C'pas l'homme qui prend la mer !

Pour la première fois depuis toujours, le vieux s’était retrouvé en charge d’une petite embarcation pour une mission de reconnaissance. En fait, on avait chargé le lieutenant d’une telle mission dans le but de savoir s’il saurait se débrouiller à la gestion des hommes ou non. L’ancienneté et la sagesse d’une personne qui aurait connu bien des choses dans sa vie ne pouvaient pas échouer dans de telles entreprises.

C’était bien évidemment trop pour le vieux marine qui, au bout d’à peine une journée, avait dissolu et coulé la petite embarcation. L’ancêtre venait tout juste de manger le fruit il y a quelques jours et il n’en maîtrisait absolument pas les rouages, l’accident était donc arrivé comme un cheveu sur la soupe… d’ailleurs, il n’avait même pas pu la finir, sa soupe. L’équipage entier s’était retrouvé sur plusieurs petits canots de sauvetages qui dérivaient de façon séparée. Le lieutenant Nils s’était retrouvé avec une petite subordonnée assez jeune. C’était bien sa veine tiens ! Il aurait pu avoir un canot pour lui tout seul mais il avait fallu qu’une autre personne l’accompagne. Bon, par chance, ils avaient des rames, et c’est tout naturellement que le vioque s’était mis à demander à son subalterne de ramer. C’était un truc de jeunes ça, pas un truc d’anciens !


Allez mon mignon ! Rame donc ! Ce n’est quand même pas les anciens qui vont tout faire hein ?
Le vieux n’avait pas forcément conscience des grades au sein de la marine et ne savait pas vraiment quelle place occupait son partenaire du jour. Toujours était-il qu’il lui donna l’ordre comme si de rien était sans aucune animosité dans la voix ou autre. Qu’il accepte ou non, le bateau dérivait déjà en direction d’une ile et l’après-midi était déjà plus que bien entamée.

Au loin, on pouvait percevoir une ile toute petite, seul un château de style moyenâgeux, ou ressemblant beaucoup à un manoir, surplombait la côte. L’ile était difficile d’accès et un simple ponton très petit aurait permis à de possibles visiteurs de s’y amarrer. Aucune plage, juste une falaise assez imposante et un escalier qui partait du ponton jusque la bâtisse. De sombres nuages semblaient flotter en suspension dans la région de cette mer, un manoir qui ne donnait absolument pas envie au grand-père. Nils regardait du mieux qu’il pouvait la zone en question, et bien que ses yeux n’étaient plus ce qu’ils avaient pu être, il ressentit tout de même un frisson le parcourir. Comme si ce château ou ce manoir était possédé.

Pas rassuré, il n’avait de toutes les façons pas les cartes en mains : ne voulant pas toucher aux rames, il laissait soit son partenaire faire, soit se laissait dériver… c’était comme si l’embarcation était happée par cette ile mystérieuse. En arrivant au ponton, on pouvait également voir que plusieurs barques semblaient être ici depuis des années. Aucune autre embarcation en revanche : des vieilles barques, de vieux canots de sauvetage, aucun bon présage donc.

Se retournant vers son collègue du jour, le vieux médecin arbora une mine déconfite, il semblait presque bouder de sa situation. Pour se rassurer, il lui adressa un signe de tête pour l’inviter à avancer.


Allez ! Les jeunes d’abord !
L’escalier se dressait devant les deux protagonistes et la nuit était tombée. Seules quelques torches éclairaient le chemin dans l'escalier. Le jeune marin qui l'accompagnait allait-il pouvoir subir les affres du grand-père et les supporter ?