L’île sur laquelle Shimura était arrivée n’avait de visu rien de particulier. Une longue plaine semblait offrir aux voyageurs des terrains propices à la découverte, tandis que le port était composé d’une douzaine de maisons en bois solide et en paille, où habitaient principalement des vieillards et leurs petits-enfants. Il était évident que ce lieu n’avait rien d’exubérant, et on y retrouvait principalement une population qui se voulait calme, loin des histoires de ce monde. S’il souhaitait parler aux habitants, de l’ordre d’une cinquantaine malgré tout, il pourrait apprendre que les lieux étaient connus pour être la retraite de nombreuses personnalités civiles de ce monde et, à l’occasion, de vieux pirates à bout de souffle qu’on accueillait en faisant fi de leur passé.

Les Constantinistes n’étaient pas encore venus promulguer leur foi en ces lieux, sûrement à cause de la population très faible et vieillissante. On savait que changer l’avis d’une personne de cet âge était loin d’être chose aisée. Pourtant, l’accueil qu’on ferait à Shimura serait jovial. Il avait été mis sur la piste d’un primé, un vieillard bien connu de la population. Sigürd Bonovitch avait longtemps œuvré en tant que pirate : il avait été contre le Gouvernement Mondial à de nombreuses reprises et s’était fait l’égérie de la Liberté en son temps, du moins l’eut il cru. Aujourd’hui, c’était un vieil homme oublié de tous, qui mourait tranquillement sur cette île nommée Alexandra.

Elle était connue chez les sabreurs pour une raison assez simple : on y trouvait l’Hypogée d’Alexandra, un lieu de recueillement pour les pèlerins qui venaient s’offrir une prière auprès des âmes de quelques grands sabreurs des Blues enterrés ici. Les habitants ne s’y rendaient pas particulièrement, mais Shimura pourrait leur poser des questions dessus s’il le désirait.

On lui indiquerait volontiers l’emplacement de la maison du Bonovitch, mais il ne se trouvait pas chez lui. Il aurait alors plusieurs options : aller demander à l’auberge, où il pourrait prendre une chambre, s’ils avaient des nouvelles de sa cible, demander aux voyageurs qui semblaient tourmentés par quelque chose s’ils étaient informés de la localisation du vieil homme… Ou rencontrer l’aïeule du village, une femme de 130 ans qui semblait encore avoir du grain à moudre et la langue bien pendue, si on en croyait les nombreuses histoires qu’elle contait à ses petits-enfants non loin du port.

Quel que soit son choix, son aventure sur les traces du Yubashiri commençait ici… Sur l’île d’Alexandra.

SIGÜRD BONOVITCH

3.500.000

Les auberges étaient des lieux de fréquentations assez réputés dans le monde des chasseurs de prime. On y trouvait des informations fortuites, des voyageurs angoissés qui avaient la parole leste et des gérants dont l’oreille était tendue un peu partout. C’était donc un lieu de prédilection quand on allait à la pêche aux informations, et il fallait s’avouer que Shimura avait fait un choix judicieux en se rendant là-bas. Les voyageurs se succédaient sans donner d’informations intéressantes au chasseur, mais la gérante, une femme d’une certaine ampleur dont le sourire naïf n’avait d’égal que son débit de parole inquiétant. Tandis qu’elle essuyait un verre avec un torchon usé, elle raconta à son interlocuteur un peu tout ce qu’il se passait sur l’île :

- Il y a une dizaine de pèlerins coincés à l’auberge en ce moment ! Les pauvres, ils étaient venus voir l’Hypogée mais elle est infestée de créatures en tout genre : des chauves-souris, des rats mutants, un peu de tout ! Il y aurait même un monstre incroyablement puissant au deuxième sous-sol.

Elle sortit une carte de sous sa taverne et souffla dessus, laissant échapper un peu de poussière.

Spoiler:

Il s’agissait d’une carte de l’Hypogée, de toute évidente assez ancienne. Il n’y avait dessus que le rez-de-chaussée de décris, mais elle pouvait jurer qu’il y avait au moins deux sous-sols dedans ! Elle voulait bien sûr uniquement faire la conversation, et quand Shimura aurait jeté un coup d’œil attentif à la carte, elle la rangerait. Ce n’était pas le genre de précieux document qu’on donnait à un étranger… Enfin, sauf si celui-ci voulait bien donner quelques berrys.

Enfin, elle arrêta de divaguer et se gratta la tête lorsqu’elle réalisa qu’elle était allée à côté des interrogations du jeune homme. Sigürd avait été un habitué de l’auberge pendant une dizaine de semaine avant d’emménager ici. Elle ne crachait jamais sur ces clients, mais elle devait avouer que cet homme était un fieffé dragueur. Pourtant, lors de ses soirées alcoolisées, il parlait et s’ouvrait un peu plus, racontant l’histoire de sa tendre et chère, Lindy. Elle était morte l’épée à la main, une épée maudite des hommes selon la légende.

Il n’était pas venu depuis une semaine, de toute évidence il avait décidé de s’isoler. En général, quand il voulait s’isoler, il allait dans l’Hypogée, là où sa tendre et chère était enterrée. Comme elle l’avait dit plus tôt, les lieux étaient infestés de monstres, mais ça ne coûtait rien d’y aller… Sinon un peu de temps. Elle lorgna sur William et Shimura, et d’un œil perceptif dit :

- Je pense qu’il vaudrait mieux que ton ami reste ici, il n’a pas l’air suffisamment armé pour combattre les créatures de l’Hypogée. Enfin, à vos risques et périls, soupira-t-elle en essuyant toujours le même verre qui semblait à présent plus sale qu’au départ, et qu’elle rangea tout de même distraitement dans la vaisselle propre.

La direction suivante serait sûrement l’Hypogée pour Shimura, et peut-être son compagnon s’il choisissait d’ignorer le conseil de l’aubergiste. Elle lui indiquerait dans tous les cas le chemin du caveau : il fallait traverser la plaine vers le Nord-Est, là-bas il apercevrait une construction ancienne entièrement faite en pierre d’une solidité remarquable, et à l’épreuve du temps. Il pouvait aussi continuer à glaner des informations pour éviter un trajet inutile s’il se retrouvait devant, qui sait, une porte fermée ou une autre mésaventure qu’il aurait pu prévenir.

L’hypogée était loin d’être un cimetière ordinaire : c’était un lieu qu’on pouvait qualifier de véritable labyrinthe, un tombeau dans lequel des dizaines de bretteurs avaient été enterrés en général après leur inhumation officielle sur leurs îles natales. Pour certains cependant, cela avait été le seul lieu de repos qu’ils avaient jamais connus. C’était le cas d’Alexandra, la toute première bretteuse morte sur cette île. On racontait de sources plus ou moins incertaines que cette femme était une des prétendantes au titre de Sword Master à son époque, et qu’être enterré à ses côtés était l’immense privilège de se trouver proche de l’excellence.

Qu’importe les légendes, car en réalité elles avaient peu d’impact sur ce que pourrait ou ne pourrait pas faire Shimura lors de sa mission.


Salem, chasseur de prime
Alors qu’il combattait la chauve-souris, il ne pourrait que remarquer une présence qui, jusqu’alors, s’était faite discrète. C’était un Nain au poil grisonnant. Il portait des lunettes d’aviateur sur le crâne, et semblait observer le bretteur depuis quelques instants déjà. Son sourire redoubla tandis qu’il s’approchait du jeune homme, tentant de toute évidence de lui faire bonne impression.

- Toi aussi, t’es v’nu pour le primé, Sigurd, hein ? J’ai du flair, je reconnais un chasseur de prime quand j’en vois un ! J’en suis un moi aussi. Il est entré y’a deux jours dans l’hypogée, et il a fermé la porte derrière lui… Ce lieu est infesté de monstres, franchement, si tu veux, on peut aller chercher le gars et partager la prime… Surtout que je sais comment entrer, maintenant, ahah.

Après deux jours de recherches, il avait en effet trouvé une manière d’accéder au tombeau, qui, pour une partie, semblait se trouver au niveau de la mer… Et pour une autre s’enfoncer dans les sous-sols de l’île. C’était pourtant la première piste d'exploration, le rez-de-chaussée, qu’il était parvenu à privilégier. Autour de l’hypogée se trouvait aussi, bien moins fréquenté, le cimetière de l’île. On y trouvait quelques centaines de tombes sans grand intérêt, qui avaient passé les années.

Si Shimura acceptait les conditions du Nain, ce dernier pourrait l’inviter à le suivre, et lui dévoilerait le moyen de pénétrer dans l’Hypogée… Et s’il refusait, il pourrait se faire envoyer paitre ! Après tout, il avait autre chose à foutre que de s’occuper d’une personne qui refusait son aide. Et pourtant, s’il la demandait, c’est qu’il doutait de pouvoir réussir à relever les dangers de cet endroit seul. Qu’allait donc faire Shimura ? C’était bien là un dilemme qui s’offrait à lui : partager la récompense mais se protéger du danger, ou tenter de trouver un moyen d’accéder seul au lieu où se trouvait, de toute évidence, le primé qu’il recherchait ?

L’Hypogée n’était pas un lieu sûr à explorer : la structure était branlante, sous certains aspects elle menaçait même de s’écrouler à tout moment. C’était cependant dans le métier des chasseurs de primes de prendre des risques. L’endroit n’était pas entretenu, c’était clair, et c’est ainsi que Shimura n’eut aucun mal à entrevoir l’endroit où se trouvait la salle secrète. Il n’eut qu’à couper dans le tas, et par chance cela n’entraina pas d’autres éboulements. L’autre moyen, il pourrait l’entendre étant donné qu’il venait de casser le mécanisme, ça aurait été de regarder dans les deux tombes en face. Il y avait là deux leviers qui pouvaient être actionnés pour ouvrir la porte, cachés à la vue mais accessibles si on cherchait bien.

Ainsi, il ne fut pas venu pour rien. Il repartait avec cinq billes lumineuses, et il y en aurait eu six si le nain n’en avait pas fait tomber une… Satané nain ! Enfin, il donna le butin à son collègue, déjà dégoûté de l’utilisation de ces objets étranges. En réalité, ils devaient avoir une histoire, mais sous ces décombres il était presque impossible de la reconstituer. Sûrement rien d’intéressant.

Le second objet intéressant était une clef : elle ouvrait sûrement quelque chose. Heureusement que Shimura avait fouillé les décombres, à présent fallait-il encore trouver le coffre que cette clef ouvrait ! Ou la porte, qui sait ? Salem pourrait avoir plusieurs hypothèses, mais pas de réponses. D’ailleurs, plus il côtoyait ce jeune homme, plus il voyait les risques que cela impliquait de traîner avec lui pour l’instant. Enfin, tant qu’il y avait un primé à l’horizon, qu’importe ! C’était pour ça qu’ils étaient venus.

Les vieux bijoux valaient 15.000 Berrys, ils pourraient être échangés une fois qu’ils seraient sortis. En les mettant à proximité ou en les prenant ils pourraient les vendre plus tard. Enfin, ils pourraient avancer. Alors qu’ils parlaient peut-être pour commenter le côté lugubre des lieux, Salem s’arrêterait avant d’entrer dans la grande pièce principale.

Au milieu du hall se trouvait un grand monticule de pierres qui s’élevait jusqu’au plafond, montrant qu’il y avait eu un éboulement quelques années plus tôt. Il aurait sûrement été possible, en déblayant, de passer par là pour entrer : c’était si peu évident que Salem n’avait même pas penser à aller vérifier. Enfin, qu’importe, il regarderait sur la droite et la gauche. Sur les murs de gauche et de droite se trouvaient trois caveaux à chaque fois, et en face seulement deux : c’était de petites tombes où étaient enterrés des squelettes et leurs biens. Il y avait cependant la possibilité que des pièges aient été posés, ou que des monstres s’y soient faufilés… Il allait falloir être prudent, ou accepter le danger.

En somme, les petits caveaux étaient composés d’une porte sur laquelle se trouvaient les armoiries des familles si elles en avaient. Derrière chaque porte, parfois légèrement ouvertes ou fermées avec de larges cordes de fortune, se trouvait une tombe et une petite statue à l’effigie des combattants.

Rats Mutant
Encore une fois, le nain avait fait une belle bourde. Il avait déclenché la fureur de deux créatures qui faisaient parties du petit panel de monstres présents ici. Entre ces deux-là, et ce qui attendait les deux chasseurs de prime plus loin, ils allaient être servis. En tout cas, quand il remarqua sa bêtise, Salem prévint immédiatement son compagnon, faisant alors encore plus de bruits. Cela aurait pu avoir le don de rameuter tout ce qui se trouvait au rez-de-chaussée, mais par chance c’était sûrement les deux seules créatures que l’on pouvait trouver ici.

Ces rats mutants avaient deux particularités : leur dentition était extrêmement développée, on trouvait plusieurs rangées de dents, et leur queue était particulièrement musclée. Elle semblait être un muscle à part entière qu’elles pouvaient manipuler, comme un troisième bras. Lorsqu’elles firent voler des morceaux de pierre qui traînaient, le nain déglutit et recula légèrement, attrapant sa masse d’arme pour se défendre en cas de besoin.

Alors que le premier rat s’était lancé à l’assaut du petit groupe, Salem s’étant dirigé vers son acolyte, il utilisa sa queue pour sauter au-dessus d’eux et se positionner de sorte à les encercler. Immédiatement, le nain se mit dos à dos avec Shimura pour prendre celui qui tentait de les avoir en étau :

- Je m’occupe de couvrir tes arrières, mon gars !

La masse d’arme viendrait alors rencontrer les dents du rat qui couinerait en étant repoussé.

Le second animal ayant muté avait largement entamé sa progression vers l’épéiste à ce moment-là. Il avait enroulé dans sa queue un morceau de pierre qu’il jeta sur son ennemi, dans le but de l’assommer, et peut-être de faire distraction. Plus surprenant encore, il visait le visage, ce qui signifiait qu’il avait compris que pour se protéger, son ennemi devrait lever le bras, exposant le bras de son corps… Ce qu’il visait justement avec ses dents : il voulait mâchouiller le mollet de son adversaire, ou plutôt le déchiqueter pour qu’il ne puisse plus s’enfuir.

Le rat ne fit pas bon ménage avec le tranchant de la lame de Shimura. Sa mâchoire tomba en même temps que son crâne commençait à se vider de son sang. Un petit cri d’agonie signifia la fin de sa vie, tandis qu’un bruit sourd résonna derrière l’épéiste. Salem venait de briser le crâne de son adversaire, de toute évidence en plusieurs morceaux épars. La masse d’arme était à présent ornée de quelques gouttelettes de sang, mais il la nettoierait en revenant à l’auberge où il n’avait pas mis les pieds depuis trois jours.

Grognant, le nain regarda le bretteur et lui dit sur un ton blasé :

- On dirait que ces créatures ne font pas le poids, mais si on s’était laissé avoir par surprise en ouvrant ces portes, on aurait sûrement eu plus de mal à s’en défaire. On ferait bien de faire attention.

Suite à ce conseil, il se dirigea vers un des deux derniers caveaux, mais il n’y avait rien. Il ne fallait pas perdre trop de temps à tout fouiller malheureusement : ça prenait non seulement du temps, mais c’était aussi un risque de finir par perdre leur cible. L’objectif était toujours clair.

Shimura put donc continuer à explorer tranquillement l’endroit, et lorsqu’il observa le septième caveau, ce dernier dévoila un passage secret qui se situait pile poil dans la tombe craquelée. Le nain, dont la force était supérieure à celle de l’humain, n’eut aucun mal à bouger la pierre qui tomba dans un gros fracas sur le sol. Des escaliers droits menaient vers les sous-sols où de multiples dangers les attendaient sûrement…

- Fais attention, y’a peut-être des pièges, dit-il en allumant une torche et en s’enfonçant dans les escaliers, avant ou après son partenaire en fonction de ce que ce dernier aurait décidé.

Pique Lesssous, Pilleur de tombes
Le piège qui avait été actionné n’était clairement pas anodin, mais il n’était pas à proprement parler caché. En effet, Shimura pourrait aisément remarquer les dalles en y prêtant attention. Qui disait pièges, disait pourtant butins bien gardés, et ce qui pourrait avoir amener des pilleurs de tombe à tenter d’entrer par tous les moyens… Comme celui qui se trouvait à présent devant le duo. Il écarquilla les yeux d’ailleurs en voyant les chasseurs de prime entrer, et les prit directement pour des gardes. Salem voulut ouvrir la bouche, mais l’inconnu ne laissa le temps à personne de parler. Il sortit en vitesse une dague, lâcha le sac qu’il était en train de remplir, et s’élança jusqu’aux deux hommes sans faire trop de bruit.

Cette fois-ci, Salem se retiendrait de crier, cependant sa masse ne se déplaçait pas assez vite : c’était à Shimura de bloquer le coup. S’il le faisait, le nain aurait le champ libre pour utiliser sa masse sur le pied de leur ennemi qui, en l’état, reculerait juste pour éviter de se faire fracturer des os.

Si Shimura parait donc, il pourrait rapidement évaluer que son adversaire était loin d’être en possession de toute sa tête. Pourtant, il avait réussi à venir par ici, et à la vue des gouttes d’eau qui perlaient de son corps, il était à n’y pas douter passé par la mer…

En effet, une autre entrée se faisait par la mer. Cette information pouvait intriguer les deux chasseurs de primes, mais de toute évidence il y avait plus d’un moyen de faire son entrée ici… Enfin, qu’importe, puisque l’homme s’apprêtait déjà à relancer l’assaut. Shimura allait-il crier pour l’arrêter ? Accepter le combat ? Dans toutes les cas, l’endroit où il était allé se trouvait être un cul de sac, malgré quelques caveaux eux aussi en partie détruits…

Pique Lesssous, Pilleur de tombes
L’écume à la bouche, le voleur ne semblait pas pouvoir être raisonné. Avait-il contracté ce que les rats avaient eu, en passant par l’eau des catacombes ? L’hypothèse pouvait être posée, en tout cas il avait l’air d’avoir une forme de rage. Lorsqu’il attaqua, il ne pensa pas à la défense, même s’il esquivait par instinct. Lorsqu’il fut à hauteur de son adversaire, il ne leur répondit toujours pas, cependant la douleur sembla commencer à lui redonner un semblant de raison, touché par l’un des assauts de ses adversaires.

Il se tint l’épaule et fronça les sourcils, mettant une main sur la tête.

- Argh… Ma tête… Mes aïeux…

Il avait en effet l’air d’être mal en point, pourtant il se relèverait en tenant son couteau devant lui. Sa vision était trouble, et il se laissa à nouveau submerger par la rage lancinante qui l’habitait. Soulevant son manteau, il prit une dague qui se trouvait derrière lui et la lança vers Shimura, tout en s’approchant à toute vitesse de ce dernier. Cette fois-ci le nain fut plus réactif, et tandis que Shimura devrait arrêter l’assaut qui lui fonçait vers le visage, Salem n’hésiterait pas à lancer une pierre dans les airs, et à utiliser sa masse comme une batte de baseball pour l’envoyer vers l’ennemi.

Il le verrait arriver au dernier moment, et devrait faire un geste ample de la main pour cisailler l’objet, créant une étonnante ouverture dans laquelle pourrait s’engouffrer le sabreur tandis que l’écume bouillonnait à nouveau sur les lèvres de ce truand.

Lorsque le coup retentit, Salem haussa les épaules avec une désinvolture qu’il ne cherchait même à cacher. Il aurait aimé pouvoir se boucher les oreilles avant, étant donné la résonnance des lieux, et se dit qu’un simple coup de sabre aurait tout aussi bien fait l’affaire. Qu’importe, l’homme tomba au sol, mort. Le pilleur de tombe fut fouillé par le nain qui s’intéressa à ses possessions. Il prit la dague, une sorte de coutelas qui semblait avoir été usé par le temps. En plus de cela, il cachait dans son dos une carabine standard, chargée, et quelques cartouches, ainsi que…

- Oh, il a une carte au trésor le trouffion !

Il la garda dans sa poche en attendant qu’ils finissent la mission. Elle avait été préservée de l’eau en grande partie grâce à une sorte de pochette en boyaux séchés de porc, ou en peau de chien, il ne savait pas trop. L’odeur de poudre s’évapora enfin, tandis que Shimura avait commencé à visiter l’endroit.

Les caveaux autour d’eux étaient au nombre de sept, trois de moins qu’en haut. Ils étaient de toute évidence loin d’être aussi remplis. Salem n’eut pas le temps d’explorer puisqu’il s’était concentré sur le cadavre, mais dans le premier caveau que Shimura explora, il trouva des bijoux dont la valeur totale était de 45.000 Berrys. Le second abritait un rat qui ne put sortir, couinant derrière la porte tandis que Shimura avait donné un gros coup de pied dedans. Heureusement, elle était encore debout. Quel type de précautions devrait-il prendre pour explorer les suivantes ?

En tout cas, il allait sûrement pouvoir continuer son exploration et demander à Salem d’en faire de même. Leur ennemi mort, ils n’auraient plus qu’à avancer… Pour le meilleur, ou pour le pire.

Shimura avait en effet trouvé une lame d’une grande qualité. Ayant une résistance proche du titane, elle était à la fois flexible et solide : une rapière comme on en faisait peu de nos jours. Pourtant, il ne s’agissait pas d’une lame de qualité, et elle aurait du mal à égaler ne serait-ce qu’une lame des 50. En observant un peu les armoiries du caveau, il pourrait aussi reconnaître celles de la famille « Taka ». Ce nom était répandu, mais ces armoiries en particuliers permettaient d’identifier la filiation à Sayouri Taka, une révolutionnaire du mouvement extrémiste qui avait péri dans les sombres événements de Marineford. Sa chute était aujourd’hui avérée, et sa lame, D’Artagnan, avait disparu de la circulation, potentiellement récupérée par les marines qu’elle affrontait à l’époque pour être redistribuée dans les forces nouvelles.

Bien sûr, ce tombeau n'était en réalité que celui d'un membre éloigné de la jeune femme, et le hasard avait juste voulu ramener le souvenir de "La Règle" d'outre-tombe.


Horde de chauves-souris sanguinaires
Alors que le rat qu’avait enfermé Shimura continuait de couiner, le coup de feu avait attiré quelque chose de bien plus inquiétant… En effet, une horde de chauve-souris se fit entendre dans le couloir, juste avant de pénétrer dans les lieux. D’habitude de nature assez inoffensives, celles-ci avaient les yeux injectés de sang. Des chauves-souris sanguinaires, à la recherche de leur prochain repas qu’elles venaient de trouver de toute évidence : alors que Shimura évitait le gaz soporifique, les petits êtres volants s’élancèrent sur lui, sans faire attention au nain.

Elles ne se firent pas prier pour envoyer vers Shimura des ultrasons qui viendraient rapidement le perturber. Elles faisaient avec lui comme avec toutes leurs proies : elles le déstabiliseraient en lui envoyant des ultrasons pour ensuite le mordre un peu partout sur le corps, le vidant de son sang.

Après avoir réussi à détruire la faible horde de chauves-souris, Shimura et Salem pourraient fouiller les caveaux restant et trouver pour 43.000 B. de ressources. Ils pourraient alors continuer à avancer dans l’Hypogée en marchant tranquillement. D’un air interloqué, le nain dirait à son allié :

- Je pense que les dalles ont pas toutes la même fonction…

Il comparerait le nombre de dalles au nombre d’endroits d’où pouvaient sortir les flèches : il y en avait une de plus. Ça voulait dire qu’une des dalles n’avait pas pour vocation de tuer les personnes qui s’en approchaient ? Peut-être était-ce un piège mortel, conçu pour faire tomber la personne qui marchait sur la dalle dedans ? Ou est-ce la dalle avait une toute autre fonction ? Salem ne s’y attarda pas : il se fichait bien de la réponse, tant qu’il pouvait marcher.

En attirant les chauves-souris à eux, les deux hommes avaient pu s’éviter le malheur de les retrouver plus loin. Ils entreraient bientôt dans une nouvelle salle, suivie d’un couloir au bout duquel se trouvait un escalier qui descendait encore. Plus loin, sur la droite, se trouvait une porte durement scellée. La porte n’avait cependant pas de serrure, et ce qui s’y trouvait derrière n’était pas accessible…

Qu’allaient-ils pouvoir y faire ?

L’exploration de Shimura lui permit de mettre la main sur une coquette somme. Il traversa les pièces piégées et obtint les trésors dont il n’aurait pu s’imaginer une réelle utilité au début de l’histoire. Se laissant donc aller jusqu’au prochain sous-sol, il descendit les marches. Salem tenait une torche mais les lieux étaient déjà éclairés par des torches qui avaient été allumées récemment. Il ne ferait pas un bruit, voyant des toiles d’araignées qui s’accumulaient de plus en plus au fil de leur descente, jusqu’à provoquer de véritables barrages sur leurs chemins que l’épéiste devrait couper pour pouvoir passer.

Enfin, ils arriveraient en bas. Le couloir était court, mais il permettrait d’accéder à une salle ronde. Au milieu de cette dernière, sa multitude d’yeux fermés, se trouvait une araignée d’une taille anormalement grande.


Araignée géante
L’animal géant dormait paisiblement, gardien des deux derniers trésors du donjon qui se situait dans les pièces dans son dos. Cependant, s’ils s’approchaient de l’insecte, les deux aventuriers risquaient de la réveiller.

Sur leur droite se trouvait d’autres escaliers. Ils pouvaient les emprunter sans crainte de se retrouver face à l’araignée géante… Mais décideraient-ils de s’en prendre à elle en s’approchant plus près, quitte à risquer la vie de l’un ou de l’autre, ou iraient-ils plus en bas pour trouver, peut-être, la cible de leur mission ? Enfin, s’ils choisissaient la première option, le danger serait-il une simple histoire à raconter plus tard, ou pourraient-ils en tirer les trésors que promettaient un tel affrontement ?

Araignée géante
L’araignée n’avait pas de moyen de défense sur son dos, sinon une épaisse carapace dans laquelle le sabre de qualité de Shimura put finalement aisément pénétrer. Il découpa une des pattes de l’araignée dont le cri résonna dans tout l’hypogée. S’il y avait quelqu’un ici, il avait sûrement déjà repéré les intrus. S’ébrouant, elle laissa donc retomber Shimura tandis que le nain avait entamé un coup de masse qu’il n’eut jamais le temps de finir. En effet, vigoureuse et mécontente de ce retournement de situation, elle renvoya le nain de là où il venait, le projetant contre l’un des murs de la salle tout en rondeur.

Ayant déjà perdu de l’équilibre à cause de sa première patte coupée, elle ne put esquiver le second assaut du chasseur, d’autant plus qu’elle se réveillait à peine.

Détruire les pattes était l’une des solutions pour vaincre le monstre qui se trouvait en face d’eux. L’araignée avait commencé à dormir parce qu’elle avait récemment mangé, ce qui la rendait plus lente et plus amorphe que d’habitude. En somme ? Elle était vulnérable. Ils pouvaient donc continuer leur méli-mélo de coups qui finirait sûrement par avoir raison de l’animal qui, en temps normal, aurait pu les écorcher.

Tentant malgré tout de répliquer, elle utilisa la dernière patte avant qui lui restait pour tenter de clouer l’épéiste au sol. S’il bloquait, il laisserait le temps au nain d’attaquer une ou deux pattes, mais s’il esquivait, il risquait d’exposer son allié à un retour de bâtons. Bien sûr, Shimura avait déjà subi deux blessures depuis le début de l’aventure, et il n’était pas en état de tenir longtemps. Il fallait concilier efforts communs et puissances individuelles pour venir à bout de ce morceau…

Profiter de son sommeil aurait aussi pu être une solution. Ils auraient pu tenter de lui asséner un coup fatal avant qu’elle ne se réveille : c’était là sûrement la solution à côté de laquelle ils étaient passés. La tentative aurait aussi échoué, mais ils auraient toujours pu en profiter pour rendre leur ennemie plus vulnérable que maintenant.

« Avec des si… ». Cependant, le duo s’en sortait bien. Au prix de quelques contusions et blessures supplémentaires, ils pourraient venir à bout de leur adversaire.