Les eaux divaguaient sous les coups brutaux d’une main tendu en pagaie. L’air d’East Blue s’enfonça dans les narines de la rousse qui comme à son habitude fendait les eaux de la manière si particulière qui était sienne. Bien loin des nefs de bois aux voutes de cathédrales marines ou des dompteurs transformant des animaux aquatiques en moyens de transport, la navarque de la Ligue Egéenne de Milon aux ambitions impériales employait son propre corps pour traverser les océans. La Nature ne pouvait pas résister à l’Alpha Predator qui cherchait à grimper jusqu’au sommet de la pyramide de la loi du plus fort. Tout du moins, pour l’heure elle se faisait encore l’obstacle sempiternelle de ce corps n'ayant pas encore suffisamment dépassé, transcendé, ses propres limites. La Té Ra devait l’avouer, il y avait encore du chemin à faire avant de partir en chasse des terribles yonkou régnant sur les mers sauvages d’un Nouveau Monde en proie au véritable chaos naturel. Alors que l’ancienne championne de la Salle de Combat laissait ainsi ses réflexions l’emmener vers un avenir lointain qu’elle devait rationnaliser, les flots de l’océan oriental, la plus calme des quatre régions cardinales, commençaient à s’adoucir… Comme si l’originaire d’Himitsu Shima s’approchait d’une côte. À sa connaissance aucune île n’existait sur le chemin qu’elle avait choisit d’emprunté, mais la cartographie n’était pas encore à son apogée technique il semblerait et Rébéna n’était guère passé par ici jadis. Soulevant sa crinière flamboyante au-dessus des remous du fluide iodée, l’iris incandescente de la combattante capta la vision d’une montagne lacéré et striés, une silhouette qui se détachait difficilement puisque le soleil se trouvant derrière faisait baigner cette ombre dans une véritable auréole éblouissante. Malgré tout, cela signifiait bel et bien que la rousse touchait terre. Commençant à se redresser, ses pieds touchèrent le sable agréable qui glissait sur son épiderme avec la même vivacité que l’eau dans un fleuve.

-Où est-ce que j’ai atterris encore ? grommela la navarque en observant les environs.

Embrassant l’horizon de cet environnement proche d’un geste vague, Rébéna s’attache à caractérisé les particularismes locaux de cette nouvelle terre survivant au milieu des flots. L’herbe semblait normal, mais la grande quantité de roches, parsemés à intervalles réguliers au milieu de véritables champs, laissaient entendre une culture tirant l’intérêt culturel d’une vision mégalithique. Mais la forme de ces pseudos menhirs étaient assez étrange. Fronçant les sourcils, la Té Ra finit par comprendre que cela lui évoquait des genres de coquilles ou carapaces. L’une de ces roches s’ouvrit alors en deux pour dévoiler la supercherie à la rousse qui se gaussa moqueusement. Des palourdes géantes faisant trois mètres de haut ? Drôle de manière de les cultiver que de les ériger sur la terre ferme. Est-ce que la population sur place avait quelques rites faisant de ces bestioles des divinités mineurs ? Mais c’est la montagne dont la guerrière avait détaillé le contour plus tôt qui se révéla encore plus surprenante. Ce n’était pas un mont de pierre, mais un agglomérat de déchets. Ce n’était guère non plus une décharge normal, les éléments constituant cette assemblage colossales et on ne peut plus puant, l’odeur envahissant les narines de la navarque, n’était autre que des détritus de fruits de mers : carapaces et autres coques se mêlaient à des éléments organiques pourrissant là au soleil et à l’air libre.

-Mais où je suis tombée bordel ?! s’exclama Rébéna en se pinçant les narines et en tournant le visage vers de haute palissades en rondins de bois situé un peu plus loin sur la côte de la petite île. De la fumée s’élève de ce village… Ils arrivent à vivre ici malgré cette odeur ?

Le chemin était tracé, dans le vent comme dans les chairs. La terre foulée par des pas altérées, le sang bouillait dans les artères de la rousse qui s’avançait, immuable, face à l’odeur exécrable qui émanait du monticule de déchets organiques balancé par ce minable village. S’arrêtant devant l’entrée de ce gros hameau, l’originaire d’Himitsu Shima détailla les lettres sculpté dans la palissade de troncs mais dont la peinture n’avait pas été rafraîchis depuis une bonne décennie à minima. Palourdium ? Ils ne s’étaient pas foulé pour le nom. Faisant volte-face, la combattante observa à nouveau les champs où « poussaient » les palourdes. Aucun humain n’y arpentait les cultures. Les mollusques n’avaient donc besoin de rien ? Aucun agriculture ne s’occupait de veiller sur ce qui semblait être leur principal source de revenus ? C’était vraiment étrange. Observant la jonction entre la muraille de troncs et le mont-déchèterie, Rébéna fronça les sourcils pour concentré sa vision sur ce qui semblait être un bâtiment d’où sortait une partie des détritus. Une cheminée d’où émanait de la fumée opaque et dense se trouvait dessus. La Té Ra grimaça alors qu’un nouveau coup dans son odorat la déstabilisa. Posant sa main sur l’immense et unique porte d’entrée également constitué de rondins, la navarque donna une simple impulsion pour contraindre le lourd assemblage à dégager la voie pour l’impériale championne de l’Amphithéatrion. Pénétrant dès lors dans la bourgade de Palourdium, qui donnait également son nom à l’île, la rousse fut surprise par le décalage colossale qui existait entre l’architecture du grand bâtiment qu’elle avait observée précédemment et les cahutes branlantes qui l’entourait désormais. Village de pêcheurs assurément. Étonnamment, ou pas, à l’hygiène déplorable… Continuant à avancer, la navarque de la Ligue Egéenne de Milon croisa les premiers regards d’habitants. Certains reculèrent, peut-être d’instinct, face à la bestialité émanant des intenses prunelles de la lionne ardente, un brasier inextinguible animant ses pupilles dans un éclat reflétant le Soleil.

-Quelle immondice… nota Rébéna en observant une espèce de poubelles en osier qui ornaient les façades de ces habitations et d’où dégueulaient une quantité effarantes de restes, des arrêtes de poissons à des rognons à moitié terminé désormais recouvert de larves et autres vers qui se délectaient de la nourriture en décomposition.

Comment pouvait-on vivre dans pareil environnement ? Plus elle avançait vers le cœur du village, vers la place centrale qui faisait face au « port », ou plutôt aux quais d’où partait les barques des pêcheurs et qui n’avait la place d’accueillir qu’un unique navire de grande dimension, à l’image d’un de ceux de la Marine, plus les gens osaient restés en sa présence, l’observant avec une certaine forme de fascination… Tout du moins c’était comme cela que la Té Ra l’interprétait pour le moment, alors même qu’elle n’avait guère fait quoi que ce soit de particulier. C’était assez évident que l’activité halieutique demeurait une base de l’alimentation de Palourdium étant donné l’état de ces poubelles en osier et les bacs remplis de poissons aux abords de la place centrale ne semblait pas faire démentir cela. Concernant les fruits de mer, dont les restes formaient la montagne à l’extérieur, des hommes en transportant en direction de la périphérie du village. Finalement, quelqu’un se présenta devant elle sans rien dire et lui indiqua une maison plus grande que les autres, avec un toit de paille qui remontait en pointe d’une telle manière qu’on aurait pu croire à un doigt dressé vers le ciel. Hochant simplement la tête, la guerrière s’avança vers cette demeure du chef et entra dans celle-ci pour découvrir un vieillard assis sur un… Pouvait-on appeler ça un trône ? La femme tout droit venue du Nouveau Monde aurait même parié que l’individu pouvait faire ses besoins en restant dessus.

-Bonjour à vous… C’est quoi votre île de merde là ?

Ces lieux n’étaient guère une terre de villégiature et il semblait pourtant que le vieillard à la tête du village n’ait pas encore mis celui-ci en viager… Enfin si on pouvait utiliser le terme pour parler d’une passation de pouvoir vers la nouvelle génération avant la mort du pater familias. La rousse croisa le regard du Gratz, voyant ses traits s’animer difficilement mais de manière de plus en plus net. Il semblait soudainement reprendre vie, sa peau s’étirant, ses yeux retrouvant de l’éclat, son se redressant avec une certaine vigueur. L’individu s’éclaircit la voix avant de valider les propos de la jeune d’un geste de la tête. Donc il était au courant que c’était vraiment un dépotoir sans nom ? Comment les gens pouvaient vivre décemment dans de telles conditions ? C’était bien difficile de croire que la vie était belle pour cette tribu qu’on pourrait qualifier d’Archaïque au vu de ses différents aspects. Et encore, la Té Ra ignorait les problèmes alimentaires, voire l’enfer alimentaire, que rencontrait le grand père, bien que vu les exploitations « agricoles » du coin elle se doutait déjà qu’ils devaient consommer beaucoup de palourdes. Nils se mit à parler et souligner que cela faisait longtemps qu’il dirigeait les lieux. Ignorant l’histoire de l’ancêtre, elle ne pouvait que corréler cela avec l’âge avancé du vieillard… Néanmoins c’est à ce moment que Rébéna se rendit compte du faible nombre de personnages âgés dans l’auditoire. Etait-il le seul vieillard ? Comment avait-il vécu si longtemps ? Etait-ce justement car c’était le plus ancien qui avait réussi à se maintenir en vie qu’ils l’avaient choisi pour diriger ? La gérontocratie avait de beaux jours devant elle. Le temps que la navarque fasse cette observation, le Gratz c’était approché en mettant en scène une gestuelle grandiloquente, même un peu trop grandiloquente pour être autre chose que forcé. Un peu de subtilité aurait été bienvenue pour rendre le message plus convaincant… Mais apparemment cela suffisait aux péquenauds alentours.

Il commença alors à parler de prouver sa valeur. Une sorte d’épreuve ? Voilà qui pouvait susciter l’intérêt de la demoiselle toujours en quête de nouveaux défis. Puis vinrent les mots. La rousse fronça les sourcils pendant quelques secondes. Qu’est que toute cette mascarade voulait dire ? Le sortir du bâtiment alors que tout les gardes se retourneraient contre-elle ou quelque chose comme ça ? Jetant un regard à droite et à gauche elle vit que personne ne comprenait non plus pour l’instant. Si c’était une épreuve traditionnelle du village, ils auraient été au courant. C’était les traits du visage du vieillard, qui semblait prêt à fondre en larmes en suppliant qui permirent de forger assez d’éléments pour comprendre que cet individu en avait ras-le-bol de cette vie. Elle ne pouvait que le comprendre vu l’état de déliquescence de cet endroit qui ne méritait peut-être même pas le qualificatif de « civilisé ». La transformation par la foule en une acclamation solennelle, voire cultuelle, aurait pu la ramener à une tout autre considération, celle qu’on demandait simplement son aide face à une situation difficile pour le village. Pourtant, la dissonance entre le propos et l’épreuve mentionné, ainsi que celle entre le visage du vieillard et ceux de la populace conduisait la Té Ra à considérer qu’elle avait vu juste et que le chef du village voulait commencer une nouvelle vie loin des soucis de la gestion de cette décharge à ciel ouvert.

-Si c’est ce que vous voulez…

L’ancienne championne de la Salle de Combat d’Himitsu Shima attrapa alors Nils, dont elle ignorait toujours le nom, avant d’effectuer un bond qui la conduisit à sortir de la salle du trône en traversant le semblant de toit. S’arrêtant un instant, la guerrière du Nouveau Monde sauta sur un bâtiment adjacent et ainsi de suite tout en commençant à converser.

-Comment vous vous être retrouver à la tête de cette bouse si cela vous emmerde tant ?

Il était arrivé ? Donc ce n’était pas un natif de cette île-poubelle-nid de fruits de mer. En tout cas le vieillard avait la mémoire qui flanché à force d’être enfermé dans ce taudis. Ces autochtones avaient élus un étranger à la tête de ce village et il ne semblait même pas consentant. C’était le monde à l’envers. On marchait sur la tête. Comment ces gens pouvaient avoir développé ces genres d’usines et restés bloqués à ce stade de… d’imbécilité profonde ? Quelle île étrange. Certaines sociétés développés des aspects culturels vraiment divergents. Difficile de comprendre la mentalité d’un être issue d’un tout autre schéma de pensée. Phoenicia aurait peut-être été apte à faire cet effort, même éventuellement Médolie, mais la Té Ra n’avait pas que ça à faire. Les mots suivant du Gratz permirent en tout cas de comprendre que le vieillard s’y connaissait en pharmaceutique, donc qu’il avait des connaissances en médecine. Ce n’était pas quelque chose totalement répandu encore que de maîtriser le vocabulaire médical au vu du nombre d’îles dépourvus d’hôpital où de docteurs compétents. Peut-être que ces ignares avait prit Nils pour une sorte de sauveur vu qu’il avait été en mesure de sauver l’un des leurs de ce qu’ils prenaient peut-être pour quelque chose d’insoignable. La rousse commença à se demander si la barbe proéminente du Gratz était au final dû à une absence d’outils de rasage sur cette terre et que, puisqu’il avait oublié depuis combien de temps il était ici, cela faisait au final quelques décennies qu’il était resté enfermé par le rivage de cette île qui ne devait pas avoir beaucoup de contacts avec le reste du monde. À se demander si le senior aurait encore toute sa santé mental à la sortie de ces épreuves. Bon, il n’avait pas l’air spécifiquement dans un état catastrophique alors on pouvait demeurer optimiste.

-À tout les coups vous êtes devenu leur messie. Ils vont partir à notre recherche si vous êtes devenu si important pour eux. Ils vous nous poursuivre avec ce qui leur sert d’armes. J’imagine qu’ils n’ont pas grand-chose de plus que des harpons ? déclara la navarque en observant le matériel déposé contre la paroi de certaines maisons par ci par là.

S’arrêtant finalement sur une maison près de l’océan immense qui s’étalait à perte de vue, l’originaire d’Himitsu Shima observait la mer et se demandait comment elle allait annoncé ce qui les attendaient au vieil homme.

-Et votre maison, elle est où précisément ?

Elle lui laisserait le temps de répondre la localité ou l’île d’où il venait, puis viendrait le temps de la « révélation ».

-Je me déplace à la nage entre les îles… Alors soit je vous embarque et vous vous accrochés jusqu’à ce qu’on ait atteint l’île la plus proche, soit on leur pique un bateau et on traverse jusqu’à l’archipel un peu plus au sud. Ils doivent quand même avoir quelques bateaux de pêches ces péquenauds mangeurs de palourdes.

-Toroa ce n’est pas la porte à côté, souleva la combattante tout en se disant que 1429 devait être la date de naissance du vieillard ou de la rencontre de ses parents. Bon je vois… On va se débrouiller alors.

Le commentaire aurait été plus prononcé si la navarque ne réfléchissait pas à la possibilité que cet individu puisse disposer d’un fruit du démon, raison qui pouvait expliquer l’incapacité de certaines à nager. Mais il ne fallait pas se mentir que même encore à cette époque, même parmi les marins certains ne savaient toujours pas nager. La Té Ra s’abstiendrait donc de commentaire, quand bien même elle avait appris cela en autodidacte et que, quitte à partir à l’aventure en se fourrant dans un tel guêpier, les gens devraient se préparer correctement en apprenant des choses assez essentielles. Alors qu’elle s’approchait d’une embarcation, la rousse déposa le Gratz au sol et s’approcha de la barque pourtant dépourvu de voiles. Alors que Rébéna commençait à jouer des cordages et des filets pour créer un genre de « harnais » qui retiendrait Nils à l’embarcation même s’il lâchait prise, la guerrière se stoppa en recevant l’information. Une île gouvernementale ? Les civils ne savaient décidemment faire confiance qu’à cette autorité-ci dans ce coin du monde. Ils ne faisaient que se reposer là-dessus, sur des lauriers imaginaires d’un pouvoir sensé les protéger mais qui s’en révéler trop souvent incapable. Si ce pouvoir supranational faisait bien son boulot, est-ce que le docteur se serait retrouver dans cette situation, piégée sur une île étrange ?

-Il ne tient qu’à vous de choisir à qui faire confiance. Si vous pensez être en sécurité sur une île protéger par la Marine, grand bien vous en face. Même si je doute que ce soit loin d’être la même situation instable que sur le Nouveau Monde, le fait qu’il continue d’exister des primés montre bien que les brigands arrivent à leurs fins en dépit des mouettes. S’ils n’étaient pas rattachés à ce Gouvernement Mondial et sa politique, ils seraient peut-être plus efficace, mais pour arriver à un tel résultat il faudrait qu’un des mouvements révolutionnaires arrive à changer l’ordre établis et on est loin d’y être, commentait-elle tout en ajustant les cordages qu’elle reliait à l’embarcation mais qu’elle laissa pendre à la proue de cette barque longue malgré tout de cinq mètres. Bon, vous montez ?

Les mains sur les hanches, Rébéna observait le Gratz passer sur l’embarcation de pêcheurs côtiers, bon gré mal gré. Elle ne l’aiderait pas le moins du monde, puisque selon sa philosophie de vie c’était à chacun de prendre son destin en main et donc également son quotidien. Elle lui passerait ensuite le harnais qu’elle avait bricolé, peu importe ses commentaires ou un refus d’obtempérer, tandis que des premiers individus armés commençaient à apparaître plus loin entre les demeures. La navarque noua alors autour de sa taille la corde qui pendait à l’avant.

-Ils approchent. On y va.

Sans plus de cérémonie, la demoiselle se mit à courir en direction de l’océan en tirant derrière elle la barque à laquelle elle s’était attaché. Plongeant dans l’eau lorsque la surface fut assez haute, la nageuse extraordinaire se mit à se propulser en crawl, continuant de tracter l’embarcation sur laquelle se trouvait Nils qui, s’il ne se tenait pas fermement, risquait d’être brinquebalé d’un côté à l’autre de la construction navale en coque de palourdes. Ce n’était pas du tout plus lourd que les cadavres de monstre marin qu’elle ramenait à terre dès fois après ses parties de chasse sous-marine au large. Se propulsant en frappant les flots de ses mains puissantes, la rousse attendrait d’être suffisamment loin du rivage pour s’arrêter, se mettre en nage stationnaire et observer le « port » des autochtones.

-Ils n’ont pas encore lancé de navire à notre poursuite… Comment vous vous sentez ?

La rousse ne cilla pas devant la surprise du vieillard qu’elle venait de secourir. Ce n’était guère la première fois que quelqu’un s’étonnait de ses capacités du point de vue de la natation.

-Je suis Rébéna Té Ra. Je suis né à Himitsu Shima mais je vis à Tir na Crann sur le Nouveau Monde. J’imagine bien que ça doit être choquant de découvrir mon moyen de déplacement… À vrai dire, je ne connais personne d’autre qui fais ça, même chez les personnes qui sont de mon niveau. Mais est-ce vraiment plus étonnant qu’un être ailé traversant le firmament entre deux îles ou qu’une baleine traversant l’océan ? Je me suis simplement entrainé pour m’adapter. C’est le fruit d’années d’efforts et de travail qui me permette aujourd’hui d’être entière autonome du point de vue de la mobilité. Je n’ai besoin d’aucun navire, je suis mon propre navire… Un vaisseau qu’on ne peut pas aborder par-dessus me marché.

Un sourire amusé se dessina sur ses lèvres.

-Je vous fais peur ?

Il avait raison de craindre. C’était une forme d’instinct de capter la dangerosité, de se rendre compte qu’un prédateur est tellement dominant qu’il pourrait vous évincer. Comme quelqu’un braqué par l’arme à feu d’un voleur, la crainte d’être menacé envahit l’être, dévore ses entrailles, secoue ses tripes. La proie se sent en danger sous le regard d’un prédateur, c’est quelque chose de particulièrement primitif, une forme d’instinct de survie qui malgré tout pousse parfois à agir dans la précipitation et se condamner. D'ailleurs, la navarque remarqua la sueur perlait sur le visage de Nils sous la crainte... Non, ce n'était pas de la sueur. On aurait dit une matière plus visqueuse, d'une couleur violette peut-être même. Tiens, tiens, voilà quelque chose d'intéressant.

-On me surnomme Alpha Predator, mais je ne vous mangez pas, soyez tranquille, plaisanta la navarque. Bon… L’archipel des Gekko devrait être par là-bas et Ta no Kuni par là. Mais il y a une île gouvernementale plus proche à notre sud-est.

Rébéna s’imaginait bien que le rythme à pleine puissance, ou plutôt à pleine vitesse, devait être difficile à supporter dans la barque. Après tout, elle s’était entrainé à tracter des navires de guerre, alors la chaloupe devait brinquebalé dans tout les sens. Si elle voulait que Gratz s’en sorte en vie il fallait réduire la cadence, s’adapter.

-Bon, ils n’ont pas l’air de beaucoup se bouger, je vais aller moins vite. Vous pouvez parler si vous voulez discuter pendant la traversée, je vous répondrais quand même.

Ce serait en hachant ses phrases puisqu’elle s’exprimerait  quand elle sort son visage de l’eau afin de reprendre sa respiration, puisque l’originaire d’Himitsu Shima nageait le crawl.

-Vous avez ... mangez un fruit ... du démon ? l’interrogea justement la dirigeante de la Ligue Egéenne de Milon en reprenant la nage et en parlant durant trois respirations.

Les vagues viendraient défiler et le soleil continuerait de briller. Les remous soulèveraient par intermittence la barque qui glissait sur les flots au rythme des bras de la rousse qui en frappait la surface. Nils c’était bel et bien échapper et laissait derrière lui le souvenir de sa séquestration qui d’ici une petite heure aurait disparu à l’horizon.

-La fameuse malédiction … des flots. Il y en a bien … des histoires à ce propos et … je vous confirme que ceux … qui ont mangés un fruit du démon … coule comme des enclumes … une fois qu’ils tombent à l’eau. … Une fois, j’ai plongé pour … en sauver un avant qu’ils ne … s’enfoncent trop profondément.

Bon, elle ne mentionnerait pas qu’elle avait fait cela pour soutirer des informations à ce criminel sur la localisation de son capitaine qui avait dérobé la nourriture qu’avait amassé la rousse en chassant dans la jungle. Le navire des Pirates du Cromwell avaient sombré quelques heures plus tard, bien que Rébéna avait récupéré la cargaison de vivres qu’on lui avait chipé avant de condamner le vaisseau à finir comme un maudit tombant à l’eau.

-Du poison ? Voilà une malédiction … qui sonne comme puissante et … particulièrement efficace et pernicieuse. … Du Fugu, je n’en ai jamais… mangé mais j’en ai entendu parler. … Cela doit malgré tout être handicapant … par moment de produire une substance toxique.

Vu que c’était un vieil, faire un câlin à ses petits-enfants, s’il en avait tout du moins, incluait ainsi un risque de les empoisonnés s’il perdait le contrôle du pouvoir. Cela semblait vraiment être un pouvoir dangereux. Ce n’est pas pour autant que l’originaire d’Himitsu Shima aurait chercher à en obtenir un de ce genre. Elle ne voulait pas être maudite. Au-delà de l’empêcher de se déplacer à la nage, la rousse avait toujours voulut être la pleine instigatrice de sa réussite et de son développement propre, ce qui impliquait à ses yeux de ne pas se reposer sur un pouvoir d’origine extérieur qui lui faciliterait la tâche d’une certaine manière. La navarque ne passait pas la majeur partie de son quotidien à entraîner son corps de toutes les manières possibles avec des entrainements de plus en plus extrême au fil des ans pour finalement utiliser un jet de poison pour vaincre un ennemi. Non, c’était bien plus gratifiant de l’emporter par des moyens entièrement issues de son propre travail.

-Ishtar ? … Je la connais celle-là. … Je fonde de grands espoirs en elle, … mais son heure pour révéler … son propre potentiel n’était pas encore venu.

Cela devait faire étrange au vieux Gratz de suivre une conversation ainsi segmenter par les passages de la tête de la Té Ra sous l’eau. En tout cas, à l’époque Rébéna n’avait pas encore enseigner à Ishtar et l’avait observer de loin, offrant son accord en tant que Psyjique afin que cette dernière bénéficie du repos et de certains conseils dans son entrainement de la part des Wans qui avaient aussi recueillit la navarque peu après qu’elle eut quitter Himitsu Shima suite à l’arrivée au pouvoir de Konan sur l’île.

-Au moins, ça dois vous avoir permis … de devenir plus ou moins toxicologue. … L’aspect positif c’est que vous connaissez … suffisamment bien les poisons pour pouvoir … vous servir de ces connaissances dans votre métier… C’est une façon de devenir un expert dans votre domaine… Vous pouvez vous perfectionner en la matière … plus qu’aucun autre docteur.

À moins que le vieillard s’en servait pour couvrir les traces d’actions ou crimes. Après tout, elle ne le connaissait pas des masses et il pouvait tout à fait être devenu une sorte de meurtrier destructeur. Avec un tel pouvoir entre leurs mains, certaines personnes auraient complétement vriller et se sentit pousser des ailes. Plusieurs maudits se croyaient invincibles après l’acquisition de leurs pouvoirs et pour la plupart le retour à la réalité était dure, notamment quand ils se confrontaient aux hakis.

-À croire que … le monde n’est composé … que de ça, … de conneries ! s’amusa la rousse. En effet, … le pouvoir, quelque soit sa forme, … est vecteur de nouvelles réalités, … de dynamiques intrinsèquement mutagènes qui … refaçonne les esprits … par les multiples perspectives qu’il ouvre. Un être au cœur pur … peut tout à fait être corrompu par … un pouvoir trop gros qu’il ne saurait pas gérer par lui-même. Ishtar a bien cela pour elle… d’avoir tempérer son propre pouvoir afin … de le dompter à sa façon. Les usages mesurés de malédiction … sont plus pertinente qu’un … simple étalage de destruction. Néanmoins, sa tempérance était trop grande … elle manquait trop d’ambitions ou de désirs … pour parvenir à trouver une voie satisfaisante… Le voyage en lui-même … c’était ça ce qui la portait.

C’était bien l’aspect qui différenciait les deux femmes. Rébéna avait un plus fort tempérament et une assurance certaine tout en gardant à l’esprit qu’elle n’était pas invincible. La confiance en soi, sa certitude d’emporter chacun de ses combats, n’était pas véritablement de l’orgueil car la Té Ra avait conscience que derrière chaque adversaire pouvait se cacher un potentiel surprenant à mesure de rivaliser avec elle et de la mettre en danger. La rousse savait qu’un jour elle serait en mesure d’affronter l’un des yonkous du Nouveau Monde, mais pour l’heure ces derniers n’étaient pas encore accessibles. Il s’agissait de nuance, mais la confiance absolu ne devait pas se transformer en foi aveugle. Par ce biais, elle reconnaissait donc bien que la De Lérhane disposait de cette capacité à relativiser sa propre force et à un stade bien supérieur à celle de la navarque, peut-être même trop justement car à ne pas oser on plonge dans l’inaction.

-Il y a un oméga c’est certain… ricana l’originaire d’Himitsu Shima. Quant au reste de la liste, … il faudrait faire des comparatifs. Ce surnom vient du fait qu’à la Salle de Combat … je jouais avec beaucoup d’adversaires … comme s’ils étaient ma proie… Même quand eux même semblaient être … digne d’être appelés prédateurs… En sommet, on m’y voyait comme la prédatrice… au-dessus des autres prédateurs. Le sommet de la chaîne alimentaire… des affrontements. Cette image est restée quand j’ai rejoins la Ligue… Et elle me décrit plutôt bien… pour le reste également. Et oui, je suis au courant que je fais peur à certains… Et à raison en soit… La peur est un mécanisme humain de survie… Lorsque l’on fait face à quelque chose qui nous dépasse … , la peur nous fait comprendre … de ne pas tenter le diable. Alors, c’est normal d’inspirer la terreur… lorsque l’on vise des sommets… nécessitant de s’imposer à ce sommet de la chaîne alimentaire… C’est la loi de la jungle, … ni plus ni moins…

La Té Ra poursuivait la nage, observant par moment les animaux dans les profondeurs et relâchant son fluide perceptif afin de capter les voix se déplaçant sous l’eau.

-Êtes-vous déjà allé sur le Nouveau Monde ? Ou même sur Grandline ?