Le ciel ce soir-là était dégagé, serti d’étoiles rendues timides par la luminosité de Marine Ford. Après y avoir passé presque toute la journée, voilà que je retournais déjà au terrain d’entraînement. Pourquoi ? Puisqu’on m’y avait invitée, tout bêtement. Si, pour quelqu’un d’autre, j’aurais été prompte à préférer refuser l’offre pour mieux passer la soirée à roupiller, disons que cette fois-ci j’aurais été bien sotte de le faire. Dire que moi, la petite Penny d’Ironfall avec ses cheveux roses et ses rêves de liberté, j’allais passer la soirée avec un Amiral de la Marine. Enfin, s’il faisait acte de présence, évidemment. Je m’attendais à ce qu’il oublie ou simplement à ce que ses obligations entrent en conflit avec ce qui avait été rapidement convenu dans la journée. Pourrais-je lui en vouloir de toute façon ? Pas vraiment. J’avais eu une chance incroyable d’attirer l’attention d’un homme bien plus prestigieux que moi ou, plutôt, j’avais eu une chance incroyable d’avoir une malédiction capable d’attirer l’attention d’un homme tel que lui. Oui, cette vérité était toujours amère, mais je préférais la regarder en face malgré tout.

Lui avait plusieurs îles sous sa protection, plusieurs peuples. Même que le Kurohebi voyait chaque individu étant sous sa tutelle comme étant un membre de sa famille. Cette simple idée suffisait à me donner le tournis. J’avais été incapable de prendre soin d’une seule petite fille et lui dédiait sa vie à prendre soin d’îles entières ! En bien des points il continuait de m’impressionner et de me faire douter de la portée de ce que moi je pourrais bien accomplir en comparaison. C’était presque ironique comme nous étions tout l’opposé l’un de l’autre. J’étais partie pour faire ma vie et lui, de son côté, considérait avoir déjà joué le rôle qui était le sien. Une fois de plus, le triste constat s’imposait à moi : la seule chose que j’avais à lui offrir était la puissance du fruit des séismes.

« Hrmpf. »

Soudainement marabout, je frappai un caillou du pied pour exprimer ma frustration. Difficile également de ne pas repenser aux événements ayant eu lieu plus tôt. Malgré toute ma volonté j’avais prouvé que je n’avais rien de spécial, chutant alors que je m’apprêtais à repasser à l’offensive. Le combat s’était conclu sans ma participation alors que je n’avais rien pu faire d’autre que d’encourager mes camarades depuis un endroit sûr. Oui, ma fierté en était encore entachée. Quoi que ça n’avait pas besoin de rester comme ça, n’est-ce pas ? Je regardai à droite à gauche à la recherche d’une grande silhouette que je pourrais difficilement manquer. Rien, j’étais seule. Peut-être qu’il ne viendrait pas, finalement. Mais ce n’était pas plus mal. J’avais le terrain d’entraînement à moi seule et, maintenant que j’étais là, pourquoi pas en profiter ?

Je me dirigeai vers un endroit dégagé, respirant un bon coup et dénouant mes épaules avant toute chose. Évidemment je me sentais un peu bête de faire ça toute seule après la tombée de la nuit, mais bon. Je n’avais pas d’auditoire de toute façon alors autant en profiter. Je sautai donc sur place, une fois, puis deux. Je devais sauter assez haut pour avoir le temps de frapper l’air avant de retomber. Vachement plus compliqué lorsqu’on n’est pas déjà en chute libre. Une fois les premières tentatives maladroites derrière moi, je parvins à me glisser dans la zone, comme on dit. Concentrée, c’est avec plus de sérieux que je tentai de reproduire la technique de l’Amiral Archer. Seule, je n’avais pas peur des regards ou de me relever après une chute. Il n’y avait plus que moi et mon objectif, allant jusqu’à momentanément oublier pourquoi je m’étais rendue au terrain d’entraînement en premier lieu.  

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Depuis toujours, Ghetis raisonnait de façon pratique lorsqu’il rencontrait de nouveaux marines. Il cherchait à voir les atouts de chacun et réfléchissait à ce qu’ils pourraient apporter à son unité. Ce raisonnement pouvait paraître inhumain pour certains, mais l’Archer était d’une sincérité naturelle. Il ne pensait pas à mal, bien au contraire.

Certains se cachaient derrière de beaux sourires, énormément de gentillesse et plus encore. Lui se montrait franc et honnête. En réalité, n’était-ce pas ça la vraie vie ? Une franchise naturelle. Ce n’était pas pour autant qu’il ne savait pas choisir sur d’autres bases que le talent. Cependant, son optique n’était pas la même que d’habitude. Là où il aurait tenté d’enrôler cette femme immédiatement afin de ne pas la « manquer », il ressentait l’envie de laisser les choses «  se faire seules ».

Cette journée, qui aurait dû être mauvaise, s’avéra être très intéressante. Plus encore, cette soirée l’excitait presque. Il voyait là un moment de lâcher prise. Alors, au lieu d’être vêtu en armure, manteau et gunbai, le guerrier vint en kimono. Sa grande chevelure ébène avait été attachée en une queue de cheval, alors qu’il s’étirait longuement.

- Tu vas vraiment y aller ? dit un Pride, occupé à manger.
- Pourquoi pas ?
- Nous avons dû quitter Marijoa à la hâte pour éviter que les Dragons Célestes ne nous agressent.
- Il est vrai que rester à Marineford peut paraître dangereux, mais en soi je suis sur mon territoire ici. Marijoa était une zone plus risquée.
- En plus tu ne rentres pas dans le bâtiment pour esquiver l’Amiral-en-chef, ça ne te ressemble pas.
- Je ne sais pas comment je réagirai si je le croise… Le Constantinisme. Cette religion agresse le Gouvernement. Fusionner l’Etat et la religion est une mauvaise idée, cela ne peut qu’entrainer une décadence. Un état doit se baser sur la raison, la logique et non sur les dogmes d’une religion. Encore moins lorsqu’elle porte le nom d’un simple homme.
- Je suis un homme de science, alors tu connais mon avis sur tout cela. En tout cas, nous ne devrions pas rester ici trop longtemps… Ton Serguy risquerait de nous rendre visite…Tu as intérêt à la recruter.
- Eh bien, je n’ai pas prévu cela je t’avoue. Je voudrais juste discuter avec elle. Désormais connaître les opinions d’autrui est très important. Je ne veux plus recruter de traître, de personne qui change d’avis sur une seule action, des personnes qui oublis les services rendus. La loyauté artificielle ne m’intéresse plus.
- Cela n’arrivera plus
- Aller je te laisse !

D’une puissante impulsion, le Vairon se projeta dans les airs, son kimono captant l’air dans une ondulation violente, avant que le geppou ne prenne le relai. Lentement, il arriva vers la zone d’entraînement et ne tarda à voir la demoiselle.

Manifestement elle s’entrainait au geppou et cela l’amusa. En une lente descente, il prit la parole.

- BOUH !

Si sa blague fonctionnait, alors il ne pourrait s’empêcher de s’esclaffer ! Sinon, il rirait quand même, mais un peu moins fort.

- Il faut reposer tes muscles voyons, tu les as déjà éprouvé aujourd’hui. Ce soir rimera avec le repos.

Eh bien oui, il la tutoyait. Non pas parce qu’il avaient passé le cap de la familiarité, mais parce qu’il n’avait plus sa casquette d’amiral, alors il se présentait comme l’homme qu’il était : Ghetis Archer.

- J’espère que le bain chaud t’a fait du bien. Il ne faudrait pas que tu te froisses un muscle, nouvelle recrue AInsley ! Dit-il en riant.

Il regarda autour de lui, voyant qu’il n’y avait pas âme qui vive et conclut par :

- Tu es une vraie battante pour avoir la force d’entamer un entrainement dans un tel cadre, un poil solitaire.

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La Couronne

Comme dit plus tôt, j’étais concentrée. Très concentrée. Trop concentrée. Ainsi, je ne remarquai pas l’ombre qui s’était approchée de moi par le ciel. Contrairement à moi, lui n’avait aucun mal à se mouvoir dans l’air et, aussi joueur que plus tôt, il se permettait de marquer son arrivée par une gentille blague. Enfin, pour lui c’était drôle. Pour moi ? BOUH !

« AHH ! »

Je perdis mon équilibre et ratai mon double saut, retombant au sol de manière maladroite. Au moins je parvins à rester sur mes pieds, mais il m’avait bien fait une petite frayeur. Tout fier, le grand brun ne se privait pas pour en rire et, malgré moi, je ne pu m’empêcher de le rejoindre et de m'esclaffer à mon tour.

« Okay, c’était bien joué je l’admets. »

L’hilarité initiale passée, l’Amiral opta pour une approche plus bienveillante. Il avait bien raison, mes muscles avaient besoin de repos et j’acquiesçai donc. Me faisant plus droite, je m’empressai de passer une main dans ma courte chevelure rosée et de chasser la poussière qui pourrait s’être accrochée à mes vêtements de civile. Déjà que je ne m’attendais pas à ce qu’il fasse vraiment acte de présence, le voir apparaître en kimono était d’autant plus surprenant. Peut-être aurais-je dû porter quelque chose d’un peu plus spécial moi aussi ? Enfin… C’était qu’une rencontre pour discuter quand même, n’est-ce pas ? Ce n’était pas comme si nous avions un rencard ou un truc du genre, ce serait ridicule. Sur un terrain d’entraînement ? Et j’étais une femme mariée ! Et lui mon supérieur et de loin… Ouaaais ce n’était pas un rencard. Peut-être qu’il était juste plus confortable comme ça ?

« Je dois admettre que c’était une superbe idée les bains aujourd’hui. Ça faisait longtemps que je n’avais pas eu la chance de simplement relaxer dans une étendue d’eau chaude. Merci pour ça. »

J'étais certaine qu’il devait comprendre. Même sans savoir depuis combien de temps il était lui-même maudit, il était simple à deviner qu’il ne devait pas être allé nager dans l’océan depuis un bail. Ceci étant dit, l’ambiance était différente ou, à tout le moins, c’est l’impression que j’en avais. Si plus tôt nous nous étions rapidement comportés comme de vieux amis, le voilà qui regardait à droite à gauche à la recherche de je ne sais quoi. La conversation restait encore superficielle, comme maladroite. Il me complimenta d’ailleurs sur mon attitude puisque j’avais trouvé la force de m’entraîner ici en solitaire. Gênée, j’esquissai un sourire avant de m’expliquer.

« À dire vrai je ne pensais pas vous voir ce soir alors… Tant qu’à être ici je me suis dit… Voilà. »

Le vouvoyer contribuait, étrangement, à cette ambiance qui n’était ni professionnelle, ni familière. Ce fut à mon tour de regarder d’un côté et de l’autre, comme si je cherchais quelqu’un d’autre dans l’immensité du terrain d’entraînement vide.

« Donc… c’est quoi le plan ? On reste plantés ici debout à discuter ou y’avait quelque chose de prévu ? »    

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Un franc sourire vint alors se tracer sur le visage de l’homme, suivit d’un rire lorsqu’il entendit la demoiselle crier. De même il fut très content de voir à quel point elle jouait le jeu de l’humour. Elle ne s’était pas braquée pour une simple blague.

Si cette rencontre pouvait avoir des airs de « rencard », de « rendez-vous galant », l’Archer n’y voyait là qu’un moment de discussion tout à fait normal. Un large sourire apparaissant sur son visage lorsqu’elle mentionna les sources chaudes. Il était heureux de voir toute la motivation de cette jeune femme.

Pourtant, il pencha la tête sur le côté d’un air intrigué lorsqu’elle mentionna le fait qu’elle ne pensait pas le revoir. Elle s’attendait sans doute à ce qu’il annule à la dernière minute ou ne soit pas disponible. C’était généralement de cette façon qu’était faite la vie d’un amiral alors il ne pouvait que comprendre !

Néanmoins, lorsqu’elle regarda autour d’elle, il ne comprit pas ce qui lui prit et fit de même.

- TU as peur d’être surprise avec moi ? Je te vois baliser le périmètre.

Cette question, quoi qu’un peu rhétorique, avait pour but de montrer que lui ne se préoccupait pas du fait qu’on les croise ensemble. Il s’affirmait ainsi aux yeux de celle-ci.

- Rester planter là ? Pas du tout ! J’avais envie d’être installé tranquille, alors j’ai pensé qu’une petite nuit à la balle étoile, sur une île végétale, pourrait te plaire.

Il lui tendrait alors la main et dirait l’air de rien :

- Nous allons nous en voler, tu peux me tenir par la main, mais si tu préfères te blottir contre moi, comme la dernière fois, tu peux. Le voyage sera court.

Ainsi, il emploierait à nouveau le geppou, découlant des airs avec la demoiselle. Elle serait, soit, correctement accrocher à son buste, soit, elle le tenait par une main, tout en ayant peur de la sensation de vide si telle était sa frayeur.

Finalement, en quelques impulsions, ils purent s’éloigner des quelques navires de guerre de l’île, le brun commença à descendre lentement vers l’eau. Lui comme Penelope étaient maudits par un fruit du démon , alors ce genre de chose pouvait paraître effrayante. Pourtant, le brun se contenta de libérer une pop green sur l’eau et celle-ci se déploya en un ilot verdoyant et chaleureux. Ponctuer de plantes diverses. Souriant pour sa partenaire, il la posa lentement contre le « sol » de l’île avant de se poser lui-même. Bientôt il lança une autre graine qui créa une sorte de buisson plat, à l’allure de fauteuil ou de grand nid, une sorte de mélange. Il y avait de quoi y loger deux personnes sans qu’elles ne se touchent. Il lança ensuite une pop green qui créa un robinet floral, tandis qu’un autre état un arbre à plats divers et variés. Tout souriant, il viendrait s’asseoir dans ce « mini » fauteuil si pratique.

- Alors, cela en valait le détour ?

Dit-il en constatant le noir complet autour d’eux, alors que la lumière des étoiles venait ensoleiller sa vie.

- J’avais envie de discuter, d’apprendre à te connaître. Mais il valait mieux discuter seul. En revanche je constate que tu as du mal au tutoiement. N’ait crainte tu ne risques rien à me tutoyer ou non ! Pour ma part, étant actuellement en tenue de civil, je ne suis que Ghetis Archer face à toi.

Ainsi, il sortirait de son kimono deux verres vides, proposant l’un à la demoiselle afin qu’elle se serve elle-même.

- Je te laisse te servir, je suppose que tu seras plus à l’aise avec le fait de le faire toi-même. Pendant ce temps, pourrais-tu me parler de toi ? La vie qui t’a emmené à rejoindre la marine pour offrir un monde meilleur à ta fille. Raconte-moi cette histoire, elle m’intéresse.


Dit-il avant de presser le robinet qui laissait couler un jus multifruit ! Il pourrait ainsi écouter l'histoire de cette femme avec détail. Le pourquoi !

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La Couronne

Avais-je peur d’être surprise avec lui ? Embêtée, je me mordis la lèvre inférieure et laissa mon regard fuir vers le côté. Oui, c’était un fait et il l’avait tout de suite remarqué. Je choisis néanmoins de ne pas laisser la conversation s’attarder sur ce sujet, demandant plutôt quel était le plan pour la soirée. À ma grande surprise, le grand brun était fort préparé. Une nuit à la belle étoile sur une île végétale… Vraiment ? Je croyais que nous allions seulement discuter et pourtant le voilà qui venait de partager sa petite idée comme si cela allait de soi. Comme si c’était une idée totalement normale pour apprendre à connaître une collègue de travail. Sans voix, je regardai sa main se tendre vers moi alors qu’il poursuivait sur sa lancée. L’Amiral était confiant, comme si les choses ne pouvaient qu’aller en sa faveur. Ce n’était rien pour lui, l’histoire d’un petit vol où je pourrais me blottir contre lui avant d’arriver vite fait à notre destination et on n’en parle plus.

« Oh c’est euhm… Une idée. Je… »

Mon regard verdoyant se leva pour mieux rencontrer le sien dans la pénombre. C’est un peu trop, vous ne trouvez pas ? C’est très gentil, très attentionné, mais est-ce vraiment approprié ? En même temps à quoi m’attendais-je ? J’aurais tout aussi bien pu choisir de ne pas me déplacer, surtout si je ne croyais pas vraiment qu’il me consacrerait sa soirée. Sa nuit à la belle étoile. Sa main était toujours tendue vers moi et, malgré mon hésitation, je ne me sentais pas capable de la rejeter. Il y avait quelque chose de si pur dans la façon dont il avait étalé son plan, de si inévitable. Pourquoi est-ce que rejeter sa main semble plus difficile que de la prendre ?

« D’accord. Ça a l’air d’une superbe idée. »

Lui concédais-je finalement avec un sourire. Dire que, quelques heures plus tôt, mon poing ganté s’était abattu dans cette même main avec assez de force pour abattre des murailles. J’avançai vers le grand brun, laissant mes doigts aller se poser contre les siens avec prudence. Sa peau était chaude, plus que la mienne en tout cas, et rendue rude après toutes les batailles que l’homme avait menées. En comparaison, ma dextre semblait fragile et délicate, protégée des aléas de la vie par un destin relativement clément jusqu’à présent. Après une respiration profonde, je cherchai de nouveau son regard bicolore dans le clair-obscur.

« Je vous fait confiance. »

Nous quittâmes le sol peu après et, malgré moi, ma poigne se resserra dans la sienne. Cela mis à part, néanmoins, je parvins à garder mon calme. J’avais été avertie, cette fois. D’autant plus que j’avais eu l’occasion d’entrevoir l’aisance qu’avait le serpent noir à se mouvoir dans les airs et à jouer de sa force physique. Il était en contrôle, il l’avait été dès l’instant où j’avais posé les yeux sur lui dans la matinée. Seule la redescente parvint à vraiment m’inquiéter et, malgré moi, ma main libre vint se poser contre son bras. L’eau de la nuit était sombre et tranquille, plus profonde que le ciel nocturne et aussi opaque que l’encre. De douces vagues menaçaient de nous accueillir pour mieux nous piéger dans leur étreinte mortelle. Mais l’Amiral avait prévu le coup et, tel que promis, il fit apparaître une île végétale où nous serions en sécurité. J’y risquai un pied avec appréhension, guidée par la main confiante de celui qui m’avait amenée ici. Et voilà. C’était aussi facile que ça. Émerveillée, je levai les yeux au ciel. D’ici, la voûte céleste était encore plus magnifique, mise en valeur par la noirceur quasi-totale nous offrant un refuge à l’écart du reste du monde. Est-ce que cela valait le détour ?

« Largement. »

Je ne remarquai le reste de ses installations que lorsque je me retournai vers lui. Le Kurohebi était, comme toujours, parfaitement serein. Déjà il avait pris place sur son siège improvisé et reprenait la parole, citant ses espoirs pour ce qui allait suivre. Il voulait apprendre à me connaître loin des oreilles indiscrètes. L’homme insistait d’ailleurs sur le relâchement qu’il préférait adopter, prétendant qu’il n’était ici qu’un individu plutôt qu’un officier de la Marine Gouvernementale. Sur sa lancée, le soldat dévoila même les verres qu’il avait préparés, supposant que je préférerais me servir par mes propres moyens. Je le remerciai sobrement d’un mouvement de la tête avant de prendre le récipient et de prendre place sur ce même grand fauteuil végétal. Il était prêt à entendre mon histoire, à la cueillir avec autant de facilité qu’il l’aurait fait pour attraper une pomme sur une branche basse. Je le regardai se servir à boire sans toutefois l’imiter. J’esquissai plutôt un sourire amer avant de me tourner vers les étoiles. Ce n’est qu’une formalité, Penny. Lorsque sa curiosité sera satisfaite, il ne te trouvera plus aucun intérêt et ce sera tout.

« Je crois que je devrais d’abord rectifier quelque chose… Bien que cette histoire serait sans doute beaucoup plus louable, ce n’est pas pour ma fille que je suis ici. Je suis loin d’être aussi vertueuse, malheureusement. Bien au contraire… »

Allez Penpen, tu vas parler beaucoup de toute façon alors autant te mettre à l’aise. Me dis-je avant de finalement me servir du jus de fruit pour y tremper mes lèvres. Il était délicieux, pas que ce fut surprenant.

« J’ai atteint le point de non-retour. Je n’en pouvais plus de rester là-bas et de vivre une vie que l’on avait décidée pour moi. Malgré tous mes efforts, toute ma bonne volonté, je n’ai jamais pu trouver le bonheur dans le rôle que l’on m’a façonné. Puis il y a eu le Gura Gura no Mi, ce même fruit qui vous a poussé à vous intéresser à moi. C’était l’occasion idéale, l’excuse idéale. Je suis partie par égoïsme, c’est tout. Peut-être que c’était une erreur, que je vais mourir dans d’atroces souffrances sur un champ de bataille ou que je ne pourrai plus jamais tenir ma fille dans mes bras pour l’avoir abandonnée à son sort, mais ce sont les risques que j’ai acceptés. Je préfère encore prendre les mauvaises décisions et me mettre le monde entier à dos, tant que c’était ma décision. C’est tout. En profiter pour améliorer les choses et offrir une meilleure vie à Prim, ce ne sont que des excuses, vraiment. »

Je me tournai à nouveau vers lui sans voir tout à fait ses traits, moi-même porteuse d’un sourire désolé.

« Vachement décevant, je suppose. Mais au moins, jusqu’à présent, tout se passe comme vous l’aviez imaginé. Quoi que c’est sans doute une habitude, non ? C’est chiant à force ? »
   

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L’Archer se sentait particulièrement à l’aise avec la demoiselle, il ne voyait pas pourquoi il se sentirait mal à l’aise en sa présence… Elle était assez timide au final, là où lui était assez libéré. Pourtant, il ne pouvait cesser de se dire qu’elle devait bien avoir un fort caractère enfoui en elle.

Néanmoins, celle-ci s’évertuait à vouloir paraître banale…

Cette main tendue venait témoigner d’une vie encore tendre, d’une quiétude que l’Archer ne connaissait plus. Il enviait presque cette fragilité qu’il aurait préférée pour son frère et qu’il désirait pour sa nièce. Penny représentait cette part de la population qui pourrait s’épanouir dans un monde de paix. Paradoxalement, cette douceur témoignait de l’absence d’effort physique éprouvant, mais pas de l’absence de douleur psychologique. La vie de chacun pouvait être bien complexe par moment.

Alors, lorsqu’elle conclut son histoire, c’est un sourire à la fois chaleur, mais simple que le brun lui offrit.

- Pourquoi éprouves-tu le besoin de paraître banale ou décevante ? N’est-ce pas là l’intérêt de nos vies. Choisir des routes qui nous sont propres, sans forcément satisfaire l’ensemble des critères de ce monde. Bien des personnes me voient comme un monstre ou un homme abject, tu sais ? Pourtant, ai-je l’air de me préoccuper d’eux ? De l’avis qu’ils pourraient avoir de moi ? Lorsque tu narres le récit de ta vie, ne te dévalorise pas. Même le mendiant trouve sa valeur dans la rue où il s’installe. Et tu es loin d’en être un.

Il devait d’abord mettre l’accent sur ce point précis.

- A Hunter Island, tout individu est voué à devenir un chasseur de primes, de renommées ou un mercenaire. En vérité une bonne partie d’entre eux deviennent des mercenaires. A l’âge de 18ans, une proie est donnée à un groupe de jeunes afin de prouver qu’ils sont prêts à chasser librement. Durant cette mission, nous étions tous considérés comme des surdoués du combat, alors l’ennemi choisi était assez puissant… Pour la vaincre j’ai volontairement sacrifié mes trois camarades. Revenu à mon village j’étais vu comme un paria. Ainsi, je fus banni et on m’obligea à porter un masque et ne plus manier de sabre… Même après avoir quitté mon village, j’ai continué à arborer ce masque. Notre passé nous stigmatise et nous marque à vie. C’est à nous d’en sortir ou non. Tu as rejoint la Marine pour sortir d’une boucle infinie ou inintéressante, alors plutôt que de regretter le bateau t’ayant mené à destination, réfléchit plutôt à celui que tu emprunteras pour ton prochain voyage.

Il venait de lui avouer dans le plus grand des calmes, un pan méconnu de son passé. En vérité, elle était probablement la seconde personne à qui il avait raconté cette histoire. Ce qui vint même à l’étonner, n’ayant confié ce détail qu’à Yzis depuis des années, il se rendait compte du recul qu’il avait pris sur la vie.
Alors, il vint poser sa main sur l’épaule de la demoiselle et poursuivit.

- Entrer dans la Marine n’était qu’un moyen d’obtenir plus de soldats afin d’assaillir Whisky Peak. Sous les traits d’un soldat du Gouvernement se cachait un vengeur. Pourtant cela ne l’empêcha pas de trouver sa voie et devenir amiral. Ne tourne pas ton histoire dans son mauvais sens, imagine là sous un terme plus poussé. Peut-être qu’aujourd’hui tu ne sens pas cela comme l’accomplissement d’un but moral, mais demain sera un jour différent.

Cependant, l’homme marqua un arrêt et un nouveau sourire se dessina sur son visage.

- Tu ne m’as pas dit de quelle île tu étais originaire, ni qui était « Prim », même si j’en viens à supposer qu’il s’agit de ta fille.

Regardant le ciel un bref instant il conclurait sa première interaction…

- Il est vrai que le Gura pourrait représenter un grand intérêt pour moi. Néanmoins, si je souhaitais simplement en acquérir la puissance, j’aurais simplement demandé à t’assigner à mon corps armé. J’avais à cœur de découvrir la personne derrière ce don. Le temps m’a rendu méfiant, les trahisons viennent toujours de face et pourtant, je n’y suis jamais préparé. Désormais, le talent n’est plus un moteur suffisant. C’est pour cela que j’ai voulu te rencontrer, contrairement à mes usages habituels. Ton pouvoir est puissant, couplé au mien, cette fusion serait dévastatrice, mais je peux également m’en passer. C’est donc pour vérifier un intérêt supérieur à ton simple don, que je t’ai invité. N’image donc pas qu’il s’agisse-là d’un schéma habituel. C’est nouveau aussi bien pour moi, que pour toi. Cependant, je suis assez bavard et extraverti je dirais.

Oui le Gura était intéressant, mais recruter sur cette base ne garantissait pas l’absence de trahison.

- Quant à la mort, n’y pense guère. Pense à celle que tu dois éviter aux individus que ta médecine soignera. C’est ce qui compte réellement.


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La Couronne

Pourquoi étais-je comme cela ? Pourquoi vouloir me montrer difficile ou simplement banale et dénuée d’intérêt ? Je voulu ouvrir la bouche pour balbutier une excuse pour mieux la refermer immédiatement. Loin de se laisser démonter, l’Amiral m’avoua plutôt que certains le considéraient comme un monstre et, pourtant, cela ne l’atteignait pas. Sa vie était la sienne et n’appartenait à nul autre après tout, pourquoi ne pouvais-je faire de même ? Je me mordis l’intérieur de la joue, incapable de trouver une explication satisfaisante. Enseignant par l’exemple, le grand brun me partagea le récit de sa propre vie, au moins en partie, sans s’encombrer de gêne ou de dévalorisation d’aucune sorte.

Originaire d’Hunter Island, lui aussi s’était vu imposer un chemin tout tracé sans que l’on ne s’intéresse à son avis ou à sa volonté. Puis, le jeune homme avait, à l’époque, choisi de sacrifier ses camarades afin de réussir la mission qui lui avait été confiée. Sans surprise, on l’avait traité de paria et exilé, lui imposant même des sanctions supplémentaires pour bien enfoncer le clou. Ce qui m’étonnait, c’était qu’il ait volontairement continué à porter ce masque en question, même une fois loin d’Hunter Island. Il était donc, déjà à l’époque, porteur d’assez de remords pour se plier à cette punition loin des regards de ceux qui la lui avaient imposée. Pourtant cela ne l’avait pas empêché de chercher la vengeance, planifiant d’abord d’user de la puissance du Gouvernement Mondial pour mener à bien ses plans. Et, aujourd’hui, ce même homme était devenu Amiral. J’eu d’ailleurs l’impression qu’il me fit rapidement la morale en disant que je devais me concentrer sur l’avenir plutôt que vers le passé. Je me renfrognai, réfléchissant à ses mots et me demandant pourquoi ils ne résonnaient pas avec moi. Pourtant sur la forme il n’avait pas tort, c’est un peu ce que j’avais fait, non ? Oui, mais pourquoi ? Telle était la question qui avait continué à me tourner dans la tête pendant tout ce temps.

Le Serpent Noir me concéda son intérêt pour le Gura Gura no Mi, mais cela ne lui suffisait pas ou, plutôt, ne lui suffisait plus. À présent, c’est lui qui avait maintes fois souffert de la trahison des siens et il refusait de laisser entrer n’importe qui dans son cercle. Je me gardai bien de lui faire remarquer qu’il s’agissait peut-être d’une histoire de karma, ne me sentant pas l’âme d’une justicière qui pourrait abattre sur lui mon jugement. Selon ses dires, il était lui-même en territoire inconnu et je pouvais le croire. Toute cette démarche ne semblait pas malhonnête, tout comme lui ne semblait pas porteur de mauvaises intentions. Je me sentie même coupable d’avoir été si difficile avec lui alors que, pourtant, il n’avait fait qu’être gentil et curieux jusqu’à présent. Alors pourquoi avais-je réagi comme ça ? Mon regard se tourna de nouveau vers le sien et une piste de réponse se mit à éclore dans mon cœur.

« Je… Désolé de m’être montrée aussi négative. Je crois que… l’attention que vous me portez est intimidante. »

Voilà, j’avais trouvé. J’avais mis le doigt dessus et je l’avais dit.

« Enfin, ne le prenez pas mal. Vous n’êtes pas intimidant en soi c’est plutôt… Vous semblez incarner tout ce que j’ai toujours voulu accomplir. Fort, respecté, confiant et accompli, capable de protéger les siens. Je pourrais continuer, mais je ne veux pas non plus que ce soit prit de la mauvaise façon, je n’essaie pas de vous complimenter, c’est juste… voilà. Je suis à la fois fascinée et terrifiée par le monde que vous m'avez laissé entrevoir depuis notre rencontre cet après-midi. »

J’expirai un bon coup, me sentant déjà comme débarrassée d’un grand poids. J’en profitai pour prendre une nouvelle gorgée de jus de fruit, m’avouant finalement qu’il était on ne peut plus délicieux. Je me permis donc de remplir mon verre une seconde fois avant de m’installer plus confortablement dans le fauteuil végétal que l’Amiral avait fait pousser pour nous. Heureusement que j’avais songé à mettre des pantalons, comme ça je pouvais même m’installer en tailleur et me détendre un peu.

« Je suis née sur Ironfall, dans North Blue. Et Prim est bien ma fille, Primrose de son prénom complet. Si vous avez d’autres questions, s’il-vous-plait, n’hésitez pas à me les poser. J’y répondrai plus sincèrement cette fois, je vous le promets. »

   

@feat Amiral Kuroinu Enjoy !

La simplicité de vie, c’était un peu ce que lui évoquait ce moment. Quand bien même il voyait en elle une élève potentielle, il avait pris du recul sur la vie. Il l’abordait cette soirée avec beaucoup de quiétude. Il n’était pas dans son rôle d’amiral, ni dans son rôle de père et encore moins dans son rôle de dirigeant. Certes il s’intéressait au potentiel de Penelope, mais n’en faisait pas une priorité absolue. Il souhaitait discuter avec elle, jauger l’être humain, découvrir la personne.

Alors, lorsqu’elle s’excusa, c’est un sourire assez naturel qui vint se draper sur le visage de l’Archer. Elle le trouvait intimidant ? Elle le voyait comme une sorte d’incarnation de la « puissance », à la fois attrayante et effrayante, enviable et détestable. La puissance l’avait érigé en être à part en ce monde, mais lui créa également des ennemis. Pourtant, il continuait sa course vers celle-ci, tel l’insecte vers la lumière.

Pourtant, un jour, il arrêterait, un jour il décrocherait la lune du ciel, s’érigeant comme maître de son destin.

Aujourd’hui il apprenait qui elle était et cela lui plaisait. North Blue ? Une originaire des Seas Blues ? Cette mer qui existait à peine pour l’Archer, lui qui voyait cette zone comme inintéressante… Il n’y était allé qu’en de rares occasions. Néanmoins, il fallait bien admettre que de puissantes personnes venaient de cette mer.

Alors naturellement le brun mena sa main celle de Penelope, posant sa main, bien plus petite dans le creux de la sienne, il vint refermer sa main doucement contre la sienne.

- Une main, de la chaleur, différentes lignes, mais pourtant un humain comme les autres. Etonnant par sa taille, mais aussi normal que tout autre homme. C’est ce que je suis, c’est ce que nous sommes. Aucun être ne m’intimide, car je ne vois que des corps. Par contre, certains caractères, certaines personnalités peuvent être fascinantes, je le conçois. C’est sur cela que tu dois te baser. Ne laisse pas les hauts-faits ou la stature guider ta façon d’appréhender autrui. Laisse-les parler, sonde-les et tu verras comment agir avec eux.

Il n’était qu’un homme, elle n’était qu’une femme. Ils avaient un vécu d’humains. Rien ne pouvait placer l’un au-dessus de l’autre. Ils étaient égaux.

Cependant, en découvrant sa personnalité, elle pourrait se faire un avis sur lui.

Sa main vint se délier de la sienne avec lenteur, si elle l’acceptait, alors qu’il poursuivrait.

- En revanche, si je t’inspire… Si tu y vois là un tremplin, alors saisis-le avec toutes les émotions que cela t’évoque et transforme-les en force. Ne te laisse pas paralyser. Parce que le monde que tu entrevois. Ce monde qui parait si vaste, il peut être tien si tu le décides, tout comme tu peux en être une aventurière méritante. Ainsi, si tu mets cette fascination et cette peur au service de ton avancée, tu n’en ressortiras que : forte, respecté, confiance et accomplie.

C’est volontairement qu’il lui redit les adjectifs qu’elle avait employé.

- Mais ne t’excuse pas d’avoir été négative, j’espère surtout pouvoir te rendre la positivité que tu avais ce matin, celle qui a changé ma mauvaise matinée, en un bon moment.

Sans elle, sans son naturelle, l’homme n’aurait pas été aussi heureux d’affronter ses recrues, aussi heureux d’être avec elle dans les cieux. Il n’aurait pas vécu autant de joie en si peu de temps. Elle avait été un rayon de soleil en un instant, puis s’effraya de ses actes. Pourtant, elle semblait réfléchie et curieuse, des qualités importantes.

- Ta lecture du monde, c’est ce qui a l’air fascinant ce soir… Pourquoi Primrose ? C’est un prénom très original et quel âge a-t-elle ? Je ne connais guère North Blue, tout comme je connais peu les Seas Blues je t’avouerai. Dois-je comprendre que tu y as laissé famille et enfant ? Tel les marins d’une époque lointaine.

Levant son regard vers le ciel, il le glissa sur l’horizon plongé dans une teinte ébène, rendant l’océan à peine visible.

- Quel est ton but ici ? Non pas de façon « résumée », mais de façon précise.

C’était une question qui avait toute une symbolique et demandait une véritable réflexion. Une question qu’il était heureux de lui poser



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La Couronne

Il souriait simplement, m’écoutant lui avouer à quel point il m’impressionnait de tant de façons. Cela me rassurait, me permettait de continuer sur ma lancée et de me montrer aussi sincère que je le pouvais. Laisser tomber mes barrières était un exercice effrayant, ça avait toujours été le cas. Mais l’homme me faisant face n’avait pas hésité à tendre la main pour se saisir de la mienne. Une énième fois. Ce contact aurait dû m’être familier maintenant, ne rien évoquer de nouveau ou de plus marquant que les fois précédentes. Et pourtant, cette fois, j’eu l’impression que nos mains s’unissaient vraiment pour la première fois. Peut-être était-ce la façon qu’il avait de parler, peut-être était-ce les mots eux-mêmes. Je n’en avais aucune idée. Ma seule certitude, c’est qu’une bouffée de chaleur venait d’éclore en mon abdomen. Une sensation nouvelle, inédite, qui n’était pourtant pas effrayante, simplement réconfortante et peut-être même attirante. L’Amiral insistait, encore et toujours. Une main n’est qu’une main. Qu’importe sa taille, il n’en demeurait pas moins un simple homme, un simple mortel au même titre que moi. De son point de vue, seules les personnalités comptaient, les idées, la substance. J’aurais aimé lui dire qu’il avait raison, avouer que cela faisait grandement partie de tout ce qui me fascinait en sa personne, mais je n’y parvins pas.

Sa poigne chaude avait quitté ma main et c’est à regret que je l’avais laissé faire, me contentant d’acquiescer à ses mots. Pour lui, je devais me laisser être inspirée, me servir de lui et de ce que je voyais en son être pour me propulser vers de nouveaux sommets. Moi qui le voyais si loin de moi en ses accomplissements, ce n’était pourtant qu’une question de temps avant que je ne m’élève et que je le rattrape. Que je sois celle que l’on qualifiait de ces mêmes adjectifs dont je lui avais fait cadeau. Mieux encore, j’étais parvenue à illuminer sa journée et, en retour, il avait choisi de m’offrir la lueur des innombrables étoiles qui paraient le ciel. Grâce à lui, cette nuit avait pris un tournant fantastique, incroyable, là où mes rêves les plus fous pouvaient se manifester au creux de ma paume. Ce fut à mon tour de lui sourire, mes iris cherchant les traits de son visage dans l’intimité de la pénombre.

« Tout le bonheur était pour moi. Découvrir toute la fougue et la malice qui se cachaient derrière ce sombre regard absent était la plus belle des récompenses en soi. »

En avais-je trop dit ? Peut-être, mais l’ambiance s’y prêtait avec grâce. L’homme vanta ma lecture du monde, avoua que je le fascinais également. Le sentiment était donc mutuel, nos curiosités jumelles avaient servi à nous réunir et, à présent, c’est à petits pas que nous cherchions à les satisfaire. Le brun me présenta ses prochaines interrogations, questions auxquelles je me fis cette fois un plaisir de répondre, sans craintes.

« Cela fait plusieurs générations maintenant que les femmes de ma famille ont un prénom débutant par la lettre P. Ma mère se nomme Poppy, je suis Penelope et ma fille est Primrose. Ses cheveux sont de la même couleur que les miens alors le choix s’est imposé. Elle va bientôt avoir trois ans. Maintenant que je suis partie, ma mère et mon mari s’occupent d’elle alors, oui, je suppose être effectivement un vieux loup de mer. »

Avais-je conclu avec le sourire, suivant son regard qui se perdait dans l’horizon. Quel était donc mon but ici ? Question légitime bien que je dû y réfléchir un instant. Je lui avais déjà dit ce que je faisais dans la Marine, non ? Ce n’était pas sa question ou, du moins, je ne croyais pas que ce l’était. Il voulait savoir ce que je faisais ici là et maintenant, pourquoi j’avais répondu à son invitation, pourquoi j’avais accepté de le laisser m’emporter ici au large de Marine Ford et pourquoi je m’étais assise pour mieux répondre à toutes ses questions. Mon regard s’adoucit alors que je devinai ce qu’il me demandait vraiment dans tous les mots qu’il n’avait pas prononcés. Peut-être n’allais-je pas lui offrir la réponse à laquelle il s’attendait, mais mon instinct me disait qu’il s’agissait de la seule qui ferait l’affaire.

« Une personne qui voudrait vous tromper et profiter de vous ne l’avouerais jamais, n’est-ce pas ? Alors commençons là. Je suis venue car j’ai vu en cette rencontre une opportunité à ne pas manquer. J’espère que vous pourrez me le pardonner, sachant qu’il ne s’agit pas de la totalité de mes motivations. »

Je m’arrêtai, sentant les prochains mots s’entremêler dans ma gorge. Cette même sensation de chaleur me revenait, accompagnée d’un pincement de nervosité. Je voulais bien trouver mes mots, éviter les malentendus et lui offrir une réponse satisfaisante. Une réponse aussi sincère que celle qu’il méritait, que celle dont il aurait lui-même besoin. S’il s’était acharné à me faire baisser mes propres murs jusqu’à ce que je craque, je ne doutais pas qu’il me faudrait moi aussi mériter le privilège de le découvrir vraiment, ce grand homme qui ne se croyait pas différent d’aucun autre.

« J’avais envie de vous revoir sans avoir à vous partager avec toutes les autres recrues. »

@feat Amiral Kuroinu Enjoy !

Il était assez étonnant, d’un œil extérieur de constater la façon dont deux êtres pouvaient vivre très différemment une situation. Ghetis était assez éloigné des sentiments chaleureux, mais aussi intimidants qui abritaient l’esprit de l’Ainsley, prenant place dans son cœur avec sournoiserie. Il agissait avec elle hors de tout rôle, de tout devoir et cela se ressentait. La demoiselle le découvrait sous un jour peu commun.

Dans cette pénombre à la fois chaleureuse et inquiétante, le regard de la demoiselle semblait trouver celui du démon que représentait ce serpent noir. Oui son regard fut  absent lors de l’entraînement, mais était-il sombre ? Etait-il malicieux ? La fougue l’abritait, cela était une évidence, mais le reste, Penelope devrait le découvrir par elle-même.

Bientôt elle libérait réellement les informations tissant sa vie, les informations construisant son être. Il était assez drôle de savoir que sa famille pratiquait cette « culture » des « P », quand en face, celle de Ghetis cultivait les fins en « is ». Deux problématiques opposés, non pas une, mais deux lettres, non pas au début, mais à la fin.

L’âge le rendit presque songeur, son frère avait quitté cette terre depuis le même nombre d’année et pourtant cela semblait si lointain, tant il avait vécu de choses depuis. Il n’en oubliait pas Noctis, bien au contraire, mais il se rendait compte de l’impact de ce décès sur sa vie. Si Noctis avait été présent, alors l’Archer ne serait pas amiral aujourd’hui. Cela était une certitude.  

- Ma famille fait la chose inverse. Mon nom se termine par « is » et celui de mon frère également. Probablement que si un jour je donne naissance à un être, alors il aura cette terminaison lui aussi. Heureusement que je n’ai pas une lettre obligatoire à associer devant également, comme un « P ». Ça aurait rendu la tâche encore plus compliquée, hahaha.

Plaisantant sur le fait que tant de contrainte sur un prénom devait être source de recherches longues et complexes, il n’imaginait pas que son frère avait alors perpétré la décision, ou plutôt sa veuve. La nièce Archer, n’ayant pas encore été rencontrée en cette période de vie.

Lorsque la demoiselle prit le parti de parler d’une personne qui aurait voulu tromper, Ghetis pouffa de rire. Pourquoi songer à la réponse du trompeur ? Cela n’avait pas de réel intérêt, ni pour elle, ni pour lui, à part alerter l’Archer. Cependant, cette phrase amenait en réalité une chose : elle y avait vu une opportunité inratable. Le rendez-vous d’un amiral paraissait trop important sans aucun doute.

Cela offrait la possibilité à la demoiselle de s’attirer les bonnes grâces d’un supérieur et ainsi assurer une certaine quiétude au sein de la Marine. Ce fut la déduction qu’en eut Ghetis en première pensée… Jusqu’à ce qu’elle ne les achève.

Oui « Les » car non-contente d’achever sa phrase, c’est le Kurohebi qu’il cibla d’un tir prcis.
Elle ne voulait pas avoir à le « partager avec toutes les autres recrues » ?

Le regard de l’Archer s’agrandit, l’homme qui était généralement décisionnaire d’actes et de situations s’en retrouva bouche-bée, on ne lui avait jamais offert pareille réponse. Elle dégageait une ambigüité qu’il ne savait interpréter… Il en était presque à rougir, même si cela ne se dessina pas sur son visage, sans doute car il ne voulait pas imaginer de choses étranges la concernant… Elle avait parlé de son mari après tout, alors cela ne pouvait pas être ambigüe.

- Co-comment ça ? Je… Tu veux dire que tu voulais être seul à seul avec moi ? Mais dans quel but ?

Le Ghetis de ses seize ans, le Ghetis sous l’identité de Mask, n’importe lequel des deux auraient gratté sa tête et exprimé une sorte de gêne… Lui voulait rester sur la retenue, quand bien même l’intonation de sa voix en était perturbée.

- On ne m’avait jamais dit ce genre de chose, je ne sais pas comment l’interpréter, je ne voudrais pas manquer de respect à votre mariage en pensant à un sens erroné.

Il se devait d’être respectueux de sa situation de famille, car il ne connaissait pas la réelle teneur de sa phrase… Néanmoins, il connaissait la désagréable sensation d’une « réponse à côté » de la part d’un interlocuteur. Alors il tenait malgré tout à donner sa réponse France.

- Ma famille est assez vaste, je ne sais pas si tu pourras être souvent seule avec moi, cependant… Si nous venions à nous recroiser, nous pourrions reproduire un moment de quiétude comme celui-ci, si tu le désires bien entendu…

Que la phrase de l’Ainsley soit ambigüe ou non, cette réponse s’accordait dans les deux sens de celle-ci. S’ils se revoyaient un jour, alors ils pourraient de nouveau partager un moment ensemble.

- Tu as une promesse à tenir, donc cela arrivera un jour, j’en suis convaincu. Peut-être même, un jour ou nous rentrerons tous deux de missions différentes. J’aurais bien dit que tu serais peut-être le médecin s’occupant de mes plaies, mais je pense que la guerrière,  que tu es, n’aura pas le temps pour un simple amiral. Dit-il en la taquinant, sa main retournant chercher la sienne, cela inconsciemment.

Il avait plaisanté pour se rassurer de la situation, il tentait de ne pas manquer de respect à une femme, c’était, après tout, une femme qui l’avait sauvé il y a peu. Hélène Thermopolis changerait ce rustre en homme mesuré. Le hasard voulu que leur chevelure soit de couleur identique, même si cette Thermopolis ne représentait rien pour le brun, elle avait commencé à l’éduquer sur son comportement et cela commença par là.

- Par contre. Si nous devons nous voir seuls… Alors tu devras apprendre à ne pas me vouvoyer dans ce genre de moment, c’est ce qui te différenciera des « autres recrues » comme tu disais. Sois différente jusqu’au bout, si tu désires réellement l’être.

Oui, cela avait un autre sens, elle devait se démarquer coûte-que-coûte encore et toujours. Si elle désirait une chose dans la vie, alors elle devait la saisir, se donner les moyens d’accomplir ses objectifs.



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La Couronne

Il avait balbutié, cherché ses mots et, malgré moi, cela m’avait amusée. J’en avais ris juste un peu, doucement comme pour ne pas déranger les vagues qui sommeillaient autour de nous. Le voir hésiter de la sorte, se demander ce que j’avais voulu dire et pourquoi ; tout cela mis ensemble servait à le rendre profondément attachant. Ça me donnait envie de continuer à le taquiner à mon tour après tous les rebondissements qu’il m’avait fait vivre plus tôt dans la journée. Ceci étant dit, il eu tôt fait de me rappeler à la réalité et de me faire réaliser ce qui l’avait vraiment embêté. Je ne voudrais pas manquer de respect à votre mariage en pensant à un sens erroné. Ah, ah oui, c’est vrai. J’étais une femme mariée moi, ne venais-je pas tout juste de le lui avouer ? À mon tour de ne plus savoir où me mettre, prise en flagrant délit.

« Oh évidemment que ce n’était pas ! Je veux dire, je ne suis pas du genre à… Vous savez. »

Je n’étais pas le genre de dame facile qui s’amusait à fleurter avec tous les beaux grands bruns qui se démarquaient dans une foule, loin de là. Ceci étant dit, il était vrai que je n’avais plus porté mon alliance depuis mon entrée dans la marine. Je l’avais d’abord retirée simplement car c’était plus pratique dans les entraînements et, après un bout de temps, n’avais plus eu envie de remettre la bague à mon doigt. Elle était présentement rangée dans l’un de mes tiroirs, blottie dans un foulard de soie entre deux paires de chaussettes. Telle était toute l’importance que j’accordais à ces vœux qui m’avaient été imposés sans qu’il y existe la moindre once de passion entre moi-même et l’heureux élu. À partir de là, était-il vraiment étonnant que j’en arrive à oublier que j’avais déjà quelqu’un qui avait été absent de ma vie dans la dernière année ? Mais tout cela avait des airs d’excuses et, si l’on venait à m’offrir les mêmes, je ne serais sans doute pas encline à les écouter. C’est donc pour cela que j’avais décidé de garder ces explications pour moi-même, préférant simplement démentir ses craintes pour le rassurer. Bien sûr que j’avais dit cela sans arrières pensées, voyons. Je n’aurais jamais osé faire autrement… ha, haha…Mon interlocuteur sembla d’ailleurs s’en accommoder puisqu’il évoqua sa large famille qui pourrait compliquer les choses, si nous désirions réitérer l’expérience d’une soirée en seuls à seuls.

« Cela me plairait, mais je ne me sentirais pas confortable à l’idée de me mettre entre vous et votre famille. Je me contenterai des moments qu’ils voudront bien me laisser. »

Il y avait, après tout, une large différence entre la famille d’un homme et les autres recrues assistant à un entraînement. Celui m’ayant invitée ici mentionna donc qu’il ne serait pas surpris que nous nous croisions à nouveau bien assez tôt, au retour de nos propres missions respectives. Il pourrait alors avoir besoin d’un médecin, quoi que la guerrière que j’étais n’aurais peut-être plus de temps à consacrer à un simple Amiral. J’esquissai un sourire flatté, sentant mes joues se teinter de rose lorsque sa main revint cueillir la mienne.

« En effet, je serai très bientôt une femme occupée. Mais si vous faites votre réservation maintenant, je veux bien vous garder un créneau. »

Je crois que j’arrivais enfin à me sentir vraiment à l’aise avec lui, à oublier le monde par-delà notre île d’un soir. Quelque chose me disait que cela était réciproque puisque, plutôt que de me décourager, il me demandait de me démarquer. D’être spéciale jusqu’au bout et de me permettre de le tutoyer. Si je voulais vraiment qu’il me remarque en toutes les foules, je devais aller jusqu’au bout sans me retourner. Qu’à cela ne tienne, j’allais donc lui dire d’autres mots que personne ne lui avait sans doute jamais partagés à la belle étoile.

« Si tel est votre souhait… Cet après-midi, en vérité, tu m’as permis de me sentir plus vivante que je ne l’avais été depuis longtemps. Tu m’as rappelé ce pourquoi je suis ici dans la Marine et quel monde s’offre maintenant à moi. Retomber sur terre… Je ne le voulais pas, je l’admets. J’aurais aimé que notre moment de haute voltige ne s’interrompe pas, mais toute bonne chose a une fin. Voilà donc pourquoi je suis plus qu’heureuse de t’avoir à moi toute seule. Ce genre de moment me plait trop pour que je m’empêche de le saisir. »

Avais-je finalement conclu en laissant mes doigts s’entremêler aux siens. J’avais détourné le regard pendant ce geste on ne peut plus effronté. Bien sûr que je ne le pensais pas dans ce sens !, bien sûr. Après cela, pourrait-il vraiment me croire ? Devrais-je laisser cette vieille union dont je n’avais jamais voulu m’empêcher de faire des folies au moment présent ? Si j’étais partie, n’était-ce pas justement pour prendre mes propres décisions ? Bonnes ou mauvaises, tant quelles étaient les miennes. En accord avec les paroles du brun, peut-être que je pourrais simplement assumer mes mauvaises décisions, quitte à m’attirer le jugement de ceux qui étaient plus vertueux que moi.

@feat Amiral Kuroinu Enjoy !

Si le haki de l’observation du brun s’était spécialisé dans la lecture des mensonges, il y aurait fort à parier que la demoiselle s’en soit retrouvée mise à nue, laisser sans armes face à celui qui détiendrait alors la vérité sur ses intentions. Néanmoins, le destin avait choisi de la protéger, le destin avait choisi qu’il n’en serait pas ainsi. Non, elle ne pensait pas à mal disait-elle et l’Archer, naïf y croirait. Après, tout, il ne voulait pas agir de façon irrespectueuse. Dans un passé au final assez proche, il aurait sans doute abordé les choses différemment. Cependant, il était désormais amiral et devait réfléchir à la portée de ses actes, mêmes les plus « anodins ». Après tout, se rapprocher d’une femme n’était pas quelque chose d’étrange pour un humain.

Elle semblait  assez compréhensive vis-à-vis de la « famille Archer » et Ghetis appréciait cela. Elle ne cherchait pas à s’y imposer, ni à y entrer, elle cherchait simplement à concilier les deux. Un geste qui avait sa touche de respect, mais aussi de pudeur. Un léger rire vint s’emparer de lui à sa réponse, une réservation ? Pourquoi pas, cela pourrait être amusant. Il avait tant l’habitude de revenir blessé grièvement, que cela ne serait pas très surprenant. Depuis  Makui, chaque mission avait été la raison d’une hospitalisation. Loin d’être un guerrier « puissant », le serpent était simplement un forcené, mettant son corps au service de ses batailles.

- Tu devrais avoir assez rapidement du travail avec ce que je prévois dans les six prochains mois. Enfin, si je rencontre une réelle opposition, mais en vérité cela m’étonnerait. Disait-il en pensant à l’opération Kaiten-Su, qui devait être un jeu d’enfants selon les pronostics originaux du brun.

Ce sourire flatté, l’obscurité qui empêchait de voir une rougeur aux joues, tout semblait fait pour mener ce moment vers une quiétude presque innocente. Pourtant, il ne fallut qu’un mouvement, qu’un geste pour que la demoiselle décide finalement de passer la seconde vitesse. Elle qui hésita longuement, elle se sentait désormais à son aise, elle se sentait capable de lui montrer sa singularité.

Cependant, ce qu’elle dit fit l’effet d’un bug à l’Archer. Encore une fois, il ne savait pas comment réagir, comment aborder la situation. Il aurait aimé pouvoir lire dans ses pensées, il aurait aimé cela...


De sa main, elle venait entremêler les doigts et de son être, elle venait échauder l’atmosphère. Lui qui avait décrit cela comme « juste une main », se retrouvait dans un moment presque intimidant. Il était pourtant le Kurohebi, survivant de Pluton comme il aimait le penser, sauveur de Drum, véritable vainqueur de Mars, futur dieu des Îles Célestes.

Pourtant, il se retrouvait décontenancer par une femme qui lui montrait un schéma différent de ce qu’il connaissait. Originellement, il ne s’intéressait qu’aux hommes, cependant, il lui était arrivé, volontairement de céder à la curiosité, vis-à-vis d’un certain physique de femmes. Néanmoins, il était toujours moteur de l’action. Or, ici, il se sentait « soumis » à l’action.

Il constatait presque nerveusement que la main enlacée à la sienne était la gauche, resserrant ses doigts entre les siens, il sentirait l’absence d’alliance…

- Tu… me perturbes Penelope. Je ne vois pas le chemin vers lequel tu veux m’emmener… Tu ne portes pas ta bague…

Alors d’un geste lent, il laissa sa main libre remonter lentement sur son cou. La main ouverte, c’est le bout du majeur, suivi de l’index qui vint dessiner la courbe de cette partie du corps. Remontant au menton, le majeur s’arrêta et naturellement releva le visage de la demoiselle, pour pleinement plonger son regard vairon dans l’émeraude du sien.

- Le monde n’avait de limite que le ciel disait-on. Pourtant, en cette vie, même le ciel a été conquis. Ce moment aérien qui s’est cristallisé en toi, que serait-il face à l’immensité d’une mer de nuages ? Imagine un instant, pouvoir monter au sommet de tout, au sommet du monde. Telle est la vue que je souhaite contempler. La saisiras-tu le jour où je m’y rendrai ? La chance de te sentir plus que vivante à mes côtés.

La provoquait-il ? Jouait-il ?
Elle avait choisi d’être ambigüe, de le titiller et lui-même avait décidé de la prendre à son jeu. Lui-même avait décidé de répondre à sa demande. L’invitait-il à découvrir le ciel ou l’invitait-il à le rejoindre lui ? Non pas l’amiral, mais l’homme aventurier. La proximité entre eux  était alors trompeuse.

- Entre le ciel et la terre, mon choix est déjà fait.

Et elle, toucherait-elle le ciel conquis par le Serpent, ou la terre abritant l’arbre aux fruits défendus. Pouvoir, puissance, suprématie, guerre et argent, tant de fruits pourtant défendus abritaient cet arbre que le serpent lui-même fuyait.

Etait-il démon ou ange ? Un serpent pouvait-il être chose du bien ?


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La Couronne

Penelope… C’est ainsi qu’il m’avait appelée, torturé par les signaux emmêlés que je lui envoyais. Il avait remarqué l’absence de bague, avait serré ses doigts aux miens. Sa poigne était chaude, sa main si grande. Sur quel chemin voulais-je le mener ? Moi-même je n’en étais pas certaine. Je voulu ouvrir la bouche, offrir un semblant d’excuse, de justification, mais il m’avait devancée. Il m’effleura le cou, m’arrachant un frisson dans tout le dos et remontant vers mon menton. Avec son mouvement, mes mots me furent arrachés tout comme l’air qu’il me restait. À mon tour d’être désarçonnée, surprise. De croiser son regard alors que je n’avais qu’une seule envie : fermer les yeux. Laisser son mouvement se prolonger et nous rapprocher plus encore. Cette délivrance me serait pourtant refusée, sans doute avec raison. La méritais-je, après tout ? Non, j’étais loin d’être la femme juste et honnête que je m’imaginais jusque là être. Je ne méritais aucune récompense du simple fait que ses lèvres en auraient été une. Vraiment, Penelope, tu touches un nouveau fond.

Si un bref moment passé dans les airs avait suffi à m’impressionner autant, qu’en serait-il de la mer de nuages que l’on pensait autrefois impossible à conquérir ? Si cela m’avait tant changée alors oserais-je gravir de nouveaux sommets à ses côtés pour découvrir l’immensité du ciel délesté de frontières ? Voulais-je l’y rejoindre ? Me sentir plus que vivante ?

Entre le ciel et la terre, mon choix est déjà fait.

Pouvais-je vraiment lui dire que le mien l’était aussi ? Pouvais-je l’avouer à lui comme à moi ? Je me sentais toujours privée de mes mots, envoûtée par le regard dépareillé de l’homme qui me faisait face. Pourtant je me devais de lui répondre, de respirer à nouveau pour mieux laisser le temps reprendre son cours entre deux battements de mon cœur affolé. Sur quel chemin désires-tu l’emmener, Penelope ?

« Même si l’on doit me condamner à l’Enfer même pour ma curiosité… »

Je m’approchai de lui, prenant moi-même ce prix qui m’était pourtant interdit. Déposant mes lèvres sur les siennes pour l’embrasser doucement. Découvrir ses lèvres, laisser nos respirations s’entremêler et commettre l’irréparable. Ma main avait caressé sa joue, découvert les imperfections d’une barbe naissante. Je m’étais rapprochée de lui, avais souhaité qu’il m’enlace et m’empêche de repartir, sachant toutefois que cela ne pouvait se produire. De nouveau mon abdomen s’embrasait et, aussi sage que je puisse l’être, c’est les joues écarlates que je m’éloignai de lui sans pourtant être hors de sa portée. Je voulais qu’il me retienne alors qu’il ne le devrait pas. De tout ceci, rien n’aurait dû se passer. Ce n’était pas correct, ce n’était pas prévu et ce n’était pas juste. Et pourtant je l’avais fait quand même et, en mon cœur, il n’y avait pas le moindre regret. En un murmure, j’achevai ma réponse.

« J’ai choisi de découvrir le goût du Paradis. J’espère que tu sauras me le pardonner, Ghetis… »

@feat Ghetis Enjoy !

Cette tension, elle était devenue palpable, elle se ressentait dans l’air, elle rendait la respiration plus hardie, les corps se retrouvaient prisonniers d’un étreinte pourtant chaleureuse. Le doute s’emparait d’eux, jusqu’à s’immiscer dans leurs gestes. Pourtant, c’est ce même doute qui créa l’ambigüité, qui créa le rapprochement.

Qui était ciel, qui était terre ? Le choix cornélien ne trouvait point de figure de personnification. Pourtant, c’est d’un désir chaste et honnête que la demoiselle décida, qu’elle décida de ce qui était…

Le Ciel.

Ce fut dans ce but que l’Archer « vague », ce fut dans ce but qu’il décida de ne pas pleinement exprimer son envie première. Il ne voulait pas lui manquer de respect, il ne voulait embrayer sur une chose qu’elle ne désirait pas. Lui qui était le serpent, lui qui était vu comme le mauvais, il attirait dans son étau une jeune femme à l’avenir encore nébuleux.

Serait-il son enfer ou son paradis ?

Le verrait-elle à temps ou en retard ?

Le contact de leurs lèvres semblait cristalliser l’instant, le solidifiant en une douceur, qui se mêlait à de la surprise. Volontairement il ne s’était pas approché d’elle, volontairement, il voulut voir jusqu’où allait ce désir…

Ainsi lorsqu’elle amorça ce qui aurait pu être une « fuite », la main quitta son manteau, allant se poser au bas de son dos, pour la ramener contre lui…. Elle qui avait souhaité se blottir contre lui, il l’invitait enfin.

Lui accordant cette étreinte chaleureuse, il l’avait enfin appelé « Penelope », tandis qu’elle lui offrait un timide « Ghetis ».

La vie avait-elle fait d’eux des êtres mauvais ? Des parias ? Non, le monde les observait de loin, riant de leur gêne.

- Sache que même le Paradis est tortueux. Cette voie fera, certains, te juge ou tenter de t’orienter vers une autre vérité.

Sa main viendrait alors empoigner plus fermement le dos du pull, la ramenant contre lui, contre son torse, sa main quittant la sienne pour caresser la chevelure rosée. Le temps semblait s’être arrêté, tandis que les flots incessants continuant, malgré tout, d’onduler, rappelant cette douce réalité.

Sa main irait finalement caresser les joues de la demoiselle, décollant simplement la tête de la jeune femme de son torse, il la gardait précieusement contre lui. Son regard devait plonger dans le ciel…. La main poser sur sa joue, le pouce posé sur les lèvres de la demoiselle, il caressait lentement ce qu’il venait d’avoir contre lui…

- Je dois t’avouer, avoir également une personne dans ma vie. Nous ne sommes pas « mariés », mais il porte mon nom. Avant d’être un compagnon, c’est principalement un ami. A l’origine cette relation est libre… Je ne sais pas pourquoi je t’en parle… Je suppose que… Je veux que tu saches sur quel chemin tu t’aventures.

Il ne savait pas forcément où cela allait le mener, tout simplement car il avait une conception assez spécial des relations humaines. Néanmoins cette femme, cette Penelope Ainsley avait ce courage qui la rendit différente… Qui la rendit plus précieuse encore.

- Laisse-moi achever ma quête céleste et je t’emmènerai voir ce ciel, Penelope.

Il tiendrait cette parole, il le devait, il avait besoin de temps, de beaucoup de temps, mais il lui promettait sa place dans le projet qui suivrait, il promettait une place à ses côtés.

- Pardonne ce geste… De quoi parlait-il ?

Sans doute de ses lèvres qui allèrent caresser le cou de sa muse, remontant de toute sa longueur en de fins baiser, pour enfin accéder aux lèvres qu’il désirait déjà. Lui volant de lui-même ses lèvres, comme elle le fit avec lui, c’est un baiser plus fougueux, plus fort, plus sincère, qu’il lui offrit. Laissant ces jumelles danser, c’est dans une chaleur envoûtante qu’il vint séparer ses lèvres des siennes.

- Je ne.. Je ne peux aller plus loin sans que tu sois sûre de toi. Toi qui désire le Paradis, jusqu’à quel point en franchiras-tu les barrières ? Celles qui sonneront le point de non-retour.

Ce choix était risqué pour elle, mais pourtant lourd de sens. Elle ne portait plus son alliance, mais se prétendait parfois mariée. Etait-ce réellement ça le désir d’un couple, ne plus voir l’utilité de porter les alliances ? C’est en cela que la question du brun prenait tout son sens.

Quels serait les limites de cette rencontre ? Existaient-elles ?

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La Couronne

Je l’avais fait. N’en pouvant plus, j’avais décidé de l’embrasser et avais profité de chaque instant, mon cœur battant la chamade alors que, loin de me repousser, le grand brun me le rendait plutôt bien. Un moment de paradis avant l’heure, volé en secret sous les étoiles. Je croyais en avoir eu assez, désirait me modérer avec un brin de retard sans doute. Il ne fallait pas pousser le vice trop loin, comme si mes actes n’étaient pas déjà lourds de sens et de conséquences. Preuve étant qu’une large main s’était posée dans le bas de mon dos, m’empêchant de trop m’éloigner. Qu’on se le dise, Ghetis n’eut guère besoin d’user de force. Cette seule présence au-dessus de mon bassin avait réussi à m’attirer à nouveau, à abattre le peu de volonté qu’il me restait d’être une personne raisonnable. J’avais envie que sa main descende, ou remonte, ou qu’importe. Tant qu’elle continuait d’être contre moi. Tant qu’elle continuait de nous rapprocher l’un l’autre afin que nous puissions mieux savourer cet instant inédit de romance aux goûts d’interdit. Blottie contre lui, je fermai les yeux et profitai de sa respiration, de sa voix qui résonnait dans ce grand torse invitant. Mes mains se posèrent contre son kimono, les plis de se dernier s’entremêlant avec mes doigts qui cherchaient à s’agripper sans pourtant le faire vraiment. Bienveillant, mon partenaire d’infidélité m’offrait un avertissement supplémentaire, me rappelait qu’il y avait un monde par-delà son étreinte et qu’il serait bien bête de m’imaginer que la réalité ne me rattraperait pas. Il y aurait, forcément, des gens pour s’indigner et chercher à m’éloigner de ce chemin que je m’étais choisi pour l’espace d’une soirée. J’échappai un rire amer, loin d’ignorer que tous se penseraient autorisés à critiquer ma décision.

« J’en ai l’habitude et, quelles que soient mes décisions, quelqu’un trouvera à y redire. Mais ils ne sont pas là, ici et maintenant. Les seuls avis qui comptent sont les nôtres. »

Sans doute satisfait, c’est dans ma courte chevelure rosée qu’il choisit ensuite de jeter son dévolu. Affectueux, aimant, il n’y avait là rien qui laissait présager que je me trouvais dans l’étreinte d’un serpent. Ceci étant dit, Ghetis n’en avait pas fini de dispenser ses mises en garde. Je me séparai donc du battement de son cœur pour plutôt le regarder dans les yeux, laissant son pouce glisser sur mes lèvres alors qu’il cherchait de nouveau à me freiner. Lui non plus n’était pas seul, il avait déjà quelqu’un et, bien qu’il fût naïf de m’en étonner, cela me pinça le cœur de chagrin. Quelle ironie, tout de même, que je ressente un tel sentiment alors que je venais moi-même de défier mes vœux pour un brin de satisfaction temporaire. L’homme qui partageait la vie de Ghetis était un ami plus qu’un compagnon et leur relation était donc ouverte, mais elle existait néanmoins. Je soupirai, l’âme soudainement en peine alors que, pourtant, rien ne m’y autorisait.

« Merci pour ton honnêteté, Ghetis. »

Merci de m’avoir rappelé à quel point tout ceci était une mauvaise idée dont il valait mieux me dépêtrer au plus tôt. Je devrais faire une croix sur ces brefs instants de bonheur, prétendre qu’ils ne s’étaient jamais produits. Ce serait le mieux à faire, n’est-ce pas ? Et pourtant, peut-être tout aussi tourmenté que moi, l’homme me tenant contre lui m’intima de lui laisser du temps. Lorsque ses aventures célestes toucheraient à leur terme, Ghetis m’emmènerait avec lui. Il me ferait découvrir les immensités de l’azur, là où nous pourrions vivre de manière effrontée et libre de toutes frontières.

« Mais le périple lui-même n’est-il pas ce qui rend le paysage d’autant plus magnifique ? Avant de m’élever à tes côtés, il me faut trouver mes propres ailes. »

Une vérité douce-amère que je ne pouvais ignorer, pas celle-là. S’il désirait me dire pas maintenant plutôt que jamais, alors il n’y avait pas d’autre choix. Qu’importe ma décision, qu’importe si au final j’admirais ce ciel avec lui ou non. Je me devais de poser cette base, de citer ce fait indélébile qui marquait toute la direction de ma nouvelle existence loin d’Ironfall. Ma poitrine se tordait à l’idée de me détacher de lui, d’interrompre volontairement ces instants magnifiques où rien ne comptait sinon ses lèvres sur les miennes. Je devais pourtant le faire, m’arracher à ses bras et à son coeur. Une séparation que l’Archer lui-même ne pouvait permettre, invoquant mon pardon pour mieux me retenir de baisers lascifs. Le pardonner ? Je frissonnai, mes mains passant derrière son dos pour mieux s’emparer du riche tissu de son kimono. Sous le coup de la surprise, j’expirai l’ombre d’un gémissement. Aussi gênée que j’en fus, cela ne découragea pas l’avancée du conquérant qui voulait étendre son domaine jusqu’à mes lèvres. Après m’avoir repoussé de ses mots, ses gestes trahissaient ses envies autrement plus charnelles. Avais-je la force de l’interrompre pour mieux lui rappeler les sermons qu’il venait de me faire ? Non, je ne l’avais pas.

Je me laissai plutôt emporter par cette vague d’émotions, de chaleur, cette fois trop consciente de la nature éphémère de cette étreinte. Ce baiser était sans doute le dernier. Il aurait dû l’être et, cela en tête, c’est ainsi qu’il se devait d’être savouré. Un baiser pour remplacer tous ceux qui n’auraient jamais lieu. Des mots d’adieu susurrés à même les lèvres l’un de l’autre. La douleur que j’éprouvais suite à cette réalisation ne rendit notre échange que plus passionné encore, plus profond et plus vrai. Plus désespéré. Une dernière chance de changer d’avis, de déraper jusqu’au matin sans se soucier de rien. Une opportunité qu’il faudrait laisser nous couler entre les doigts comme du sable, apportant avec lui des bouts de mon être peiné. Toute bonne chose avait une fin et notre courte aventure atteindrait bientôt la sienne, à mon grand regret. C’est Ghetis qui, d’un contrôle de soi fissuré d’hésitation, nous interrompit à nouveau. Après avoir plongé sans retenue, il retournait à la rive avant de s’en éloigner trop. Avant d’atteindre le point de non-retour, comme il le disait si bien. Souffrant de ce trop plein d’émotions interdites, je chassai une mèche de cheveux du beau visage de l’Amiral. Admirant son regard bicolore, il fut à mon tour de lui caresser la joue avec toute la bienveillance et toute l’affection dont j’étais capable.

« Il vaudrait mieux en rester là, n’est-ce pas ? »

Même si aucun de nous ne désirait mettre fin à ce rêve éveillé, il faudrait bien que nous le fassions. Je repris donc ma place de l’autre côté du fauteuil feuillu, me faisant douleur pour ignorer chacune de mes pulsions qui m’imploraient de céder et de mordre à pleine dents en ce fruit défendu. Après un soupir profond, j’avais passé une main dans ma chevelure rosée, regardé le ciel en espérant y trouver une autorisation envoyée par les étoiles. Mais non, rien. Il était impératif de m’occuper l’esprit, de ne plus y penser. De me calmer. Je pensai donc à ce qui avait le plus de chances de me refroidir : Felix.

« Comme tu m’as parlé de ta relation, je suppose qu’il est juste que je t’explique la mienne également. J’ai cessé de porter ma bague lorsque je suis entrée dans la Marine, d’abord car c’était plus pratique et plus tard car je n’avais simplement plus envie de la porter. Ce mariage a été arrangé par nos parents et je n’en ai jamais voulu. Mon mari n’est pas un homme mauvais, loin de là. Il a nombre de qualités que j’admire particulièrement, mais malgré tous mes efforts je n’ai jamais réussi à tomber amoureuse de lui, à être attirée par lui vraiment. Mais bon, ce ne sont que des excuses je suppose. C’est une question de principe après tout, certaines choses ne se font tout simplement pas. »

@feat Ghetis Enjoy !

Les choix…
Constamment critiqués, ils constituaient pourtant la concrétisation des opinions de chacun, des désirs de l’Humain. Loin d’être des caprices, ils étaient nécessaires à l’éveil de chacun. Vaincre un ennemi, détruire un lieu, bâtir une ville, planter un arbre, aimer une personne, tout cela faisait partie du spectre que représentaient « les choix ».

Seraient-ils critiqués en ce jour ? Non.
Pourquoi ? Parce qu’ils étaient seuls.

Néanmoins, dans un futur lointain, afficher cette tendance pourrait représenter un risque certain. En vérité, n’était-ce pas là une bonne raison pour attendre que la demoiselle soit suffisamment grader pour cela ?
La franchise, qu’il lui offrait, n’était pas là pour la repousser, bien au contraire. Plus que tout, il voulait surtout qu’elle soit consciente de ses actes et de leur portée. Il n’avait rien à craindre ou à perdre, contrairement à elle. Sa vie n’était pas rythmée par une union sacralisée. S’il la désirait, il pouvait s’y laisser mener, ce qui n’était pas forcément le cas de l’Ainsley.

Le contact de ses mains chaudes sur son visage, sa voix douce et si affectueuse à la fois. Elle intriguait l’Archer différemment de ce qu’il avait pu connaître. D’origine, les pulsions auraient pris le pas sur la raison, mais le fait qu’elle ait pris les devants, le décontenançait. Il possédait une stature qui le rendait assez difficile à aborder comme une personne banale et bien souvent, ceux qui l’abordaient de façon classiques n’étaient autres que ses proches. La grande majorité des interactions du Vairon était avant tout « cadrées ».

Dieu de Bilca et Kitamura, aidant son peuple. Vice-amiral réalisant ses missions. Chasseur de primes ramenant une capture. Père veillant sur ses enfants. EN vérité, il n’était Ghetis qu’à des moments qui n’intéressaient que peu. Il n’était Ghetis que lorsqu’il revivait l’insouciance arrachée dès son plus jeune âge.

S’il n’était pas né à Hunter Island, s’il n’était pas né chasseur de primes… Peut-être aurait-il été un simple voyageur, pourquoi pas subventionner par son pays. Une sorte de MontBlanc Norland. Il aurait alors rencontré Calgara, en la personne de Caligula, mais cela au détour d’un voyage. De père, il serait passé à ami.

Avait-il jamais été lui-même plus qu’aujourd’hui ?

Hormis dans ses excès de colère, hormis dans ses besoins de vengeance, hormis dans ce désir de grandeur presque obligatoire par sa condition.

Avait-il jamais été autre chose qu’un homme guidé par des devoirs ? Avait-il déjà été juste « un homme ».

Toutes ces choses s’éveillaient en lui avec magnificence, sans qu’il ne puisse le comprendre. Lorsqu’elle s’éloigna, il s’avança… Lorsqu’elle s’expliqua, il écouta.

- Nous ne sommes pas si différents… Les choix de vie sont bien souvent guidés par nos prédécesseurs, nos parents…. La question est plutôt de savoir si tu comptes t’en affranchir ou non. L’honnêteté dont tu me gratifies… L’offres-tu à ce mari non-désiré ? Tu ne te sentiras jamais libre, si cela n’est pas fait, mais je pense que tu le sais.

Lentement, il lui tendit les bras et la ramena contre lui, et doucement il s’allongea dans le fauteuil végétal, la gardant contre lui, le regard face au ciel.

- Yzis. C’est son nom. Lorsque j’ai été condamné à l’exil, c’est lui qui m’a trouvé. Redevenu homme sauvage, vivant au bord d’une rivière, avec pour seul habit un masque. Il me prit en charge au sein de son village et m’appris l’art de la méditation. C’est ce qui me fit découvrir précocement le haki de l’observation. Cette chose permettant de capter les émotions humaines. Par la suite c’est lui qui réussit à me convaincre de briser mes chaînes. Paradoxalement, il ne m’invita jamais à ôter mon masque, même s’il avait déjà vu mon visage. Il considérait cela comme mon devoir. Néanmoins, il était désireux d’aventure, de voyage. Notre union était ponctuée par une amitié et une pulsion charnelle. Pourtant dès l’instant où La Couronne, mon unité, s’est étendu, nous nous sommes moins vus. Notre relation intime est aujourd’hui une sorte de lointain souvenir, tout simplement car là où je m’occupe du ciel, lui s’occupe de la terre. Tel était notre contrat, lui m’aidant à accomplir ma vengeance, moi l’aidant à s’affranchir de notre île natale. C’est sans doute pour cela qu’aujourd’hui je peux te prendre dans mes bras sans crainte.

Il lui expliqua les tenants et aboutissants de sa relation de couple lui aussi. Dans le fond, son couple s’était distendu avec le temps.

- Cependant. Si je te dis toutes ces choses, ce n’est que dans un but : que tu sois sûre et certaine de ce que tu feras. Simplement, car moi je le suis.

Les grades d’amiraux, de recrues, tout cela était tombé. Tout cela était devenu fantaisie, les deux humains parlaient de leur situation relationnelle, seule moteur de leur décision.

- En rester là, poursuivre, ou poursuivre dans un avenir lointain. Toutes ces choses ne m’appartiennent pas, elles sont de ton ressort, car tu connais ma position vis-à-vis de cela. Jaya est ma patrie, tu pourras toujours m’y trouver si un jour tu décides de te joindre à un de mes voyages. Peut-être alors, pourrons-nous continuer à nous découvrir et voir où tout cela nous mène. A moins qu’en cette nuit, tu parviennes déjà à imaginer la route où mènera notre rencontre, si… nébuleuse pour nos esprits, mais claire pour nos âmes.

L’attraction, leurs âmes en avaient conscience, les corps se joignant sans questionnement. En revanche, les esprits, forgés par l’effet du temps, se montraient craintifs, hésitants.

De ses mains, il allait ainsi caresser son dos, il laissait sa main parcourir le tissu, l’autre trouvant à nouveau chemin vers sa chevelure. Il se sentait bien mieux avec elle contre lui tandis qu’il lui parlait. Lascivement, la main sur son dos, glissait sous son pull et du bout des doigts caressaient la peau de sa compagne d’hésitation. Le regard se plongeant dans le ciel, en un air songeur, mais satisfait.


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La Couronne

Bien que nous fumes au final encore relativement proches, la distance creusée entre nous était un gouffre n’ayant d’égal que la douleur de notre séparation momentanée. Nos mouvements évoquaient la mer, allant et venant sans jamais se décider. Il me mettait en garde et je l’embrassais. Je reculais et il s’approchait pour me ramener à lui. Il était bien difficile de ne pas céder, de ne pas simplement accepter de me perdre en ses bras pour ne plus jamais m’en échapper. Mais il marquait un bon point, avais-je déjà offert tant de sincérité à ce mari dont je n’avais jamais voulu ? Pas en tant de mots, non. J’avais simplement pris pour acquis qu’il le savait. Qu’il avait apprit à me connaître suffisamment pour savoir la vérité se terrant dans mon cœur. Mais l’incertitude restait puisque, comme souligné, nous n’avions pas eu cette conversation. J’acquiesçai donc aux paroles de Ghetis qui me semblait un interlocuteur bien plus agréable et, contre toutes attentes, moins intimidant que cet homme aux allures de papier-peint.

« En effet, c’est une conversation inévitable à terme. »

Peu enthousiaste à l’idée de contacter Felix pour avoir une telle conversation, c’est avec soulagement que j’acceptai plutôt l’invitation lancée par les bras du grand brun à mes côtés. Me blottir contre lui me rendit tout de suite paisible et je l’écoutai parler tout en laissant l’une de mes mains vagabonder contre son large torse. Il me parla d’Yzis, un autre prénom se terminant comme tous ceux de sa famille. Logique puisque, comme mentionné plus tôt, le partenaire en question portait son nom. J’eu droit à des détails sur leur rencontre, la nature de leur relation et sur ce qu’il avait apprit durant le temps qu’ils avaient passé ensemble, dans le village d’Yzis. Avec le temps ils s’étaient éloignés l’un de l’autre, poursuivant leurs propres objectifs et grandissant chacun de leur côté plutôt que de vraiment avancer ensemble. Je pouvais comprendre cela ou, à tout le moins, je me dis que c’était sans doute ce qui était en train d’arriver à mon propre mariage puisque j’étais partie. Toujours est-il qu’égoïstement, au fin fond de mon être, j’étais heureuse qu’ils se soient un brin perdu de vue. J’étais heureuse qu’il puisse me garder contre lui alors que nous discutions de manière détendue.

Selon ses dires, c’était par simple désir de m’aider à prendre une décision qu’il m’offrait ces informations et j’en étais profondément reconnaissante. De son côté les choses étaient claires, il savait ce dont il avait envie et le souvenir de ses lèvres sur les miennes était encore assez frais en mon esprit pour que je devine ce qu’il avait en tête. Ghetis plaçait la balle dans mon camp. Il me disait où le retrouver et quelles étaient mes options, laissant tout entre mes mains. Détendu, ses mains parcourant mon dos comme si elles l’avaient toujours fait, il m’avoua que son âme était déjà parfaitement au courant de ce qui devait se passer. C’était intimidant, dit comme cela, et pourtant je savais qu’il avait raison.

« Dans l’immédiat j’ai l’intention d’accomplir ce pour quoi j’ai quitté mon île. Je veux prendre le temps de me redécouvrir, de me forger mon propre chemin et de vivre pour moi-même plutôt que de chercher à tout de suite remplacer celui que j’ai préféré abandonner derrière moi. Lorsque ce sera fait et que je me sentirai prête… Nous pourrons reprendre là où nous nous sommes arrêtez, si nos âmes le désirent toujours. Je crois que c’est la meilleure chose à faire. »

Conclus-je avec un sourire pourtant désolé. Ce n’était pas la décision que j’avais envie de prendre, mais je savais que c’était la bonne. Un jour, dans un avenir lointain, je savais que je m’en féliciterais et que je serais fière d’avoir choisi mon indépendance, ne serait-ce que pour quelques mois de plus.

« Ceci étant dit… Je suis bien trop curieuse pour attendre si longtemps avant de te découvrir vraiment. Dis-moi, qu’aimes-tu faire dans tes temps libres ? Quel est ton repas favori ? Aimes-tu que quelqu’un joue dans tes cheveux ? Tous ces petits détails, ces trucs anodins, j’ai envie de les connaître et de les chérir comme des petits trésors. As-tu des questions pour moi aussi ? Y a-t-il des mystères à mon sujet que tu voudrais que j’éclaircisse ? »

@feat Ghetis Enjoy !

La réponse apportée par la demoiselle lui plaisait, elle avait pris conscience de l’importance d’une discussion avec ce mari qu’elle semblait vouloir quitter. C’était une chose difficile à faire, certes, mais elle n’en tirerait que de bonnes choses, que des avantages. De plus si elle le désirait le Vairon pourrait l’aider, l’y accompagner, la soutenir.

Il vivait cette nuit plus sereinement encore par cette réponse. La tentation était forte et grandissante, mais elle retombait pour une autre intimité. Plus réfléchie, plus douce, cette intimité, qui s’installait, allait différencier leur relation d’une simple relation charnelle. Elle trouvait un intérêt plus fort encore. Les retrouvailles n’en seraient que meilleures.

Elle devait encore se construire et le brun le savait, c’était pour cette même raison qu’il avait été plus réfléchi, plus prudent avec elle. Il se devait d’être aussi bien passionné qu’attentif. Il ne suffisait pas d’exprimer cette impulsion brusque qu’on nommait passion, il fallait également savoir exprimer ce désir délicat qu’on appelait « attention ».

- Je mènerai ma vie au rythme des nuages jusqu’à ton retour, si tant est que tu reviennes vers moi dans les six prochains mois… Dans tous les cas, je pourrai t’accompagner à ton île natale si tu le désires… Je suppose qu’y aller seule ne sera pas chose aisée.

Néanmoins, lorsqu’elle dit être bien trop curieuse pour attendre, l’Archer fut surpris, il se demandait si elle en revenait à cette courte pulsion charnelle qui avait kidnappé leur être ou autre chose… Eh bien entendu, elle parlait d’autre chose. Cela était rassurant, même s’il n’aurait probablement pas dit non à l’opportunité de poursuivre davantage de choses. Pourtant, il se complaisait dans cette situation. Alors, tout en regardant le ciel il lui répondrait, posant par moment son regard sur la demoiselle.

- Eh bien je suis un botaniste, attiré vers toutes les techniques atypiques de botanique. Je développe une agriculture pensée pour nourrir le plus grand monde. En fait, j’aimerais que ma botanique puisse subvenir aux besoins matériels et alimentaires d’un peuple. Concevoir des maisons avec et plus encore. A côté de cela, je suis un véritable passionné des fruits du démon. A l’origine ils ne m’intéressaient guère, mais les nombreux affrontements m’y ont donné goût, j’en suis donc un connaisseur. D’ailleurs, mes plantes font également de la nourriture complexe, même si je préfère de loin celle de mon fils Caligula…. Je dirais que je suis un grand fan des pièces « empilées », lasagnes en plat salé, mille-feuille en dessert, verrine en entrée… J’ai également une tendance à collectionner tout et n’importe quoi… Par exemple La Couronne possède trois meitous dont nous n’avons pas utilité…

Il ne connaissait pas le nom de ce « toc » ou « tic » qui poussait à collectionner des choses de façon presque compulsive, mais il se savait habité par ce dernier. Ce dernier, certes pas au point que cela trouble sa vie, mais il possédait malgré tout ce penchant.

- Je ne fais pas grand-chose avec mes cheveux, alors je suppose que oui, TU peux y jouer comme tu le désires. Dit-il en souriant, sachant très bien qu’elle posait la question pour elle-même.

- A côté de ça j’ai une entreprise commerciale que je développe avec un vieil ami… Les inventions en tout genre me passionnent, alors j’en imagine et je trouve des personnes capables de les conceptualiser. C’est ainsi que j’ai eu l’idée de véhicule de transport plus innovants, avec des « dials », ce sont des coquillages que l’on trouve sur la mer céleste. Ils peuvent contenir des « éléments » en grande quantité tout en restant petit. Ainsi, certains crachent du feu par exemple. Nous avons donc mis en place toute sorte d’appareils fonctionnant par leur biais. Je dirais que le combat également me passionne, mais c’est assez différent, de même que la chasse et l’aventure. Depuis peu j’ai également une petite fibre urbaniste, j’imagine la façon dont fonctionneront les villes des îles sous ma garde, ce genre de choses. Et toi, que fais-tu de ton temps libre ? Quels sont tes plats favoris ? Comptes-tu laisser tes cheveux pousser ou les préfères-tu courts ? Pourquoi es-tu médecin, en quoi cela te passionne ? Aimes-tu les animaux ?

Il avait tant à demander lui aussi, qu’il ne pourrait s’arrêter à une seule question.

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La Couronne

Six mois, un délai incroyablement généreux dans les circonstances. Peu de gens accorderaient tant de patience à un individu qu’ils venaient à peine de rencontrer et, une fois de plus, je fus emplie de reconnaissance, me sentant réellement spéciale pour le grand brun malgré le peu de temps que nous avions passé ensemble. Mieux encore, il offrit de m’accompagner jusqu’à mon île natale pour m’aider à régler ce léger souci et, si j’étais bien tentée d’accepter, je désirais aussi me garder une certaine réserve. Ce n’était pas à lui de faire cela, mais bien à moi et à moi seule. C’est ainsi que je le voyais en tout cas, bien que le déplacement pourrait effectivement être compliqué et que je ne me voyais pas régler la question autrement qu’en personne.

« J’apprécie beaucoup, merci. »

Je n’osai pas en parler d’avantage, ne souhaitant pas entacher ce magnifique moment en lui rappelant que nous venions de nous rencontrer et qu’il était peut-être hâtif de se projeter si loin dans mes projets. Certes j’étais contente qu’il le fasse, j’avais envie de le revoir. Au plus profond de mon être je ressentais cette même attirance qu’il avait décrite comme une rencontre des âmes qui savent déjà ce qui devait se passer, mais mon côté intellectuel reprenait rapidement ses droits et m’implorait de garder les pieds sur terre. Un exercice difficile, mais nécessaire. Cela réglé, mon partenaire du soir s’était gentiment prêté au jeu, répondant à mes questions sans se formaliser de mon esprit curieux. Lorsque je découvris son intérêt pour la botanique, je ne pu retenir un léger commentaire amusé.

« Ceci expliquant cela. »

Dis-je en référence à l’île artificielle qui nous accueillait en cette magnifique soirée. Il m’avoua d’ailleurs s’intéresser à ce qui lui permettrait de nourrir le plus grand monde possible, désireux comme il l’était de subvenir aux besoins de tout un peuple. Malgré le peu que je connaissais de lui, cela m’apparaissait bien typique de Ghetis et j’esquissai un sourire attendrit face à cette âme bienfaitrice. La prochaine chose qu’il évoqua était sa passion pour les fruits du démon et je repensai à ce livre qu’il avait feuilleté en me demandant de l’attaquer. Ça me donnait presque envie de le lui emprunter à l’occasion pour découvrir quel genre de malédictions peuplaient les mers, mais me contentai de noter cela quelque part dans un recoin de ma tête pour l’instant. Lorsqu’il évoqua l’un de ses fils, Caligula, je fis un effort pour mémoriser le prénom. Je déduisis d’ailleurs qu’il ne s’agissait pas d’un fils biologique puisque le «is» traditionnel manquait à l’appel. Un cuistot donc ? Intéressant ça, surtout pour quelqu’un comme moi qui adorait la bonne bouffe. Je fus d’ailleurs amusée d’apprendre qu’il aimait les mets empilés, m’imaginant déjà préparer des monstruosités d’une cinquantaine d’étages juste pour le taquiner.

Ghetis était aussi friand d’objets de collection et… et !! La réponse que j’attendais ! Je pouvais lui jouer dans les cheveux !! Oui, ça me rendait enthousiaste, voilà. Je me redressai, me détachant à regret du torse confortable contre lequel j’étais posée pour mieux m’asseoir, jambes allongées. Désignant mes cuisses, je l’invitai à venir s’y installer.

« L’oreiller de monsieur est avancé. »

J’attendis qu’il s’installe, m’assurant qu’il ne se couche pas sur ses cheveux dans la manœuvre, histoire qu’il soit bien confortable. C’est donc affectueusement que je m’amusai à lui caresser les cheveux, écoutant la suite de ses confidences avec grand intérêt. Les inventions étaient aussi quelque chose qui l’intéressaient et pas qu’un peu visiblement. Il trouvait des gens capables de réaliser ses projets et de concrétises ses visions, ce que je trouvais incroyablement intéressant. Je serais bien curieuse de fouiner dans sa collection ne serait-ce qu’un après-midi, j’étais convaincue de pouvoir y trouver toutes sortes de merveilles, dont les fameux dials dont il me parla. Quant à sa passion pour le combat, cette mention m’arracha également un sourire. Ça j’aurais pu le deviner, me rappelant de l’entraînement ayant eu lieu plus tôt dans la journée. Si la chasse et l’aventure le passionnaient aussi, il n’était toutefois pas contre l’urbanisme et la conception des villes et villages pour le bien de son peuple, encore et toujours. J’aurais voulu en entendre plus, mais il était à mon tour de recevoir un peu de ma propre médecine. À mon tour de me prêter au jeu !

« Alors, pourquoi la médecine. Il était une fois, lors d’une nuit d’orage violent… Non je rigole, désolé. C’est à cause de mon grand-père, Phineas Ainsley. Il était apothicaire et médecin, un métier qu’il a passé à sa fille et, bien sûr, à moi. Quand j’étais petite j’étais une gamine très curieuse qui aimait fourrer son nez partout et qui pouvait poser des questions plus vite que son ombre. Ma mère avait peu de patience pour ça, mais mon grand-père était très content de répondre à tout ce qui me passait par la tête, peu importe à quel point c’était stupide et farfelu. Du coup j’ai bien sûr développé un intérêt dans ce qu’il faisait très jeune et, quand j’ai compris que je pouvais m’en servir pour aider tout le monde autour de moi, j’étais accrochée à cette discipline. Et bien sûr j’adore les animaux aussi alors j’ai essayé d’apprendre quelques petits trucs basiques pour les soigner aussi, mais je suis loin d’être vétérinaire. J’ai tout de suite été charmée par Gun d’ailleurs, c’est un bel oiseau, presque autant que… Ahem. Que toi… »

J’avais rougi et regardé ailleurs, presque honteuse de la facilité avec laquelle j’avais dit ça. Heureusement que j’avais d’autres questions auxquelles répondre pour me rattraper et attirer son attention sur un autre sujet.

« Depuis que je suis ici, je dirais que je m’entraîne beaucoup. Je n’avais jamais vraiment combattu avant d’arriver à Marine Ford alors j’ai l’impression que je dois travailler deux fois plus fort pour rattraper les autres. Certes, j’ai une malédiction pour m’aider à compenser mes faiblesses, mais je ne suis pas du genre à aimer s’asseoir sur ses lauriers. Sinon quand je peux vraiment me la couler douce, j’aime les trucs assez simples au final. Manger, les lits confortables, faire un peu de shopping, passer du temps avec les gens qui comptent pour moi, lire un bon livre, ces trucs-là. J’aime aussi les énigmes, les jeux de l’esprit, les discussions peut-être un peu trop philosophiques. Au final je dirais que je suis un peu une touche à tout. J’aime tout essayer au moins une fois, mais j’ai du mal à me concentrer sur un hobby pour vraiment performer dedans. »

Oui, ça me décrivait assez bien, pensais-je en continuant de caresser la longue chevelure d’ébène de Ghetis.

« Je trouve que d’avoir les cheveux courts c’est plus pratique et j’ai d’ailleurs apprit à me les couper toute seule. Comme ça je peux être rapidement prête pour tout et n’importe quoi. J’aimerais bien les porter plus long, mais j’ai l’impression que ça ne se marie pas très bien à la vie active. Enfin, pour moi en tout cas. Mais je trouve ça joli sur les autres. Eeeet… Je pense que j’ai gagné le droit de poser d’autres questions, non ? Pourquoi les îles célestes en particulier ? Pourquoi avoir choisi La Couronne comme nom d’équipage ? Est-ce que ta vision est la même dans tes deux yeux ou est-ce qu’elle est affectée par ce qui les a rendus vairons ? Tu passes combien d’heures chaque jour juste à entretenir tes cheveux ? Ils sentent très bon d’ailleurs, c’est un vrai plaisir d’y passer la main. Tu as un modèle dans la vie qui t’inspire à faire les choses que tu fais ou comme qui tu aimerais davantage être ? Si tu étais fait de sushis, non, si tu étais fait d’étages de sushis, tu crois que tu te mangerais toi-même ou pas ? »

Ponctuant ma dernière question, un léger grondement se fit entendre au niveau de mon ventre. Oops. Si j’aurais pu, dans d’autres circonstances, espérer qu’on ne le remarque pas, les chances que ce soit le cas cette fois étaient nulles. C’est ce que je gagnais à force de parler de bouffe, forcément.

@feat Ghetis Enjoy !

La demoiselle devait effectivement réaliser ce projet en solitaire et pour cause, c’était sa vie de couple. L’Archer ne pouvait y avoir qu’un impact de conseil et rien d’autre. Après tout, quand bien même une sorte d’alchimie passionnelle s’installait entre eux, ils n’étaient que des inconnus, repoussant une pulsion trop forte. Ils se découvraient dans la simplicité la plus grande et appréciaient ce moment de partage.

La réaction de la demoiselle, à l’annonce d’une passion pour la botanique, fit rire le Kurohebi, qui avait finalement révélé son passe-temps sans le vouloir en installant ce décor. La botanique de l’homme n’avait pas un grand attrait pour le combat, mais elle s’instaurait dans son projet de bâtisseur. Un jour, il finirait par vivre en retraite sur une île céleste paisible, plantant quelques conaches, fruit endémique des îles célestes. Ce même fruit qui inspira le nom de « Konnasshu » un meitou du ciel, sans doute l’un des rares.

Finalement, lorsqu’elle lui proposa ses cuisses en guise d’oreiller, ce fut en toute quiétude qu’il posa la tête, s’allongeant sur le côté, alors qu’il continua ses nombreuses réponses. En vérité il n’avait jamais pu parler de lui-même de cette façon. Il était intéressant de voir que le savoir médical avait été intégré dans sa famille depuis toujours et qu’elle poursuivait une sorte de tradition. Peut-être qu’un jour, l’Archer transmettrait la botanique, sous forme de tradition, à ses enfants.

Le compliment déguisé l’amusant, il ne put s’empêcher de dire avec un léger sourire.

- Moins beau que la rose qui daigne effleurer son plumage.

Il voulait lui renvoyer ce compliment en restant dans son ton, en restant dans la zone de confort et de taquinerie qu’elle avait instauré.

Les plaisirs simples de la vie lui convenaient, ce qui poussait le Vairon à réfléchir à son irrépressible besoin de grandeur, son esprit de conquérant, ce besoin d’agrandir sa nation en un atout puissant et impénétrable. Peut-être que la simplicité était une chose tout aussi belle.

Vint enfin la réponse sur sa chevelure, qu’il trouva amusante, compte-tenu de son immense crinière ébène. Il était vrai que ne pas avoir de cheveux représentait un avantage au combat, il s’agissait d’un des atouts de son masque à l’époque. Cependant, cette crinière de lion lui convenait davantage.

- Un si beau rose, il est dommage de le cacher, il pourrait être si éclatant s’il se répandait davantage. Même si je dois reconnaître qu’ils sont très beaux courts. Quant à la coupe, il faudra que je t’emmène voir Caligula, il ne coupe pas beaucoup ses cheveux, moi non plus, mais chuuut. Je te laisserai peut-être les tailler un jour. Dit-il en riant.

Finalement, Penny était davantage intéressée par question l’Archer que s’était sur son passif et ça le brun commençait à le comprendre. Néanmoins, il était peut-être difficile à cerner pour elle, alors il comprenait l’ensemble de ses questions.

- Après avoir accompli ma vengeance, je n’avais plus de but. Alors j’ai décidé de faire passer en priorité l’objectif d’un de mes enfants. Caligula désirait unir le peuple du ciel en une seule nation, étant originaire d’une des tribus de cette mer. De plus, étant Shandia, il s’inspire énormément de Kalgara, un ancien guerrier shandia, devenu un modèle pour eux. Il compte bien devenir le « nouveau » Kalgara d’ailleurs. C’est dans ce but que je l’entraine, mais aussi dans ce but que nous nous occupons du ciel. Son peuple sera uni et reconnaîtra sa valeur. Je suis encore vu comme le dirigeant de ce territoire, mais un jour, c’est lui qui en héritera. Lorsque nous aurons unifié le ciel en une seule nation, nous partirons simplement à l’aventure je suppose… Peut-être au-delà du ciel qui sait ?

Les nuages avaient longtemps été une limite, pourtant l’Homme les avait conquis. Cependant, il ignorait ce qui se trouvait au-dessus du ciel qui surplombait les îles célestes. Etait-ce à cet endroit que vivait le divin ?

- Mon unité ce nomme ainsi en hommage à mon défunt frère, Noctis Archer. Au sein du culte religieux de notre île natale, Noctis était vu comme l’élu, comme une sorte de roi en devenir. Lorsque j’ai été banni, j’ai pu voir mon frère une dernière fois. Il était alors âgé de huit ans. Alors je lui ai simplement dit :
« Noctis, tu es un roi, trouves ta couronne, elle sera ton plus grand trésor. Trouve-la et je veillerai sur elle à tes côtés ».

Un peu plus tard, lorsque j’ai appris sa présumée mort, j’ai eu une sorte d’hallucination, où il apparu en face de moi et posa une couronne sur ma tête, le visage emplit d’un large sourire. Alors, quand bien il s’agissait d’une hallucination, j’ai décidé d’en faire un pilier.

Souvenir passé…

D’un coup Ghetis se retourna et en geste brutal il serra son petit frère contre lui, pour le sentir au plus près de lui avant de disparaître de sa vie. Des larmes aux yeux…

- Noctis ! J’ai tant de choses à te dire ! Je voulais te montrer tant de choses ! Et je n’ai rien pu faire ! Mais je te jure de devenir meilleur, de veiller sur toi peu importe mon destin, quant à toi, grandis, fais des choix, trompes-toi, apprends, découvres, deviens meilleur et surtout, sois fier de ton parcours jusqu’au bout. Tu es un roi, trouves ta couronne. Elle sera ton plus grand trésor, elle est cachée quelque part dans ce monde. Trouves-la et je veillerai sur elle à tes côtés ! Je serais toujours présent, même dans l’ombre ! Sois fort Noctis !

Le petit garçon ne put s’empêcher de verser des larmes en se blottissant contre son frère aîné.

- Je te le promets Ghetis. Je serai le meilleur et tu seras fier de moi.

La réalité dont parlait Ghetis semblait, bien éloignée, bien plus émotive encore que ce qu’il offrait pourtant avec la plus grande des sincérités. Le temps l’avait endurci. Même si son frère lui manquait il dut aller de l’avant pour lui et ne garder que le meilleur de ses souvenirs… Même si l’amertume s’entendait dans ses propos.

Malgré tout, il chassa les idées obscures de son esprit et ria des autres questions, se tournant un peu pour regarder la demoiselle qui surplombait son visage.

- Tes questions sont si mignonnes. Mes yeux ont cette teinte depuis ma naissance, le monde n’est pas très différent à travers eux. Ma mère souffre d’albinisme, sa peau comme ses cheveux sont d’un blanc pur et fascinant, tandis que ses yeux sont d’un rouge ardent et puissant. Mon père a désormais les cheveux grisonnant, mais ils furent noirs par le passé, tandis que ses yeux étaient bleus. J’ai hérité de leur yeux disons, avec en plus les cheveux de mon père. Nous avons tous les cheveux longs dans ma famille, mais Noctis s’évertuait à les couper, hahaha. Ma mère a toujours eu une certaine application à s’occuper de nos cheveux, quand bien même les miens étaient hirsutes « comme ceux de mon grand-père » disait-elle. Alors j’ai toujours eu cette habitude d’en prendre soin. Mon fruit me permet de m’offrir les meilleurs bains possibles, alors j’en profite disons. Tandis que la botanique me permet de sélectionner les meilleurs fruits que ma scientifique utilise dans les savons de l’équipage.

Tout en riant il posa son doigt contre l’abdomen de la demoiselle et répondit :

- Je commencerai par te manger toi. Dit-il en riant, avant de se remettre sur le côté.

- Comptes-tu rejoindre une unité particulière du Gouvernement un jour ? Mon équipage en est une, mais il en existe tant. Certains préfèrent, malgré tout, rester « non-affiliés ». Veux-tu que je te transmettre quelques techniques ou savoir-faire dans le futur ? Vivre dans le ciel pourrait t’intéresser ? Souhaites-tu avoir d’autres enfants ? Et surtout, que recherches-tu chez un homme ?

Il avait lui aussi droit à son tour de question après tout.

- Si tu étais un rhum tu serais plutôt Saint Janz ou Trois Reverse ?

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La Couronne

Un si beau rose, il était dommage de le cacher. Je rougis, souriant avec un brin de gêne à force de recevoir tant de jolis compliments. Peut-être un jour, lorsque j’aurais accompli assez pour être en paix avec moi-même, pourrais-je me permettre de les laisser tomber jusqu’à mes reins. Pour l’heure, néanmoins, j’étais satisfaite avec leur apparence et le grand brun s’empressa d’ajouter que ma coupe actuelle était bien elle aussi. Il mentionna d’ailleurs que Caligula, son fils adoptif, pourrait bien avoir besoin d’un coup de ciseaux et que, un jour peut-être, c’est sa propre crinière que j’allais potentiellement alléger.

« Au moins maintenant je sais que j’ai un avenir dans la coiffure si la Marine ne me réussit pas. »

Avais-je répondu sur le ton de la plaisanterie. Puis la conversation prit un tournant plus sérieux alors que l’homme se reposant contre mes cuisses me partageait ses motivations actuelles. Après avoir accomplit sa vengeance, Ghetis ne savait plus que faire et, avec une simplicité que je ne pouvais que lui envier, il avait choisi de se consacrer aux projets d’un autre. C’est au final ce fameux fils de cœur qui orientait depuis ses décisions et ses actes, l’Amiral se dévouant à la conquête des îles célestes pour son bien. Unifier le ciel pour le lui offrir, rien que ça. Mon visage se fit plus terne, mon sourire à demi éteint. Mais il n’en avait pas terminé. Même le nom de son équipage était une dédicace à un individu autre que lui-même. Son défunt frère, Noctis Archer. Ce dernier avait été considéré, sur leur île natale, comme un véritable élu, un souverain. Voilà donc la source de son inspiration. Ghetis avait décidé de lui offrir sa couronne de façon posthume. Plus je l’écoutais parler et plus je réalisais à quel point le grand brun était défini tant par les autres que par son passé. L’importance de son clan transpirait dans chacune de ses paroles et, de ce fait, ma vision de l’homme se modifiait lentement, mais sûrement. Elle se corrigeait, s’affinait. Il parlait librement d’héritage, tant de celui reçu de ses parents que de celui qu’il comptait léguer à Caligula. Un bâtisseur ambitieux qui n’hésitait pas à faire passer les désirs des autres pour les siens, avec une touche d’humour et un grand amour du combat. Normal, la recherche de puissance devait aller de pair avec la capacité qu’il recherchait à changer le monde pour les siens. Bizarrement, cela me donnait presque le vertige.

Si je décidais effectivement de revenir vers lui dans plusieurs mois, que se passerait-il ? Il m’aiderait à atteindre mes buts, me protégerait, veillerait sur moi et en retour je devrais aimer tout son clan autant que je l’aimerais lui. Sa nature le pousserait à vouloir planter ses racines, faire quelque chose de solide et durable dans le temps. Au final, serait-ce si différent de ce que j’avais fuis en quittant Ironfall ? Certes, j’aurais choisi ce compagnon ci, mais combien de temps mettrais-je à me sentir étouffer ? À me sentir mourir à petit feu ? C’était effrayant, tant et si bien que je ne l’écoutais plus que d’une oreille distraite. Comme pour me donner raison, même ses questions sur mon avenir semblaient porter en cette direction. Voudrais-je rejoindre une unité ? Un groupe où m’établir ? Voulais-je lui permettre de cultiver mes connaissances et capacités ? Pourrais-je m’imaginer m’établir dans le ciel ? Avoir d’autres enfants ? Qu’est-ce que j’attendais d’un homme, que désirais-je d’un partenaire ? Des questions sérieuses qu’il était en droit de poser vu la passion avec laquelle nos lèvres s’étaient trouvées quelques instants plus tôt à peine. Ma main s’arrêta de caresser ses cheveux alors que je réfléchissais profondément. Le cadre de notre conversation facilitait la chose, à dire vrai. Tout comme la façon avec laquelle il se confiait à moi, sans craintes et sans retenue. J’avais l’impression de pouvoir faire de même, de pouvoir être vulnérable face à lui sans la moindre crainte ou réservation. Sans doute est-ce pour cela que je ne me contentai pas d’énoncer une suite de réponses disparates comme si je cochais simplement des cases pour être certaine d’avoir répondu à tout. Je préférais lui ouvrir mon cœur, le laisser entrevoir ce qui s’y cachait et comprendre par lui-même quelles étaient mes motivations et mes envies.

« Je n’ai pas de réponse à t’offrir, à aucune de ces choses. Je n’ai pas envie d’en trouver, aussi effrayant que ce soit de vivre ainsi. »

Une confession qu’il ne comprendrait peut-être pas, mais j’avais confiance. Il tenait mon âme dans la paume de sa main depuis que nos regards s’étaient croisés. Ghetis comprendrait.

« Être avec quelqu’un comme toi semble… idéal, parfait. Ce serait comme de rejoindre un chemin tout tracé et de simplement me poser dans une petite place confortable juste pour moi, sous ta protection. Ce serait facile, rassurant. C’est ce que j’ai toujours connu après tout, simplement accepter de me poser et de faire au mieux pour faire passer ma famille avant moi. »

Je marquai une courte pause puisque j’en avais besoin tant pour continuer d’agencer mes idées que pour souffler. C’était une conversation difficile, des aveux que je peinais à me faire et que, pourtant, je lui partageais sous les étoiles. Je me livrais à lui sans retenue, avec plus d’intimité que si nous avions poursuivi notre projet initial.

« Quand j’ai fini par comprendre que l’on n’attendait rien de moi sinon mettre au monde des enfants et jouer mon rôle de femme, j’ai connu le désespoir. L’angoisse de savoir que je n’avais aucun autre choix et que je n’accomplirais jamais rien d’autre. C’est de là qu’est venue ma détermination je pense, celle qui m’a poussée à mordre dans ce fruit. Je voulais partir, m’en aller de n’importe quelle façon, tant que je n’étais plus là-bas. Alors serais-je capable de m’imaginer m’installer quelque part ? Essayer une seconde fois de fonder ma propre famille ? Pas pour l’instant, non. Et crois-moi, je déteste devoir te dire ça car j’ai déjà l’impression de comprendre à quel point ton peuple et ta patrie, ton clan, comptent pour toi. À quel point ces valeurs te définissent jusqu’au plus profond de toi et j’ai envie de les partager, de te les retourner et de te dire que tous tes projets me vont pour ne pas risquer de perdre la chance inouïe que tu représentes. Mais je ne me le pardonnerais pas si je te disais quoi que ce soit de moins que la plus pure vérité. »

Je soupirai un bon coup, laissant la tension qui s’était installée dans mes épaules me quitter. Je n’avais qu’un seul souhait : croiser son regard vairon pour m’y perdre à nouveau. Me blottir dans ses bras pour me sentir en sécurité, protégée. Retrouver sa main pour y glisser mes doigts.

« Peut-être est-ce pour cela que nous nous sommes croisés, car nous nous complétons si parfaitement. Peut-être sauras-tu me réconcilier avec cette vie que j’ai choisi de fuir. Peut-être serais-je capable de te rappeler à quel point un cœur peut s’enflammer lorsqu’il poursuit ses propres passions et qu’il mord dans la vie à pleines dents sans s’encombrer du passé ou de l’avenir. Quelque part, entre toi et moi… Je crois que c’est là que se trouve la perfection. »

@feat Ghetis Enjoy !

L’Archer vivait-il dans son passé ? Pas vraiment, il n’y pensait que rarement désormais, cependant, la demoiselle lui posait des questions l’obligeant à ressasser cette époque lointaine. Ghetis avait accompli sa vengeance et vivait particulièrement bien sa situation. Etait clairement tourné vers un avenir stable et une vie de quiétude. Ses moments de frissons deviendraient ses voyages et ses aventures, mais il espérait réduire son débit de guerres avec le temps, quand il aurait réalisé celles qui étaient prévues plus ou moins.

Il avait conscience qu’un petit monde dormait désormais au creux de sa main, une vie qu’il pouvait offrir sans crainte à une éventuelle partenaire. Néanmoins, il mentirait en disant que le suivre était facile et rassurant. Peut-être que la demoiselle risquait d’échanger sa petite cage dorée, pour une plus grande cage, dont les barreaux sembleraient si éloignés, qu’elle ne les verrait pas.

En un sens, elle le rejetait, rejetait la chimère que constituait une relation entre eux. Elle détruisait en un instant cette passion qui était née… L’esprit du Vairon s’embrumant dans une masse noirâtre, il resta stoïque, écoutant patiemment celle à laquelle il commençait à s’attacher inconsciemment.

Elle avait raison, peuple, patrie et famille définissaient l’Archer de façon assez profonde. Lentement, l’homme se redressa, son bras allant envelopper le corps de la demoiselle avant de la ramener contre lui.

- Ne crois pas mon existence parfaite. Je manque de mesure, je suis capricieux sur les points qui me sont personnels et pour certains j’ai été un mauvais père. Il est vrai que c’est un véritable pays soudé que je fonde. Il est vrai que j’en fais ma priorité. Cependant, je ne sais pas encore ce que l’avenir m’offrira après cette étape. J’espère voyager… J’espère perfectionner l’homme que je suis.

Il eut alors un soupire léger, son bras libre, allant s’envelopper autour de la demoiselle, scellant cette étreinte aussi forte que douce, en un chaleureux paradoxe…

- J’aimerais être un meilleur père. J’aimerais allier cette vie de famille à une vie d’aventure. J’aimerais pouvoir bâtir tout en offrant aux miens une liberté, hors des protections que j’ai pu ériger pour eux. J’aimerais que ma famille soit complète.

C’était ça, il n’aspirait pas à la perfection, mais à un équilibre. Elle le pensait trop nouer à sa famille, à son peuple, là où lui pensait que sa méthode n’était pas encore la bonne. En un sens, n’était-ce pas leur union qui offrirait un monde calme, mais amusant à ce peuple, à cette famille ?

- Vis cette vie, vogue. Nos chemins se croiseront à nouveau, en un jour où cette relation paraîtra évidente. Enfin, s’ils se recroisent, ce sera pour cette raison. Deux êtres opposés, mais complémentaires, ne se rencontrent pas pour s’oublier. Ils se rencontrent dans un but propre à leurs âmes, un but qu’ils pourront entrevoir au fil du temps. Alors, la distance te permettra peut-être de savoir si tu envisages cette vie. Après tout, ce sont des choses à construire, à changer. Cette composition sera nécessairement complexe. Moi-même je dois y réfléchir, pour ma famille cela bousculera bien des choses, tout comme cela pourrait secouer la tienne. Au final, nous sommes des parents mâtures. Une nouvelle relation ne se fonde pas en une nuit. Elle se réfléchit.

Alors il se tut, commençant à caresser son dos, du bout de ses doigts. Effleurant le tissu en une lente cadence, la pulpe de ses doigts venait presser le tissu contre sa chaire et la gratifier de tendres attentions. La chaleur de son corps venait se répercuter contre elle, tandis que son désir d’avenir emplissait son cœur.

- Le jour où nous nous reverrons dans un contexte intimiste… Ce jour-là… Nous saurons, l’évidence se présentera à nous une seconde fois. J’y crois. La rose et le serpent, s’uniront s’ils le doivent. Entre épines et venin, leur union n’en sera qu’inébranlable. Le plus jaloux des ennemis, le plus envieux des concurrents, le plus perfides des monstres, rien ne pourrait passer cette carapace invulnérable qu’une telle union engendrerait… Le monde se souvenant de cette naissance…

La naissance d’une nouvelle famille.


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La Couronne

Lui avouer toutes ces choses, les lui confier à cœur ouvert, c’était douloureux. Mon cœur s’en retrouvait serré et je le regrettais malgré moi, pourtant contente d’avoir su faire valoir mes buts et mes aspirations. J’avais tenu le coup malgré la difficulté et c’est avec peine que je le laissai se relever, croyant qu’il allait s’éloigner de moi pour marquer physiquement la distance que je venais de creuser entre nous. C’est ce qui serait le mieux à faire, la bonne chose à faire. Je saurais m’en remettre de toute façon, n’est-ce pas ? Nous ne nous connaissions que depuis quelques heures à peine alors évidemment que ça allait me passer. Je finirais par retomber sur terre lorsque je regagnerais la caserne et que, demain matin, l’instructeur me crierait de me bouger sur le terrain d’entraînement plutôt que de continuer à rêvasser à un grand brun qui, de son côté, m’oublierait sans doute tout aussi facilement. Je déglutis, mon regard se faisant plus terne, mes mains se serrant.

Lorsque son bras vint m’entourer, c’est avec surprise que je cherchai à croiser son regard, espérant y trouver une explication. Mais en avais-je besoin ? Ghetis m’attirait à lui et je n’avais pas besoin de me faire prier, loin de là. Je me pressai contre lui comme si je l’avais toujours fait, fermant les yeux et posant l’oreille contre son vaste torse pour entendre son cœur battre au rythme des vibrations de ses mots. Je ne devais pas le croire parfait ou dénué de caprice. Lui-même avait déjà été un mauvais père et, malgré ses nombreux projets de sédentarité, l’envie de voyager l’appelait également à partir à l’aventure. Serait-ce une erreur d’insister et de lui dire que, bien au contraire, il me semblait en tous points parfaits là tout de suite ? Calme, mesuré, rassurant, protecteur, patient et compréhensif, mais sachant tout de même ce qu’il voulait et possédant ses propres ambitions. Il m’était difficile de ne pas faire la comparaison, de ne pas me faire remarquer à quel point son étreinte me faisait ressentir des choses qui ne s’étaient jamais éveillées en moi au contact de mon mari. Sa seconde main alla trouver mon dos et c’est malgré moi que mes doigts se glissèrent vers les pans de son kimono pour se glisser entre eux, s’aventurant contre le torse de cet être dont je ne voulais pas me séparer.

L’équilibre lui faisait envie. Il voulait bâtir et protéger, mais aussi être un meilleur père ainsi qu’une meilleure personne. L’aventure devait faire partie de ce tableau complet, c’était son désir tout comme c’était le mien. Ainsi, il n’eut pas de mal à me dire de vivre ma vie et de voguer au gré de mes propres vagues. Selon ses dires, la prochaine rencontre, si elle avait lieu, saurait nous décider. Il n’y avait pas d’autres explications, pas d’autres possibilités. Deux âmes comme les nôtres ne se croisaient pas par hasard, mais bien par destinée. Le moment n’était simplement pas propice et nous devions faire preuve de retenue et de patience. Lui-même considérait avoir besoin de temps pour y réfléchir, sachant trop bien les répercussions que cela pourrait avoir sur nos familles respectives. J’esquissai un sourire doux-amer, réalisant ce qu’il venait de laisser échapper. Vraiment, Ghetis ? Tu t’inquiètes de me présenter à ta famille ? Tu y penses déjà avant même de savoir si nos sentiments sont durables et si nous sommes vraiment compatibles ? Il était attendrissant, mignon. Bien sûr cela n’invalidait pas ses mots, il était vrai qu’une nouvelle relation prenait du temps à se construire, mais le voir si décidé au point qu’il en sautait inconsciemment des étapes, c’était tout autre chose.

« Oui, c’est un fait. »

Avais-je dit surtout pour qu’il sache que je l’écoutais et que, au fond, mon avis sur la question était fort similaire. Rassuré, peut-être, il fut au tour de ses mains de me gratifier d’affection, comme cherchant à passer au-delà de mon pull pour découvrir la chaleur de ma peau. L’avait-il fait consciemment ? Ses mots me laissaient penser le contraire alors que, encore et toujours, il parlait d’avenir lointain, d’une union incertaine qu’il faudrait revoir à une date ultérieure. Se pouvait-il que Ghetis tente tant bien que mal de rationnaliser la chose ? De nier ses désirs que ses doigts me murmuraient dans tout le dos ? Moins sage que lui, je me redressai en m’asseyant sur mes genoux pour avoir une meilleure allonge. J’écartai son col pour aller embrasser doucement sa clavicule alors que, plus haut, il disait quelque chose à propos d’une rose et d’un serpent. Mon chemin se poursuivit alors que je me dirigeai vers la base de son cou que je remontai ensuite de même manière, laissant mes lèvres déposer de petites touches d’amour à intervalles régulier jusqu’à ce que j’atteigne le coin de sa mâchoire.

« Désolé, je crois que j’ai manqué la fin parce que tu parlais trop. Tu veux bien répéter pour moi ? Tu parlais d’une union inébranlable, c’est ça ? »

Avais-je dit sur le ton de la taquinerie, ponctuant mes phrases d’un nouveau baiser déposé contre sa peau. Je ne pouvais m’empêcher de sourire, d’être heureuse en son étreinte. Maintenant que nous avions atteint un commun accord, que nous savions ce que nous voulions tous deux et que d’attendre pour l’avoir nous convenait, c’est dans le moment présent que je m’étais retrouvée. Face à face avec la possibilité que ces mots ne se réalisent jamais, je m’étais demandée si je voulais vraiment laisser passer cette opportunité et mes actes trahissaient la réponse à laquelle j’étais arrivée. Et pourtant, c’est malgré moi que j’ajoutai la suite avec moins d’entrain.

« Alors, tu vas me raccompagner jusqu’à la terre ferme tel l’homme mature et raisonnable que tu es ? »

@feat Ghetis Enjoy !

En vérité l’Archer s’exprimait à cœur ouvert, lui offrant les réponses à ses questions dans un certain naturel. Il ne pensait pas griller les étapes. Il parlait d’une éventualité et en posait les conditions éventuelles. Rien ne pouvait garantir à la demoiselle qu’il serait l’homme qu’il souhaitait être, rien ne garantissait que le Vairon lui appartienne un jour.

Tout cela paraissait encore si éloigner de la réalité, tout en étant si réel, si cohérent pour eux. Cependant, cela était-il rationnel ? Etait-ce le bon choix ? Beaucoup dirait non, mais le duo écouterait-il les conseils ? Le « couple » laisserait-il autrui guider ses pas ?

Non.

Il exprimait avec beaucoup de complexité ce qu’il voyait pour eux, il voulait densifier la chose pour la rendre plus acceptable, moins folle.

Néanmoins, Penelope en décida autrement. Coupant l’homme dans son élan, elle vint briser son assurance, en un instant cette petite pousse ébranla l’arbre. Il fut comme figé. Le moment se cristallisa. Les mains de la demoiselle ouvrant grandement le col de l’homme avant de retracer son corps à sa manière. Un geste qui eut l’effet, non pas d’un frisson, mais d’une bombe.

Taquine, espiègle, joueuse, elle relançait cette danse en une phrase provoquante.

Pourtant, avec ce même flegme, elle lui proposa de clore cet instant. Touchant du bout des doigts l’interdit, elle le fuyait l’instant d’après. Craignait-elle de se briser les ailes ? Craignait-elle de fondre comme neige au soleil ? Quel était ce risque qui lui intimait de reculer ? Mais surtout, quel était ce poison qui polluait son être jusqu’à la pousser vers l’irréparable ?

Pouvait-on parler de pollution, lorsque l’énergie qui animait son corps était douce, chaleureuse et agréable ?
Non.

Ce n’était pas un poison qui s’instillait en elle, mais bien l’antidote à cet amour morne qu’elle vécut. Comment cesser d’offrir à son être ce dont elle avait besoin ? Comment limiter le bien-être de chacun ?

Son index alla caresser son cou, remontant juste sous son menton avant de le relever, plaçant son regard à son niveau.

- La raison nous aurait-elle menés ici ? Penelope Ainsley, cette histoire ne fait que débuter.

L’index  remonta alors à ses lèvres, se posant contre elles pour les faire taire. Dressant un sourire léger, le brun ôta son doigt, son visage s’approchant de celui de l’Ainsley, feinta un baiser, tombant non pas sur sa bouche, mais bien sur son cou. En une descendante taquine, il la couvrirait de ses mêmes gages d’affections, non pas à la façon de baisers, mais de morsures légères. Peut-être était-ce la façon de lui administrer ce poison… cet antidote ?

Les mains caressèrent de nouveau le pull, faisant de celui leur possession, elles en parcoururent le dos, les bras les hanches, jusqu’à ce qu’il n’existe plus, jusqu’à ce que cette peau lui soit révélée. De la pulpe des doigts il se l’approprierait, le tracer léger, ponctuer de baisers. Les tissus étaient-ils encore présents ? Caressait-il la fibre ou la peau ?

Le temps semblait s’être arrêté. Les doigts s’entremêlaient, les peaux se rencontraient, se découvraient pour la première fois. La main droite découvrant sa jumelle de plus petite taille, la main gauche revenant à cette chevelure rosée.

Le monde se figeait à cette découverte nébuleuse. Que se passait-il ? Etait-ce une étreinte ponctuée de caresses ? Les doigts se crispèrent, se firent hésitants, mais trouvèrent le courage de s’unir.

Les peaux se rencontraient à nouveau, s’entrechoquaient par leur simple chaleur.

Une union naissante, une histoire nouvelle. Un torrent d’émotions, un torrent d’illusions. Le réel et l’irréel se rencontraient aujourd’hui. Dans l’obscurité la plus profonde, deux êtres se rencontraient.

Pourtant, ils ne faisaient que se caresser l’un l’autre.

Non.

Pourquoi réduire une caresse à une chose futile ? Pourquoi ne pas la voir comme la plus grand et salvatrice des rencontres. Le brasier les habitant se fit plus fort, plus grand et plus étincelant. Il irradiait de leurs êtres, enflammant jusqu’à la mer, jusqu’à l’océan. Ce feu ardent qui remontait jusqu’au nuage, cette incandescence qui menaçait jusqu’au ciel, d’apparence si calme.

La flamme s’intensifiant à chaque contact, le combustible de cette rencontre, l’huile sur le feu, venant se répandre à chaque nouvelle caresse. Désormais feu de joie, de bonheur et de satisfaction, c’est pourtant très dangereusement qu’il prenait de la place sur l’îlot végétal, sur l’îlot qui rapetissait petit à petit. Pourquoi avaient-ils pris tant de temps à simplement se caresser l’un l’autre ?

Jusqu’où étaient-ils parvenus ? Que s’étaient-ils interdit ? Si même le monde l’ignorait, alors comment des mots pourraient le savoir ?

Le temps était pourtant passé, la nuit avait fini par devenir longue et profonde, la quiétude du moment en avait perturbé la notion du temps. Néanmoins, il était temps, temps qu’il la raccompagne sur la terre ferme. Le temps s’était écoulé, sans le moindre silence, le temps leur manqua.

Malgré tout, c’est un  baiser profond et langoureux qui vint à sceller cette rencontre. L’Archer proposa sa main à la demoiselle, pour la relever et la ramena contre lui. Finalement, il la porta telle la princesse qu’elle était, tandis que l’îlot était sur le point de disparaître.

Le regard plongé dans le sien, cette nuit leur appartenait.

Les pas gravir les cieux, le nénuphar disparu et les pieds revinrent doucement à la terre ferme.

- Quand bien même je le voudrais, il est encore trop tôt pour que nous puissions voyager ensemble je suppose. Alors, n’oublie pas cette nuit Penelope et surtout, laisse le feu brûler en toi, montre à ces personnes que tu n’es pas une figurante. Ton destin t’appartient désormais.

Alors, il marqua un silence pour l’observer sans piper mot et conclut…

- Et si tu le désires, nos destins se lieront un jour.

Si tant est qu’ils décidaient de prendre ce risque.


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La Couronne

Dire que les choses avaient dégénéré serait un véritable euphémisme. Nous avions perdu tout contrôle sur la situation, rejetant serments et logique d’un même coup pour mieux laisser nos cœurs et nos corps fusionner le temps qu’ils le désiraient. Le regrettais-je ? Pas du tout, bien au contraire. C’était ma meilleure décision depuis que j’avais quitté Ironfall, si je devais être honnête. Je n’avais aucune honte, aucun scrupule. Vraiment, j’étais une femme méprisable et ça me plaisait presque. Pire, ma plus grande déception fut de voir que l’île végétale nous ayant accueillis pour la soirée touchait si vite à son terme et que, par conséquent, il nous fallait abréger et regagner la terre ferme. Et par conséquent la réalité que nous y avions abandonné.

Toujours aussi attentionné, et bien placé pour savoir que mes jambes étaient encore molles, le grand brun m’avait pris dans ses bras pour regagner la forteresse de la Marine. Le rêve toucherait bientôt sa fin et il serait mentir de prétendre qu’une certaine mélancolie ne m’envahissait pas à l’idée de me séparer de Ghetis pour mieux le laisser repartir comme il était venu. Je jetai un regard à son cou, là où j’avais malicieusement laissé une petite marque en preuve de mon passage, aussi temporaire qu’il fut dans ce long chemin que l’on appelle la vie. Nous croiserions nous à nouveau un jour ? L’Amiral semblait y croire dur comme fer, sans doute habitué à modeler sa propre destinée et à citer des éventualités comme si elles étaient déjà certitudes. Preuve étant qu’il annonça que j’étais moi aussi maîtresse de mon destin et que, si nous le désirions, nous pourrions toujours, dans un avenir lointain, revisiter cette union pour la concrétiser, la cristalliser. De retour sur la terre ferme, je lui avais offert un sourire doux-amer, reculant d’un pas ou deux sans néanmoins arriver à me détourner de cette grande silhouette.

« Je ne dirais pas non en tout cas. »

Mais le cœur n’y était pas. Toutes ces discussions de destin, de futur lointain, ça ne m’accrochait pas comme ça semblait l’emporter lui. En son regard vairon, en sa façon de me détailler, de m’effleurer la main et dans la façon dont il m’embrassait, en toutes ces choses je sentais sa sincérité. Lui retourner ce sentiment aurait dû être facile, couler de source, mais je n’arrivais pas à m’abandonner à l’espoir et à la rêverie avec autant de liberté que je l’avais fait pour les plaisirs charnels. Il y avait tant d’éléments inconnus, d’incertitudes et de choses pour nous séparer. La veille encore je ne savais même pas qu’il existait, je ne lui avais jamais parlé. Comment pourrais-je sincèrement me leurrer au point de lui jurer que c’était inévitable, une simple question de temps ? L’âme en peine, je n’avais envie que d’une seule chose : me jeter dans ses bras pour l’embrasser encore et encore en des au revoir qui n’en finiraient jamais. Mais si je le faisais, ne serait-ce pas simplement que de retarder l’inévitable ? Que de nous causer à tous les deux plus de douleur encore ? Je m’en tins donc à simplement détailler une ultime fois les traits de son visage pour les mémoriser, les graver en mon esprit pour y revenir chaque fois que la solitude me pèserait.

« Cette soirée était parfaite. Merci infiniment, Ghetis, et bonne nuit. À la prochaine. »

Il fallait partir maintenant, lui offrir un dernier sourire et m’en aller. Retrouver mes repères habituels et planifier mon itinéraire. Je devrais faire un détour par les douches avant de regagner mon lit en espérant ne réveiller personne. Vu l’heure qu’il devait être je pourrais sans doute dormir deux ou trois heures avant le lever du jour. Telles étaient les choses sur lesquelles il valait mieux se concentrer pour oublier le vide qui se creusait en moi avec chacun de mes pas. Il me manquait déjà, comment était-ce seulement possible ? Reprends toi, Penny… Sois sérieuse pendant cinq minutes. Tu l’as fait, tu en as profité et c’était un moment merveilleux, unique. Maintenant il ne te reste plus qu’à chérir ce souvenir jusqu’à ton dernier souffle, c’est tout. T’attendre à autre chose serait stupide et naïf. Et pourtant… Et pourtant !

@feat Ghetis Enjoy !