L’eau giclait de part et d’autre à chaque fois que la main venait rencontrer la surface marine. L’océan se fendait sous les coups brutaux de la guerrière qui propulsait son corps entier à la force de ses seuls bras. Oui, Rébéna avait décider de nager le crawl sans faire appel à ses pieds alors qu’elle revenait de West Blue, avait franchit le Calm Belt en repoussant les monstres marins et qu’elle faisait maintenant route vers Redline afin de l’escalader et ainsi retourner au Nouveau Monde. C’était tout à fait le meilleur moment pour se soumettre à ce genre d’exercice non ? Il fallait dire que la Té Ra mobilisait son corps à longueur de journées, de semaines, de mois, d’années. La douleur causée par la fatigue des muscles était son pain quotidien dont elle se nourrissait avec avidité et délectation. Une rigueur absolue dans cette vie qui n’était qu’un long entrainement sans fin à ses yeux. Alors certes de temps à autre elle se faisait une tendinite, un claquage ou une autre blessure légère de ce style, mais cela n’allait pas l’empêcher de suivre son rythme de vie pour autant. C’était en fin de compte une journée comme les autres pour la navarque… Non c’était faux. C’était une journée assez ennuyante en raison de la platitude de l’océan causé par ce ciel au grand soleil sans nuage et avec très peu de vent. Il était bien plus intéressant de fendre les vagues, de briser les dynamiques marines que de se laisser porter sans avoir à rencontrer de résistance. La situation actuelle était moins fatigante, mais bien moins amusante. Même en retenant sa respiration, maintenant sa tête sous l’eau alors que son corps évoluer dans la mer telle une torpille, la rousse était en mesure de voir les rayons du soleil s’enfoncer en direction des profondeurs, illuminant bien davantage le monde marin que lorsqu’une tempête se déclencher.

Tandis qu’elle doublait un banc de thons artéronomes, quelque chose vint divertir l’esprit de l’originaire d’Himitsu Shima. Des voix humaines venaient de pénétrer dans le périmètre de son fluide perceptif. Accélérant davantage, Rébéna se demanda qu’est ce qu’un navire venait faire sur sa trajectoire, mais il était après tout naturel que pour franchir les mers la nageuse soit contrainte à passer au travers de routes maritimes. Soit, il faudrait faire avec… Néanmoins il était impératif de vérifier la nature et les enjeux de cette rencontre afin de s’assurer qu’aucun souci ne pourrait en émerger. Peu importait qui se trouvait à son bord, l’Alpha Predator soumettrait ce vaisseau de la proue à la poupe pour qu’il respecte ses conditions avant qu’elle ne daigne reprendre la mer. Approchant à grande vitesse, chaque mouvement de ses bras la propulsant un peu plus vers l’avant en soulevant quantité d’eau qui retombait en une fine pluie derrière elle, la Té Ra ne freina pas à l’approche de l’embarcation. Cela aurait pu donner l’impression qu’elle souhaitait le percuter, mais en réalité elle s’enfonça dans l’eau pour remonter en diagonale et en jaillir dans une explosion aqueuse. Son corps s’éleva dans les airs, dessinant une trajectoire parabolique avant qu’elle ne retombe directement sur le pont supérieur du navire, atterrissant en faisant une roulade avant. Elle demeura le genou posé au sol, la tête baissée avant que quelqu’un commence à s’avancer vers elle. C’est alors que la dirigeante de la Ligue Egéenne de Milon ouvrit soudainement les paupières en soulevant le menton pour transpercer de son regard la personne en question avant de se redresser.

-Que faites-vous sur ma route ?

-S’entraîner par un temps si peu mouvementée au contrôle de votre navire… Vus devez en être aux balbutiements de la navigation j’imagine. Si vous comptez un jour vous rendre dans le Nouveau Monde, c’est à des calamités bien pire qu’il faudra vous préparer. Une fois que vous maîtriserez bien l’usage du bâton, vous pourrez tenter avec une vraie lame après tout.

Ce n’était pas une référence aux armes que portait le gouvernemental, mais bien une métaphore comparant cet « apprentissage » à l’appréhension des bases du combat via des armes non tranchantes avant de passer aux choses sérieuses, réelles et concrètes par l’emplois d’armes blanches. La métaphore était d’ailleurs spécifiquement choisie en raison du style de combat apparent de l’homme qui lui faisait face présentement. Un sacré bonhomme qui se présenta dans les formes. Un simple commandant ? Les quelques gestes qu’elle avait pu observer de lui ne correspondant pas aux mobilités différenciées dont été capable un simple commandant de la Marine, les sommités des bas-gradés mais qui ne valaient pas un colonel qui eux étaient les unités de base avec lesquelles il fallait composer pour former les élites de la Marine. Mais même lesdits colonels étaient des élites en formation. Oui, cette brindille valait au moins un colonel, mais il ne semblait clairement pas être une proie intéressante, encore moins un prédateur à défier. Cependant, lorsque son nom atteignit les oreilles de la rousse, cette dernière fronça rapidement les sourcils.

-Ce nom me dit quelque chose… Où est-ce que je l’ai déjà entendu.

Ignorant pour l’heure la suite de la prise de paroles du Keigo, elle farfouilla dans sa mémoire d’où pouvait lui venir cet écho lui disant que « Sakuga Keigo » avait déjà été prononcé en sa présence. Cela lui reviendrait peut-être que c’était Ishtar de Lérhane qui lui avait parlé de certaines de ses connaissances à un moment donné, mais pour l’heure cela ne semblait pas se rappeler à son bon souvenir. Il fallait dire que l’originaire d’Himitsu Shima avait des choses biens importants à classer en ces souvenirs du temps passé.

-Rébéna Té Ra, déclara sans aucune expression et sur un ton monocorde là Psyjique, ne montrant ni joie, ni haine, ni amitié, ni colère. Navarque de la Ligue Egéenne de Milon basé à Agnôstos. Si jamais vous souhaité défier des combattants valeureux alors que vous êtes de passages sur le Nouveau Monde, passé y faire un tour et participer à une compétition… compléta-t-elle en détournant les yeux du Keigo.

Ce n’était pas que son regard qui la fixait la mettait mal à l’aise ou l’intimidait. À l’inverse, cela n’avait aucune importance et elle se contentait de l’ignorer comme si c’était un simple élément du décor. Tout dans son attitude montrait une décontraction certaine. Elle ne sentait guère menacer, tapotant le sol du pied en se demandant si elle pouvait détruire l’embarcation par le seul emploi de Raem, néanmoins tracter le navire jusqu’à sa destination en nageant représenterait un exercice bien plus intéressant et efficace qu’une simple décharge de puissance physique. Le corps devait être à l’épreuve du temps long et non simplement de l’instantanéité.

-Un compliment bien inutile. Il n’y a rien de bien sorcier à nager dans la mer de Grandline. Tentez une traversée de Calm Belt à la nage et vous comprendrez en quoi consiste un trajet difficile.

Rébéna marqua une pause avant d’observer le pont et l’équipage présent d’une manière las.

-Et vous vous rendez où comme cela ? J’imagine que vous n’avez pas effectué cette virée au large juste pour jouer au timonier des airs… déclara-t-elle en repensant à la voix qu’elle avait sentit situé plus haut que les autres vers les cieux. Remarquez, ça serait bien le genre des mouettes, souffla-t-elle dans un rictus de malice alors qu’elle faisait volontairement un amalgame entre l’armée navale en faisant usage comme symbole et l’animal lui-même.

Un air de défi dans le regard, comme si elle attendait à ce qu’on tente de s’en prendre à elle, voire même qu’elle invitez à le faire par sa posture pleine d’ouverture, la Té Ra ramena son regard vers celui du Keigo. Dans les iris de la rousse brulait alors une flamme d’une grande intensité, la lueur sauvage d’un lion qui attendait de bondir sur sa proie alors même qu’ici elle demandait à la proie de bondir dans ses crocs, cette proie ci ne valant même pas la peine de se déplacer soi-même.

-Encore un ange ? siffla-t-elle. Vu comment il parait que votre mer blanche est relativement paisible, c’est à se demander pourquoi vous la quitter… Certainement que le calme est trop oppressant. Je peux comprendre ça. Enfin, je me base surtout ce que m’a racontée Ishtar. Je ne sais pas à quel point cette dévergondée a raison… Cela m’étonnerai que je vous ai retenu pour cela, une si petite prime n’attire pas mon attention et je ne lis pas très souvent les histoires de Justice gouvernementale.

La rousse posait son regard sur l’avis de recherche qu’agita presque fièrement ce membre de la Marine. Alors comme cela il était encore possible d’obtenir une grâce et voir sa prime annulée ? Elle se demandait bien quelles étaient les raisons qui avaient poussé un juge à porter un tel jugement bénéfique à l’heure des Décrets Décimas et autres lois constantinistes anticriminels.

-Je ne sais pas ce qui vous a poussé à rallier l’armée du Gouvernement Mondial, mais j’espère pour vous réussirai à vous créer une place. Si c’est pour demeurer commandant, ça ne valait clairement pas la peine, maugréa la demoiselle en replaçant une de ses tresses qui dansait au vent pour la caler derrière son oreille. Toute personne venant s’inscrire est la bienvenue. En tout cas, cette ambition démesurée vous portera peut-être au sommet. Personne ne vous aidera à faire de vous ce que vous désirez être. Il faut compter uniquement sur vous-même pour réussir à atteindre vos objectifs.

Le jeune homme ardent ne tarda guère à répondre aux provocations avec une technique assez basique. Le rokushiki était un art martial gouvernemental devenu assez répandu à l’heure actuelle dans ce monde, ce ne serait pas la première ni la dernière fois qu’elle verrait un kamisori. Alerté par son fluide perceptif, l’originaire d’Himitsu Shima n’eut aucun mal à couvrir sa gorge de haki de l’armement de manière précise et localiser à l’endroit du point d’impact. Ne bougeant pas d’un pouce, comme si cela n’était rien, elle se contenta de continuer de répondre aux propos du jeune homme.

-Je ne vois aucune raison de vous accorder un échange de coups. Tentez de me blesser si ça vous chante, mais rien de ce que je peux voir pour l’instant ne m’incite à perdre mon temps ou mon énergie inutilement. Ce serait aussi pertinent que perdre son temps à écraser toutes les mouches qui tournent dans une pièce. Néanmoins mon temps n’est pas extensible. J’ai des délais à tenir alors si vous souhaitez gagner un minimum d’estime à mes yeux ayez au moins l’obligeance de sortir le grand jeu rapidement. Faites moi perdre mon temps inutilement et je réduirai votre navire à l’état d’épaves.

A mesure qu’elle parlait, la flamme dans ses yeux s’agrandissait, menaçant d’en jaillir pour s’étendre sur l’horizon, sur le monde et embraser tout les environs et tracter vers les enfers celui qui tentait de la défier et qu’elle transperçait de son regard. Allait-il se montrer à la hauteur. Il aspirait à devenir le plus grand bretteur de tous les temps. Pour cela il devrait surpasser Gold Roger lui-même. Qu’il fasse ses preuves, qu’il se saisisse de son destin s’il tenait tant que ça à marquer l’histoire pour l’éternité. S’il ne parvenait même pas à lui faire employer son haki de l’armement avancée, elle n’aurait aucun scrupule à le déposer aux portes de la mort. Le prédateur alpha ne ferait qu'une petite bouchée d'un pigeon qui se croirait rapace.

-Celle-là même oui. Je devais l’entraîner. Elle a du potentiel mais se retiens encore trop. Trop prompt à se retenir, à se montrer « sage » dans l’attitude et ne pas oser exploiter l’intégralité de son potentiel. Pour Kosenjobi, que vous pourrez certainement recroiser à la Ligue si vous finissez par vous rendre à Agnôstos, c’est certainement un modèle de vertu et une personnalité sur qui compter. Néanmoins, de mon point de vue cela nuit à ses instincts primaires d’être ainsi trop maîtrisé. Cela a assurément des avantages stratégiques j’en conviens, mais cela se fait au détriment de sa force brute par bien des aspects alors que le Nouveau Monde est un lieu où règne la loi du plus fort. Si vous êtes son ami d’enfance, cela doit expliquer pourquoi j’ai déjà entendu votre nom, néanmoins ne pensez pas que je vous accorderai le moindre intérêt supplémentaire car vous êtes une connaissance d’une connaissance.

La déclaration qu’il fit par la suite amena la rousse à l’observer de bas en haut.

-Je conviens tout à fait que vous avez plus de capacités qu’un simple commandant. Tout guerrier digne de ce nom serait en mesure de le deviner par votre gestuelle. Néanmoins, j’ai l’impression qu’il vous reste encore des progrès à faire pour être digne de vos aspirations. Il vous faudra a minima vous montrer digne de l’amiral Sorafuka si vous ne voulez pas qu’un Mifune vous rie au nez le jour où vous le défierai comme tant d’autres dans l’espoir de récupérer le titre de Sword Master. Vous n’êtes pas encore à ce stade selon mon ressenti, mais peut-être me donnerai vous tort en dévoilant des techniques secrètes.

Attendant que l’attaque vienne, Rébéna observa sans bronché la métamorphose de son interlocuteur. Si elle ne disait, un éclat d’amusement brillait dans ses yeux. Elle n’était pas impressionnée ou surprise, simplement amusé. Le jeune homme avait de la ressource et cela ne voulait pas se révéler comme une marque d’irrespect. C’était simplement l’état des choses. Susciter un simple intérêt chez la navarque était suffisant comme marque de reconnaissance pour la majorité des Polémarques de la Ligue. D’un regard circulaire, l’originaire d’Himitsu Shima observa le vent se rassembler et couvrir en tournoyant les lames multiples du bretteur. Un style pur de vent, cela était parfaitement cohérent avec ce qu’il débittait depuis le début, à savoir manier la navigation par le souffle du vent lui-même. Etant elle-même puriste, la Té Ra savait les efforts qu’il fallait déployer pour parvenir à pousser son art à ce niveau. Néanmoins, la valeur que la rousse accordait à cela était depuis longtemps un prérequis pour mériter l’appellation de guerrier. Les puristes qui n’étaient pas capable de maîtriser un style pur actif ou passif, ou s’engager dans une voie équivalente, ne faisaient que jouer à se battre. Le véritable combat, c’était celui des personnes dans ce genre qui dépassaient les limites de l’humanité pour pousser la guerre vers son sens le plus absolu. Son fluide perceptif l’avertit des intentions de son opposant et lui permit de s’adapter en conséquence.

-Lethal Blade : Rain

Utilisant son shigan personnel sur son index couvert de fluide offensif, Rébéna contra les assauts d’estoc en touchant la pointe des armes avec son doigt et fit de même en repoussant les tranchants. Le vent qui déferlait menacer certainement beaucoup de s’envoler, néanmoins la Té Ra ancrait ses appuis correctement dans le sol.

-Iron man.

Quand les assauts commenceraient à faiblir, l’ancienne championne de la salle de combat cessa de contrer les attaques pour employer le tekkai mêlé à l’apparition de plaques de haki de l’armement défensif. Son regard demeurait rivé sur son adversaire, attendant de voir ce qu’il pourrait sortir d’autre. Parviendrait-il à lui faire user de son propre style pur ?

-Il s’agit pour ainsi dire de mon territoire. La Ligue regorge d’adversaires diverses, de quoi s’entraîner dans l’adversité pour se préparer à tous les types d’adversaires, à tous les types d’ennemis.

La rousse ne prit pas la peine de commenter les commentaires de l’homme plus prompt à parler qu’à se montrer pertinent dans ses assauts. Elle l’observa prendre une pose qui avait certainement un objectif de concentration, qu’il soit physique ou mental, en vue d’une manœuvre rapide.

-Comme vous voulez.

Tandis que le bretteur fonçait sur elle afin de réaliser son attaque maîtresse, ou en tout cas l’assaut qu’il sortait là comme botte secrète, tout en semblant se démultiplier par les images rémanentes de sa présence physique en diverses points de l’espace en instants déversant. Les doigts de la rousse s’enfoncèrent alors dans le bois à ses pieds et en un instant elle souleva la matière pour dresser le sol en mur devant elle, arrachant ainsi quelques mètres carrés du pont supérieur. Le Keigo ne pourrait pas foncer en ligne droite jusqu’à elle, il lui fallait détruire ou contourner l’obstacle. Dans le premier cas, il révélerait ainsi sa position à l’instant de l’ouverture dans le mur, permettant à la Té Ra de le saisir au col. Dans le cas où il contournerait par les côtés ou par le dessus, il lui faudrait reprendre appui pour s’élancer. Même si le geppou permettait de rebondir sur l’air et que l’épéiste employait cette méthode-là, si cet air était en mouvement logiquement la trajectoire ne serait pas des plus précises. Levant la jambe, Rébéna frappa avec beaucoup de force le plancher. Sa technique de l’invocation du silence fit tanguer très violemment l’embarcation, déséquilibrant tout ceux dont les pieds se reposaient sur le sol, tandis que l’air lui-même fut expulsé tel une onde de choc, générant un déplacement d’air qui ainsi rendrait le geppou moins efficace sans parler de la vague d’air à franchir. Dans tous les cas, normalement il aurait ainsi sa trajectoire dévier et elle pourrait de cette manière le saisir au vol et au col avec célérité. Le déroulement des événements, lui rappelait d’ailleurs l’une de ses confrontations avec Kosenjobi. Dans le pire des cas, il suffirait à l’originaire d’Himitsu Shima de couvrir plusieurs parties de son corps avec du fluide de l’armement pour repousser la lame véritable se cachant parmi les fantômes.

-Alors, avez-vous encore une corde à votre arc, bretteur de la Marine ? questionna Rébéna avant de relâcher sa proie dans un mouvement visant à l’envoyer valser contre un mat, sans pour autant y mettre de force.

-C’est bien dommage, conclut la rousse en observant l’épéiste admettre sa défaite et rendre les armes.

Un peu plus de challenge n’aurait pas été de refus. L’ancienne championne de la Salle de Combat d’Himitsu Shima commençait à penser qu’il était temps pour elle de mettre les voiles, n’ayant plus rien à faire sur ce navire et face à ces représentants de la Marine comme des autres. Néanmoins, la Té Ra fut stoppée dans son processus de départ par l’audace du jeune bretteur angélique qui souhaitait poser une question à celle qui était venue se fracasser contre ce navire qui se trouvait sur sa route. La question était assez simple et appelait à ce que Rébéna développe le fond de sa pensée face à cet inconnu, qui était certes un ami d’enfance de celle qu’elle espérait avoir transformée en rivale potentielle. Fronçant les sourcils face à cette curiosité, la navarque se laissa aller à répondre au blond.

-Mon idéal ? C’est la soumission de tout ceux qui se prétendent plus forts que moi. Je compte faire face et vaincre les yonkou. A minima Hadès Tenryon qui est catalogué comme le plus puissant pugiliste de ce temps. Je vais lui ravir cette couronne. Ce n’est pas une question de gloire. Que les petites gens soient conscients de ma force ne m’intéresse guère. Qu’on écrive des chants en mon honneur ou que soit tisser ma légende. Au fond, cela importe peu. C’est la reconnaissance de mes rivaux que je cherche. Que ceux à même de m’affronter sur un pied d’égalité comprennent qui je suis, quelle puissance déferle sur eux. Certains refuseront certainement de m’accorder le fait que je sois plus forte qu’eux, j’en suis certaines, et je n’aurais peut-être pas l’occasion d’aller jusqu’à la victoire face à chacun de ces êtres au sommet de la chaîne alimentaire des combattants de l’humanité, néanmoins l’éclat de peur et de doute qui fera palpiter leur cœur à chaque rencontre et à chaque idée d’affrontement entre nous sera la preuve que leur corps a comprise, reconnus l’état de faite. Je vais me dresser dans ces sommets et m’imposer au sein des prédateurs pour devenir le seul et unique prédateur de ces sommets, le prédateur ultime de ce monde. Pour cette ère en tout cas, car chaque époque à ses dieux et que l’immortalité, littérale comme métaphorique, n’est que l’utopie de la conscience humaine.

Elle leva sa main de quelques centimètres, écarta les doigts et observa la paume.

-Je n’ai aucun héritage, aucune ascendance illustre, aucun mentor à l’idéal transcendant. Je me suis faite. Je m’entraine jour après jour car je me suis faite seul et que ce n’est que par mes efforts que je pourrais demeurer celle que je suis. Je ne m’entraine plus pour devenir plus forte mais pour rester moi-même. Il est hors de question de choir, de descendre chez les faibles. La loi du plus fort est celle qui dicte la nature, qui dicte ce monde même civilisé car l’essence humaine demeure primitive, quand bien même on cherche à intellectualiser et à se prétendre « raisonnés ». Les fondements de notre être demeurent le même que celui des animaux mais se trouve transcendé par les possibilités qui nous ont été offertes. Les titans n’ont pas besoin d’excuses car ils savent les raisons de leur échec s’il y a échec. Alors si je perd car je me suis ramollis, il n’y a personne d’autre que moi-même à blâmer pour cela.

-Comprendre est la clef de voute du secret.

L’épéiste avait des rêves de grandeur et de gloire, mais il lui manquait l’ambition qui transcendait ces deux notions. C’était peut-être quelque chose d’égoïste d’envisager les événements et le sommet que par le prisme personnel, néanmoins paradoxalement cela faisait une personnalité en même tant bien plus désintéressé que ceux aspirant à la prospérité, à la gloire, en permanence. Vouloir être connu, quel qu’en soit la raison, était-il plus répréhensible que l’égoïsme ? Débat intéressant et sans réponse objective. En tout cas, pour la Té Ra le sommet imposait d’agir sans se voiler la face, sans aspirations nuisibles, et de faire le tri avec ses propres émotions, avec sa manière d’appréhender le monde pour comprendre non seulement celui-ci mais soi-même. Il n’y a que par le Soi qu’on devient Soi, et sans être soi-même aucune légende ne peut jamais raconter qui l’on est.

-Alors rendez-vous à ce moment-là, se contenta de répondre la rousse.

Ceci fait, elle se mit soudainement à siffloter avant de monter sur le bastingage, embrassant dans son regard ce qui se trouvait sur le pont supérieur du bâtiment. Sans rien rajouter, la demoiselle fit un pas en arrière, dans le vide se trouvant derrière elle. Son corps bascula alors en arrière, chutant à l’horizontal en direction des eaux en contrebas. Donnant alors une impulsion avec son épaule droite, la Té Ra effectua un demi-tour pour se présenter face à l’immensité. Pénétrant dans les eaux, Rébéna joignit ses deux pieds sur la coque de l’embarcation de la marine et se servis de cet appui pour faire un départ en trombe, se propulsant à pleine puissance en direction de l’horizon, fendant plusieurs mètres de liquide tel une lame avant que ses deux bras jaillissent en trombe de la surface pour s’abattre dessus avec la violence de la hache d’un bourreau. Nageant le papillon, la rousse avançait sans se retourner, ignorant complétement les dégâts qu’elle avait fait au navire de la Marine en s’élançant de cette façon. Ce n’était pas ses affaires à régler. Sentant le fluide aquatique courir le long de sa chair, épouser les traits de son visage pour glisser comme une caresse sur sa chevelure mais comme des gifles sur le visage, la rousse se sentait revigoré dans ce milieu bien connu avec lequel elle pouvait rivaliser avec certains hommes-poissons y étant pourtant natif. Un large sourire s’étendant d’une oreille à l’autre, son visage s’enfonça dans l’océan, le frappant, l’incisant, coup après coup, instant après instant.

Déjà les poissons aux alentours s’enfuyaient tandis que des monstres se rassemblaient en banc pour l’observer. Une carpe-jaguar se retrouva malheureusement sur la trajectoire de la navarque qui ne changea pas de rythme pour autant et propulsa dans l’inconscience et vers les profondeurs la bête malchanceuse. Le sang tourbillonnait dans les veines tandis que la satisfaction de la nage envahissait par l’adrénaline le corps irradiant de la non maudite qui s’engageait vers de nouvelles aventures en attendant que le glas sonne sur le monde.