Alors qu’il passait une journée des plus normales, marchant à travers la ville afin de trouver de l’inspiration, Obra fut abordé par une jeune femme vêtu d’un uniforme de colonelle de la marine. Cette dernière demanda dans un premier temps au scientifique s’il était bien un chasseur de prime, ce qu’il confirma sans attendre la moindre seconde. C’était très flatteur pour Obra qu’on le reconnaisse, lui qui devait toujours se justifier de ses fonctions, voilà qu’il devenait célèbre dans North Blue et que les marins commençaient à le reconnaître ! La femme fit par un peu à l’écart du reste du monde qu’elle avait une mission spéciale pour lui et qu’un chasseur de prime de sa trempe pourrait s’y résoudre. Tout en expliquant les détails de la mission, la jeune femme ne lésina pas sur le fait de mettre son magnifique corps en valeur, persuadé que cela avait de l’effet à la vue de la réaction de l’homme. En réalité, ce n’était pas tant le corps de la femme qu’il l’intéressait, lui ne pratiquant pas de relations charnelles, mais plutôt les flatteries concernant son talent : elle avait quand même précisé qu’elle lui faisait confiance pour cette mission !
Quoi qu’il en était, c’était malgré tout une situation atypique : une criminelle qui avait infiltré la marine. Le Taton ne pensait pas aux premiers abords ça possible, mais à y réfléchir, c’est une stratégie qui peut à long terme devenir viable. De plus, il fallait pour l’homme se remplir à nouveau les poches de berrys car les derniers étaient tous partis dans l’achat d’une statuette à son effigie. Ella Tagay….c’était donc elle sa prochaine cible.

Alors que plusieurs heures plus tard un bateau de la marine finissait par amarrer sans une once de discrétion, cela allait pouvoir permettre à Obra d’appliquer son génial plan. Comme il s’agissaitt d’un équipage, la femme s’était probablement liée d’amitié avec d’autres membres, il vallait donc mieux éviter de l’attaquer entouré des autres. Deux choix s’offraient donc à lui : pister la femme une fois sortie du bateau et attendre qu’une occasion s’offre à lui, ou bien directement l’aborder, se faire passer pour un grand admirateur de son travail en tant que marin, puis la mettre hors d’état de nuire une fois isolée. Bien que la première option semblait la plus efficace, la femme ayant engagé le chasseur de prime semblait pressée de voir la Tagay arrêtée, l’homme partirait donc sur la première option.
Posté sur le quais, l’ingénieur observait avec attention le bateau ainsi que les membres qui en faisaient partie. Il n’attendait qu’une seule chose pour passer à l’action et aborder sa cible : qu’elle descende. Si cela arrivait, il montrerait ses plus beaux talents d’acteur en montrant sa surprise de voir la magnifique Ella Tagay, connue pour son talent et son efficacité. Ensuite, il essayerait de lui demander un autographe et de l'emmener plus loin, espérant que le reste de son équipage n’y verrait que du feu. Le plan était prêt pour Obra, mais les choses allaient-elles se passer comme il le désirait ?

Et bien, les choses étaient bien plus simples que prévues ! Alors qu’à l’habitude Obra devait toujours improviser de nouveaux plans, car les anciens avaient toujours une faille, ici il n’y en avait visiblement pas ! Au contraire, la femme que devait neutraliser le chasseur de prime était, il semblerait, des plus naïves, croyant sans l’ombre d’un doute qu’elle avait face à elle un admirateur. Elle prit de grands airs face à l’homme, dégainant son pinceau et sa peinture. Alors qu’il s'apprêtait à annoncer à la femme qu’il possédait du papier de bonne qualité plus loin, la femme se mit à dessiner à même le sol. Le Taton regarda le dessin un instant, clignant les yeux de manière succincte. Etait-ce réellement ce qu’il voyait là, sur le sol ? Avait elle vraiment dessinée ce qu’il pensait voir ? La réponse était oui ; c’était bien une large bouse. Pour le coup, la représentation du dessin semblait à la hauteur de son talent, ce qui donna à l’homme une grande difficulté pour garder son sang-froid.

Un peu perplexe aux premiers abords, Obra finit par déduire que sa cible était une personne un peu extravagante et avec ce genre de personnes il vaut mieux rester naturel et faire semblant de les comprendre. Dans le plus grand des naturels, sans même sans rendre compte lui-même, le Taton avait généré une poire qu’il commençait à déguster en observant Ella. Finalement, les deux purent s’écarter plus loin, ce qui laisserait probablement une occasion d’agir.

Cherchant un lieu des plus discret, les deux finirent par se rendre dans une ruelle visiblement déserte de population. Le Taton avait bien fait attention à ses arrières tout en dégustant le nectar de son fruit, mais il semblait plutôt en sécurité, personne ne semblait avoir fait attention à eux. Une fois isolés, encore nul besoin de se justifier, voilà que la femme aux cheveux de tentacule s’extasiait sur les murs, comme si ces derniers étaient des toiles immenses sur lesquelles elle pourrait déverser son florilège de couleur pour transformer ce lieu sombre en une boite de nuit sous acides.

La femme était en admiration pour les murs, elle avait donc visiblement entièrement oublié la présence du chasseur de prime, c’était le moment pour agir. C’était toujours un peu étrange de devoir attaquer une personne semblant si faible, si innocente, mais si sa tête est primé c’est certainement pour une très bonne raison. Si ça se trouve, cette femme a déjà commis de multiples meurtres en série, ou alors elle a fait le portrait d’un noble qui l’a dégoûté aux plus haut point, allant jusqu’à la primer. Quoi qu’il en soit, nul besoin de réfléchir à cela, bientôt, tout ça ne serait que de l’histoire ancienne. Se saisissant de son fusil, le Taton utilisa ses capacités de maudit et y généra un ananas à l’intérieur. Finalement, il leva son arme en direction du crâne de son adversaire et fit feu.

“- Bon, il est temps de se mettre au travail.”

L’homme ferma les yeux au moment du tir. En effet, même si la chasse était des plus intéressantes, il s’était un peu attaché à la femme en face de lui malgré une unique discussion avec comme conclusion un étron au sol. Cependant, c’était ce caractère déjanté qui lui plaisait, étant lui-même parfois des plus étranges. Il espérait que ce tir pourrait l'assommer sans la faire souffrir davantage, il faudrait passer ensuite à autre chose.

Flute, c’était manqué. Une fois encore, le Taton avait fait preuve de beaucoup d’arrogance, persuadé qu’il arriverait à défaire son adversaire en un unique coup. Pourquoi, alors qu’il aurait dû se sentir agacé, vexé ou même contrarié, il n’était rien. C’était étrange et il était incapable d’en expliquer la raison, mais l’ingénieur se sentait soulagé. Face à lui, la femme poisson était toujours aussi et enthousiaste. Dans un sens, l’ingénieur avait l’impression de se voir comme dans un miroir. Il y a encore quelques années, il avait un enthousiasme similaire, se moquant des jugements d’autrui, se contentant de faire ce qui lui plaisait ! Serait-il devenu barbant avec ses voyages ?

Bien trop de question que se posait l’homme, faisant légèrement abstraction de son entourage jusqu’à ce que la femme vienne saisir doucement la main, y déposant un pinceau. Obra observa le pinceau pendant un long moment, réfléchissant à sa condition. Il avait été engagé pour capturer cette criminelle, mais il n’en avait pas du tout envie. Au final, un chasseur de prime est libre de choisir ses proies. Tant pis pour les berrys, cette femme venait de lui rappeler une chose importante : il faut toujours rester soi-même !

Un grand sourire s’affichait sur le visage du chasseur de prime alors qu’il serrait fortement le pinceau entre ses doigts. Il se mit face à la peintre avant de la prendre dans ses bras, la serrant contre lui.

“- Merci ! Merci de me faire prendre conscience de tout ! Commençons une œuvre !”

Même s’il avait probablement à faire à une criminelle, le Taton avait choisi son camp : celui de la femme poisson. Elle n’était pas agressive, ne donnait aucune raison de se méfier d’elle et avait un caractère parfait qui convenait à l’homme en blouse. C’est d’ailleurs la première fois de sa vie qu’Obra ressentait ce genre de chose pour un autre être humain, était-ce de la sympathie ? Etait-ce plus que ça ? Il n’en savait rien, mais il se sentait des plus joyeux. Ainsi, à deux, ils entamèrent une œuvre qui serait probablement la meilleure pour eux deux, mais la plus catastrophique aux yeux du monde entier.

La joie était à son paroxysme, c’en était presque indécent. Lorsqu’il tenait la femme poisson dans ses bras, son corps brûlait de désir. C’était la première fois que l’ingénieur ressentait ce genre de chose, lui qui n’avait jamais été intéressé par les autres être vivants. En face de lui, Ella semblait ressentir le même genre de chose. Il semblait au Taton avoir déjà entendu parlé de ce phénomène dans un vieux livre. D’après ses souvenirs, cela s’appellerait “l’amour”, mais pouvait-il se permettre de croire en de telles sottises en temps que scientifique ? En attendant, il comptait bien profiter de ces moments de bonheur.

Malheureusement pour lui, des bruits sourds vinrent briser l’accolade des deux. Tout d’abord, le hurlement du nom de “Giny”, puis celui de “Ella”. Ella ? C’était elle, pourquoi quelqu’un hurlerait son nom ? A moins qu’il ne s’agisse d’un autre chasseur de prime intéressé par la prime. Après tout, il avait été lui-même attiré pour cette raison, mais c’était impensable de laisser quelqu’un avide d’argent lui prendre sa dulcinée. L’homme à la blouse vint saisir la Tagay au poignet, l’invitant à le suivre :

“- Il faut fuir, je crois qu’un chasseur de prime est à notre trousse ! On doit se mettre en sécurité, je ne les laisserais pas t’atteindre !”

Si elle se laissait tirer, ils courront tous deux dans la direction opposée au hurlement, fuyant le plus rapidement possible afin de semer celui qui voulait du mal à la peintre. Egalement, afin d’assurer un minimum ses arrières, le Taton générerait une flopée de noix qu’il laisserait au sol derrière lui. Si jamais une personne passait ici sans faire attention, il glisserait et tomberait au sol, permettant de gagner de précieuses secondes.
Pour une fois dans sa vie, Obra mettait tout en œuvre pour protéger une autre personne que lui-même. Il ne comprenait pas pourquoi il le faisait, mais il ne voulait pas prendre le temps d’y réfléchir, le temps était à l’action et non à la réflexion.

Les deux tourtereaux avaient commencés à prendre la tangente, fuyant celui qui avait visiblement décidé de prendre en chasse la pauvre femme-poisson innocente. Curieux de voir son opposant, le chasseur de prime décida de jeter un regard derrière lui durant sa course, mais il n’eut qu’une vision d’horreur. Qu’était-ce que cette chose ? C’était…. une créature ? On aurait dit un amas de gélatine violette et fumante, formant une très vague forme de vieillard. Était-ce une créature ou un utilisateur de fruit de démon ? L’heure n’était pas à ce questionnement, mais à la fuite. Heureusement pour eux, la créature à leur poursuite était visiblement dans le piège de noix, laissant un temps non-négligeable pour se cacher.

Ayant une certaine avance, le Taton décida d’emmener Ella avec lui dans une nouvelle ruelle, espérant qu’ils seraient suffisamment dissimulés ici.
Même si la femme poisson à ses côtés était encore sous les feux de l’amour, ne se rendant pas compte de la dangerosité de la situation, le Taton lui commençait à ressentir du stress quant à ce poursuivant. Malgré tout, voyant le regard profondément amoureux et passionné d’Ella, il décida de jouer le coup pour le coup avec elle.

“- Quand faut y aller, faut y aller”

Grâce à ses capacités de maudit, l’homme généra un fruit de petite taille en forme de cœur. Ce dernier était un des fruits mystérieux qu’il avait pu découvrir au fur et à mesure de ses voyages : une amande qui rend profondément amoureux celui qui la mange. Ca n’était pas utile quant au poursuivant, mais au moins, ça permettrait de se changer les idées.
Obra mit le fruit en bouche, l’avalant en un rien de temps avant de voir le monde autour de lui changer de couleur. La ruelle qui était jusque là sombre venait soudainement de se teinter de rose et le ciel auparavant bleu se voyait traverser de toutes les couleurs de l’arc en ciel. Enfin, celui qui lui tenait la main était toujours présente, mais le Taton ne voyait désormais qu’une déesse, une femme que personne ne pourrait jamais égaler, la plus belle femme du monde.
Dans son délire amoureux, l’homme se rapprocha soudainement de la femme aux tentacules en guise de cheveux, lui déclarant sa flamme dans un discours des plus passionnées.

“- Ella… je crois que toute ma vie j’ai attendu quelqu’un comme toi, une personne capable de me comprendre, une personne comme moi. Je n’ai plus envie de te laisser, je veux qu’on reste ensemble, je veux qu’on habite ensemble, qu’on bravisse des sommets ensemble. Je veux pouvoir être avec toi lorsque tu dessineras des portraits ou que tu sois là lorsque je mettrais au point des nouvelles inventions. Restons ensemble pour toujours !”

Suite à ce discours enflammé, le Taton tenterait d’approcher ses lèvres encore vierges de tout autre contact humain de celle d’Ella, cherchant à lui donner son premier baiser.
Les effets de l’amande d’amour étaient des plus efficaces, tout le stress qu’avait accumulé l’ingénieur avait disparu en un instant, mais il en avait oublié toute la menace que représentait Nils. Il ignorait également que dans l’ombre, son employeuse la surveillait et que les choses allaient probablement finir par encore s’empirer...

La sensation du contact entre les deux langues étaient exquise. Alors que quelques heures auparavant il aurait violemment repoussé l’idée d’être aussi proche d’un autre être vivant, le voilà en train de mélanger ses fluides corporels avec cette femme poulpe. La femme enlaçait le chasseur de prime tandis que ce dernier l’entourait de ses bras, les deux tournant en rond, comme s’ils avaient entamé une valse des plus étrange. Étrangement, le Taton n’était pas repoussé par les mélanges de salive et d’encre. Dans sa vie, il a été amené à consommer de grandes variétés de fruits dont certains extrêmement repoussant. A côté, l’encre de cette femme était un divin nectar que même la plus belle des pommes ne pourrait envier. L’ingénieur s’en délectait, en profitant tellement qu’il pourrait fusionner avec son corps.

Alors que le nouveau couple profitait de leur amour, l’homme à la blouse remarqua la présence de la femme qui l’avait originellement engagé à une dizaine de mètres d’eux, les observant. Comme pris de peur, l’homme relâcha les lèvres de la douce Ella avant de s’interposer entre elle et l’autre femme, probablement voyeuriste.

“- Qu’est-ce que tu me veux ? Vas t'en, je ne te laisserais pas t’en prendre à cet être magnifique ! Je refuse de croire que cet ange remonté des profondeurs de l’océan soit une criminelle, et même si c’était le cas, je refuse de m’en prendre à elle. Si tu lui veux du mal, tu vas devoir me passer sur le corps.”

Le Taton pointa du doigt la femme habillée comme une colonelle de la marine d’un ton arrogant, de l’encre noir coulant encore au niveau de ses lèvres. Il avait la main portée au niveau de son arme, prêt à réagir en cas d’attaque de la femme. Pour la première fois, Obra voulait protéger une personne et non lui-même, il était hors de question de la lâcher pour qu’elle finisse derrière les barreaux, l’homme ne l’aurait pas supporté.

Visiblement, la femme d’en face ne désirait pas comprendre l’amour fou qui existait entre le scientifique et la femme poisson. De ses grands airs pleins de jugement, elle dévoila son sabre ainsi que sa gourmette. A-4 ? C’était un format d’impression des plus classique, mais pourquoi cette femme avait-elle été jusqu’à l’inscrire sur un bracelet ? Était-elle particulièrement attirée par ce genre d’affiche ? Elle était probablement folle.
Pour la première fois de sa vie, Obra allait devoir affronter un membre de la marine et cela ne le réjouissais absolument pas. Heureusement pour lui, la femme poisson voyait le danger s’approcher et étala de la peinture grise sur le couple.

“- Merci ! C’est exactement ce qu’il nous fallait !”

Le chasseur de prime, même s’il n’avait aucune idée de ce que venait de faire Ella, était persuadé que son intervention était des plus utiles et qu’elle avait certainement utilisé une technique secrète ou quelque chose du genre afin de pouvoir renforcer ses capacités contre son adversaire.
Exacerbée, la colonelle fini par dégainer son sabre, étant visiblement habituée à l’utiliser. Cependant, alors qu’il pensait qu’elle se jetterait sur le couple pour combattre, elle se contenta de lancer un juron avant de disparaître. Est-ce qu’elle venait de s’enfuir à toute vitesse ? C’était impressionnant, mais le hurlement qui se faisait entendre l’était davantage. Au bout, il y avait un homme, un vieillard visiblement. Il était difficile de dire son état de pensée, mais il semblait actuellement avoir de mauvaises pensées. Il avait un costume de contre-amiral, la femme aurait appelé son supérieur en renfort ? Aurait-elle eu à ce point peur de la peinture de la peintre ?

Alors qu’il comptait emmener sa douce plus loin, une phrase interpella le Taton. “C’est pépé” ? Elle connaissait donc cet homme ?

“- Ella, tu connais ce vieil homme ? Il est dangereux ?”

Obra se contenterait dès lors de surveiller les actions du vieillard, prêt à esquiver si jamais il tentait de l’attaquer. Cependant, il s'interposerait si jamais l’homme venait à s’en prendre à sa bien-aimée, préférant souffrir à sa place. Dans le doute, il aurait chargé son arme de quelques fruits, prêt à intervenir et à combattre cet homme qui ne semblait en rien être une menace malgré son rang.

C’était à n’y rien comprendre même en réfléchissant bien. La colonelle était remplacée remplacée par un contre-amiral et ce dernier se révélerait donc être le grand-père d’Ella ? De ce qu’il pouvait voir aux premiers abords, le vieillard au regard noir ne semblait pas agressif envers Ella, il semblait même protecteur. En y repensant, quelles avaient été les mots de sa bien aimée déjà ? “C’est mon papy…..c’est mon capitaine…”.

Alors que la femme poulpe essayait de convaincre le vieil homme, Obra lui venait de subir un bug mental. Dans son plan mental, Ella était une criminelle et il s’était mis à dos la marine pour avoir refusé de l’attaquer, mais dans ce cas, pourquoi indiquait-elle faire partie de son équipage ? Et s’il n’avait pas la marine à dos, pourquoi ce contre-amiral semblait si agressif ? La situation était parfaitement incompréhensible, cela lui occupait tellement l’esprit qu’il ne semblait même plus faire attention à ce qui se déroulait autour de lui, ignorant la discussion entre sa bien aimée et le marine.

Soudain, l’ingénieur eut un éclair de génie. Alors que son interlocuteur d’en face tendait sa chaussette, l’homme à la blouse s’écria :

“ - J’ai compris !”

Lourdement, il vint s’asseoir lourdement sur le sol, commençant à générer devant lui une grande quantités de fruits : pommes, melon, pastèques, bananes, et bien plus encore. Alors que les fruits apparaissaient, dévoilant les capacités de maudit de l’homme, il expliqua la situation :

“- En fait, la colonelle était en train de me tester, pour voir si j’étais capable de voir un piège qui me serait tendu ! Et lorsqu’elle a vu notre compatibilité avec Ella, elle a prévenu son supérieur, vous, pour qu’on fête ça tous ensemble ! Du coup, dégustons tous ensemble ces fruits de bonnes qualités et rigolons de la réussite du test !”

Le Taton commença alors à croquer une des pommes parfaitement fraîche, totalement insouciant de ce qu’il pouvait se passer autour de lui. Comment allait réagir le contre-amiral suite à cette réaction parfaitement inopinée ?

C’était à n’y rien comprendre même en réfléchissant bien. La colonelle était remplacée 9 mois ? C’était une période de temps particulièrement précise. Le chasseur de prime avait déjà entendu parler d’une telle durée, mais il était parfaitement incapable de se souvenir de ce qu’elle signifiait. Etait-ce le temps de péremption d’un aliment particulier ? Le vieil homme enchaîna en parlant de maladie sexuellement transmissible, mais qu'était-ce ? Obra n’était pas un grand fanatique des relations humaines, ignorant presque tout des comportements normaux et même de la reproduction. La réflexion continua à partir dans cette direction lorsque le vieillard confirma qu’elle était enceinte. Etait-ce comme ça que l’on donnait naissance à une progéniture ? Lorsqu’un éprouvait une attirance intense envers quelqu’un ? L’inventeur venait prendre dans ses bras la femme à ses côtés, prenant un air des plus sérieux.

“ - Je serais très attentif ! Je ne sais pas ce qu’implique le fait d’être enceinte mais je ferais le nécessaire pour que ça se passe bien ! Expliquez moi tout en détail et ensuite, nous pourrons parler de tout ça en rigolant un peu plus autour de quelques jus de fruits !”

L’ingénieur n’était pas aussi rouge que celle qu’il tenait dans ses bras mais il possédait malgré tout un air très niais. Malgré tout, il restait très intrigué par la question d’Ella, comment pouvait-on savoir la différence entre un garçon et une fille ? L’homme posa immédiatement cette première question à Nils…

“ - Tout d’abord, comment sait-on si c’est un enfant ou une fille oui ? Je suis d’accord avec elle, j’aimerais connaître ce qui viendra de nous ! Expliquez-nous, nous sommes tout ouïe !”

L’avenir était donc décidé ici même ? Obra devrait-il abandonner sa vie de chasseur de prime pour se concentrer sur sa nouvelle femme ainsi que le fait d’élever un jeune fruit ? C’était une nouvelle très acide pour lui, très difficile à avaler. Lui qui désirait tant se faire connaître par les criminels comme leur pire ennemi, il allait désormais devoir laisser tomber tout cela… ou bien alors…

Se saisissant de la main d’Ella, il regarderait le vieux Nils droit dans les yeux, le regard très sérieux, lui proposant une alternative.

“ - Un autre choix est possible ! Ella pourrait m’accompagner ! Je ne mène pas une vie facile, j’ai parfois des criminels qui m’en veulent, mais je mettrais tout ce qui est en ma possession pour la protéger, pour être sûr qu’il ne lui arrive rien ! Que si je mente, Mijushike se ramène et me renvoie lui-même de ma place au sein de l’Alliance des chasseurs de primes !”

Puis finalement, Obra se retournerait vers sa femme, lui serrant de plus belle les mains, les yeux amoureux mais également plein de doutes.

“ - Ella…. accompagne moi. Je sais que c’est difficile, mais si tu as son approbation, je ferai tout ce qui est en monde possible pour que tu sois en sécurité. L’Alliance possède des moyens, nous pouvons nous assurer que tu sois bien protégé et que… notre descendance le soit également.”

Finalement, le Taton viendrait poser sa main contre son coeur, la deuxième toujours en possession de sa femme. Il serait complètement tourné vers le vieillard, attendant visiblement son approbation pour cette demande. S’il acceptait, les deux pourraient finalement vivre leur rêve idyllique, l’un avec l’autre.

Aïe, ça n’avait pas eu l’effet escompté. Au contraire même, c’était pire que ce qu’il aurait pu imaginer ; le vieillard semblait être un maudit, probablement un logia vu l’apparence de couleur violette et toxique qu’il venait de prendre. L’homme s’avançait pas à pas vers le Taton, laissant résonner les bruits de cannes comme le ferait un envahisseur qui voudrait terroriser un citoyen innocent. Ella, elle, était venue se cacher derrière le chasseur de prime, quelque peu terrorisée. C’était donc comme ça que finirait le Taton ? Empoisonné à mort pour sauver la femme de sa vie ? C’était probable oui. Heureusement, le rythme lent de l’homme empoisonné laisserait à Obra le temps d’offrir une dernière tirade pour sa femme.

“ - Ma chère Ella, je comprends la réaction de ton capitaine. Même si jamais je dois périr, n’oublie pas que je tiens à toi, même dans l'au-delà, personne ne sera capable de te témoigner autant d’amour. Tiens, prends ça, c’est une grappe de raisin, elle représente l’amour que j’ai pour toi. Quand tu mangeras ces délicieux fruits, tu penseras à nous et je te demanderais de ne pas être triste. Crois-moi, c’est un honneur pour moi que de mourir en te protégeant.”

Suite à cela, Obra se tournerait vers le vieillard, générant au creux de sa main une gèche, un fruit très particulier connu presque exclusivement d’Obra. D’un geste vif, il avalerait le dit fruit avant d’écarter les bras, faisant barrage au grand-père. Soudainement, quelque chose d’étrange se passerait : le corps de l’inventeur de mettrait à briller, comme si de la lumière émanait de l’intérieur de son corps. En effet, l’organisme du Taton avait pour habitude de s'adapter à sa nourriture. En mangeant cette gèche, fruit particulièrement lumineux, cela avait pour conséquence de rendre son corps resplendissant, littéralement. Les bras toujours levés, lumineux et faisant barrière tel un Jésus des temps modernes, il dirait quelques mots qui seraient probablement ses derniers.

“ - Je suis prêt à mourir pour elle, que les fruits m’en soient témoins, je la protégerais jusqu’au bout.”

La situation devenait catastrophique, mais après tout, Ella et l’autre personne étrange avaient tous les deux raisons : il n’y avait pas d’autres possibilités que fuir. D’un regard laissant transparaître une certaine tristesse, le chasseur de prime lancerait un dernier regard à la femme poulpe afin de lui témoigner une dernière fois son amour d’ici à ce qu’il se retrouvent un jour. Il lui prononcerait également quelques phrases afin de ne pas partir comme un voleur, sans un mot.

“ - Nous nous retrouverons Ella, c’est promis ! Je ne t’oublierais jamais !”

Suite à cette annonce, les bottes à réaction du chasseur de prime viendraient s’activer, lui faisant prendre une grande hauteur afin d’atteindre les toits et puis, finalement, ce dernier se mettrait à courir, courir sans s’arrêter, ne pensant qu’au fait qu’il venait d’être séparé de l’amour de sa vie par la force.

“ - Tellement je t’aime, je pense à toi, tellement je t’aime, je rêve de toi.”

Le Taton se mit à fredonner ces quelques mots alors qu’il continuait à courir, se retrouvant sur ce qui ressemblait désormais à un pont. Il n’y avait que cinquante-sept lunes à attendre ? C’était quelque chose de faisable pour un asocial comme Obra, mais pourtant…. il ne pouvait s’empêcher de ressentir un certain pincement au cœur. Presque deux mois sans revoir sa moitié ? Allait-il le supporter ?

Finalement, le Taton se retrouva au milieu de plusieurs habitations, ne sachant même plus où il se trouvait. Il errerait dans les rues, cherchant dors et déjà à imaginer comment se passeraient les retrouvailles des deux tourtereaux.