-J’en ai déjà informé et briefé les cinq des Douze Titans qui s’y trouve, expliquait l’Onassis à l’escargophone depuis sa demeure à Akropolis où avançaient les préparatifs pour la recherche de Troie et la confrontation avec Tégée Deimos de l’Alliance des Chasseurs de Primes à ce sujet.

-Je vois. Vous êtes certains qu’il sera partant ? s’interrogeait le Minamoto qui pour sa part avait laissé de côté l’entreposage des boulets et de la poudre qui serait nécessaire d’ici quelques semaines pour lancer l’invasion éclair des territoires du Tenryon.

Le triérarque devait s’en charger personnellement et gérer les stocks afin d’éviter qu’il ne soit évident pour quelqu’un glanant des informations sur le marché noir qu’un assaut se préparait. Faire croire que Rébéna utilisait une confrontation avec Hadès politiquement afin d’accroître son pouvoir en faisant miroiter un renversement de pouvoir sous peu afin d’ensuite imposer une forme de tyrannie sur ceux l’aillant rallier était une composante même de la stratégie de désinformation afin de maintenir une surprise malgré la circulation des informations sur ces ralliements. Certaines informations donnés aux recrus de l’Opération Zizanie allaient dans ce sens selon les nouvelles qu’ils avaient eu de la Té Ra avant son départ pour Himitsu Shima. Les choses avançaient bien. Il ne restait pour ainsi dire plus grand-chose à faire avant de déclencher la guerre, à savoir dans l’idéal rallié Kars Makram à la cause de la Ligue et que Rébéna soit de retour à Agnôstos pour la réunion d’Etat Major final. Il fallait aussi compter l’assistance qui devait être apporté à Kyo Kara dans le cadre du pacte de coexistence pacifique, ce qui permettrait d’en retour jouir d’une aide à un moment donné. Il fallait malgré tout garder un œil sur ce concurrent qui pouvait tout à fait finir par les trahir s’il y trouvait avantage… Néanmoins, la stratégie de vassalisation économique de l’Alliance de Kyo Kara avait débuté, faisant en sorte de développer le système économique de ladite alliance mais en faisant reposer cela exclusivement sur les bases de la Compagnie Hellène des Indes Equatoriales. En les faisant se concentrer sur l’extraction des ressources et non sur leur transformation en produit finis, ils demeureraient dépendant de la Ligue, la remonté des filières ne pouvant d’ailleurs pas se faire dans de tels conditions.

-Nous verrons bien. Je n’ai jamais eu l’occasion de le rencontrer, mais lorsque j’ai appris les pouvoirs dont il était doté, cette idée m’est venu et cela serait un trop gros atout, tant militaire que commerciale, si cela était possible. Je compte sur toi pour pouvoir le convaincre.

-Je ferai de mon mieux Phoenicia.

-Je dois retourner à mes affaires. J’ai une réunion avec les autres archontes dans une heure et un repas avec mes collègues aréopagites après. Je ne serai donc pas disponible si tu as besoin de me parler.

-À plus tard alors.

Le vieux samouraï était un éminent membre de la Ligue Egéenne de Milon faisant partis des Hétaires, c’est à dires les cinq triérarques les plus importants considérés par Rébéna comme ses « compagnons » puisque c’était la traduction du terme. Conseil stratégique et militaire personnel de la navarque, il revenait tout juste d’une longue mission dans l’Empire Kalhatien, mission s’étant montré fort fructueuse commercialement en ouvrant de nouvelles voies de navigation afin que la Compagnie Hellène des Indes Equatoriales puisse desservir Paradise mais aussi au niveau recrutement car deux éléments intéressants avaient rejoint les rangs de la Ligue bon gré mal gré au cours de cette épopée. Mihael Kheel allait même se retrouver directement sous l’influence de Phoenicia qui avait certains projets vis-à-vis de la Pègre.

-Bon. Il ne me reste plus qu’à trouver ce Yashin Archer. J’aurais peut-être dû laissé Médolie s’en charger vu qu’elle le connait mieux que moi, mais il fallait qu’elle parte à l’aventure une énième fois sur l’une des autres îles de l’archipel, s’amusa Kosenjobi en commençant à remonter le port en direction de l’Arsenal Egéen, passant devant différente stoas du marché portuaire.

Kosenjobi avançait au milieu des passants, saluant ceux qui venaient lui dire bonjour. Un milicien se permit même de lui demander un autographe. L’éminent triérarque s’exécuta et sourit au jeune homme qui repartit alors à sa place pour surveiller les lieux. Le samouraï s’empara d’une pomme et versa les berrys correspondant à l’épicière. Son regard se porta d’ailleurs sur une flottille qui arrivait au port. Plusieurs flûtes et quelques galères étaient protégés par deux frégates ainsi que par l’un des vaisseaux de ligne fabriqué par Phoenicia non pour l’Armada Egéenne mais bien pour la protection des convois marchands de la Compagnie Hellène des Indes Equatoriales. Les cales des navires devaient être remplis de richesses et de ressources exotiques qui seraient transformés par les artisans d’Agnôstos afin de pouvoir ensuite exporter par ces mêmes nefs les produits manufacturés aux quatre coins du Nouveau Monde. Alors qu’il reprenait sa route, un attroupement visible plus loin et des beuglements attirèrent l’attention du vieil homme. Ce dernier posa la main sur le manche de son meitou des 50 et s’approcha petit à petit, fendant la foule en s’excusant afin d’avoir un point de vue sur le centre de l’attention. C’est alors qu’il découvrit le seul parmi les triérarques à ne pas être un ancien polémarque. Un soupir quitta ses lèvres quand il se rendit compte du capharnaüm déclenché à partir d’une malheureuse histoire de peinture. L’artiste observait l’Archer l’engueulait, craignant visiblement pour sa vie. Le Minamoto intervint ainsi rapidement.

-Veuillez tous vous reculer je vous prie ! lança le vieil homme à la foule. Yashin… Que diable vous a fait cette toile ? Excusez nous pour le dérangement monsieur, conclut-il en lançant quelques berrys au peintre afin de servir de compensation pour les dégâts causés.

L’homme surnommé Nobunaga, selon le nom du meitou des 12 connu pour reposer dans les mains d’Eko Taka, remarqua les taches de peinture et se retint de rire nerveuse, pinçant un sourire en coin qui montait à ses lèvres. Bon, vu la réaction du jeune homme, il devait être le même genre d’énergumène que Movor’ach ou Ba’a’Moth, le colossale homme-poisson et l’homme-lion faisant eux aussi partis des têtes des triérarques. Colériques par moment, impatient, bagarreur, ces termes correspondaient bien… Et vu le système de la Ligue c’était logique que des personnalités pareils se démarque. Les gérer n’était pas forcément simple, mais ce n’était pas mission impossible non plus.

-Ce monsieur n’a certainement pas fait exprès de vous importuner… J’ai à vous parler et des choses à faire avec vous Yashin, alors j’espère que vous saurez clore cette affaire pour vous. Revenez régler cette histoire plus tard si c’est important pour vous.

Le fluide perceptif déployé, le samouraï attendrait de voir la réaction de l’Archer et serait prêt à s’interposer si le forban menaçait trop le civil. Il lui suffirait de générer de l’électricité sur sa lame pour générer une défense suffisante. Dans le cas contraire, il lèverait le bras pour inviter le jeune homme à s’éloigner et lui parler.

-Alors, comment-vous sentez-vous parmi nous ? Le rôle de triérarque vous satisfait ? La vie à Agnôstos vous est-elle agréable ? Avez-vous hâte de partir exécutez quelques missions pour venir en aide à vos collègues ou à l’inverse y a-t-il une aventure qui vous tente ?

Kosenjobi laisserait son interlocuteur répondre avant de tendre la perche.

-La malédiction que vous possédez est fort particulière et attire beaucoup d’intérêt de la part de certaines personnes… Même à Akropolis, certains entendent parler de vous.

Le jeune homme obtempéra assez rapidement, se pliant à la demande de celui qui était ainsi son ainé au sein de l’organisation, tant en hiérarchie qu’en âge. Comme il l’avait déjà deviné, cet individu était du genre impatient, rente-dedans et avide d’affrontements. Un profil donc bien classique chez de nombreux jeunes de la Ligue ambitionnant une carrière vers les sommets de la piraterie. Bien des inconscients se jetait à l’assaut des yonkou poussé par cette avidité et cet orgueil. Certains comme Kyo Kara finissaient par former une alliance, ayant conscience qu’il fallait faire contrepoids face aux armées d’un de ces empereurs des mers. Mais la Ligue Egéenne de Milon c’était différencié de tous ces challengers par une approche autre : une construction progressive, des années à planifier dans l’ombre des stratégies afin d’avoir des cartes à jouer le moment venu. Ce moment approchait enfin et le sang bouillonnait dans les veines de la navarque, Kosenjobi n’avait pas besoin de la voir pour le savoir ou le sentir. Après tout, son tempérament s’approchait de cela même si elle était bien moins bourrin que ce qu’une première approche pouvait laisser penser d’elle.

-Cela ne devrait plus tarder, même si après le titre de yonkou nous aurons encore d’autres affaires à gérer comme l’Alliance des Chasseurs de Prime.

Les recherches de Phoenicia avait révélé les liens qu’entretenait Tégée Deimos avec la disparition de Troie. Si la conclusion qui s’imposait était que ce collectionneur de meitous ne disposait pas lui-même du trésor national d’Akropolis, les informations dont il disposait était capitale pour comprendre ce qu’il c’était joué cette lointaine journée. Or l’Alliance des Chasseurs de Prime était tout sauf un petit adversaire et prendre à partie Tégée uniquement nécessiterait une certaine organisation. Il faudrait en plus montrer malgré tout le moins d’hostilité possible pour éviter de déclencher un conflit d’ampleur et être pris pour cible par Mijushike.

-Vous aurez l’occasion de prouver votre valeur à de multiples reprises durant ces événements. De nombreuses îles sont à conquérir. L’affrontement avec les troupes de notre adversaire ne sera pas unique. Certains officiers importants seront certainement à faire tomber avant la grande bataille finale.

Dans un certain sens, c’est cela que craignait le vieux samouraï. S’emparer d’un vaste territoire était plus simple, en prenant en compte des troupes équivalentes, puisque les défenses sont étalés pour tout protéger là où l’assaillant peut tenter de tout focaliser en un point pour briser la défense et s’imposer. D’où l’idée de mener une guerre éclair d’ailleurs afin d’éviter que l’ennemi ait le temps de se réorganiser et de répartir ses forces pour l’affrontement. Néanmoins, par la suite cette même problématique s’imposerait à eux lorsqu’ils disposeraient de ce territoire. Concernant son propre pouvoir, comme certains rookies sûr d’eux comme les logias se pensant invincible avant de se faire stopper net par le haki de l’armement, l’Archer semblait particulièrement fier et sûr de lui quant à la supériorité de son pouvoir.

-Faites attention. À trop se reposer sur sa malédiction, on se retrouve démuni face à quelqu’un qui se révèle en mesure d’en contrecarré les fondements sans problèmes grâce à sa propre malédiction ou une technique spécifique… Mais vous avez raison, si je suis venu à votre rencontre c’est à propos de cette faculté à donner la vie. Et c’est pour cela que je vous conduit à l’Arsenal Egéen… Connaissez-vous Phoenicia Onassis de nom ? Elle est désormais aréopagite de la cité d’Akropolis, mais c’est une personnalité majeur d’Agnôstos depuis de nombreuses années. Je ne suis pas certaines que vous aillez eu l’occasion de l’apercevoir à l’Amphithéatrion étant donné qu’elle ne se bat pas et avait d’autres affaires à mener qu’observer la plupart des combats.

-Ce n’est pas à l’Alliance en elle-même que nous allons nous en prendre mais à l’un de ses membres. Dans le cadre de la solidification des bases politiques de la Ligue en tant qu’institution transnationale formant une sorte d’Etat fédéral, nous avons besoin de récupérer certains symboles anciens de la civilisation hellène sur laquelle se base la Ligue Egéenne de Milon, notamment au travers de l’héritage de l’ancienne Ligue Nauclère. Visiblement, à son époque elle était l’équivalent en puissance, en influence et en activités de l’actuelle Guilde Marchande du royaume de Trader. Enfin, bref, l’un des membres éminents de l’Alliance des Chasseurs de Primes dispose d’informations sur le passé de l’histoire d’Akropolis, informations dont nous avons donc besoin pour mener à bien la pérennisation de notre présence. Une fois que nous aurons renverser Hadès, il faudra en effet que nous nous consolidions avant de pouvoir penser à nous étendre à nouveau afin d’être en mesure de faire face aux assauts. Si nous nous en prenions à un autre yonkou, les deux autres pourraient saisir l’opportunité pour pénétrer nos lignes et ravir une partie de notre territoire. Nous pensons déjà à ces éventualités et à la manière dont optimiser la construction de nos lignes défensives.

Kosenjobi n’était pas le conseiller stratégique principale de Rébéna en matière militaire pour rien. Même si, même là Phoenicia impulsait des axes de réflexions et des idées, il maîtrisait le sujet et évaluer les manières de procéder pour arriver aux objectifs que les têtes pensantes se fixaient. Après tout, c’est bien cela qui caractérisait la Ligue par rapport aux Empires actuelles : elle était autosuffisante sur bien des aspects, gérant son économie sans avoir recours à la pègre, construisant ses propres équipements militaires de tout types, assurant la domination politique sur chaque île au travers des cadres de la Compagnie… La Ligue s’était divisé en de multiples aspects qui allaient bien plus loin de la fédération sportive originel pour forger une nation complète capable d’imposer sa force mais aussi sa culture sur ses voisins. Le projet de développement du Soft power était en bonne voie suite à la mission dans l’Empire Kalhatien, la vassalisation de l’économie de Kyo Kara était assuré par les closes que ce dernier avait accepté, la construction du réseau d’informateurs se portait tout aussi bien.

-D’incroyables batailles nous attendent en effet. Nous sommes resté dans l’ombre pendant des années afin de nous préparer à ce moment. L’heure de dévoiler notre puissance à la face du monde à éclater. La victoire de Rébéna sur l’ancien amiral de la Marine de la famille de l’Etoile Yang Thalassa n’était qu’un coup de semonce à ce titre, sourit le vieux samouraï. Notre stratégie va payer.

La stratégie, toujours la stratégie. Kosenjobi le militaire de tradition, Phoenicia la politicienne aux visions économiques, Rébéna l’instinctive maîtresse de l’improvisation. Cette trinité trônant au sommet de la longue planification n’avait pas toujours pu gérer facilement ceux en manque d’actions, mais il était nécessaire que tout soit prêt, que la Ligue soit armée pour que la stratégie paye. Même Rébéna avait finit par se montrer impatiente, quand bien même elle savait elle-même l’importance d’attendre le bon moment pour agir. Les pertes du Tenryon face à Mijushike durant la bataille finale contre les Décima avaient lancé le signal de la phase finale des préparatifs et notamment simplifiant les recrutements de l’Opération Zizanie. Il ne manquait plus que la navarque rentre elle-même au pays pour lancer l’assaut avec tout le monde.

-Je préférais simplement te prévenir. Rébéna a déjà eu l’occasion de manger des fruits du démon, mais a toujours décliner. Utiliser un pouvoir extérieur à son propre corps est tout simplement hors de sa manière de vivre… Elle s’est tempéré avec le temps sur ce point de vue, mais quand je l’ai rencontré pour la première fois, c’était extrême, ricana le Minamoto qui se remémorait l’arrivait de la rousse à Agnôstos. Eh bien nous verrons un jour si tu réussis à me battre, étant donné que l’on me considère pour l’instant comme le meilleur bretteur de la Ligue, songeait-il en tapotant le pommeau de son fidèle katana.

Finalement, arrivant au bout du chemin, l’Hétaire observa le bassin qui se présentait devant eux.

-Nous sommes arrivé à l’Arsenal Egéen… Il s’avère que Phoenicia le possède, la famille Onassis étant justement l’une des familles ayant colonisé cette île pour le compte d’Akropolis il y a plusieurs siècles… Retiens bien son nom d’ailleurs, car si les autres yonkou ont des « seconds » dans leur équipage, Phoenicia a beau ne pas être du tout une combattante, c’est bien elle le bras droit de Rébéna… Bref. Elle a eu l’idée d’utiliser ta malédiction pour créer une nouvelle gamme de navire… En somme, créer des navires vivants capable d’obéir aux ordres du capitaine pour faciliter la navigation mais aussi les manœuvres à réaliser pour l’équipage. Il s’agirait tout simplement de révolutionner le monde l’architecture navale à partir de ce principe. Nous aurions le produit phare, rare et cher qui nous permettrait d’enfin faire passer l’Arsenal Egéen devant la Galley La… Bien entendue, nous chercherions également à profiter de ces avantages pour notre Armada dans un premier temps afin d’améliorer notre mobilité et notre rapidité dans le cadre des guerres à venir, mais dépasser la Galley La pour devenir le premier constructeur naval à l’échelle mondiale, dans un monde dominé par les océans, serait tout simplement une manière de marquer l’histoire et d’asseoir une supériorité autant militaire que commerciale sur les autres empires, et même face au Gouvernement Mondial.

Le regard du triérarque embrassa les navires amarrés.

-Je ne suis pas spécialiste, donc nous allons voir les détails avec les maîtres charpentiers, mais il sera assurément nécessaire de faire plusieurs tests pour voir comment cela serait viable ainsi qu’évaluer quelle quantité d’âmes il vous faut dépenser pour obtenir tel ou tel résultat afin de voir ce qui est commercialisable, ce qui est le plus performant et que nous garderions pour nous, ainsi que les coûts que l’on pourrait ajouter pour adapter des navires à ce concept que Phoenicia appelle « Vivenef ».

-Je n’ai pas dis que nous allions vendre des modèles vivants militaires, sourit Kosenjobi. Phoenicia doit être en train d’effectuer certaines projections et étudier les différentes possibilités commerciales qui s’offrent à nous… Mais, une fois que nous aurons remplacés l’Empire Suprême de la Piraterie d’Hadès, nous n’aurons pas grand-chose à craindre. Nous ne vendrons pas ces navires aux autres yonkou et même s’ils parviennent à s’en procurer directement, Phéréclos et ses charpentiers seront ceux qui connaissent tout les secrets de ces embarcations. Il a déjà dû prévoir des points faibles que nous serions les seuls à connaître et qui pourraient être exploité si on retournait ces vaisseaux contre nous. La guerre est un aspect important, mais ce n’est pas le seul qui compte. La domination économique est également un moyen de prendre l’ascendant sur les autres nations et de pérenniser notre présence… La Ligue ne sera pas un Empire Pirate éphémère comme tant d’autres, ces derniers disparaissant généralement avec la défaite de leur yonkou ou dans quelques cas survivant durant deux ou trois génération comme pour les Taka de Wa actuellement. Avoir le monopole de la production d’un tel produit unique au monde offre apparemment des avantages considérables sur le marché mondial selon ce que m’a dit Phoenicia. Et cela ne sera pas donné. Si la construction du navire en lui-même ne dépassera pas j’imagine la centaine de millions même avec les aménagements pour le rendre vivant et lui inclure des défaillances, vu les avantages et la rareté qui découle du fait qu’il serait vivant, il semblerait qu’il soit envisagé que ces Vivenefs soient vendu à plus d’un milliard de berry l’unité…

Il demeura songeur un instant.

-Vu que c’est votre malédiction qui rendra cela possible, j’imagine que vous aurez le droit à un pourcentage sur les bénéfices.

Concernant les détails donnés sur la malédiction du Soru Soru no Mi, le Minamoto se contenta de lever les épaules.

-Je vous crois. Cela n’est pas de mon ressort, mais il me semble que de toute manière les charpentiers effectués au moins une dizaine de tests avant de lancer une nouvelle gamme de navires, cela pour équilibrer l’hydrodynamisme, la flottaison, l’équilibre du poids… Ce genre de chose. Vous aurez donc l’occasion d’effectuer plusieurs tests pour optimiser la répartition des âmes et tout ces détails techniques liés à votre malédiction.

D’ailleurs, il ne le mentionnait pas, mais il avait été décidé par Rébéna de ne pas transformer les navires les plus importants de l’Armada Egéenne quand bien même cela pourrait donner un avantage tactique aux monstres navals qu’ils représentaient. La Té Ra préférait se prémunir de tout risque de trahison et que l’Archer retourne les vaisseaux contre la Ligue un jour ou l’autre, pour X ou Y raison… Notamment s’il décidait de devenir yonkou et de renverser Rébéna sans passer par les combats internes à la Ligue, préférant tenter de retourner la flotte contre elle-même.

Le binôme avait avancé dans l’Arsenal Egéen au fur et à mesure de la discussion tant et si bien qu’ils se trouvaient actuellement entre plusieurs navires en construction. En l’occurrence, il s’agissait de vaisseaux de la gamme Vestri qui avaient fait jadis la renommé de l’Arsenal. Ces trois bateaux-ci étaient destiné à un membre de la Guilde Marchande de Trader qui voulait tenter de commercer sur le Proche Nouveau Monde et avait pour ce faire besoin de navires adaptés à ces mers houleuses. Quatre individus qui discutaient ensemble, dont un géant, étaient assis un peu plus loin, proche de l’eau. Ils supervisaient de loin l’évolution du chantier, mais venaient d’être mis au courant du projet « Vivenef ».

-Yashin, je te présente les quatre gérants de Dock de l’Arsenal, qui font également tout quatre parti du Conseil des Douze Titans qui gère la vie artisanale de la Ligue et la production des marchandises pour la Compagnie Hellène des Indes Equatoriales.

-Y-a-t-il quelqu’un en particulier dans l’équipage d’Hadès qui vous intéressez ? s’enquit alors le Minamoto.

Ce dernier aurait aimé croisé le fer avec Jormugand qui était assurément un des plus grands épéistes pirates à l’heure actuelle, capable de rivaliser avec des samouraïs de Wa no Kuni qui étaient véritablement la patrie des bretteurs flibustiers par leur histoire ancienne se conjuguant à celle récente de la dynastie régnante des Taka. Kosenjobi dirait même de manière objective que c’était Kars Makram qui était le plus adapté pour affronter cet énergumène, néanmoins cela n’empêchait pas le vieil homme de se dire que cela serait très enrichissant de croiser le fer avec cette terreur faisant pour ainsi dire office de bourreau pour le compte d’Hadès.

-La Ligue, par sa relation avec la Compagnie Hellène des Indes Equatoriales qui au final en est une composante, dispose d’un modèle économique basé sur le commerce. Alors l’argent est en effet quelque chose qui revêt un aspect important pour solidifier l’empire pirate à venir. Si Erika se concentrent sur l’esclavage et Hadès sur l’obsidienne, leurs rentrées d’argents se font donc au travers de la pègre. Au-delà du fait que nos rentrées d’argents sont légales du point de vue gouvernementales et donc que le Gouvernement Mondial ne peut pas en soit interdire la commercialisation de nos produits sur leur territoire, cela fait que nous avons un meilleur contrôle de notre économie et que nous sommes en mesure de subvenir à nos besoins sans avoir à négocier auprès d’une autre organisation ou des taxes envers des territoires conquis. Je vous passerai le détail de la stratégie économique établit par Phoenicia, je n’ai moi-même pas compris tout les aspects puisque ce n’est pas notre domaine le commerce, l’économie et la politique. C’est en tout cas l’un des aspects importants pour nos tactiques de vassalisations…

En effet, le processus de mise en dépendance de l’Alliance de Kyo Kara avait été enclenché par le traité de coexistence pacifique et s’ajoutait d’autres plans pour accroître l’influence de la Ligue Egéenne de Milon sur les régions qui ne faisaient pas partie de son territoire. Du point de vue culturel, la mission dans l’Empire Kalhatien c’était montrée importante pour répandre la culture hellène et engagé la stratégie de Soft power qui allait différencier la Ligue de tous ce qui c’était fait par le passé du côté des yonkou, le Hard power dominant les relations internationales depuis des années. Mais là encore, toutes ces notions échappaient à Kosenjobi qui n’était pas assez érudit, malgré sa sagesse et ses connaissances plus qu’honorables, pour comprendre pleinement la vision de Phoenicia sur le long terme et en comparaison des événements du passé lointain.

-En tout cas, dans le cadre des batailles navals à venir, en prenant la tête de Vivenefs vous seriez responsable d’une partie des opérations, vu l’influence de votre pouvoir sur la relation avec ces créations. Des responsabilités digne du titre de triérarque et qui vous permettrons de foncer en première ligne pour mener des combats, conclut le samouraï qui se disait que cela ferait plaisir au jeune homme vu sa matière d’être.




-Salut le nouveau. Il est cool ton pouvoir, entama directement le géant qui, contrairement à la triérarque géante que Yashin avait vu se battre dans l’Amphithéatrion, n’était pas natif de la légendaire Elbaf et qui avait appris l’ingénierie naval des suites d’un naufrage.
À ses côtés, la blonde cornue abattit son marteau, qui avait un manche de naginata et qu’elle maniait ainsi comme telle, sur une carvelle, une sorte de gros clou de forme pyramidale très allongée utilisiée la plupart du temps pour l'assemblage des bordés sur les membrures.

-C’est la première fois que tu viens ici ? s’interrogea la bâtarde d’une noble du royaume de Standing qui avait jadis échoué dans les jeux de pouvoir à la cour de Ka no Kuni et qui, par son passé à la Galley La, était précieuse dans la quête de l’Arsenal Egéen de passer devant sa grande concurrente de Water Seven.

Assis sur un tas de planches, l’homme-singe de Monkeypeia tira une bouffée de sa pipe avant de tourner le visage vers celui qui avait amené la transition entre le titre de polémarque et celui de triérarque. Ancien commandant de la Marine affilié au G-5 devenu révolutionnaire avant de réemployer ses anciennes compétences de charpentier du G-5 pour intégrer l’Arsenal Egéen, il était possible de reconnaître son ancienne cape d’officier gouvernementale qui trônait toujours sur ses épaules. Néanmoins, le mot « Justice » dans le dos avait été remplacé barré puis recouvert par le logo de l’Arsenal Egéen, indiquant clairement que ce n’était plus un membre de la Marine.

-Tu as de l’expérience en construction naval ou pas ? C’est important pour que nous sachions si on doit t’enseigner quelques bases avant d’enclencher ce projet « Vivenef », se justifia Améinoclès.

L’homme des sables masqué originaire d’Yfécho hocha la tête aux propos de son collègue.

-Il y a tout le vocabulaire technique mais aussi la compréhension de la mise en relation des différents éléments constituant le navire, leur agencement et leurs liaisons.

Une autre silhouette commença à s’approcher. Son corps était couverts d’une multitude de cicatrices et on voyait clairement qu’il avait été forgé par des années d’exercices physiques mais surtout de travail manuel.

-Yashi, voici l’homme à la tête de l’Arsenal et qui a dessiné les plans de la majorité des navires de l’Armada Egéenne, ainsi que celui qui s’est chargé de la construction de nos navires amiraux en personne… Phéréclos, en quelque sorte le membre du Conseil des Douze Titans le plus respecté, expliqua Kosenjobi.

-Alors le voilà le p’tiot. Félicitation pour être devenu triérarque… L’autre n’était qu’un pauvre con. Si j’avais su, j’aurais tué son père lorsque je l’avais battu il y a des années. L’gosse aurait pas vu le jour.

-En effet, le commerce d’obsidienne nous reviendra. Nous savons déjà quoi en faire.

C’était même ce dont la Ligue s’emparerait le plus rapidement et les accords conclut avec Saül de Valroy offraient justement l’exclusivité de l’achat de l’obsidienne à ce dernier en échange de son appui et de celui de l’organisation qui devait se trouver derrière lui. Il serait le seul à pouvoir en acheter, mais bien entendu Hâroun ar-Rachîd s’occuperait d’utiliser l’obsidienne pour la Ligue également. L’Onassis lui avait d’ailleurs préemptivement demandé s’il jugeait possible de réaliser des canons en obsidiennes et surtout des boulets en obsidiennes pour le Jugement Dernier, le navire amiral de Rébéna… Bien qu’il était rare qu’elle faisait une traversée à son bord, préférant nager dans la mer. Concernant la partie mafieuse que représentait le Valroy, ce n’était de toute manière pas l’argent en lui-même qui intéressait les Cyclopes Ouraniens mais bien les services que cet individu pouvait leur offrir en échange de cet incroyable avantage commercial. En tout cas, les recettes engrangés par la Compagnie Hellène des Indes Equatoriales en cumulant tout ses secteurs d’activité atteignait actuellement les 2.000 milliards, en faisant ainsi l’une des entreprises du top 10 mondial aux côtés de noms prestigieux comme la Very-Melon Society, la Galley-La, la Dosukoi, la Guilde Marchande, l’International Vivre Card Society ou encore Dialo Fusion, néanmoins il y avait encore du chemin à parcourir pour atteindre le sommet de cette pyramide des sociétés commerciales. Yashin avait raison sur le fait que le commerce d’obsidienne contribuerait à encore davantage boosté les revenus de la Ligue qui assuraient la stabilité d’une économie globale… Une stabilité qu’aucun autre yonkou ne pourrait égaler quand bien même ces derniers pouvaient certainement déployés des moyens d’obtenir autant d’argents pour l’usage public par les taxes et autres formes de domination. En effet, la Ligue devait dépenser de nombreux milliards pour l’entretien et la construction de ses infrastructures, les salaires et les différents projets tant en urbanisme qu’en recherche et développement commerciale comme à l’Arsenal Egéen.

-Être un des piliers de la Ligue… Eh bien, nous verrons si tu arrive à intégrer les Hétaires dont je fais partie avec Médolie Canondor… C’est tout simplement les Triérarques considérés comme étant les plus importants, les plus puissants mais aussi les plus ancrés dans ce système.

Il s’agissait en effet du groupe que la Té Ra réunissait régulièrement avec les Cyclopes Ouraniens et les Douze Titans pour parler des grandes lignes directrices des semaines à venir, des projets et des stratégies à adopter dans les différents domaines. Les postes d’Hécatonchires, inventé il y a peu par Rébéna afin de créer un palier entre les Triérarques et la Navarque, restaient à pourvoir. La rousse attendait qu’un autre candidat se démarque afin de faire s’affronter Médolie, Kosenjobi et cette dernière recrue de haut niveau pour la première position. Parviendrait-elle à convaincre Titia Lae de rallier la Ligue et en faire ce dernier candidat ? Etant donné la dynamique actuelle de leur alliance, ce serait peut être un peu trop tôt. Concernant Kars Makram, il avait déjà été convenu qu’il pouvait obtenir d’entrée de jeu le poste s’il acceptait d’intégrer la Ligue au réveil de son comas : le prestige de son nom et de ses capacités n’étaient plus à refaire.




-Cela fera peut-être naître en toi une passion, qui sait ? releva Hringhorni.

-Plusieurs d’entre nous n’étaient en effet pas du tout destiné à la charpenterie navale, ajouta Maria en hochant la tête et en échangeant un regard avec le géant.

-Donner la vie… Ton pouvoir est intéressant, mais en parler donne l’impression que tu es enceinte, s’amusa l’homme-singe en tirant une nouvelle bouffée de sa pipe.

-Les questions sont faites pour avoir des réponses. Mais nous irons plus vite si tu les connais déjà, releva Séleucos. C’est mieux quand la question elle est vite répondu… Comme disait le Prêtre des Insultes, ajouta-t-il en se tournant vers l’Archer, se moquant de la façon dont parlait feu le polémarque.


-On est pas là pour lambiner mais pour bosser les mecs. Une fois que la réunion est terminé on se met au boulot. Si l’un de vous veut un jour me succéder, vous avez intérêt à encore vous améliorer.

-Vous avez une vie entière d’expérience en charpenterie naval, répliqua Maria. C’est normal que l’on en sait pas autant que vous.

-C’est pas une raison pour rester à la traîne. Tant qu’on y est le jeunot. Si tu veux déjà faire quelques essais pour voir comment ta malédiction réagit avec les bateaux, on peut te mettre à l’un des chantiers « écoles » de nos artisans et tu testeras comme tu veux de donner la vie aux parties du navire, proposait le vieil homme bourru qui avait survécu à l’une des plus terribles courses et aventure que l’on pouvait vivre sur ce Nouveau Monde déchaîné.

Phéréclos commença à s'éloigner, puis se retourna.

-Qu'est ce que vous faites à poireauter ? Suivez-moi !

-À toute de suite ! sourit alors Maria, étant donné que le chantier-école mentionné faisait partie de son dock et que par conséquent elle pouvait passer voir comment cela avançait tout en travaillant.

-Fin de la réunion, retournez bosser ! On en parlera ce soir ! siffla le vieillard couvert de cicatrice avant de jeter un regard sur Kosenjobi. Le Nobunaga veut assister aux essais j'imagine. Viens aussi, mais ne fait pas de bruit.

-Très bien Phéréclos, mais je t'ai déjà dis de ne pas me traiter comme ça. On est sensé être ami, répliqua le Minamoto qui connaissait le Directeur Naval Egéen depuis la fois où, tout deux polémarques, ils avaient collaborés durant tout un tournoi dans l'Amphithéatrion.

-Le boulot c'est le boulot. Traîne pas dans mes pattes où je te refais le portrait le vieux torchon !

-À vos ordres patron, répliqua Kosenjobi en se mettant au garde-à-vous, retenant son sourire amusé comme il pouvait avant de faire un clin d’œil si Yashin l’observait, tandis que Phéréclos reprenait sa marche en soupirant d’exaspération.

Croisant les mains dans son dos, le vieux samouraï suivit donc son vieil ami avec l’Archer tandis que l’Arsenal Egéen se dévoilait un peu plus. Semblable à une sorte de forteresse, ce chantier naval, raison même de la fondation de la colonie par Akropolis dans les temps anciens, disposait donc d’une structure centrale circulaire entourée d’eau entourait d’autres structures décrivant un cercle et s’étalant jusqu’aux murs extérieures de la partie « chantier naval ». Le bassin entre cette partie et la mer était parfois considéré comme une extension bien qu’il y mouillait des navires qui n’avait pas vocation à être vendu, tel le fier vaisseau en charge de la défense de l’île en cas d’attaque navale. Un principe pensée par Rébéna pour structurer la Ligue : en dehors des navires à vocation commerciale, les forces « militaires » se décomposaient en trois groupes disposant de leurs propres subdivisions. Il y avait première l’Armada Egéenne de Milon qui était une force massive de nombre. En second lieu, on trouvait les navires personnels des membres de la Ligue, telles ceux des équipages de Kosenjobi ou de Médolie, qui avaient tout à fait le droit d’arborer leur propre pavillon pirate aux côtés de celui de la Ligue. Enfin, on trouvait les « forces en rade » qui étaient alloué à leur île et ne devait être employé que pour la défendre. Des escadres de l’Armada Egéenne avaient également une vocation défensives mais étaient des forces mobiles, là où ces navires-ci étaient destinés à ne pas quitter leur cité. La plus importante de ces forces se trouvait bien entendue à Akropolis, avec la fameuse Olympe des Mers qui était une des plus grandes réalisation de Phéréclos avec le Jugement Dernier et Le Sérénissime. Néanmoins, la présence de l’Arsenal Egéen faisait qu’au besoin les navires presque finalisés pouvaient être mobilisé pour défendre Agnôstos. Après tout, Akropolis était la capitale économique et politique de la Ligue, mais la « capitale » militaire, le quartier-général, était davantage Agnôstos malgré tout.

En tout cas, cette structure des chantiers navals ressemblant presque à l’extérieures des temples était typique de la civilisation hellènes. Des colonnes déterminaient les différents espaces de chantiers et des rondins de bois étaient disposés le long du sol, ainsi que des fentes pour accueillir les quilles si les rondins ne fonctionnaient pas, solution plus moderne. Les charpentiers n’hésitaient pas à tirer les embarcations à la force de leurs bras via des cordes afin d’amener les vaisseaux jusqu’à l’eau où la pente pavé du chantier naval suffise par gravité pour achever de conduite les bateaux droit dans l’eau. Dans l’un des 100 espaces dédiés pour former un chantier naval composant le cercle extérieure de l’Arsenal, dans le quart qui constituait le Dock 1, Phéréclos s’arrêta devant une trière de guerre dont la construction s’apprêtait à être achevé d’ici une vingtaine de minutes. Il manquait encore le mat, mais celui-ci était en vérité « dépliable » : coucher sur le pont, on pouvait le dresser pour utiliser le vent plutôt que les rangées de rameurs. De nombreux artisans se trouvaient autour, surtout des jeunes. La figure de proue, sculptée par Maria Zheng, représentait une tête de taureau et n’avait pas encore été placé à l’avant.

-Voilà, nous y sommes.

La remarque fit grogner Phéréclos, mais étonnamment il ne fit pas de remarques acerbes pour autant. C’est qu’il appréciait en effet Kosenjobi, mais au boulot le boulot passait avant tout et l’architecte naval aimait se plonger entièrement dans son élément, ne pas être dérangé.

-Wawawa. Eh bien, Phéréclos était un polémarque de la Ligue autrefois et nous avons combattus ensemble à plusieurs reprises, en équipe. On a également vécu certaines aventures ensembles et je lui ai même sauvé la vie une fois grâce à mon Tranche-Foudre.

-Oui, bah c’est bon… On est pas obligé d’en parler aux nouveaux, répliqua l’homme couvert de cicatrices qui était un peu gênée de l’anecdote que certains de ses subalternes chériraient assez fortement s’ils le savaient et ce afin de pouvoir le taquiner et donc remettre en question son autorité sur les chantiers navals sans le vouloir. On est trois vieux de la vieille qui se connaissent depuis l’époque de Milon, c’est comme ça.

L’autre était Ogygès « Le Père des Geysers », un triton qui s’était installé à Agnôstos. C’était également un ancien polémarque, mais ses capacités déclinant avec l’âge, il avait finalement était vaincu par Penthésilée qui avait récupérée le titre devenu « triérarque » depuis Yashin. Ogygès continuait malgré tout à se battre en tant qu’épibate, là où Phéréclos avait renoncé à l’art du combat pour concentrer toute sa vie à l’architecture navale, ce qui l’avait conduit à créer les modèles de guerre mais aussi de commerce les plus importants de la Ligue Egéenne de Milon.

Le chantier-école impressionna visible l’Archer qui pouvait observer les dessous du célèbre Arsenal Egéen qui jadis avait fait les grandes heures du Nouveau Monde, fournissant les plus grandes puissances de leur temps en navires. En devenant le cœur de la puissance navale d’un Empire Pirate, Phéréclos prouverait que l’Arsenal Egéen n’avait rien perdu de sa superbe et pouvait rivaliser avec la fameuse Galley La. Le savoir faire ancestral hellène se mêlait ici aux idées de certains génies de la charpenterie. Le Directeur Naval Egéen se lança d’ailleurs dans une explication d’un sujet dont il discutait parfois avec sa patronne, Phoenicia étant la patronne de l’entreprise et la propriétaire des lieux.

-Les arsenaux navals ont toujours eu un impact urbain significatif dans le cadre de l’anthropisation des côtes et des ports naturels. Dans de nombreux cas, leur présence a fortement limité la croissance urbaine et le développement des ports commerciaux, agissant comme un répulsif, néanmoins à l’inverse la construction d’un arsenal a en certains lieux favorisé un développement urbain rapide, faisant croître la ville en symbiose avec les installations militaires. Agnôstos en est le plus parfait exemple puisqu’elle fut fondée pour créer l’Arsenal Egéen et c’est son attractivité tant en terme d’économie que de professionnalisation artisanale qui a pousser des étrangers à la civilisation hellène à s’installer ici. Dans tout les cas, la présence d’un arsenal, chantiers navals à vocation avant tout militaire, influe d’une manière ou d’une autre sur la structuration urbaine de la ville.

Il enchaîna ensuite sur la production en elle-même.

-Aucun chantier n’est spécifiquement dédié à un type de production, tel des trières, des galéasses, des frégates, des brigantins et ainsi de suite. La plupart des chantiers peuvent accueillir la majorité de ces structures. Il y a un chantier spécifique sur l’îlot centrale, que je gère personnellement, dans le cas des navires de trop grande dimension. Cela vaut aussi pour la rénovation et la remise en état de navires. Mais passons au fonctionnement des chantiers navals. Les navires conservent leur emplacement physique déterminer par les différentes séquences d’assemblages. L’objet coque de la galère ne se déplace pas de chantier en chantier ou d’atelier en atelier. Les travailleurs ne sont pas affectés à un poste de production fixe, ils vont et viennent autour de l’axe de la quille pour les travaux de mesure, de sciage, de façonnage, de montage et d’ajustement ; ils doivent se déplacer pour aller chercher des éléments à assembler qui ne sont ni fournis en continu ni standardisés dans leur totalité. La même immobilité de la coque sur son chantier permet aux charpentiers de fixer l’appareil de propulsion à rames, le château de poupe, les équipements de la proue, et ainsi de suite.

Kosenjobi n’avait jamais assisté à des explications de son camarade sur son métier et, encore davantage qu’à l’accoutumé, on voyait à quel point cela le passionnait.

-Si pendant longtemps l’organisation du processus d’armement maritime et militaire des vaisseaux, notamment les trières et ses évolutions comme la galéasse, était tout à fait différent. La chaîne d’armement était intégré à la chaîne de production, mais nous avons créer un axe de circulations des mobiles navals permettant d’avancer d’étape en étape de la chaîne d’armement pour recevoir les éléments dans l’ordre déterminé et ainsi concentrer les équipements militaires nécessaires à des points stratégiques. Cette optimisation du trajet des coques est devenue possible grâce à des aménagements hydrauliques et la modification de certaines infrastructures de l’Arsenal Egéen, bien que la forme circulaire assurait dès le départ l’absence de besoin de virer de bord sur le trajet. La systématisation du processus améliore également la cadence.

Kosenjobi observait Yashin pendant que Phéréclos débitait ses explications, bien loin de la vulgarisation. S’il comprenait plusieurs parties de celle-ci, il devait avouer que certains aspects lui échappaient complètement et que si certains mots de vocabulaires mis bout à bout formaient un ensemble compréhensible en soit, leur enchaînement à l’oral rendait le suivit trop poussé pour intégrer les informations même au compte-goutte. La densité des propos était trop importante. La samouraï restait silencieux et observa le fait que Yashin semblait encore plus paumé que lui. Sa volonté marqué de ponctué d’approbation tacite les propos de leur interlocuteur était bien trop présente vu le degré de professionnalisme du monsieur en face. À moins qu’il soit lui-même un charpentier naval expert, il devait lui aussi faire semblant de suivre les explications. D’ailleurs, l’un des Homies du maudit finit par trahir la supercherie. Phéréclos continuait ses explications, mentionnant comment traité l’étambot et préparer l’assemblage des mâts et des vergues, l’ajustement des sabords ou encore l’agencement des différents espaces des ponts inférieures afin d’y répartir des salles comme la Sainte-Barbe de manière optimale. Il semblait trop emporté par son propre élan explicatif pour remarquer ce qui c’était dit, néanmoins le hurlement de l’Archer le coupa et rattrapa son attention. Le vieil homme au corps couvert de cicatrices cligna plusieurs fois des yeux en observant la scène qui se jouait.

-Quel secret ? s’interrogeait-il.

L’Hétaire de Rébéna de son côté se retint de pouffer de rire face à la situation, face à son ami qui n’était pas capable de faire attention à ce qu’il se passait autour de lui quand il entrait dans les détails de sa profession et face à la « nouvelle » recrue prometteuse de la Ligue qui s’énervait contre ses propres créations, son caractère semblant néanmoins ne pas le rendre prompt à la réflexion savante.

-Et dire que Phoenicia et toi pouvaient parlé de ça ensemble pendant des heures, nota le Minamoto en regardant le Directeur Naval Egéen afin de détourner son attention. Ils peuvent passer un long moment à l’escargophone à débattre et échanger sur le sujet, expliqua-t-il par-dessus à l’attention du jeune triérarque.

Phéréclos siffla entre ses dents, comprenant que ce qui constituait le cœur de sa vie n’intéressait clairement pas les deux énergumènes présent. Les ignares ne savaient donc pas comprendre toute la beauté et la profondeur de son art.

-Très bien. Si vous ne voulez pas d’explications, libre à toi d’essayer le gamin. Vas-y, monte dessus et anime des trucs. La figure de proue notamment. Je pense qu’il faudra que ce soit une élément continu, intégré pleinement dans la structure des œuvres mortes, c’est-à-dire de la partie de la coque à l’extérieur de l’eau, afin que le fait de lui donner vie permettent d’animer une grande partie du navire en une seule fois. Cela demanderait beaucoup de travail et l’usages d’arbres très spécifiques, encore plus que ce que l’on doit faire actuellement. Enfin bref, on verra si ma conjecture est vrai avec les résultats de ce test. Après tout, vous connaissez mieux votre malédiction que moi et je ne sais pas quel est la limite à l’animation d’un objet s’il est composé de différentes parties, si c’est une question de séparation ou de la différence de matières.

Ainsi, d’un geste, Phéréclos proposa au triérarque de monter à bord et de s’essayer à utiliser son pouvoir sur le vaisseau.

Kosenjobi et Phéréclos admiraient la malédiction du nouveau triérarque à l’œuvre. C’était assez impressionnant de voir que sous ses doigts la matière prenait véritablement vie et se tortillait comme un être à part entière. Ayant reçu un rapport complet sur le pouvoir, l’architecte naval était avant tout concentré sur les comportements des objets animés, leurs interactions et leurs mouvements pour voir ce qui était possible et intéressant à combiner pour optimiser l’idée de Vivenef que Phoenicia lui avait suggéré. De son côté, le vieux samouraï se caressait le bous au menton en réfléchissant à toutes les perspectives qu’un tel pouvoir offrait lors des combats. Cela n’offrait en soit pas une force brute mais permettait milles ruses ainsi que des sollicitations d’interventions multiples. Faire crouler l’ennemi sous le nombre était envisageable. Les cordages, les voiles, le gouvernail… Les objets prenaient conscience, devenaient capable de se mouvoir légèrement par leur propre volonté. Il semblait que les objets animés qui accompagnaient Yashin, que ce dernier portait sur lui, disposait d’une plus grande liberté d’actions, surtout dans la mesure où l’épée était en mesure de changer de formes selon les combats s’étant déroulé dans l’Amphithéatrion et le flocon de neige volant ne devait pas être né d’une matière solide. Ces deux là en particuliers semblaient donc être des créations différentes de toutes les autres. Quel en était la raison ? Le Minamoto s’interrogeait dessus, ne connaissant pas spécialement le fonctionnement de la malédiction de l’Archer. C’est en se tournant vers son acolyte pour lui demander son opinion que l’Hétaire de Rébéna remarqua enfin que Phéréclos avait sortit un carnet sur lequel se trouvait un dessin d’une coupe de profil de la trière en face d’eux. Le Directeur Naval Egéen couvrait sa feuille de notes diverses.

-Nous testerons ses limites, notamment en terme de taille, directement sur le Manannán mac Lir, proposa-t-il.

-Est-ce bien judicieux d’utiliser le navire chargé du commandement de la Défense d’Agnôtos pour effectuer des essais ? s’interrogea judicieusement Kosenjobi.

-C’est moi qui l’ai construit, tu crois que je ne suis pas meilleur juge pour savoir s’il n’est pas conforme pour les tests ?

-Mais ça n’a rien à voir avec ce que je viens de…

-Tu crois vraiment qu’on va nous attaquer dans l’heure à venir ? Je sais qu’on est prudent, mais je vois pas pourquoi maintenant. Surtout, si Hadès venait à nous attaquait, dans la configuration actuelle il se concentrerait sur Akropolis, étant donné que la Ligue n’est pas territorialement encore trop étendu il n’a pas besoin de cibler le cœur militaire en premier.

-Certes, conclut Kosenjobi en rapportant son attention à Yashin qui continuait à s’amuser à sa façon sous le regard des charpentiers qui discutaient entre eux de ce qu’il se passait.

Pour certains c’était même une fierté de voir la vie animer les cordes et voiles que certains d’entre eux avaient fabriqués, ainsi que le bois qu’ils avaient taillés. C’était une sensation assez étrange de se dire que l’on était à l’origine de ces choses. Deux charpentiers se mirent même à faire des paris sur combien de temps ces choses survivraient.

-Si tu as d’autres idées, vas-y ne te prive pas ! incitait Phéréclos, la tête plongé dans son carnet. On est là pour ça !

Si jamais Yashin lui indiquait qu'il avait finit, Phéréclos lui ferait signe de le suivre et le trio se dirigerait vers le bassin se trouvant dans la continuité de l'Arsenal Egéen et qui servait de rade aux vaisseaux de l'Armada Egéenne ainsi qu'aux commandes tout juste réalisés.

-Soit. Allons voir ce bon vieux Manannán mac Lir.

Ce nom pouvait paraître dissonant avec les appellations de la Ligue, mais c’était oublié que Rébéna était personnellement plus plongé dans la culture d’Aub Beothu que dans celle de la civilisation hellène. Néanmoins, la culture des tribus celtiques insulaires ne se prêtait pas un impérialisme culturel ou même militaire, là où la civilisation hellène avait un long passé de domination naval avec son architecture navale typique. Après tout, c’est eux qui avait inventé la galère, les navires fonctionnants aux rameurs, durant les temps anciens. L’époque où Akropolis disposait de son propre empire maritime avait abouti à la création d’hypergalères, des vaisseaux aux dimensions ahurissantes rivalisant même avec des drakkars d’Elbaf et capables de transporter des milliers d’hommes… Nécessitant même plus d’un millier de rameurs, jusqu’à quatre mille dans les cas les plus incroyables. L’impérialisme et la réduction en esclavage des populations ayant résisté avait permis de nourrir cette course à l’armement des galères antiques en offrant toujours plus de main d’œuvre dans les tréfonds des coques gargantuesques. En tout cas, Manannán mac Lir était une divinité marine des habitants d’Aub Beothu et Kosenjobi n’avait pas cherché à en savoir beaucoup plus.

C’est ainsi que se dévoila l’imposant vaisseau de ligne de premier rang rivalisant en nombre de canons avec certain des monstres de l’Armada Egéenne, même si le Jugement Dernier demeurait au sommet de la chaîne alimentaire. En effet, Agnôstos étant le cœur militaire de la Ligue, ses défenses navales devaient être assuré avec des navires puissantes. L’Olympe des Mers dirigeant la Défense d’Akropolis était un monstre plus imposant, étant aux navires de ligne ce que les hypergalères étaient aux trières d’un certain point de vue, mais son poids colossale en faisant un outil de destruction moins malléable, moins polyvalent. En tout cas, les gravures et sculptures étaient nombreuses à décoré le bois brut qui, contrairement à la majorité des navires, n’était pas peint par une couleur par-dessus son vernis initiale. Les troupes s’afféraient à ravitailler la Sainte-Barbe en poudre. Dans l’absolu, ce navire n’était pas destiné à prendre la mer, bien que quelques escapades aux alentours étaient nécessaire pour éviter de laisser cordages et toiles se délabraient, puisqu’il devait être déployé uniquement en cas d’assaut sur Agnôstos..

Kosenjobi et Phéréclos observèrent à nouveau Yashin à l’œuvre et l’architecte naval continua à prendre de nombreuses notes et à y ajouter ses idées. Le Minamoto de son côté s’extasiait devant la figure de proue, ce cavalier qui domptait un cheval tricéphale et qui se mettait à bouger pour communiquer avec son créateur. Le capitaine pouvait avoir un vrai dialogue avec son navire grâce à cette malédiction. Heureusement que Médolie n’était pas présente où elle aurait demandé à l’Archer de le faire immédiatement sur son propre vaisseau… Même si le Tales Waker, la nef en question, avait un squelette doré comme figure de proue, chose étrange pour un équipage si joyeux d’ailleurs.

-Bien, j’ai les observations qu’il me faut. Je vous recontacterai lorsque j’aurais terminer de conceptualiser ce qu’il nous faut.

Sans attendre de réponse, le Directeur Naval Egéen prit la poudre d’escampette pour retourner à son travail et à ses réflexions. Le Minamoto s’adressa alors au jeune homme.

-On dirait bien que l’on a finit ici. Vous êtes libre de retourner à vos affaires, à moins que vous ne souhaitiez que l’on fasse quelque chose ensemble ?

Cela arrivait régulièrement que des triérarques fasse des activités en commun, généralement ceux avec des caractères proches. Restait à voir si cela intéressait l’Archer ou si celui-ci déclinerait pour mettre fin à leur rencontre.

-Amusez-vous bien alors.

Le samouraï observa le jeune homme s’éloigner, observant la fougue de la jeunesse s’élancer vers un avenir dont il ne savait pas grand-chose. Les flux du destin restaient muets quand bien on cherchait à les influencer en préparant cet avenir de ses propres mains. Mais le moment n’était pas aux réflexions philosophiques. Celui qui était considéré comme le plus sage des triérarques hocha la tête dans le vide. Très bien, il n’aurait pas à continuer de gérer un jeune homme et pourrait se concentrer sur ses propres affaires. Sa femme lui avait demandait quelques jours de calme pour qu’elle continue l’entrainement de leur fils à la voie du sabre. Kosenjobi était trop occupé lui-même pour mener cela de bout en bout, bien qu’il venait y participer régulièrement. Mais cette fois-ci, il avait envie d’agir pour lui-même. Quittant l’Arsenal Egéen, le vieil homme salua les charpentiers amicalement puis traversa le port jusqu’à ce retrouver de l’autre côté de l’île. En effet, il quittait Agnôstos en longeant la côte. Rare étaient les voyageurs à s’aventurer au-delà de l’ensemble urbain, les aventuriers préférant explorer les autres îles de l’archipel que celle-ci, néanmoins certains âmes comme le Minamoto rejoignait les paysans des exploitations des nauclères. Atteignant finalement un bout de plage, il s’installa face à la mer, les pieds dans le sable. Son armure brillait sous la lumière du soleil. Observant les vagues déferler sur l’immensité jaune, le bretteur se mit en position. Sa main se referma sur le manche de son meitou. Il tempéra se respiration. Ses paupières se refermèrent légèrement à mesure qu’il se concentrait. Puis, observant l’une des vagues, il se décida. D’un geste brusque, il dégaina avec tant de rapidité que l’on peinait à suivre son mouvement, à l’instar des utilisateurs du soru. L’électricité jaillis du métal pour former un arc électrique qui vint ceindre en deux la masse d’eau qui s’était élevé.

-Fendre les vagues les unes après les autres, il n’y a rien de mieux pour entraîner son endurance.

Se remettant en place, le spécialiste du iaido s’attardait ainsi à dégainer et rengainer aussi vite possible et à une cadence assez incroyable, alternant les lames d’air et celle électrique pour découper la mer qui tentait d’assaillir la plage. Le rythme était intense, mais c’était bien le but de l’exercice qui lui avait été inspiré par l’un des entrainements de Rébéna. La navarque était l’experte en exercices physiques hors normes et Kosenjobi avait conscience qu’au niveau qu’il avait atteint, les exercices martiaux standards comme les katas n’étaient plus aussi efficace pour progresser à nouveau. Il avait dû innover lui aussi et se retrouvait désormais à tenter de défier les éléments comme sa cheffe. Un sourire amusé vint s’inscrire sur ses lèvres alors que son souffle devenait progressivement lourd. Ses muscles le tiraillait, mais il devait continuer. Dix minutes. Il allait commencé par tenir dix minutes. La prochaine fois, ce serait quinze, puis vingt et ainsi de suite. Il n’égalerait pas les heures interminables de la rousse, mais il adapterait à sa façon cette discipline de fer.