Il faisait beau. Il faisait chaud. Le temps était pour le moins magnifique sur la sympathique petite île de Clostrid et sa charmante bourgade d’Azwertown. La cloche, au sommet de la petite église du coin, sonnait pour indiquer qu’il était midi quand, assis sur sa chaise à bascule, un vieil homme arquait un sourcil en observant la masse nuageuse à l’horizon. Etrange. C’était l’été pourtant. Vraiment, le monde devenait fou et la météo se mettait à se changer toute seule comme ça, par endroit, on ne sait pas pourquoi. Il ne comprenait vraiment plus ce monde. Cependant il avait pourtant raison de soulever cette anomalie. Cette amoncellement nuage n’était pas l’œuvre de la nature, mais d’une malédiction. La femme aux quatre ailes était en effet passé sous sa forme hybride pour traverser Grandline par les cieux, vagabondant selon ses envies à la recherche de nouvelles îles et de nouvelles rencontres. Incarnation zoan du Serpent à Plumes, une créature mythologique considérée comme l’Empereur de Jade de la forêt tropicale, la bilcane avait le pouvoir d’imposer un état météorologique sur toute une zone. Elle se servait actuellement de cela pour cacher son avancer et éviter d’attirer l’attention de personnes en bas, les civils pouvant prendre peur de l’approche d’un monstre volant inconnu mesurant pas moins de huit mètres de long et les bandits pouvaient être intéressés dans l’espoir de vendre la bête à un bon prix. Cette couverture lui permettait donc d’évoluer tranquillement, paisiblement, sans se soucier de ce qui se passait sur les flots. Son regard reptilien se posa sur Clostrid, détaillant de ses pupilles les formes du paisible village, de sa forêt, de son plateau rocheux. Un lieu semblant assez ordinaire, mais avant tout calme, très calme. C’était bien rare sur Grandline, cette mer infernale où mille périls attendent les aventuriers chevronnés et où les îles se suivent sans se ressembler. Cela cachait donc peut-être quelque chose si la cité visiblement faiblement défendue arrivait à survivre dans cette ère où la piraterie et la criminalité se faisait plus implacable que jamais. Toutefois, l’ancienne révolutionnaire avait besoin de repos et c’est ainsi qu’elle amorça sa descente pour aller jusqu’à atterrir dans la forêt, ne manquant pas d’accélérer pour finalement fissurer le sol lorsque l’impact avec celui-ci eu lieu. Reprenant sa forme humaine, la blonde aux yeux d’argents qui mesurait trois mètres de hauteur se dirigea vers Azwertown, laissant le destin déterminer qui elle y rencontrerait.

Des maisons en bois et en briques se côtoyaient tout en formant des rues de terre donnant un côté charmant et campagnard au tout. Habituée à étonner les civils de part sa nature exotique d’ange et de femme immense, la De Lérhane ne faisait guère attention aux regards surpris qui pouvaient se poser sur elle. Néanmoins, petit à petit elle remarqua que la population était principalement constituée de personnes âgés. La question de la défense de le Clostrid demeurait toujours dans son esprit. Comment pouvaient-ils résister à une attaque de pirates ? Un simple raid devrait suffire et pourtant les gens semblaient être bien installé, vivant paisiblement leur vie sans se soucier des dizaines de forbans avide de sang qui parcouraient les océans en cette sombre période. Il fallait qu’elle trouve quelqu’un à qui poser la question. Motivé par cela, la bilcane se dirigea vers le port, espérant y croiser des pêcheurs et donc des personnes un peu plus jeunes que ceux qu’elle croisait dans la périphérie du village. Ainsi, elle ne tarda pas à se retrouver face aux flots, cette étendue azurée magnifique qui contrastait avec les conflits infernaux qu’elle pouvait supporter par endroit. Il était clair que la décima comprenait ce qui pouvait donner envie aux gens d’habiter ici et d’oublier tout le reste du monde pour profiter des joies de la vie.

Que faisait l’équipage du Centaurus à l’heure actuelle ? Ishtar n’en avait strictement aucune idée. Comment ils s’en sortaient depuis son départ ? Valgoon et Marmo se disputait-il ? Thalgul était-il en train de danser sur le gaillard arrière ? Yorgunn se plaignait-il de ses rhumatismes en faisant sa musculation ? Saki tentait-elle encore de couper du poisson au katana dans la cuisine ? Est-ce qu’Ushuul, la femme-poisson de la troupe, tentait encore de comprendre les règles du poker qu’essayait encore et encore de lui inculquer Bylt ? Ou encore est-ce que Ashertul et Jerth continuait leurs duels en comptant les points comme si c’était des manches d’un match sans fin ? Shital était-elle en train de soupirer en regardant tout ce foutoir ? Est-ce que Deylan, Levail et Janaffe avaient du mal à défendre le groupe contre les ennemis ? Cela la pesait alors que ce ne devrait plus être ses affaires, mais elle était comme ça et ne pouvait pas retenir ses angoisses à propos de ses anciens camarades. Secouant la tête, elle chassa toutes ces pensées de son esprit avant d’observer à nouveau le grand large qui se dessinait devant elle, infini, éternel. L’Archange du Typhon s’assaillit sur le bord du ponton et regarda l’eau aller et revenir sous ses pieds. Maintenant qu’elle était maudite, le monde marin ne lui était plus du tout accessible, s’immerger l’amenant irrémédiablement à couler. Et dire qu’elle avait trimer comme une folle pour apprendre à nager lorsque le Centaurus l’avait récupéré suite à sa chute de Bilca, la mer de nuages n’étant pas vraiment un lieu approprié pour ce genre d’activités. C’est vrai qu’avec ses quatre ailes anormales ce n’était pas simple d’évoluer sous l’eau, mais c’était quelque chose d’agréable dont elle avait de bon souvenir avec les autres. En effet, c’était déjà arrivé que le navire jette l’ancre en pleine mer pour que les révolutionnaires se jettent dans l’étendu liquide. Il y avait eu de sacrés moments de rigolade. Cela appartenait au passé et jamais plus la De Lérhane ne pourrait piquer une tête dans l’océan sans être assaillit par le revers de la malédiction qu’elle portait. Ce n’était clairement pas le cas de cette femme-poisson qui fonçait droit dans l’océan depuis l’autre ponton… Tiens ! Une femme-poisson dans le coin ? Voilà quelque chose d’intéressant !

-Hey ! tenta d’interpeller la blonde de trois mètres aux prunelles argentés. Bonjour ! Dites-moi ! Qu’est-ce qui vous amène sur cette île perdue aux confins de Grandline ? lança-t-elle en balançant les jambes au-dessus de la surface cristalline, un sourire aux lèvres.

Faisait-elle partie d’un groupe qui trainait en ville ? Voyageait-elle au gré de ses envies ? En tout cas, si elle faisait une baignade c’est qu’elle n’était pas belliqueuse contrairement à certains hommes-poissons hargneux vivant mal le regard raciste de certains d’humains, ou parfois en raison d’un passé tragique s’étant répercuté sur toute leur existence. L’ange pouvait comprendre la colère et la frustration de ces personnes, ayant elle-même été discriminée pour ses ailes inhabituelles, mais ce n’était pas pour autant qu’elle approuvait les comportements destructeurs et rempli de rancœur. C’était justement en pardonnant qu’elle avait pu tourner la page. Ce n’était pas par la haine qu’on guérissait une vision restreinte des choses, pour ouvrir le regard il faut être compréhensif pour permettre à l’autre d’étendre son regard vers d’autres horizons plutôt que l’amener à se braquer encore plus sur le sujet. Néanmoins, le désir de vengeance et la colère prenait souvent le pas sur la sagesse et la raison, amenant inévitablement à de tristes situations entretenant le cercle de la Haine.

Pendant ce temps, un homme regardait les deux êtres venus d’ailleurs depuis la fenêtre de sa demeure qui faisait partie de la première rangée en face de l’océan. Un doux sourire se dessina sur ses lèvres.

La fille du ciel observa l’humanoïde s’approcher avec une certaine grâce. De quelle espèce était-elle ? Ce n’était ni une femme-truite, ni une femme-poisson clown à priori… Ah… Difficile à dire. Ishtar n’était pas scientifique et ne pouvait pas se targuer de connaître suffisamment bien les espèces animales pour reconnaître l’espèce dont les gênes s’exprime dans le physique d’un homme-poisson. Bon, en soit-ce n’était pas réellement important. C’était toujours intéressant, mais loin d’être essentiel. C’est ainsi que la demoiselle des mers ne tarda pas à s’exprimer, répondant à la question que venait de poser l’Archange du Typhon. Néanmoins, les mots lâchés par Pantalo laissèrent la De Lérhane assez perplexe dans un premier temps. « Déposé » ? Voilà qui était bien surprenant. L’ancienne révolutionnaire arqua un sourcil, cherchant à comprendre ce que cela pouvait bien vouloir dire… Elle ne pensait pas que cela pouvait être un cas comme le sien après sa chute de Bilca et la découverte du monde des mers bleues aux côtés de l’équipage du Centaurus, l’idée ne pouvait pas vraiment lui effleurer l’esprit puisque, en dehors d’elle-même, la décima n’avait jamais rencontré quelqu’un ayant un passif similaire. En tout cas, si elle ne savait ce qu’elle faisait ici, c’est que la femme-poisson ne devait pas voguer sur Grandline depuis très longtemps.

-Drôle d’histoire. Tu sais où l’on se trouve au moins ? Enfin, je vois. Calm Belt. Pour y accéder ce n’est pas non plus trop compliqué, c’est par contre bien plus compliqué si jamais tu veux te rendre à une île qui se trouve au milieu de Calm Belt. D’ailleurs, c’est bien joli, mais il y a un Clam Belt au nord de la route de tous les périls et un au sud. Tu veux te rendre auquel ? Tu sais si c’est plus vers Reverse Mountain ou vers Marijoa ?

C’était beaucoup d’information que la jeune ingénue allez devoir traiter et, à priori elle ne les comprendrait pas toutes, ce qui amènerait la demoiselle ailée à entrevoir la possibilité que la fille des eaux débarquait vraiment pour la première fois. Peut-être n’avait-elle jamais quitté son île jusqu’à aujourd’hui. Il lui faudrait donc être plus explicite. La question était comment donner des indications claires à quelqu’un qui ne connait pas la géographie de ces océans… Ishtar ne connaissait qu’un moyen, celui qui elle-même lui avait permis d’évoluer et de comprendre les mécaniques des mers bleues bien plus complexe que Bilca où le village vivait en autarcie éloigné des autres civilisations et ayant que peu de contact avec les autres îles célestes au final.

-Je vois, tu ne comprends pas et tu ne connais rien à Grandline et tout ça. C’est bien ça ? Si jamais tu pouvais me donner une information plus précise sur ta destination je pourrai peut-être t’aider, mais le meilleur pour que j’y parvienne c’est encore de t’accompagner et de t’apprendre des choses sur cette océan dangereux et sur les îles importantes à connaître. Puis à deux, c’est plus facile de faire face aux menaces que seul. Cela fait des années maintenant que je navigue un peu partout sur la planète, donc ce n’est plus vraiment un problème pour moi, d’autant que j’ai des moyens de me mettre hors d’atteindre de mes ennemis. Néanmoins, je ne sais pas si tu es en mesure de te défendre seul face aux dangers de Grandline. Il ne faut pas les prendre à la légère… Alors ? Cela te tenterait ?

Une fois ceci fait, elle pourrait se présenter et en poser des questions pour en apprendre plus sur cette inconnue, tout en renseignant en même temps cette dernière sur elle même. Ce n'était pas car elle faisait cette proposition maintenant que le départ devait être imminent. Il fallait profité de l'ambiance de cette île pour discuter posément.

L’incompréhension était visible sur le visage de la femme-poisson. Il n’y avait pas besoin d’être fin psychologue pour deviner l’état de perplexité qui s’imposait à Pantalo submergée par le flux d’informations que l’Archange du Typhon venait de faire déferler rien qu’en remuant les lèvres pour prononcer ce qui devait au final ressemblait à un agglomérat de formules compréhensible dans le vocabulaire mais insondable sans les notions géographiques primaires de ce monde. Ishtar avait de l’empathie pour cette ingénue et aussi une certaine inquiétude. Qui avait bien pu la laisser seule face aux dangers de Grandline si elle ne connaissait rien à cet océan de tous les dangers ? Ce n’était guère prudent. Comme ce voyage sur les flots équatorials n’était pas effectué dans la nécessité de réalisation d’une mission mais bien un voyage personnel pour explorer les confins et recoins de la route de tous les périls, l’ancienne révolutionnaire pouvait tout à fait prendre le temps de faire un détour pour accompagner la Neveste jusqu’à se destination. Partager cette traversée avec quelqu’un serait agréable et la De Lérhane s’en voudrait de laisser une personne comme ça, la guerrière céleste ayant à cœur d’aider les gens dans le besoin dans la mesure où ils avaient un bon fond, même s’il était caché sous une couche sombre comme l’égoïsme et la vengeance pour Shinji Nakata qu’elle avait rencontré à West Blue un peu plus tôt dans l’année. Il valait mieux vivre avec les autres que contre les autres, s’entraider régulièrement plutôt que se privilégier constamment. Dans sa quête « pour ne pas mourir », voilà une drôle de façon de s’exprimer.

-Pour East Blue il faut aller au Calm Belt nord, expliqua rapidement la bilcane. Quant à ta phrase, le plus important c’est que l’on comprenne ce que tu veux dire… Après personnellement je reformulerais ça plutôt en « Je dois retrouver d’autres femmes poissons qui vont m’y emmener. » Je trouve qu’il vaut mieux étirer un peu plutôt que chercher à trop condenser, à s’exprimer trop rapidement. Enfin, ce n’est que mon opinion, je ne suis pas linguiste. Hahaha, déclarerait la demoiselle ailée sur le ton de la blague. En tout cas, ravi de te rencontrer. Si nous partageons un bout de route ensemble, il vaudrait mieux que l’on se présente, ajouterait la maudite avec un clin d’œil. Je m’appelle Ishtar De Lérhane. Je viens des îles célestes, c’est pour cela que j’ai ailes dans le dos. Néanmoins, le fait que j’en ai quatre et que je sois très grande est une exception. Je suis loin de l’ange type, le reste de la population angélique étant assez proche d’humains normaux auxquels on aurait greffé deux petites ailettes dans le dos. Il y a très peu d’anges sur les mers bleues ce qui fait que pour certain nous ne somme qu’une légende, mais pour moi qui ait vécu jusqu’à mes dix-huit ans sur Bilca c’est des choses tout à fait banals. Cela fait maintenant sept années que je traverse les eaux de ce monde, sept années depuis que je suis tombé de la mer blanche tout là-haut. C’est bien différent d’ici parce qu’il y a des nuages à la place de l’eau et même les îles elle-même sont faites avec des nuages. Cependant, depuis j’ai découvert de biens nombreux endroits qui ont leurs propres particularités et qui pourraient ne pas paraître faire partie de la même réalité que des coins comme ici, et ceux sur tous les océans. Enfin, je parle, je parle, je parle, je parle, mais c’est à ton tour de m’en dire un peu plus sur toi.

La brise était douce. Le calme était appréciable. Que cela pouvait faire du bien se reposer, mais il fallait y aller. L’Archange du Typhon devait accompagner Pantalo sur cette mer tortueuse et dangereuse. Une ingénue comme elle était fortement menacé si elle exécutait son périple seule avec tous les équipages pouvant l’attaquer et les malfrats pouvant user de ruses pour l’attraper et peut-être la revendre à Shabaody à quelques nobles. Oui, la bilcane préférait se détourner quelques temps de son voyage pour conduire la femme-poisson jusqu’à Calm Belt où apparemment quelqu’un l’attendait. Il n’y avait plus qu’à espérer que ce soit une personne de confiance. Néanmoins, pour l’instant elle profitait encore des quelques minutes qui lui restait pour observer la vie paisible des habitants des lieux. Est-ce que c’est l’avenir auquel elle aurait eu droit si elle n’avait pas chuté de Bilca ce jour-là ? Peut-être. Si c’était assez agréable, la maudite mythologique devait avouée que le manque d’action aurait possiblement pesé sur sa conscience et la force des oiseaux tyrannisant son village natal se serait avéré frustrante pour la guerrière qui avait butté contre cet obstacle durant toute son adolescence. Envisagé ce genre de vie qu’elle aurait pu connaître ne faisait que la conduire à se questionner sur ce que faisait sa famille, ou encore les Icarus ou Sakuga Keigo, à l’heure actuelle. La nostalgie commença à hanter les traits du visage de la blonde aux prunelles argentés.

Bien vite, la zoan mythique balaya les affres mélancoliques qui la menaçait pour faire quelques pas aux bords de l’océan. Les vagues venir mourir là près des quais tandis que l’océan s’étendait à perte de vues. Dans ces instants, il était inimaginable que des terribles tempêtes pouvaient secouer les contrées marines et que des équipages assoiffés de richesses soient prêt à tout pour trouver quelques trésors. Oui, dans les moments comme celui, on pouvait croire que la mer était quelque chose d’amical qui dormait et offrait sa sérénité à ceux qui s’en approcher pour la caresser. Si seulement c’était vrai. Si seulement le monde pouvait être en paix. Malheureusement, il était affreux par bien des aspects. Les tourments étaient nombreux. Les fourberies étaient légions. Triste constat qui était obligatoire. Cette crise mondiale n’aidait en rien les choses à avancer vers le mieux. Cela faisait du bien de mettre tout ça de côté, de faire une pause et profiter de la tranquillité d’un lieu comme celui-ci. Il se pouvait tout à fait qu’un jour futur elle se décide à revenir sur cette île pour y passer quelques vacances improvisées. Un soupir quitta ses lèvres alors qu’elle se retournait pour avancer vers la femme-poisson qu’elle allait devoir conduire en sécurité tout en tentant de lui inculquer certains de ses savoirs en espérant que cela suffise pour lui permettre de survivre sur ces eaux dangereuses sur lesquels elle voyageait désormais. La bilcane lança un dernier regard vers le village avant de se métamorphoser pour prendre son envol. Peut-être même qu’elle reviendrait dès qu’aurait fini de voyager avec Pantalo finalement.