellé. Face à un prédateur dont on n’a aucun souvenir, face à une création apocalyptique d’un dieu tout puissant, il n’y avait parfois qu’à attendre la mort. La gorge de Charlotte s’était serrée en entendant la première note dans la voix de Rebena, et tous les combattants qui cherchaient à se départager n’avaient pas bougé un muscle. Dans l’attitude de chacun, il y avait une forme de tétanie qui s’était installée. La bouche de la blonde tremblait alors qu’un sentiment conflictuel naissait dans son cœur. Son venin n’avait fait qu’attiser une flamme, que donner à son ennemi le bois nécessaire à animer un feu vengeur.

Elle se rendit compte de son erreur, et chaque mot de la Té Ra indiquait cela. Son débit était suffisamment élevé pour que la tension monte. Si on avait pu mourir rien qu’en écoutant quelqu’un, alors elle n’aurait pas eu à sentir la douleur. Elle n’aurait pas eu à espérer que le temps ne se fige pas. Elle voulait abandonner, crier au secours, mais sa gorge était trop serrée. C’était une défaite.

Tombant au sol, ses tremblements redoublèrent. Elle fut malmenée par la force de la rousse, telle une poupée de chiffon, des larmes coulant le long de ses joues avec insistance. Aurait-elle eu pitié ? Existait-il un monde dans lequel sa survie était assurée ? Lorsqu’elle fut tirée du sol, le monde entier sembla se dérober encore une fois. Son corps tuméfié était un simple linge qui servirait à essuyer le ring. La peur se lisait à présent dans ces yeux qui avaient longtemps été menés par l’arrogance. Quelle que fut l’issue de ce combat, elle aurait sans doute fait mine de pardonner à la lâche… Mais c’était elle qui était lâche face à la mort.

Le public était accroché aux lèvres de Rebena.


Konan Harishigawa "Le Destructeur" & Niria "L'Exterminatrice de Révoltes"
Maître de Himitsu Shima & Habitante de Himitsu Shima
Alors, il se produisit. Konan fut le premier à ressentir cette pression familière et protégea sa cabine de ce qui allait être ultimement un assaut sur la volonté. L’effondrement complet du public aux alentours et de tous les combattants sur scène, celui de Cristal qui s’était hissée dans une nacelle, mit fin au combat. Pourtant le déchainement de violence se poursuivit. Seuls les escarméras liés à la cabine de Konan filmaient encore et diffusaient sur le grand écran le déversement qu’avait réalisé la Té Ra. Il s’approcha de l’image avec un air hypnotisé, se délectant de cette violence. Il se tourna vers Niria dont les yeux s’étaient soudain intéressés à la jeune femme en contrebas :

- C’est ça l’amour ? Demanderait-il avec un air passionné.
- Ne t’invente pas une vie de tordu, se contenta de répondre la jeune femme.

Waku avait actionné la fonction d’enregistrement des escaméras pour ne pas perdre une goutte de ce qui était en train de se dérouler. Le ring serait maculé du sang vengeur, et ultimement aucune âme n’applaudirait. Sur les milliers de personnes présents dans cet espace clos, aucun n’était en mesure de réaliser les applaudissements dus à un tel spectacle. Seuls ceux de Konan résonnerait dans la salle, alors qu’à travers la fenêtre ouverte il souriait pleinement.

Un long moment de contemplation du vide s’en suivit. Combien de temps allaient-ils rester évanouis ? La plupart d’entre eux se réveilleraient quelques minutes plus tard, étant donné que l’éveil du royal avait été à la fois simple et virulent. Alors que la Té Ra pourrait rester sur le ring, à mesure que tous se réveilleraient les images défileraient en boucle, répétant sans cesse l’acte de violence qui avait eu lieu ici. Les regards des uns et des autres se croiseraient atterrés.


Cristal Suiga
Présentatrice de la Salle de Combat
Cristal s’approcherait finalement de la rousse, lui tendant une main pour qu’elle puisse lui tenir le bras, et l’inviterait à le lever en l’air, victorieuse :

- La championne de la Fosse aux Damnés est Rebena Te Ra ! Un tonnerre d’applaudissements !

Les hurlements s’élevèrent dans les airs, tandis que la jeune femme était le centre de l’attention général. Tous reconnaissaient son ascension fulgurante, et personne ne s’étonnait de voir à présent cette diffusion qui continua alors que la dernière partie de la soirée était annoncée.

- Après une courte pause, nous assisterons au match final de la soirée qui opposera le Champion en titre de la Salle de Combat, Jonathan Cienna à notre nouvelle championne de la Fosse aux Damnés, Rebena Té Ra ! Les paris sont ouverts pendant la prochaine demi-heure, des guichetiers passeront parmi vous pour saisir les montants.

Quelques hommes s’occupaient déjà du nettoiement de la scène, peu habitués à un tel spectacle d’horreur. Ils ne pouvaient même pas reconstituer le puzzle. Quand ils s’approcheraient de la rousse pour accomplir leur travail, ils reculeraient instinctivement devant le prédateur. Avait-elle des morceaux de chair coincés entre les doigts ? Certains murmuraient déjà une nouvelle appellation que les images aidaient à sublimer : « L’Ogresse de la Fosse aux Damnés ». Dans un coin du ring, la rousse pourrait voir Niria s’approcher. Celle-ci haussait un sourcil, curieuse.

- C’était impressionnant. Je ne sais pas pourquoi, mais j’ai senti le besoin de venir te voir après cette démonstration de puissance.

Ses yeux s’étaient portés sur le ring.

- Je connais l’Empire Nirien. Je suis née de son fondateur, et j’ai été élevée par lui. Je porte son nom en sa mémoire. Voilà, j’ai répondu à ta question.

Elle poserait un nouveau regard sur Rebena. C’était des combats qui marquaient l’histoire de la salle de combat. Sans ajouter un mot, elle tourna les talons et se dirigea à nouveau vers sa loge. Rebena pourrait contempler les effets que sa victoire avait eu alors qu’elle gagnait les paris à 1000 contre 1. Dix personnes dans la salle avaient parié pour son adversaire, donc. Ou était-ce Wirgo qui avait mis tous ses œufs dans le même panier ?

Jonathan Cienna
Champion Actuel de la Salle de Combat

- Je vais me faire tuer. Pire, ma série de victoires…

L’entraineur observait son poulain avec une forme d’inquiétude mêlée à du dégoût. Il n’avait aucune idée de ce qui allait se passer ce soir-là. Le Cienna était pourtant bien calme dans cette situation, car oui, ce n’était pas lui qui déblatérait ces inquiétudes. C’était son père qui avait l’impression qu’il allait perdre ce qu’il avait construit. Jonathan avait été recruté personnellement par Konan, et s’était hissé au sommet. Il avait dû attendre d’avoir le feu vert pour commencer à enchainer les victoires. Son père, qui s’était chargé de le former, était un ancien Colonel de la Marine aujourd’hui recherché après avoir détruit l’ensemble d’une cargaison d’armes par mégarde. S’il n’avait tenu qu’au Harishigawa, alors cet homme serait mort depuis longtemps. C’était son fils qui l’avait sauvé. Il avait depuis longtemps dépassé le niveau de son paternel, et se contentait de se servir de son expertise d’ancien entraineur.

Ayant envie de progresser, il était devenu l’un des favoris du maître de la Pègre qui l’avait tout simplement porté jusqu’au sommet, depuis ses quinze ans. Soupirant, l’homme de deux mètres haussa les épaules. Il n’avait pas vraiment besoin de gagner tous les combats : il savait que l’ennemie en face de lui ne resterait pas ici, ce genre de choses ça se sentait. Il recommencerait à gagner après son départ, c’était un mal pour un bien. Au moins il allait pouvoir se confronter à la grandeur. Il ne comptait pas abandonner, ni même s’écraser. Il ne reculerait pas devant un combat : ses yeux brûlaient d’une ardeur rare dans le monde du combat.

Lorsqu’il entendit la première sonnerie annoncer son entrée sur le ring dans sa loge, il se dirigea en ignorant son père en direction de la salle de combat. Le public était calme à présent. Les escaméras qui avaient été changés par des nouveaux étaient pour la plupart en portés vers lui. Son image diffusée ressemblait à celle d’un condamné à mort alors qu’il agissait de la même manière que d’habitude : déterminé. Pourtant ses fans ne se laissèrent pas abattre, même s’ils n’avaient pas voté pour lui. Une salve d’encouragement s’éleva en direction du Champion en titre. Son sourire s’élevait en direction du public, et il monta sur le ring après d’être débarrassé de son peignoir qui tomba lourdement sur le sol.

- A ma droite, le très apprécié champion en titre de la salle de combat, Jonathan Cienna ! Hurla la présentatrice, déclenchant une nouvelle salve d’applaudissements. A ma gauche, la très redoutable championne du jour de la fosse aux damnés, Rebena Té Ra !

L’un était apprécié, l’autre redoutable. L’air de Jonathan était presque trop explicite quand il regardait Cristal : il avait l’impression d’être un enfant qu’on accompagnait vers son premier cours de boxe. Il soupira finalement, tournant son regard en direction de la Prédatrice. Il la salua respectueusement, et lui fit sur un ton déterminé :

- Que ce combat serve de tremplin à une nouvelle génération de combattants, ancienne champion en titre de la salle de combat… Je vous ai admiré pour toute votre œuvre !

Il attendrait que Cristal donne le départ, et quand elle le ferait il s’élancerait directement vers la jeune femme. D’une manière très méthodique, il chercherait les failles, enchainant les pas chassés. Son expression se durcirait en comprenant qu’il n’y en avait pas. Il lisait bien au-delà de ce qu’elle montrait : il savait qu’elle pourrait réaliser un geste pour le bloquer, mais il ne pouvait pas abandonner ici. Il devait créer une ouverture.

Lâchant une série de coups devant lui, il fit s’élever une grande tornade horizontale en direction de la Té Ra. Celle-ci avait pour but de masquer son avancée alors qu’il profitait de l’œil du cyclone pour s’élancer en ligne droite, arrêtant son geste au dernier moment dans les airs pour abattre non un coup de poing mais un coup de pied vers la fossette de la rousse.

Jonathan Cienna
Champion Actuel de la Salle de Combat
Jonathan observait son pied qui n’arrivait pas à faire bouger l’adversaire. Pire encore, s’il n’avait pas modéré sa propre force il se serait sûrement brisé un os. Il était doué pour le combat au corps à corps mais il avait en face de lui une pugiliste experte. Si certains pensaient que Hadès Tenryon était le meilleur puriste du monde, alors ils n’avaient pas encore rencontré cette femme qui devait lui faire concurrence. Elle était à elle seule l’incarnation d’une nouvelle génération de pirates dans les yeux du Cienna. Celui-ci ne dit cependant pas son dernier mot. Ramenant son pied au sol, il acquiesça sans prendre la mouche. Il n’avait pas vraiment le temps pour ça.

D’un geste du poing, il créerait un retour d’air du sol vers le plafond en frappant celui-ci, aux pieds de la Te Ra. Si son père lui avait demandé de créer cette technique pour soulever les jupes des femmes, il ne l’avait jamais utilisée à de telles fins. Il créait une zone de retour d’air de sorte à faire s’envoler ses adversaires, mais l’adversaire du jour était de toute évidence un rock. Cela leva cependant de la poussière, de telle sorte qu’il cherchait à s’en servir pour aveugler la Te Ra.

Alors qu’il aurait pu s’arrêter là, il se servit de sa force et de son Haki de l’Armement pour briser le sol sous la rousse. Il l’obligerait à bouger de cette façon et créerait une ouverture dans le but de l’assaillir quand elle se déplacerait. Son poing créa une série de pics d’air de façon démesurée. L’assaut aurait sûrement pu blesser n’importe quel autre combattant. Son objectif était simplement de lui infliger une coupure, pour passer outre ses défenses.

Le public était passionné par ce qui se passait sur la scène. Les parieurs se voyaient déjà gagner leur somme, mais beaucoup étaient en train d’admirer la chevelure blonde du pugiliste se soulever au rythme de ses attaques, s’opposant à la tignasse rousse qui bougeait au gré du vent. La présentatrice parlait d’une voix audible, commentant les techniques utilisées de manière à ce que tous puissent en profiter. Les membres de la salle chargés de diffuser les images changeaient régulièrement d’angle : le spectacle était plein, sous des lumières chargées de mettre en valeur les deux adversaires.

L’inflexible contre la bourrasque.

Le passé contre l’avenir.